| Emmanuel Frémiet est un culpteur français, né à Paris en 1824, mort en 1910. Il était fils d'un graveur de musique. Il débuta dans l'art par des lithographies relatives à l'ostéologie comparée pour le Jardin des plantes. Sa première oeuvre de modelage fut un renard en terre glaise, puis un chien. Rude devina le tempérament de Frémiet et l'accepta comme élève après avoir vu ses essais. En 1843, Frémiet exposa au Salon une Gazelle; en 1816, une Etude de chien; en 1847, un Dromadaire, puis en 1849 une Mère chatte, petit chef-d'oeuvre de vie qui lui fut payé 2500F par l'Etat. Citons ensuite son Chien blessé, et un Groupe de chiens, grandeur nature, également acquis par l'Etat. En 1850, il envoya sept oeuvres différentes, notamment un Chien griffon, une Poule de Chine et un Ours blessé, qui fit sensation. Il exécuta alors le Cheval de Montfaucon et des animaux préhistoriques, puis des dessins anatomiques pour des médecins et donna des planches à l'illustration et au Magasin pittoresque. Frémiet est, du reste, bon peintre. Plusieurs de ses toiles représentent des oiseaux ou des quadrupèdes, fort justes de ton et fort intéressants d'attitude. Il a peint aussi des paysages, avec une vision très délicate de la nature. Son Jeune Cheval, exposé en 1853, fut acheté par l'Etat. Vers cette époque, il exécuta une Vedette à cheval, qui attira l'attention de Niewerkerke, alors surintendant des beaux-arts. Celui-ci fit voir la statuette à l'empereur Napoléon III qui se montra fort épris du talent de Frémiet et lui commanda une série de soixante-dix statuettes représentant les soldats des différentes armes. Le souverain, après les avoir vues, les trouva monochromes et pria de les mettre en couleur, ce que fit l'artiste par un moyen très ingénieux. Il se servit de poussières des différents draps d'habillement, et, aidé par sa femme dans ce travail minutieux, il les appliqua sur les statuettes sans oublier les menus accessoires, tels que lisérés, harnachements en cuir, etc. Ces petits chefsd'oeuvre furent malheureusement abandonnés comme jouets au petit prince et à ses amis, Frémiet dut les réparer péniblement et ils finirent par être relégués dans les combles des Tuileries où ils furent brûlés en 1871. Le sculpteur exécuta aussi une statuette de l'Empereur pour faire partie de la même série. L'impératrice trouva à tort que les jambes étaient trop courtes (on sait que l'empereur avait surtout le buste long) et Frémiet dut faire un nouvel exemplaire de l'oeuvre. En 1855, il exposa ses Chevaux de halage, et en 1857 et 1858, il s'occupa de travaux décoratifs pour les écuries de l'empereur. Les deux Lions en pierre qui surmontent la corniche des Tuileries, en face du pont des Saints-Pères, faisaient partie de ce travail considérable. Une de ses oeuvres les plus curieuses (qui date de cette époque est son Cheval du saltimbanque. En 1859, Frémiet présenta au Salon son premier groupe d'un Gorille traînant le cadavre d'une femme. Cette oeuvre fut refusée sous prétexte que ce genre de sculpture ne devait pas être encouragé. Mais Niewerkerke, indigné, la fit placer dans une petite pièce à côté des salles de sculpture et tout le monde l'alla voir. Un sujet semblable et aussi saisissant comme effet dramatique et comme réalisme poétique valut à Frémiet, en 1887, la médaille d'honneur. En 1864, Frémiet exposa l'Ours et le Centenaire et un Chat en bronze; en 1862, un Cavalier romain et un Chef gaulois, deux statues équestres d'un grand caractère, qui se trouvent au musée de Saint-Germain. Son Jeune Faune à plat ventre, riant et jouant avec des oursons, et que chacun admire au Luxembourg comme chef-d'oeuvre de grâce et de fantaisie, date de 1864. En 1872, son Homme de l'âge de pierre fit justement sensation. C'est à tort qu'on a représenté quelquefois Frémiet comme un simple animalier. C'est un artiste multiple et complet. Son énorme buste de la Guerre (1872) témoigne précisément de son génie varié et cette tentative épique fut des plus remarquées. Il y a dans cette tête symbolique et horriblement expressive comme un ressouvenir de la grande âme de Rude. A l'encontre de cette ouvre angoissante, il faut citer sa délicate Jeanne d'Arc, statue équestre qui orne la place des Pyramides; d'abord critiquée pour sa simplicité d'attitude, elle est maintenant très généralement admirée. - Jeune éléphant pris au piège, par Frémiet (Fonte de fer de Durenne, autrefois dorée. Commandé en 1877pour l'Exposition universelle de 1878; appartenait au décor des jardins du premier palais du Trocadéro. © Photo : Serge Jodra, 2010. La production de Frémiet a été incessante. Il exposa, en 1872, un Fauconnier et une Dame; en 1874, une Jeanne d'Arc priant; en 1876, un groupe mouvementé, Gladiateur et Gorille s'étreignant avec rage. En 1875, il avait succédé à Barye comme professeur de dessin et de modelage au Muséum. En 1877, l'Etat lui commande un Eléphant ornemental pour les jardins du Trocadéro (aujourd'hui sur le parvis du Musée d'Orsay, photo ci-dessus). En 1878, on remarque son Chevalier errant du Moyen âge. Pour l'Hôtel de Ville de Paris, il exécuta un très curieux Porte-falot en bronze; pour le Trocadéro, une Fontaine monumentale. En 1888, il expose un Incroyable, le Grand-Père, vieux gentilhomme à cheval avec un enfant en croupe; en 1889, une deuxième statue équestre de Jeanne d'Arc, et en 1890, un Velasquez à cheval, acquis par l'Etat pour le jardin du Louvre. Il eut le deuxième prix au concours qui fut fondé pour la statue d'Etienne Marcel. Enfin, il a été chargé du monument de Raffet. On ne peut citer toutes ses oeuvres secondaires, statuettes ou morceaux décoratifs, et la fécondité de cet artiste n'a jamais nui à la grande tenue de son style, à la perfection son exécution, à l'originalité de sa pensée. Sa personnalité a pu choquer les esprits amoureux du banal et du convenu, et c'est la force même de son talent qui lui a suscité des oppositions et des inimitiés. Essentiellement Français par le goût, il n'en est pas moins épique quand il le faut plus complet et plus pittoresque que Barye comme animalier, il n'est surpassé par aucun dans les sujets d'histoire ou de fantaisie, et nous trouvons en lui autant de sève que chez Carpeaux, qui comprit et exprima si bien la beauté de la vie. (Charles Grandmougin). | |