| Benito Geronimo Feyjoò ou Feijoò y Montenegro est un savant né à Casdemiro (Galice) en 1676, mort au couvent d'Oviedo en 1764. Destiné par sa famille à l'état ecclésiastique, il s'adonna avec ardeur à l'étude, et dans sa curiosité d'esprit s'occupa en même temps que de littérature, de médecine, de sciences mathématiques, de physique, de philosophie, etc. Entré dans l'ordre des bénédictins, il consacra sa vie entière à lutter contre l'ignorance et les préjugés de ses compatriotes. Sa piété, qui n'était pas contestable, donna à cette sorte d'apostolat scientifique un caractère moins suspect que s'il avait été simplement un disciple des écrivains de France et d'Angleterre et, s'il trouva des adversaires violents et fut même déféré au tribunal de l'Inquisition, il n'en obtint pas moins un très grand succès. En 1726, il fit paraître en un volume intitulé Teatro critico des dissertations assez semblables à celles du Spectator d'Addison, mais plus longues et d'un genre plus grave; elles portaient contre la dialectique et la métaphysique qu'on enseignait alors en Espagne, sur la légitimité de la méthode d'induction dans les sciences physiques, sur les règles de la critique historique, sur les superstitions relatives aux comètes, aux éclipses, à la sorcellerie, sur le rôle de la femme dans la société, sur la nécessité pour les Espagnols de chercher la vérité et le progrès social, etc (L'Espagne au XVIIIe siècle). L'accueil qui fut fait à ce livre fut des plus favorables et de 1727 à 1739 l'auteur publia sept autres volumes du Teatro critico, où il attaque l'ignorance des moines et du clergé, les privilèges de caste, les préjugés populaires, les auteurs précieux, etc. On ne sait pour quel motif Feyjoo cessa cette publication en 1739, mais en 1742 il la reprit sous le titre : Cartas eruditas y curiosas en que par la mayor parte se continua el designio de el Teatro critico universal, impugnando o reduciendo a dudosas varias opiniones comunes, et en publia encore 5 volumes. La polémique très vive que quelques écrivains obscurs engagèrent contre Feyjoo ne fit qu'augmenter le succès et l'influence de ses ouvrages; bien qu'ils soient volumineux et sur des sujets arides assez souvent, les 15 tomes (en y comprenant la polémique) eurent 15 éditions dans le cours du XVIIIe siècle. Une édition des dissertations les plus intéressantes a paru aussi en 1863 dans la Biblioteca Ribadeneyra : Obras escogidas. On y trouve une intéressante notice sur Feyjoo par Vicente de La Fuente. Clemencin, en jugeant l'oeuvre du bénédictin d'Oviedo, dit que c'est à sa piété éclairée que l'on doit d'avoir vu se dissiper en Espagne bien des préjugés, que l'on doit presque tout le progrès accompli en ce sens au XVIIIe siècle. Ticknor déclare aussi que Feyjoo à lui seul a fait plus pour le développement intellectuel de son pays que tous ses prédécesseurs pendant un siècle entier. (E. Cat). | |