|
. |
|
Le climat du Sahara |
Aperçu | Sols et reliefs | Climat | Flore et faune |
Au Sahara, comme pour la plupart des régions africaines, c'est dans le climat qu'il faut voir l'élément essentiel de la géographie, et ce climat est avant tout caractérisé par son extrême sécheresse. A Tamanrasset, par exemple, au coeur du Sahara, la teneur du mètre cube d'air en grammes de vapeur d'eau oscille à peu près entre 1 et 4 au plus. Le ciel est d'une limpidité, d'une profondeur extrêmes et qui constituent en grande partie le charme étrange de ces rudes contrées: l'atmosphère est si transparente que notre appréciation des distances s'en trouve complètement faussée. Cela tient à ce que cette masse continentale est inaccessible à l'humidité marine : les vents que le Sahara surchauffé appelle de la mer en été sont en partie arrêtés par des écrans comme l'Atlas et le massif éthiopien; surtout, ils s'échauffent et se débarrassent de leur humidité à mesure qu'ils avancent dans l'intérieur, et les pluies ne représentent au Sahara qu'un accident court et violent, généralement localisé dans les régions montagneuses. Or, c'est du degré d'humidité, on le sait, que dépend directement la régularité de la température: le Sahara, pays d'extrême sécheresse, est du même coup un pays où les variations de température atteignent une forte amplitude. Le jour, le thermomètre peut monter jusqu'à 50 °C à l'ombre, la nuit, il peut descendre au-dessous de zéro; la neige et la glace ne sont pas inconnues au Sahara: la gelée blanche y est courante. Causes de la sécheresse du Sahara Le Sahara n'est Sahara qu'en vertu du manque d'eau, et il ne manque d'eau que par suite de l'extraordinaire rareté des pluies, et il ne manque de pluies qu'à cause de la difficulté de la condensation d'humidité par suite du régime des vents. En ce qui concerne l'hiver, ces causes sont faciles à concevoir : une aire de haute pression barométrique qui s'établit sur un continent est accompagnée d'un ciel serein. Le Sahara, siège de maxima relatifs et de vents très faibles qui prennent généralement naissance dans le désert, est dans le cas des autres centres de haute pression continentale, Afrique australe, Asie centrale, Inde, Australie, où l'air est sec et le ciel pur. Il ne peut donc y avoir de pluie en hiver que si ces hautes pressions font place à des cyclones. En été, les vents marins affluent au contraire de tous côtés vers le désert, et la vapeur d'eau ne manque pas jusqu'au centre du Sahara. Il y a toujours un peu d'humidité dans l'air saharien, mais pour qu'elle eût aile valeur climatique, il faudrait qu'elle quittât sa forme gazeuse. Qu'importe la quantité d'eau vaporisée dans l'atmosphère si elle ne se résout jamais en pluie bienfaisante? Il y a, en été, jusqu'à 26 mm de vapeur d'eau en suspens au-dessus de la mer Rouge, plus qu'il n'y en a jamais dans l'air de Paris - mais comme l'air surchauffé pourrait en contenir davantage, la mer Rouge ne reçoit pas de pluie. Ce qui importe, c'est l'humidité relative, c'est la question de savoir si la vapeur en fusion est plus ou moins près de saturer l'air. Or, les moussons qui soufflent du Nord vers les continents en été diminuent invariablement l'humidité relative; s'échauffant sans cesse au contact de régions plus chaudes, ces vents s'éloignent sans cesse de leur point de saturation, et loin de déverser sur le sol la vapeur d'eau qu'ils emportent, ils deviennent capables d'en absorber des quantités nouvelles. A cette grande cause de sécheresse s'ajoutent au moins deux causes secondaires. L'une plus générale que l'autre, c'est, sur les trois côtés maritimes, Ouest, Est et Nord, la présence de montagnes voisines du rivage et qui, condensant