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La mer Noire est
une cuvette profonde : sur plus de la moitié de la surface, la profondeur
atteint plus de 2000 m. Les pentes sont raides et les isobathes de 200
et 1300 m très rapprochées l'une de l'autre. Il y a cependant
à distinguer deux régions dans la mer Noire : on ne trouve
aucune profondeur de 200 m à l'Ouest d'une ligne qui joindrait Burgas
au cap Tarkhankout, en Crimée.
Au contraire, à partir des côtes de Crimée, du Caucase
et de l'Anatolie, on atteint rapidement 2000
m. La région des plus grandes profondeurs, qui dépassent
2600 m commence à partir du méridien d'Evpatoria, forme une
bande assez étroite jusqu'au méridien de Sinope et s'élargit
à l'Est; elle occupe sensiblement le milieu de la cuvette. La pente
est assez douce à partir de 1500 m. Jusque vers 300 m, le sol est
formé d'une boue de Modiola, de couleur gris clair; le fond, assez
plat, est couvert d'une boue sombre gris bleu. La mer
d'Azov, qui n'est qu'un golfe de la mer Noire, a une profondeur maxima
de 15 à 16 m, avec une moyenne de 9 à 10 m; dans la baie
de Taganrog, on atteint à peine 3,50 m, et dans le détroit
de Kerch
4,25 m.
La mer Noire est célèbre
depuis l'Antiquité
par l'inconstance de ses conditions météorologiques. Les
Grecsl'appelèrent
d'abord Pontos axeinos, c. à d., mer inhospitalière,
puis, en raison des avantages qu'ils en tiraient ou par antiphrase, transformèrent
ce nom en celui Pontos Euxeinos (dont on a fait Euxinus
Pontus, puis Pont-Euxin), c. à d. mer hospitalière.
Le nombre moyen des tempêtes y serait, d'après Sresnewsky,
de 37 par an. Sur les côtes de Bulgarie,
de la Dobroudja
et de Crimée, les vents de Sud-Ouest, Sud et Sud-Est sont très
dangereux à l'équinoxe. La région
du Bosphore
est soumise à un vent terrible de Nord-Est que les marins italiens
ont appelé bora, comme celui du golfe de Trieste.
Sur tout le globe, on ne trouve que trois
mers dont les eaux soient plus chaudes que celles
de la mer Noire ce sont la mer Rouge, la Méditerranée
et la mer de Sulu. Cependant la mer Noire n'est que la plus chaude des
mers tempérées; sa température est fort inférieure
à celle de la Méditerranée, surtout au fond, la communication
avec la Méditerranée étant toute superficielle. La
température moyenne de surface est un peu inférieure à
22 °C sur une région elliptique allant de la pointe Sud de la
Crimée à Amastra en Anatolie.
Elle est comprise entre 22 °C et 23 °C près du Bosphore
et au-dessus de la plus grande partie de la cuvette profonde, sauf au Sud-Est,
ou elle dépasse 21 °C, comme dans le golfe du Nord-Ouest. Elle
atteint même 25 °C à l'embouchure du Danube.
En hiver, cette eau de surface peut geler dans
la partie qui va d'Odessa
au liman du Danube, et sur le détroit de Kerch si, en décembre
et en janvier, les vents du Nord soufflent fortement et longtemps. Quant
à la mer d'Azov, elle est gelée
de décembre à mars.
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La
mer Noire vue depuis l'espace. Des tourbillons de couleurs allant du
vert olive profond au turquoise lumineux ont été créés
par un puissant développement phytoplanctonique (efflorescence algale)
qui recouvre toute la surface de la mer Noire sur cette image prise le
20 Juin 2006. Beaucoup des plus grands fleuves
d'Europe, y compris le Danube, le Dniestr et le Dniepr apportent leurs
eaux douces dans cette mer. La seule source de d'eau salée est le
détroit du Bosphore (au Sud-Ouest). Le. Nord de la Turquie forme
toute la rive Sud de la mer. Le péninsule en forme de losange qui
se projette dans la mer au Nord est la Crimée, en Ukraine. Source
: Nasa.
