| Etienne II est un pape, élu au mois de mars 752, mort au mois d'avril 757. Romain de naissance, il fut élevé au patriarcat du Latran. II était diacre lorsqu'il fut nommé pape. La situation de Rome était critique; en 751, Astaulf (Astolphe), roi des Lombards, s'était emparé de la capitale de l'exarchat byzantin, Ravenne. Il marchait sur Rome; Etienne Il l'arrêta par d'habiles négociations et obtint même de lui une trêve de quarante ans. Mais, quatre mois après, Astaulf oubliait ses promesses; il prétendait exiger un tribut d'un sou d'or par habitant et soumettre Rome à son pouvoir. En vain le pape conjurait l'empereur d'Orient de venir au secours de la ville. Livré à lui-même, après avoir prêché le courage au peuple et avoir invoqué le secours divin par de grandes processions, il quitte Rome (14 octobre 753). Deux envoyés francs l'accompagnent, le duc Autaris et l'évêque de Metz, Chrodegang, car déjà Etienne par une lettre a réclamé la protection de Pépin le Bref, le roi des Francs, dont son prédécesseur Zacharias a consacré le pouvoir. Il est escorté en outre d'un envoyé grec, le silentiaire Jean, qui, au nom de l'empereur, est venu lui ordonner de se rendre à la cour d'Astaulf et l'engager à restituer l'exarchat. A Pavie, auprès du roi lombard, il n'eut aucun succès. Ce fut alors qu'il franchit les Alpes pour aller trouver Pépin à Ponthion où il arriva le 6 Janvier 754. En tentant ce coup d'audace, avait-il l'intention bien arrêtée de s'affranchir de la domination des empereurs de Constantinople que les papes avaient jusque-là subie, ou voulait-il simplement réclamer l'intervention franque en faveur de l'empire grec? On a pu discuter sur ce point ; en tout cas les événements décidèrent aussitôt l'alliance étroite entre la papauté et les Carolingiens. Cet événement a eu sur toute l'histoire du Moyen âge une fort grande influence. Pépin accueillit le pape avec honneur et lui promit de veiller à la défense et à l'accroissement de la puissance de l'Eglise romaine. En retour, Etienne nomma Pépin patrice des Romains, et à Saint-Denis où il séjourna quelque temps, il le consacra roi avec sa femme Bertrade et ses fils Charles et Carloman. Ce fut en vain qu'Astaulf, pour rompre cette alliance dangereuse, força le frère de Pépin, Carloman, qui s'était retiré en Italie au monastère du Mont-Cassin, à abandonner son convent et aller négocier en France. Carloman fut enfermé dans un monastère de Vienne où il mourut bientôt. Pépin somma Astaulf de restituer ses conquêtes; sur son refus, il franchit les Alpes avec le pape, assiégea Pavie et força le roi lombard à traiter. C'est alors que Pépin aurait fait à « l'Etat romain » une première donation de territoires. L'Etat romain désignait-il l'Empire ou l'Etat pontifical qui aurait pris ainsi naissance? Selon toute vraisemblance, ce n'était pas sans intention qu'on employait ce terme ambigu. Après le départ de Pépin, dès la fin de 754, Astaulf pour se venger marchait de nouveau sur Rome. Le 1er janvier 755, les Lombards étaient devant la ville, dévastaient la banlieue, même les églises et les couvents seules les grandes basiliques de Saint-Pierre et de Saint-Paul étaient respectées. Les habitants résistèrent coura-geusement. De son côté le pape adressait un énergique appel aux Francs, et, dans une de ses lettres, n'hésitait pas à faire parler saint Pierre lui-même. Fidèle à ses promesses, Pépin accourut; à la nouvelle seule de son arrivée, Astaulf abandonna le siège de Rome. Cerné une seconde fois dans Pavie, pendant l'automne de 758, il dut se reconnaître tributaire des Francs et exécuter le traité qu'il avait rompu. Par un diplôme qui fut déposé dans la confession de Saint-Pierre, le roi franc fit donation à Saint-Pierre, à son vicaire le pape Etienne et aux successeurs d'Etienne, de Ravenne, Rimini, Pesaro, Conca, Fano, Césène, Sinigaglia, Iesi, Forlimpopoli, Forli, Sussubium (aujourd'hui Castro Caro), Montefeletri (aujourdhui San-Leo), Acerreagium (probablement Arcevia), Montelucati, Serra, Saint-Marin, Vobio (aujourd'hui Sarsina), Urbino, Cagli, Luciolis, Gubbio, Comacchio, Narni. Ces territoires, avec le duché de Rome dont le pape se considéra désormais comme le maître, formèrent l'Etat de Saint-Pierre. L'abbé de Saint-Denis, Fulrad, fut chargé d'assurer la remise au pape des villes qui lui avaient été attribuées. Sa mission n'était pas encore terminée lorsque Astaulf mourut, au commencement de 756. Etienne, qui n'avait pas oublié les angoisses passées, dans une lettre à Pépin accable d'injures la mémoire de son ancien ennemi. Son successeur, Didier, voyant surgir en face de lui un rival, Ratchis, implora l'appui du pape qui lui assura la couronne. Peu de temps après, Etienne mourait à son tour. (C. Bayet). | |