| Pierre de Maricourt, philosophe et savant du XIIIe siècle, dont Roger Bacon, qui fut son disciple, fait un éloge enthousiaste dans l'Opus majus, dans l'Opus minus et surtout dans l'Opus tertium (ch. XII, XIII, XXXIII et XXXIV). Maître Pierre dédaigne les humains et les honneurs. Vivant dans la retraite, le « maître des expériences » étudie, en prenant l'observation pour guide, la chimie, les sciences naturelles, les mathématiques, la médecine. Ainsi il a appris à connaître les secrets de la nature, les phénomènes célestes et leurs rapports avec ceux d'ici-bas, à fondre les métaux et à les travailler, à manipuler l'argent, l'or et les minéraux, à inventer des instruments et des armes pour la guerre, à faire une science de l'agriculture, sans négliger l'arpentage, l'art de construire, même ce que cachent les charmes des sorciers, les impostures et les artifices des jongleurs. Aussi rendrait-il à saint Louis (Louis IX), dans une expédition contre les infidèles, plus de services qu'une armée. C'est de lui que Roger Bacon tient tout ce qu'il sait, astronomie, mathématiques, science expérimentale, langues; auprès de lui, les autres ne sont que des idiots et des ânes! On doit se demander tout d'abord si Bacon n'a pas exagéré les mérites de maître Pierre, et l'on sera tenté de répondre par l'affirmative, si l'on considère combien il a déprécié ceux de ses contemporains dont nous connaissons les oeuvres, Alexandre de Halès, Albert le Grand, saint Thomas, parce qu'ils négligeaient dans leurs études ce qui lui paraissait avoir une importance capitale. Puis, est-il permis d'identifier maître Pierre avec Pierre Pérégrin de Maricourt, dont une lettre à Suger de Fontancourt sur l'aimant (De magnete) figure à la Bibliothèque nationale et a été publiée en partie par Libri dans l'Histoire des mathématiques? C'est ce que fait Emile Charles, pour qui maître Pierre serait un Picard des environs de Corbie, où l'on trouve encore un village appelé Meharicourt. Peut-être pourrait-on penser à maître Pierre, un des membres de la confrérie alchimiste de la Haute-Italie, que nous a fait connaître Berthelot. Quoi qu'il en soit d'ailleurs, il importe de réunir tous les témoignages de cette nature pour comprendre que la science expérimentale, dont les progrès expliquent la perfection des arts au XIIIe siècle, faillit être fondée en Europe quatre siècles avant Galilée et Descartes. (F. Picavet). | |