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Phérécyde

Phérécyde de Syros (du nom d'une petite île des Cyclades) est l'auteur d'une théogonie postérieure à celle d'Hésiode, contemporain d'Anaximandre, mais peut-être plus jeune. Il devint comme Pythagore un thaumaturge et un ancêtre pour la période philosophique dont le représentant principal est PhiIon le Juif

La tradition des écoles conservée par Josèphe, Suidas, Eusèbe, Hesychius, nous le montre s'initiant aux dogmes religieux de la Phénicie au moyen de livres secrets qu'il était parvenu à se procurer et s'essayant à suivre les traces de Thalès, dont l'immense gloire excitait son émulation. Diogène Laërce ajoute qu'il reçut aussi les leçons de Pittacus. Mais comment croire à son témoignage lorsque tous les auteurs affirment que Phérécyde n'eut d'autre maître que lui-même et les livres des Phéniciens? On dit parfois que Phérécyde fut un des maîtres de Pythagore, né comme lui dans
une des îles de la mer Égée. Beaucoup de légendes courent aussi sur ce personnage, qui reste obscur. Des récits légendaires lui attribuent, par exemple, le don de prophétie. Ainsi il aurait annoncé qu'un vaisseau prêt à entrer dans le port serait submergé par la tempête; qu'un tremblement de terre devait éclater au bout de trois jours, et que l'événement aurait justifié cette double prédiction. 

C'est l'auteur d'un ouvrage intitulé Heptamuchos ou Pentemuchos, écrit en prose. Il s'agissait vraisemblablement un traité philosophique, mais d'une telle obscurité, que Clément d'Alexandrie ne craint pas de placer Phérécyde à côté d'Héraclite dans la liste des écrivains énigmatiques de la Grèce.

On a discuté sur la nature, comme sur le nombre des  muchoi ou mucoi qui ont fait donner au livre son titre. Pour les uns, ils constituent les cinq éléments, éther, feu, air, eau, terre (Preller) pour d'autres, ce seraient les divinités présidant à l'Olympe, au feu, au vent, à l'eau et à la terre, à l'Hadès et au Tartare (Zeller et Conrad). Des discussions aussi nombreuses et aussi peu concluantes, en raison du petit nombre de textes que nous possédons, se sont élevées sur le début de l'ouvrage (Diog. Laër., I, 149) et sur les fragments qui nous restent : 

« Ce qui existe avant toutes choses et éternellement, c'est Zeus, Chronos et Chthôn. Chthôn prit le nom de terre quand Zeus lui donna l'honneur (geras). Chronos engendre le feu, le vent et l'eau. Puis Zeus, Chronos et Chthôn engendrent un grand nombre de dieux secondaires, répartis en cinq familles. Zeus, pour former le monde, se métamorphose en Eros et fait une immense étoffe sur laquelle il brode la terre, l'océan et ses palais. Cette étoffe, il la déploie sur un chêne porté par des ailes. Ophionée, qui s'oppose à cette formation du monde, est vaincu par les dieux que conduit Chronos ».
Zeus est-il la partie la plus élevée du ciel? Chronos, celle qui avoisine la terre; Chthôn, la masse terrestre? le chêne porté par des ailes, le squelette de la terre? Ophionée est-il le dieu-serpent dont les cohortes représentent les forces inférieures de la nature? Phérécyde a-t-il subi l'influence de la Phénicie, de l'Egypte, de la Perse ou de la Judée? a-t-il été le maître de Pythagore et a-t-il professé la métempsycose? Ce sont là des questions résolues en des sens divers par les mythologues et les historiens de la philosophie, mais pour lesquelles les textes n'apportent pas de documents suffisants et décisifs. 

Tout ce qu'on peut affirmer, c'est que Phérécyde forme le passage d'Hésiode à Thalès ou qu'il a connu les doctrines de Thalès et essayé de les unir à la mythologie de son prédécesseur. Et surtout c'est un personnage sur lequel on souhaiterait que plus de documents permettent de faire une lumière qui nous éclairerait sur une époque de transition très importante dans le développement de la pensée grecque. (F. Picavet).