Si l'on examine la distribution de la température
en profondeur, on trouve dans la mer Noire deux couches : jusqu'à
55 m, la température détroit, d'abord rapidement, puis plus
lentement, jusqu'à 6,70 °C en 7,11 °C, suivant les régions.
A partir de 55 m, elle remonte lentement pour atteindre 9,26 °C à
2150 m. Vers l'embouchure du Danube, par suite da manque de profondeur,
on ne trouve qu'une couche descendant à 6 °C par 47 m. La plus
forte température du fond s'explique par le contre-courant venant
de la mer de Marmara plus chaude; cette nappe
d'eau protège en partie le fond contre l'influence de l'eau froide
des fleuves. D'ailleurs, à la sortie du
Bosphore, on trouve 9,15°C à 110 m, alors qu'à la même
profondeur, en pleine mer, on n'a plus que 8,10 °C.
Une autre conséquence de l'afflux
des eaux douces. c'est le faible degré de salinité, et, par
suite, le peu de densité des eaux de la mer Noire, an moins à
la surface: D'après Kasparek, la salinité moyenne à
la surface serait de 1,90%; dans la mer d'Azov,
elle descendrait à 1,22 %. Le poids spécifique est de 1,0145
et descend dans la mer d'Azov à 1,0093; nais il augmente avec la
profondeur, d'abord lentement, puis rapidement entre 73 et 730 m, grâce
à l'influence du contre-courant d'eau salée du Bosphore,
enfin plus lentement, jusqu'au fond. Il est remarquable que cette eau peu
salée contient de l'hydrogène
sulfuré; à partir de 137 m l'odeur est très caractéristique,
à 180 m elle est très forte, et à partir de 360 m
le gaz empêche toute vie animale.
La coupure du Bosphore a été
une cause décisive dans les conditions de la faune
: dans la mer sarmatienne vivait une faune d'eau plutôt saumâtre
que salée, qui a été tuée en partie par l'invasion
de l'eau méditerranéenne; ce qui a survécu s'est réfugié
dans les limans; en effet la vie animale cesse actuellement au delà
de 200 m, et entre 360 et 720 m, la drague n'a ramené que des coquilles
à demi fossiles de mollusques analogues
à ceux des limans. C'est sans doute à cette destruction de
la faune sarmatienne et à la décomposition des organismes
qu'il faut attribuer la présence de l'hydrogène sulfuré,
présence entretenue par les organismes actuels qui se putréfient
an lien d'être dévorés. Le nombre des individus est
en effet considérable, si les espèces sont rares. La caractéristique
de la faune est la présence de nombreuses holothuries et étoiles
de mer. Les anchois et les thons circulent par bancs serrés; dans
la mer d'Azov, on ne trouve que de nombreux esturgeons.
La pêche du thon a été,
dès l'Antiquité,
une des causes qui ont attiré les marins de la Méditerranée
dans la mer Noire, et plusieurs colonies grecques
de la côte avaient sur leurs monnaies la figure d'un thon. Les Phéniciens,
les Grecs,
les Romains
allaient aussi chercher à travers la mer Noire les blés de
Scythie, les esclaves et les objets manufacturés du Caucase.
Le commerce fut interrompu par les migrations de barbares an XIIIe
siècle, il reprit de l'activité, grâce aux Génois
et aux Vénitiens.
Puis la mer d'Azov fut conquise par les Tatars,
soumis eux-mêmes par les Turkmènes
qui tuèrent le commerce de la mer Noire en s'en attribuant le monopole.
L'oeuvre de Pierre le Grand
et de Catherine Il
rendit enfin la mer Noire au commerce européen. Ce commerce a consisté
ensuite surtout en vivres et en céréales. (Ludovic
marchand). |
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