| Hiéroclès, philosophe grec, de l'école néoplatonicienne, qu'on a quelquefois confondu, à tort, avec Hiéroclès de Bithynie (voir plus bas). Hiéroclès naquit à Alexandrie et il y enseigna avec un grand succès. Il se donne lui-même comme un disciple de Plutarque. Banni pour un temps de sa ville natale, il dut comparaître, à Constantinople sans doute, en raison de son attachement à l'ancienne religion, devant un tribunal qui le condamna durement; il subit avec courage les mauvais traitements que les chrétiens lui infligèrent, puis revint enseigner à Alexandrie (415-450 environ). Il avait composé un Commentaire des Vers dorés, attribués à Pythagore (publié par Gaisford, 1858, parmi les Eclogae de Stobée, et par Mullach, Fragm. philos. Graecor., I, 408), puis un traité en sept livres sur la Providence, dont Photius (Myriobiblion, 214, 252) nous a conservé d'assez nombreux extraits. Stobée (Ecl., II, 420) cite encore un fragment d'un livre de Hiéroclès, Sur la Manière dont il faut se comporter à l'égard des Dieux, et, en divers endroits de son Florilegium, des extraits de six ou sept livres de morale. Ces divers écrits témoignent d'une grande élévation morale, et de sentiments religieux très sincères. La philosophie est pour lui la purification et l'achèvement de la vie. Elle la purifie par la vertu; elle l'achève par la vérité. Sur ces points, dans la philosophie théorique comme dans la philosophie pratique, Platon et Aristote sont d'accord pour l'essentiel, et, malgré des différences de détail, c'est ce que les stoïciens et les épicuriens ont eu le tort de ne pas comprendre. Au point de vue théorique, à côté du Dieu unique, créateur de toutes choses, Hiéroclès distingue trois classes de dieux : les dieux célestes, les démons et les âmes des humains. Il ne parle pas de ces divinités extérieures au monde, dont la description et la classification tenaient tant de place chez les autres néoplatoniciens. Contrairement aussi à l'habitude de ses maîtres, il parle de la volonté, de la sagesse et de la puissance de Dieu à la manière ordinaire. Hiéroclès se retrouve d'accord avec les néoplatoniciens pour nier la préexistence de la matière et le commencement du monde dans le temps : il veut que Dieu soit le créateur de toutes choses et que son action, comme son essence, soit éternelle parmi les êtres créés; les esprits seuls ont été immédiatement produits par lui, et sont l'objet de sa providence; la nature matérielle a été créée, et est conservée par Dieu, mais sans avoir égard aux individus, dont la destinée est réglée, non comme celle des esprits, par la providence, mais par la nécessité et le hasard. Hiéroclès croit avec Platonà la préexistence des âmes humaines et à la métempsycose; mais il refuse de suivre Porphyre et Jamblique lorsqu'ils représentent les âmes comme allant animer des corps d'animaux, ou au contraire, devenant des démons : les différentes classes d'êtres sont séparées par des barrières infranchissables. Il affirme énergiquement la liberté; il ne voit pas de difficultés à la concilier avec la Providence. La Providence est pour lui l'empire paternel que Dieu exerce sur tout l'univers; les arrêts particuliers que Dieu rend pour les individus constituent la destinée de ceux-là. Quant au mal, la divinité en est innocente; il est exclusivement l'oeuvre de l'humain : Dieu se borne à attacher certaines conséquences aux actions qui sont librement choisies par les humains. Par là, le philosophe prétend distinguer sa doctrine aussi bien du fatalisme-stoïcien que du naturalisme d'Alexandre d'Aphrodise. Dans la philosophie pratique, Hiéroclès distingue la vertu morale qui soumet la partie sensible de l'âme à la raison et la vertu théorique qui l'élève à la vérité. L'une conduit à l'autre la première fait de l'humain un être bon, la seconde en fait un dieu. Avec Platon, Plotin et le stoïcisme, il recommande de s'élever au-dessus de tous les biens extérieurs. Le véritable culte que nous devons rendre à la divinité consiste à la connaître et à l'imiter. Enfin, au-dessus de la vertu pratique, et même de la vertu théorique, il conçoit une existence, une activité encore plus parfaite, et qui nous rapproche davantage de la divinité. Pour s'en rendre digne et y atteindre, il faut se soumettre à certaines règles de vie, analogues à celles que Pythagore avait prescrites : c'est là finalement que nous voyons surtout reparaître le mysticisme, qui est le trait commun de tous les philosophes néoplatoniciens. (V. Brochard). | |