en pluie les nuages venus de la mer, en font tomber une bonne part sur leur versant océanique : à l'Ouest, le massif du Fouta-Djalon et des monts et plateaux de la Guinée; à l'Est, la haute barrière des monts d'Ethiopie; au Nord, l'Atlas de Tunisie, d'Algérie, et surtout le véritable Atlas, l'Adrar du Maroc. La cause moins agissante, on qui n'agit que sur une portion restreinte du Sahara, sur son littoral d'occident, c'est le courant relativement froid qui suit la rive de l'Atlantique : Tandis que la température moyenne de la mer est de 27 °C au Nord du tropique vers les Antilles, elle tombe à 20 °C sous la même latitude, près du Sahara Occidental, à 17 °C près du cap Juby. La moyenne de l'été au Sahara Occidental ne semble pas dépasser 200. Des observations de deux ans faites à la station du cap Juby donnent une moyenne de 16 °C en janvier, 20,4 °C en septembre, 18 °C à 19 °C pour l'année entière. Ainsi l'air de la côte saharienne aurait à peu près la température d'Alger, serait moins chaud qu'à Chypre, plus frais en juillet qu'à Lisbonne et à Lyon, et cela sous la latitude du Touât et du golfe Persique. Il n'est donc pas téméraire de penser que les eaux froides de ces parages (étant relativement pauvres en vapeur d'eau) diminuent les chances de pluie sur la côte saharienne, déjà sèche par suite de la prédominance des souffles du Nord. Les vents On l'a vu, les vents jouent un grand rôle dans la climatologie saharienne. Celui du Nord domine en hiver, mais il souffle trop rarement, en été, où il est pourtant si agréable par les abaissements de température qu'il produit. Celui du Sud-Est, appelé bahhari ou marin, également frais, alterne en hiver avec celui du Nord. Le simoum (le pestilentiel) vient également du Sud-Est; c'est surtout sous l'action de ce vent chaud et violent que se forment les dunes; lorsqu'il passe sur les plaines en désagrégation, il soulève les sables nouvellement formés et les transporte en nuages épais vers le Nord-Ouest où ils grossissent les anciennes dunes et en forment de nouvelles. Ce vent, si redouté des caravanes, souffle surtout au printemps et eu été. Le sable qu'il soulève et transporte forme dans l'air comme un brouillard interceptant lu rayons solaires et à travers lequel les voyageurs ne peuvent se diriger; il leur semble marcher dans les nuages. Viennent ensuite les vents du Sud-Ouest qui rafralchissent le Sahara de leurs ondées bienfaisantes, quoique ordinairement violentes. Mais, tandis qu'il pleut assez régulièrement, en automne, dans les régions montagneuses, les sécheresses de deux et trois années ne sont pas rares dans les plaines sahariennes. Les vents du Nord-Ouest, très violents, laissent aussi tomber quelques gouttes de pluie. Mais c'est en été que souffe le vent du Sud, le dévorant chihili, dont le nom signifie nuisant, et sous l'action duquel le Sahara se transforme en fournaise. Un ciel gris, par suite des particules de sable soulevées dans les hautes régions de l'atmosphère, des lueurs blafardes à l'horizon annoncent ordinairement l'approche de ce vent redouté. La pluie au Sahara, le climat saharien Quand on dit qu'il ne pleut pas au Sahara, on se sert d'une formule absolue, donc fausse : il y pleut, mais il n'y pleut guère, et surtout le régime des pluies y est des plus fantasques, ou plutôt il n'y a pas ici de régime des pluies. Tantôt de longues et formidables averses, évoquant des lacs, des fleuves d'une heure ou d'un jour, peut-être d'une semaine; puis pas une goutte d'eau pendant des années, voire des dizaines d'années; et, sur une zone tellement immense, l'année de la plus effroyable sécheresse en tel district peut, à quelques centaines de kilomètres de là, être