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Henri Meilhac
est un auteur dramatique français,
né à Paris le 21 février
1831 et mort dans cette ville le 6 juillet 1897. Il fait ses études
au lycée Louis-le-Grand;
entre comme employé dans une maison de librairie où il s'occupe
du commerce; collabore entre temps, en qualité de dessinateur et
d'écrivain humoriste au Journal pour rire, de 1852 à
1855, sous le pseudonyme de Thalin. Ses débuts au théâtre
datent de 1855 : Garde-toi, je me garde, un acte, au Palais-Royal.
A partir de ce moment il travaille pour le théâtre sans discontinuer.
Voici la liste de ses ouvrages et de ses collaborations :
La Sarabande du cardinal,
vaudeville, un acte (Palais-Royal, 29
mai 1856); Satania, vaudeville, deux actes (Palais-Royal, 10 octobre
1856); le Copiste, comédie,
un acte (Gymnase, 3 août 1857); Péché caché,
comédie, un acte (Palais-Royal, 11 janvier 1858); l'Autographe,
comédie, un acte (Gymnase, 27 novembre 1858); Retour d'Italie,
à-propos, un acte (Gymnase, août 1859); le Petit-fils de
Mascarille, comédie, cinq actes (Gymnase, 8 octobre 1859); Ce
qui plaît aux hommes, comédie, un acte (Variétés,
6 octobre 1860); Une Heure avant l'ouverture, vaudeville, un acte,
avec Delavigne, et l'Etincelle, comédie, trois actes (Vaudeville,
31 décembre 1860); le Menuet de Danaé, comédie,
un acte, avec Ludovic Halévy (Variétés,
20 avril 1861); la Vertu de Célimène, comédie,
cinq actes (Gymnase, 1er mai 1861); Attaché
d'ambassade, comédie, trois actes (Vaudeville, 12 octobre 1864);
le Calé du roi, opéra-comique, un acte, musique de Deffès
(Lyrique, 16 novembre 1861); les Moulins à vent, vaudeville,
trois actes, avec Halévy (Variétés, 22 février
1862); l'Echéance, comédie, un acte, avec Delavigne
(Gymnase, 15 mars 1862); la Clé de Métella, comédie,
un acte, et les Brebis de Panurge, comédie, un acte, avec
Halévy (Vaudeville, 24 novembre 1862); le Brésilien,
vaudeville, un acte, avec Halévy (Palais-Royal, 9 mai 1863); le
Train de minuit, comédie, deux actes, avec Halévy (Gymnase,
15 juin 1865); les Bourguignonnes, opéra-comique, un acte,
musique de Deffès (Opéra-Comique, 16 juillet 1863); Néméa,
ballet, trois actes, avec Halévy et Saint-Léon, musique de
Minkous (Opéra, 14 juillet 1864); les Curieuses, comédie,
un acte, avec Delavigne (Gymnase, 17 octobre 1864); la Belle Hélène,
opérette, trois actes, avec Halévy,
musique d'Offenbach (Variétés, 17 décembre 1864);
le Photographe, comédie-vaudeville, un acte, avec Halévy
(Palais-Royal, 24 décembre 1864); le Singe de Nicolet, comédie,
un acte, avec Halévy (Variétés, 29 janvier 1865);
Fabienne, comédie, trois actes, avec H. Leroy (Gymnase, 1er
septembre 1865); la Méprise de Lambinet, vaudeville, un acte,
avec Halévy (Variétés, 3 décembre 1865); Barbe-Bleue,
opérette, trois actes, avec Halévy, musique d'Offenbach (Variétés,
5 février 1866) ; José Maria, opéra-comique,
trois actes, avec Cormon, musique de Jules Cohen (Opéra-Comique,
16 juillet 1866); la Vie Parisienne,
vaudeville, quatre actes, avec Halévy, musique d'Offenbach (Palais-Royal,
31 octobre 1866); la Grande-Duchesse de Gérolstein, opérette,
trois actes, avec Halévy, musique d'Offenbach (Variétés,
12 avril 1867); Tout pour les dames, vaudeville, un acte, avec Halévy
(Variétés, 8 septembre 1867); l'Elixir de Cornélius,
opéra-comique; un acte, avec Delavigne, musique de Durand (Fantaisies,
3 février 1868); le Château à Toto, opéra-bouffe,
trois actes, avec Halévy, musique d'Offenbach (Palais-Royal, 6 mai
1868); la Pénitente, opéra-comique, un acte, avec
Busnach, musique de Mme de Grandval (Opéra-Comique, 13 mai 1868);
