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Sylvestre II
ou Silvestre (Gerbert) est le 146e'pape
(1er pape français succédant
an premier pape allemand), né d'une famille obscure, en Auvergne,
à Aurillac ou près d'Aurillac,
vers 930; élu le 2 avril 999, mort le 12 mai 1003.
Elevé au monastère
de Saint-Gérault à Aurillac, il alla compléter ses
études chez les Arabes d'Espagne, acquit en géométrie,
en mécanique, en astronomie,
toutes les connaissances qui pouvaient être acquises de son temps,
puis les perfectionna par sa propre habileté. On lui attribue l'introduction
en France des chiffres arabes et de l'horloge à balancier.
Vers 970, on le trouve à Rome.
Dès 972, il professait à Reims,
jouissant de la faveur de l'archevêque Adalbéron.
Ce fut là que Othon Il vint le chercher
pour lui confier l'abbaye de Bobbio. Mais
Gerbert dut abandonner cette abbaye, par suite d'accusations ou d'intrigues
dont il nous paraît difficile de bien préciser la nature;
il revint à Reims. Après la mort de Othon II (983), il s'unit
avec Adalbéron et son frère Godefroy, comte de Verdun
et de Hainaut, pour soutenir la cause de
Othon Il, il gagna à cette cause Hugues Capet
, duc de France; et leurs efforts réunis réussirent à
faire rendre la régence à Théophano, mère du
jeune prince. Elle resta neutre dans le changement dynastique qui éleva
au trône Hugues Capet. En 991, Arnulfe, frère de Lothaire
et successeur d'Adalbéron au siège de Reims, fut accusé
de complicité avec son oncle, Charles
de Lorraine, qui s'était emparé de la ville et qui ensuite
fut surpris par Hugues Capet et conduit en prison à Orléans.
Traduit devant un concile assemblé à Saint-Basle (concilium
ad sanctum Basolum, concilium Remense), il avoua et fut déposé.
Gerbert, qui avait dirigé le concile
et qui en a écrit la relation, fut choisi pour le remplacer; mais
il fut accusé à son tour dans un concile tenu à Mouzon
en 995, et qui est considéré comme la suite du précédent
(Synodus Mosomensis, concilium Remense). Ce concile prononça
en faveur d'Arnulfe; le jugement fut envoyé à Rome. Néanmoins,
Arnulfe ne fut complètement rétabli qu'après la mort
de Hugues Capet, dans un concile tenu à Pavie
en 997. Gerbert s'était retiré à Magdebourg,
auprès de Othon Ill dont il acheva l'éducation.
L'empereur le fit nommer archevêque
de Ravenne et, après la mort de Grégoire
V, élire pape. Ils rêvaient de réaliser ensemble
la restauration de l'empire de Charlemagne
ou plutôt une splendide amplification de l'Empire
romain, accomplie par l'association de l'empereur et du pape. Ils n'eurent
pas le temps d'assister soit à la réalisation, soit à
la déception de ces espérances. L'empereur mourut moins de
trois ans après l'élection du pape. Sylvestre l'avait puissamment
aidé à soumettre les habitants de Tivoli; mais la clémence
de l'empereur envers eux révolta les Romains et provoqua des soulèvements
qui n'étaient pas encore comprimés lorsque l'empereur mourut.
Papenoerdt (Geschichte der Stadt Rom) dit qu'on ne sait pas comment
le pape parvint ensuite à s'entendre avec les Romains.
Une
personnalité aussi marquante devait laisser, cela va sans dire,
une profonde impression sur sa génération et toutes sortes
de fables ne tardèrent pas à circuler sur son compte. Il
semble certain qu'il imagina une horloge, qui fut conservée longtemps
à Magdebourg, et un orgue actionné par la vapeur, qui existait
encore à Reims deux siècles après sa mort. Toutes
ces inventions ne firent que confirmer ses contemporains dans cette idée
qu'il s'était vendu au Diable. Il
avait fabriqué, disait-on, une tête de cuivre, qui répondait
à toutes les questions; il possédait un livre qui lui donnait
le commandement de tous les démons et lui découvrait tous
les trésors. Comme Satan lui avait promis
qu'il ne mourrait qu'après avoir lu la messe à Jérusalem,
il pouvait se trouver rassuré, en ne se rendant pas dans cette ville.
Mais voici étant à Sainte-Croix-de-Jérusalem,
en la ville de Rome, il se sentit frappé du mal qui devait le tuer,
et il mourut dans les remords. Toutes les fois qu'un pape doit mourir,
son corps frémit et pleure, et ses ossements s'entre-choquent. On
peut trouver dans les pages de William de Malmesburg, d'Orderic Vitalis
et de Platina, les récits de ses entrevues avec le prince des ténèbres,
des détails sur le pouvoir dont il avait été investi
et sur ses tentatives pour échapper, au moment de sa mort, aux conséquences
de son marché. A ces anecdotes, le premier des auteurs sus-mentionnés
ajoute l'histoire de la statue portant l'inscription « frappe ici
», qui, après avoir amusé nos ancêtres dans le
Gesta Romanorum, a été racontée de nouveau
dans le Paradis terrestre.
Une statue, oeuvre de David
d'Angers, a été élevée à Gerbert,
par la ville d'Aurillac, en 1854.
Des oeuvres de Gerbert anciennement publiées,
les principales sont ses Lettres (149), formant des documents historiques
fort précieux, à cause des événements auxquels
elles se rapportent et des personnages auxquels elles sont adressées;
ses Discours prononcés au concile de Mouzon et dans un autre,
pour sa défense; les Actes du concile de Saint-Basle; la Vie
de saint Adalbert, archevêque de Prague. (E.-H.
Vollet).
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