celle d'un maximum de précipitation. D'ailleurs certaines régions y sont plus sèches que d'autres : la palme (saharienne) de l' « aridité des cieux » y revient incontestablement au désert Libyque, à l'Ouest de l'Égypte, entre les oasis de Dakhla et de Koufra, au plus près des pluies méditerranéennes, mais aussi au plus loin des pluies tropicales et dans la région la plus basse et sans doute la plus sablonneuse de tout le Sahara. La montagne appelant la nue et condensant la vapeur d'eau, c'est naturellement dans les montagnes qu'il tombe le plus du bienfaisant trésor des airs. Tous les ans, il pleut dans le Ahaggar, soit en hiver, soit en été, ou dans les deux saisons, ou même en toute saison; et il y neige; et cette neige resterait, entre temps, jusqu'à trois mois sur le haut des montagnes : d'où quelques ruisseaux d'eau courante. Pluies également tous les ans, et ici en participation avec la mousson du Soudan - ce qui n'est le cas que pour le Ahaggar - pluies chaque année, en septembre, avec empiétement sur août et sur octobre, dans les monts de l'Aïr, dans ceux du Tibesti, de l'Ouanyanga, de l'Ennedi, et dans l'Ahenet, au Sud d'In-Salah, et surtout dans l'Adrar des Aouellimiden, en tirant sur la grand coude du Niger. Quant aux parties basses du désert, le refroidissement de la vapeur d'eau, par conséquent la pluie y est beaucoup plus rare, et il n'y a quelque précipitation plus on moins régulière que dans le Sahara méridional, toujours en vertu de la mousson du Soudan. Partout ailleurs, il ne pleut que très « à l'aventure », au hasard d'un cyclone : « Pas de pluies d'été; les rares averses tombent entre avril et octobre et semblent dues aux mêmes causes que les pluies de la Méditerranée, à l'époque où les dépressions barométriques envahissent le continent. C'est sans doute au fait de se trouver plus rarement sur le passage de ces dépressions que le Sahara oriental doit son aridité plus grande. Le Sahara algérien est mieux arrosé que le désert Libyque, bien que l'air soit peut-être moins humide derrière la barrière de l'Atlas. Tant il est vrai que la fréquence des pluies ne tient pas à la quantité plus on moins grande de vapeur, mais aux causes de refroidissement de l'air. Conformément à la sécheresse de l'air, le climat du Sahara ne peut pas ne pas être extrême, puisque tout pays où la nuée visible ou invisible, où la vapeur d'eau contenue dans l'atmosphère « ne s'intercale» pas, le jour, entre les rayons solaires et le sol, pour diminuer la « torréfaction », et la nuit, entre la terre et l'espace, pour atténuer le rayonnement vers le ciel de la chaleur contractée pendant la journée, tout pays ainsi fait se caractérise par de très grandes différences de température entre jour et nuit, entre heures et heures, et se montre tantôt froid, tantôt extraordinairement chaud. Le maximum de la chaleur peut être énorme, et il n'est pas contre-balancé par des froids abaissant le mercure à 20° C, 30 °C, 40°C au-dessous de zéro, comme par exemple, en Asie centrale. On a mesuré un 53 °C, dans l'oasis de Kaouar, à Chirtimmedrou, soit à 500 km, droit au Nord du lac Tchad. Le maximum contraire, qui est le minimum, est inférieur à zéro, malgré la qualité de fournaise éternelle que l'imagination populaire attribue au Sahara. Un peu partout on a mesuré des températures « négatives », jusqu'à -8°C°, et même jusqu'à - 11 °C ou 13 °C 3° dans le haut du Ahaggar, sur le faîte entre I'fgharghar et le Niger. De -8 °C, 11 °C ou 13 °C, à +50 °C, l'écart entre les extrêmes observés a donc été de 63 °C, beaucoup moins que sur certains plateaux d'Asie, parce que, comme il a été dit plus haut, ces plateaux-là, soumis en saison chaude à des excès à peu près