Fanny Lear, comédie, cinq actes, avec Halévy (Gymnase,
13 août 1868); la Périchole,
opéra-comique, trois actes; avec Halévy, musique d'Offenbach
(Variétés, 6 octobre 1868); Suzanne et les deux vieillards,
comédie, un acte (Gymnase, 10 octobre 1868); le Bouquet,
comédie, un acte, avec Halévy (Palais-Royal, 23 octobre 1868);
Vert-vert, opéra-comique, trois actes, avec Nuitter, musique
d'Offenbach (Opéra-Comique, 10 mars 1869); Diva, opéra-bouffe,
trois actes, avec Halévy, musique d'Offenbach (Bouffes, 22 mars
1869); un Contrat, comédie, deux actes (Vaudeville, 22 avril
1869); l'Homme à la clé, vaudeville, un acte, avec
Halévy (Variétés, 11 août 1869); Froufrou,
comédie, cinq actes, avec Halévy (Gymnase, 30 octobre 1869);
les Brigands, opérette, trois actes, avec Halévy,
musique d'Offenbach (Variétés, 10 décembre 1869);
Tricoche et Cacolet, vaudeville, cinq actes, avec Halévy
(Palais-Royal, 6 décembre 1871); Madame attend Monsieur,
un acte, avec Halévy (Variétés, 8 février 1872);
Nany, comédie, quatre actes, avec de Najac (Comédie-Française,
12 avril 1872); le Réveillon, comédie, trois actes,
avec Halévy (Palais-Royal, 10 septembre 1872); les Sonnettes,
comédie, un acte, avec Halévy (Variétés, 15
novembre 1872); le Roi Candaule, vaudeville, un acte, avec Halévy
(Palais-Royal, 9 avril 1873); l'Eté de la Saint-Marlin, comédie,
un acte, avec Halévy (Comédie-Française, 1er
juillet 1873); Toto chez Tata, comédie, un acte, avec Halévy
(Variétés, 25 août 1873); l'Opéra aux Italiens,
à-propos, un acte, avec Halévy et Busnach (Variétés,
12 février 1874); la Petite Marquise, comédie, trois
actes, avec Halévy (Variétés, 13 février 1874);
la Mi-carême, vaudeville, un acte, avec Halévy (Palais-Royal,
2 avril 1874); l'Ingénue, comédie, un acte, avec Halévy
(Variétés, 24 septembre 1874); la Veuve, comédie,
trois actes, avec Halévy (Gymnase, 5 novembre 1874); la Boule,
comédie, quatre actes, avec Halévy (Palais-Royal, 24 octobre
1874); Carmen, opéra-comique, quatre actes, avec Halévy,
d'après Mérimée, musique de Bizet
(Opéra-Comique, 3 mars 1875); le Passage de Vénus,
un acte, avec Halévy (Variétés, 4 mai 1875); la
Boulangère a des écus, opéra-bouffe, trois actes.
avec Halévy, musique d'Offenbach (Variétés, 19 octobre
1875); la Créole, opérette, trois actes, avec Halévy
et Millaud, musique d'Offenbach (Bouffes, 3 novembre 1875); Loulou,
comédie, un acte, avec Halévy (Palais-Royal, 31 mars 1876);
le Prince, comédie, quatre actes, avec Halévy (Palais-Royal,
25 novembre 1876); la Cigale, comédie, trois actes, avec
Halévy (Variétés, 6 octobre 1877); le Fandango,
ballet, un acte, avec Halévy et Mérante, musique de Salvayre
(Opéra, 26 novembre 1877); le Je ne sais quoi, vaudeville,
un acte, avec Halévy (Renaissance, 21 janvier 1878); le Petit
Duc, opéra-comique, trois actes, avec Halévy, musique
de Lecocq (Renaissance, 25 janvier 1878); la Cigarette, comédie,
un acte, avec Ch. Narrey (Gymnase, 20 avril 1878); Samuel Brohl,
comédie, cinq actes, et un prologue, avec Victor
Cherbuliez (Odéon, 31 janvier 1879); le Mari de la Débutante,
comédie, quatre actes, avec Halévy (Palais-Royal, 5 février
1879); le Petit Hôtel, comédie, un acte, avec Halévy
(Comédie-Française, 21 févr. 1879); la Petite Mademoiselle,
opéra-comique, trois actes, avec Halévy, musique de Lecocq
(Renaissance, 12 avril 1879); Lolotte, comédie, un acte,
avec Halévy (Vaudeville, 4 octobre 1879); la Petite Mère,
comédie, trois actes, avec Halévy (Variétés,
6 mars 1880); Nina la tueuse, comédie., un acte, vers libres
avec Redelsperger (Gymnase, 2 octobre 1880); Janot, opéra-comique,
trois actes, avec Halévy, musique de Lecocq (Renaissance, 22 janvier
