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Louis Racine,
né à Paris le 6 novembre 1692,
mort le 29 janvier 1763, était le septième et dernier enfant
du poète Jean Racine. Avant lui venaient
Jean-Baptiste (1678-1747), qui fut un temps dans les ambassades, à
La Haye et à Rome,
et quitta le monde de bonne heure par le même scrupule preux qui
l'empêcha d'écrire; Marie-Catherine (1679-1751), qui hésita
longtemps entre le monde et le cloître, et finit par se marier; Anne
(Nanette), et Elisabeth (Babet), qui se firent religieuses; Francine (Fanchon)
et Madeleine (Madelon) qui ne se marièrent pas et vécurent
dans le monde pieusement.
Louis (que son père appelait le
petit Lionval) fut élevé au collège de Beauvais sous
la surveillance de Rollin. Il se fit recevoir
avocat. Mais, fuyant le monde, il entra chez les Pères de l'Oratoire
de Notre-Dame des Vertus, où il resta trois ans. Il y composa son
poème de la Grâce qui le fit connaître de Daguesseau
: par la protection du chancelier, il fut reçu à vingt-six
ans à l'Académie des inscriptions
et belles-lettres. Ecarté de l'Académie
française par le cardinal de Fleury,
et à demi ruiné par le système de Law,
il entra dans les fermes en 1722 : il fut successivement inspecteur général
en Provence, directeur à Salins,
Moulins, Lyon,
Soissons. Dans cette dernière ville,
où il vécut quinze ans (1731-1746), il fut aussi maître
particulier des eaux et forêts du duché de Valois.
Il s'était marié à Moulins en 1728 avec Marie Presle
de l'Ecluse, fille d'un conseiller et secrétaire du roi en la cour
des monnaies de Lyon.
En 1746, il quitta les fermes et revint
à Paris. Il ne put entrer en 1750 à l'Académie française
les philosophes lui firent obstacle. En 1755, il perdit son fils aîné
dans le désastre de Lisbonne. Il
fut très lié avec Jean-Baptiste
Rousseau et Lefranc de Pompignan. Très
lettré, sans être un érudit et sans être un poète,
il savait bien les langues anciennes et plusieurs langues modernes, l'anglais
et l'espagnol. Il avait le goût
timide et un peu étroit dans ses jugements aussi bien que dans ses
productions. Comme il manquait de génie, son jansénisme l'éteignit
au lieu de l'exciter.
Louis Racine était des Académies
de Lyon, Marseille, Angers
et Toulouse : c'était un excellent
sujet pour ces Compagnies. Il a laissé à l'Académie
des inscriptions plusieurs mémoires qui sont imprimés dans
le recueil de la Compagnie (t. VIII-XV): Comparaison de l' « Iphigénie
» d'Euripide avec l'« Iphigénie » de Racine;
Comparaison de l'« Hippolyte » d'Euripide avec la tragédie
de Racine sur le même sujet; Réflexions sur l'«Andromaque»
d'Euripide et sur l'« Andromaque » de Racine; Discours
sur l'imitation des moeurs dans la poésie; De la Poésie naturelle
ou de la Langue poétique; De la Poésie artificielle ou de
la Versification; Du Style poétique ou du Langage figuré;
Du respect que les poètes doivent à la religion. Ces
mémoires sont entrés en grande partie dans les Réflexions
sur la poésie que Louis Racine a publiées en 1747, 2
vol. in-12.
Il doit sa notoriété principale,
après son nom, à deux poèmes, le poème sur
la Grâce (4 chants), in-8, 1720, et le poème sur la
Religion (6 chants), 2 parties en 1 vol. gr. in-8, 1742 : ces deux
oeuvres furent très en faveur entre 1810 et 1835, comme l'atteste
le grand nombre de réimpressions; on réchauffait souvent
les pieux vers du fils du grand Racine par l'addition d'Esther et
d'Athalie. Louis Racine fit imprimer encore une Epître
à M. de Valincour (sur l'abus que les poètes font de
la poésie), avec une Ode sur la paix (Soissons, 1736, in-8);
une Ode sur l'harmonie (Paris, 1736, in-8); la Ville de Paris
au roy (1744, in-4). Il a honoré la mémoire de son père
en bon fils plutôt qu'en historien exact et en critique original
par ses Mémoires sur la vie de Jean Racine suivis de la Correspondance
entre Boileau et Racine), (Lausanne, 1747, 2 vol. in-12), et par ses
Remarques sur les tragédies de Jean Racine (suivies d'un
Traité sur la poésie dramatique ancienne et moderne
(Paris, 1752, 2 vol. in-12) : deux ouvrages précieux pour la biographie
de Racine et l'étude de ses oeuvres, malgré
les insuffisances et les erreurs.
En 1755 parut le Paradis perdu
de Milton, traduit en français avec les
Notes et Remarques d'Addison et un discours
sur le poème épique (3. vol. in-12) : cette fois la religion
élargit en même temps et aveugla le goût classique de
Louis Racine; il sentit Milton et ne vit pas qu'en le recommandant il travaillait
à la ruine de la tradition du XVIIe
siècle. Enfin il a édité les Lettres de J.-B. Rousseau
sur différents sujets de littérature (1749-1750, 5 vol.
in-12) et les Psaumes traduits en vers par les meilleurs poètes
français et recueillis par J.-B. Rousseau (1751, in-12). On
a publié en 1784 des Pièces fugitives de M. Racine fils,
pour servir de suite à ses oeuvres (in-8); ce recueil fut désavoué
par la veuve et les amis du poète. Les Oeuvres complètes
de Louis Racine ont été réunies en 6 vol. in-8, Paris,
1808. Dugast Matifeux a imprimé la Correspondance littéraire
de Louis Racine avec René Chevaye de Nantes, de 1743 à 1747
(1858, in-8). L'abbé Adrien de La Roque a publié en 1862
des Lettres inédites de Jean et de Louis Racine (Paris, in-8).
(G. Lanson). |
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