comparables à ceux de l'été saharien, subissent des froids intolérables où le mercure descend presque, aussi bas dans le thermomètre qu'il monte dans la saison torride. Comme écart annuel, autrement dit comme distance de température entre le mois le plus chaud et le mois le plus froid de l'année, on arrive à : 25,5°C de différence à Ghardaïa dans le Mzab, contre 13,6 °C seulement sur la côte de l'Algérie, contre 6,5 °C seulement au large (et bien au large) du Sahara, dans l'île de Madère, à Funchal. Aucun pays, sauf peut-être les déserts de l'Afrique australe et de l'Australie intérieure, ne présente, sous ces latitudes, de semblables écarts, pas même la Mésopotamie (Irak), et le Pendjab (Pakistan, Inde), malgré leur climat extrême. Comme variation diurne, on a observé que la moyenne des écarts de tous les jours de l'année est de 14,9 °C à la lisière Nord du Sahara d'Algérie (Biskra, Laghouat, Tougghourt), tandis qu'elle n'est que de 8 °C pour les villes de la côte algérienne. Et si l'on sort des moyennes pour considérer chaque jour en particulier, on trouve des écarts de 30 °C, 35 °C, ou même plus : là encore on ne trouve mieux que sur les hauts plateaux, les Tibet et le Pamir, en Asie centrale. De fortes variations journalières ont toujours pour conséquence d'abaisser la température moyenne de l'année. De là vient que le Sahara, malgré ses journées brûlantes, n'est pas, à considérer la moyenne annuelle, un des pays les plus chauds de la Terre. L'année, dans son ensemble, est plus fraîche dans le Sahara algérien qu'en certains districts de l'Inde, ou au bord de la mer Rouge; avec des maxima de température beaucoup plus élevés, le Tibesti et le Borkou ne sont pas, en moyenne, aussi chauds que les bords du Tchad; enfin nulle part la température saharienne n'approche de l'effrayante moyenne de Massaouah (30,2 °C). C'est qu'au désert, la fraîcheur des nuits compense l'ardeur torride des jours. Pareil phénomène s'observe dans les déserts de l'Afrique australe. Ce terrible climat a singulièrement dégradé le Sahara, il continue à le dégrader sous nos yeux, même par les crues soudaines de ses torrents, méfaits dont on ne soupçonnerait pointées oueds qui restent des années et des années sans une goutte d'eau : mais il leur arrive quelquefois de tout balayer dans leurs ravines, argiles, sables et galets, de ronger leurs berges; bref, comme c'est leur fonction, d'apporter, d'emporter, de détruire. Mais ce sont surtout les excès du climat qui érodent le désert : après la chaleur torride, telle qu'il lui arrive de dépasser 70 °C ou 71 °C au soleil de midi, et de brûler si fort le roc « que Rohlfs et Nachtigal ont dû munir leurs chiens de sandales ou les faire voyager à dos de chameau », la nuit descend et refroidit la pierre : dilatation et contraction ne cessent de « travailler » la roche qui, à la fin, se brise; même elle éclate parfois soudain, au lieu de se fendre silencieusement. Puis ces éclats, ces blocs, ces galets se fendent ou se brisent à leur tour, et d'amenuisement en amenuisement, ils deviennent des sables. De ces sables le vent s'empare, il les avance et les recule, il les entasse, en dunes ou il éparpille ces dunes, dont beaucoup, énormes collines, presque montagnes, s'élèvent à 100, 200, on dit même 300 m. Elles couvrent des espaces immenses; toutefois, on ne leur attribue que le neuvième du Sahara. Et rien pour arrêter la désagrégation, la ruine. Pas de forêt pour contenir ces dunes, pas de cultures, de bois, de gazon pour protéger le squelette de la terre. Partout le soleil qui dévore, et le vent qui dissémine. Chaque siècle se lève sur un Sahara plus délabré, et qui s'étend chaque jour un peu plus. |
. |
|
| ||||||||
|