1881); la Roussotte, pièce en trois actes, un prologue, avec
Halévy et Millaud, musique d'Hervé, Lecocq et Boullard (Variétés,
26 janvier 1881); Phryné, comédie, trois actes, vers
(Gymnase, 14 février 1881); le Mari à Babette, comédie,
trois actes, avec Gille (Palais-Royal, 31 décembre 1881); Madame
le Diable, féerie-opérette, quatre actes, avec Mortier,
musique de Serpette (Renaissance, 5 avril 1882); Mam'zelle Nitouche,
comédie, trois actes, avec Millaud, musique d'Hervé (Variétés,
26 janvier 1883); le Nouveau Régime, comédie, un acte,
avec Prével (Gymnase, 11 mai 1883; Ma Camarade, comédie,
cinq actes, avec Gille (Palais-Royal, 9 octobre 1883); Manon, opéra-comique,
trois actes, avec Gille, musique de Massenet
(Opéra-Comique, 19 janvier 1884); la Cosaque, comédie-vaudeville,
trois actes, avec Millaud, musique d'Hervé (Variétés,
1er février 1884); la Duchesse Martin, comédie, un
acte (Comédie-Française, 16 mai 1884); Rip, opéra-comique,
trois actes, avec Gille, d'après Farnie, musique de Planquette (Folies-Dramatiques,
11 novembre 1884); la Bonne, vaudeville, un acte, avec Gille (Folies-Dramatiques,
24 novembre 1884); la Ronde du commissaire, comédie, quatre
actes, avec Gille (Gymnase, 27 novembre 1884); les Demoiselles Clochart,
comédie-vaudeville, cinq actes (Variétés, 30 janvier
1886); Gotte, comédie, quatre actes (Palais-Royal, 2 décembre
1886); Décoré, comédie, trois actes (Variétés,
27 janvier 1888); Pepa, comédie, trois actes, avec Ganderax
(Comédie-Française, 31 octobre 1888); Margot, comédie,
trois actes (Comédie-Française, 18 janvier 1890); Ma Cousine,
comédie, trois actes (Variétés, 27 octobre 1890);
Monsieur l'abbé, comédie, trois actes, avec Saint-Albin
(Palais-Royal, 18 novembre 1891); Brevet supérieur, comédie,
trois actes (Variétés, 13 avril 1892); Kassya, opéra-comique,
quatre actes, avec Gille, musique de Delibes (Opéra-Comique, 24
mars 1893); Leurs Cigolettes, comédie, quatre actes, avec
Saint-Albin (Palais-Royal, 9 novembre 1893); Villégiature,
comédie, un acte (Vaudeville, 15 janvier 1894); Miguel, comédie,
un acte (Trouville, 17 août 1894); Panurge, quatre actes,
dix tableaux, avec Saint-Albin, musique de Planquette (Gaîté,
22 novembre. 1895); Grosse Fortune, comédie, quatre actes
(Comédie-Française, 15 février 1896).
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La mort de
Frou-Frou
« GILBERTE
... Laisse-moi t'embrasser
encore... Encore une fois... (Elle embrasse son fils à plusieurs
reprises.) Et maintenant, Louise... viens ici, Louise... (Elle met
Georges dans les bras de Louise.) Il est à toi... je te le donne.
LOUISE
Gilberte!
GILBERTE
Oui, à toi...
(Montrant Sartorys.) Et lui aussi... prends-les tous les deux...
Déjà une fois, ici même..., je t'ai dit une phrase
pareille... Pardonnez-moi tous...
LOUISE
Ah!
GILBERTE
Tous les deux...
venez ici et promettez-moi... (Montrant Georges.) A cause de lui,
il le faut...
SARTORYS
Vous ne mourrez
pas... c'est impossible!
GILBERTE
Ne pas mourir! Ah!
maintenant, ce serait vraiment dommage!
BRIGARD
Ma fille!
GILBERTE
Ne me plains pas...
pauvre père!... A quoi devais-je m'attendre? A mourir abandonnée,
désespérée... Au lieu de cela, je meurs au milieu
des miens, tranquille, heureuse, pardonnée...
SARTORYS
Ah! ce n'est pas
à vous qu'il faut pardonner, c'est à moi... à moi
qui n'ai pas su...
GILBERTE
Vous pardonner quoi?...
de m'avoir trop aimée? (Montrant Louise et Brigard.) Cela
aura été mon malheur, à moi. Tout le monde m'aura
trop aimée...
LOUISE
Gilberte!
GILBERTE
Et c'est à
cause de cela que je meurs... Et c'est à cause de cela aussi que
je meurs si doucement! (Se laissant aller.) Ah!