L'astronomie de Phérécyde.
Voici, selon l'un des interprétations qui ont été faites, ce que pourraient être les conceptions astronomiques de Phérécyde qui se trouvent dans son ouvrage Sur les sept compartiments du grand Tout. Ces compartiments (mucoi) devaient comprendre l'espace infini qui entoure la sphère céleste, le ciel des étoiles fixes, le ciel des planètes, la sphère du Soleil, la sphère de la Lune, la Terre et l'Enfer (le dessous de la Terre). C'étaient là les lieux de retraite et les portes par où passaient et repassaient les âmes.

Diogène Laërce, dans la Vie de Phérécyde, parle de l'héliotrope comme d'un instrument propre à mesurer les solstices, les tropes (retours) du Soleil. C'était probablement un obélisque ou gnomon que ce philosophe avait élevé dans l'île de Syros. Un pareil instrument pouvait, en effet, être très utile pour déterminer le commencement de l'année grecque, en le fixant à la première Nouvelle Lune qui suit le solstice d'été. On sait que tous les quatre ans se renouvelait l'olympiade ou le retour des fameux jeux olympiques, où tous les Grecs se rassemblaient dans l'Elide. Mais peut-être ne s'agit-il, dans tout cela, que d'une fausse interprétation du passage suivant de l'Odyssée :

Il existe, tu en as sans doute ouï parler, une île nommée Syros, au-dessus de celle d'Ortygie (Syracuse), où sont les conversions (tropai) du Soleil [Homère, Odyssée, X, 403-406.].
Les mots retours du Soleil (tropai helioio) signifient suivant le commentateur Eustathe, tout simplement du côté du Soleil couchant.

D'autres doctrines de Phérécyde.
Une doctrine moins générale est celle de l'immortalité des âmes. De tous les philosophes qui ont écrit, Phérécyde, si l'on en croit Cicéron, est le premier qui l'ait enseignée. Il est vraisemblable que pour pour Phérécyde, la doctrine de l'immortalité des âmes se confondait avec celle de la métempsycose.

Il est encore parlé, dans les fragments de Phérécyde, d'un chêne ailé et d'un grand voile orné de diverses couleurs. Ces expressions, probablement symboliques, ont donné naissance à de nombreuses interprétations. Selon Sandius, dans son Traité de l'âme, le chêne ailé c'est l'esprit; le grand voile, le corps. Pour Fabricius, le chêne c'est Dieu; les ailes, le temps; le grand voile, la nature prolifique et susceptible de mille transformations. Selon Brucker, par sa durée séculaire le chêne figure la matière éternelle; les ailes, le mouvement qui s'y produit; le voile, le monde qui en résulte. Heinius rejette bien loin toutes ces combinaisons. Il est clair pour lui que le chêne est le globe terrestre, les ailes l'atmosphère, le voile le grand cercle du monde embrassant la terre et les mers. Nous aimons mieux confesser notre ignorance que d'ajouter une interprétation nouvelle à toutes celles que nous venons de citer.

La mort de Phérécyde.
Malgré la diversité des traditions relatives aux derniers moments de Phérécyde, il paraît certain qu'il mourut de la phthiriasis (maladie pédiculaire). Ses chairs tombaient en lambeaux, dévorées par une hideuse vermine. Cette légende paraît avoir été inventée par les prêtres de l'oracle d'Apollon à Délos, dont Phérécyde s'était attiré la haine, pour s'être exprimé trop librement sur cet oracle et avoir ainsi diminué les revenus des prêtres déliens.

Abandonné de tous, Phérécyde, dit la légende, aurait été visité par Pythagore. Pythagore serait accouru du fond de la Grande-Grèce pour lui prodiguer les dernières consolations,  l'aurait enseveli de ses propres mains et lui aurait rendu les honneurs funèbres. (Hoefer, 1873).


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Phérécyde de Léros est un historien grec ancien, de nationalité athénienne, qui vécut de 485 à 400 avant J.-C. Il a écrit Autochtones, ouvrage historique perdu qui traitait les légendes des origines grecques groupées en séries généalogiques. On a conservé quelques fragments d'un autre livre sur les généalogies attiques.
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Dictionnaire biographique
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