TOUS, la croyant
morte.
Gilberte!
GILBERTE, relevant
un peu la tête.
Est-ce cela qui
est la mort, mon Dieu? Comme cela me paraît peu de chose!... Louise...
où es-tu, Louise?... Viens que je te dise tout bas... Quand je serai
morte, il faudra me faire belle comme je l'étais autrefois... (Montrant
sa robe noire.) Cette robe noire... non... tu prendras parmi mes robes
de bal... une robe blanche... la jupe est toute couverte de petites roses...
c'est celle-là que je veux... et vous verrez comme je serai jolie
et comme une fois encore vous retrouverez Frou-Frou!
SARTORYS
Ah!
GILBERTE
Vous voyez, toujours
la même... Mon fils!... Vous me pardonnez, n'est-ce pas?... Frou-Frou!
pauvre Frou-Frou!
(Elle meurt).
»
(L
Halévy et H. Meilhac, extrait de Frou-Frou).
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En outre, Meilhac a fait paraître
dans la Vie parisienne des articles signés Ivan Baskoff,
et dans la Revue de Paris une fantaisie dramatique en vers, intitulée
les Païens. Il a succédé à Eugène
Labiche à l'Académie
Française le 26 avril 1888. On a vu que la collaboration de
Meilhac avec Ludovic Halévy, commencée en 1861, prend fin
en 1881. Depuis lors, les deux collaborateurs ont produit chacun de leur
côté, Halévy des romans, Meilhac des pièces,
les unes avec d'autres collaborateurs, les, autres seul, la plupart médiocrement
accueillies. De cette liste énorme de comédies, de vaudevilles,
d'opérettes, à peine serait-il possible aujourd'hui, d'en
remettre une demi-douzaine sous les yeux du public... les gros succès
du début, les parodies carnavalesques, les caricatures bouffonnes,
la Belle Hélène, la Vie parisienne, la Grande-Duchesse,
ne sont plus présentables depuis longtemps; tout au plus les survivants
des premières représentations peuvent-ils encore s'intéresser
aux airs de quadrille d'Offenbach qui leur sont des motifs d'analyse rétrospective
et de rajeunissement sentimental.
Quant au comique proprement dit du reste
de ces oeuvres, il a suffit d'une génération pour qu'il soit
rajeuni, imité si l'on veut, mais dépassé, en tous
cas détrôné. Et c'est là le sort inévitable
de ces sortes de créations de l'esprit, dont la portée n'a
jamais dépassé l'heure, la minute où elles apparurent.
La critique, banale et bienveillante, eut beau s'ingénier à
vanter « l'observation humaine », « l'ironie pénétrante
» de Ma Cousine, de Brevet supérieur, de Décoré,
elle n'a pu faire que, soudain, Grosse Fortune ne sombrât
mélancoliquement devant le changement de goût du public. Et
pourtant Grosse Fortune ne vaut ni plus ni moins que le reste des
oeuvres de Meilhac; elle en a toutes les qualités et tous les défauts.
Mais arrivée à un tournant des modes littéraires,
elle n'avait en elle ni la force, ni la sincérité, ni l'acuité
d'observation qui distinguent les oeuvres des maîtres, et devant
lesquelles le trop mince vernis humain des personnages de Meilhac apparaît
irrémédiablement flétri.
Ces réserves faites, quant à
la valeur foncière, la portée et à la durée
de l'oeuvre de Meilhac, il n'en reste pas moins vrai qu'il a fait rire
son temps durant une quarantaine d'années et qu'il a su, avec la
complicité de la critique, imposer au goût public son sens
de la réalité! Et cela n'est pas un mince mérite.
Car les qualités de Meilhac sont multiples si elles ne sont pas
profondes; il a la verve élégante, le tour agile, l'observation
à fleur d'esprit, souriante et parfois même un peu piquante;
nombre de ses « traits » ne vieilliront que très lentement.
La scène XVIe du Roi Candaule
a même une valeur d'observation inusitée chez son auteur :
c'est peut-être la meilleure de tout son théâtre; malheureusement,
on a prétendu que cette scène a été prise à
Mérimée dans son Carrosse du
Saint-Sacrement! Mais on peut mettre quand même tous ses critiques
d'accord devant le brillant et l'abondance de sa fantaisie, souvent gracieuse,
d'une finesse et d'un goût quelquefois discutables. C'est un Marivaux
banalisé par le boulevard. On peut et on pourra reprendre quelque
temps encore Froufrou qui se dresse dans le théâtre
de Meilhac, avec son émotion presque sincère et malgré
d'infantines incohérences psychologiques, comme un accident parasitaire
inexplicable. (Jules Huret). |
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