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Les Étienne ou Estienne sont une célèbre famille d'imprimeurs et de savants français, des XVIe et XVIIe siècles, issue d'une vieille maison noble de Provence. Elle a pour chef Henri Étienne, né à Paris vers 1460, mort en 1521, et a surtout été illustrée par Robert et Charles, fils de Henri, et par H. Étienne II, fils de Robert. Henri Estienne. ll publia notamment les travaux de Lefèvre d'Estaples et de Clichtoue, et se trouva en relations d'amitié avec Guillaume Budé, les trois Du Bellay, etc. Certains de ses volumes sont d'une belle exécution typographique. Sa veuve se remaria avec Simon de Colines, à la fois imprimeur, graveur et fondeur en caractères. François Estienne. Robert Ier Estienne. Leur haine ne faisait que s'accroître avec les nombreuses éditions des textes bibliques qu'Estienne publiait ensuite dans sa propre imprimerie (rue Saint-Jean-de-Beauvais, en face de l'Ecole de droit), et auxquelles il ne cessait d'apporter des améliorations de fond et de forme. Heureusement pour lui, il était couvert par la protection affectueuse du roi François Ier qui le nomma imprimeur pour les langues hébraïque et latine en 1539, et pour le grec l'année suivante. Estienne eut le premier l'honneur d'imprimer des livres avec les admirables caractères grecs gravés par Garamond par ordre du même souverain, et appelés, à cause de cela, « caractères royaux ». Le premier volume où ils furent employés est l'histoire ecclésiastique d'Eusèbe (1544), avec une préface en grec de l'imprimeur en l'honneur du roi ami des lettres. Estienne s'attacha à publier des textes grecs inédits et il mit ainsi au jour Denys d'Halicarnasse, Alexandre de Tralles, Dion Cassius, Justin et Appien. Il ne fut pas moins zélé pour la littérature latine, et il en donna tous les principaux auteurs en éditions revues par lui-même, et accompagnées de variantes et de commentaires. Tous ces volumes, extrêmement soignés et d'une rare correction, étaient rendus, par leur bas prix, accessibles à toutes les bourses. Estienne consacra encore à la philosophie latine un véritable monument qui est son Thesaurus linguae latinae, avec interprétation française, livre dont trois éditions successives (1531-1532, 1536, 1543), de plus en plus augmentées, attestent l'utilité et le succès. Cet ouvrage servit désormais de fond à tous les grands dictionnaires latins. Il en tira lui-même un Dictionnaire français-latin (1539-1540, 1549) qui est aussi le premier livre de ce genre. Robert Estienne (1503-1559). Robert Estienne, dont la vie entière était vouée au bien public, se préoccupa également de l'instruction de la jeunesse, et le premier livre qui soit sorti de ses presses (1526) est un ouvrage de pédagogie. Il édita un nombre considérable de grammaires latines de différents auteurs, publia une série d'opuscules ayant pour but de faciliter les versions de cette langue en français, ainsi que de petits dictionnaires, et rédigea un excellent Traicté de la Grammaire française (1557). La mort de François Ier fut un coup funeste pour le savant typographe à l'humeur indépendante et au caractère entier. L'oraison funèbre de ce prince par l'évêque du Chastel, imprimée par Estienne, raviva les vieilles haines des Sorbonards et provoqua l'orage. Certaines expressions en furent trouvées en opposition avec les doctrines de l'Eglise et l'on s'en prit à l'imprimeur. Celui-ci, ne se sentant pas suffisamment protégé par Henri II contre ses persécuteurs, prit le parti de s'enfuir à Genève (1551), où il établit une imprimerie qu'il mit au service de la propagation des doctrines de la Réforme. Libre désormais de parler tout haut, il exposa ses querelles avec la Sorbonne dans un écrit passionné, mais qui est un chef-d'oeuvre de polémique et de langue : les Censures des Théologiens de Paris par lesquelles ils avoyent faulsement condamné les Bibles imprimées par Robert Estienne, avec la response d'iceluy (1552). Dès lors il devint un calviniste fougueux et un véritable sectaire. Il applaudit à la condamnation de Michel Servet et reprocha violemment aux théologiens de Paris de n'avoir pas livré Rabelais au bourreau. Dans son testament, il ordonna à ses enfants d'embrasser la religion réformée, et déshérita ceux qui étaient restés dans le giron de l'Eglise catholique. Toute sa tendresse se porta sur son fils aimé Henri, qui fut son digne continuateur dans le domaine de la science. Il avait eu huit autres enfants de son mariage avec Perrette Bade, fille du savant Jesse Bade, professeur et typographe éminent. Charles Estienne. Olympie Nicole Estienne. Henri II Estienne. En 1554, il fit paraître à Paris la première édition d'Anacréon, dont il sut se procurer deux manuscrits, non « sans péril ». Cette découverte capitale le rendit célèbre du coup et Ronsard chanta sa gloire. L'année suivante, il publia à Venise, à l'imprimerie des Alde, une traduction de Théocrite, suivie de poésies bucoliques de sa plume. En 1557, il établit à Genève une typographie indépendante de celle de son père; les deux furent réunies après la mort de ce dernier. Pendant quarante ans de sa carrière typographique, où il déploya une activité si prodigieuse qu'elle paraît incroyable, Henri Estienne édita environ cent soixante-dix ouvrages en diverses langues. La littérature grecque y tient la première place par le nombre et l'importance des éditions. Il donna une quantité de textes inédits, en améliora d'autres, y ajouta souvent d'excellentes traductions en latin, des commentaires très érudits, et veilla scrupuleusement à la correction typographique. En latin : Ciceronianum Lexicon graeco-latinum (1557); divers ouvrages ayant pour but de faciliter l'étude de la la langue grecque ou de la langue française aux étrangers, ainsi que des écrits pour l'éducation de la jeunesse; le célèbre Thesaurus graecae linguae (1572-1573, 5 vol. in-fol.), réimprimé plusieurs fois et complété dans la magistrale édition moderne des Didot (1831-1865, 9 vol. in-fol.); Artis typographicae querimonia (1569, in-4), poème intéressant l'histoire de l'imprimerie; Francofordiense Emporium (1574, in-8), recueil en vers et en prose inspiré par les fameuses foires de Francfort; Principum Monitrix Musa (Bâle, 1590, in-8), ou le Conseiller des princes, recueil de plusieurs ouvrages en vers et en prose, d'une singulière hardiesse, résumant les idées politiques de l'auteur, avec un prologue en vers français adressé à Henri III, son protecteur; la vivacité de sa haine contre la Ligue n'exclut pas la rectitude de son jugement sur les événements de cette époque troublée et sur les meilleurs principes de gouvernement. En français, Henri Estienne donna le curieux Traicté de la conformité du langage François avec le grec (1565, petit in-8), où il prétend que le français dérive du grec et en est resté proche; la Précellence du langage français (Paris, 1579, pet. in-8), Deux Dialogues du nouveau langage fançois italianizé (Genève, 1578), écrit en vers dirigé contre la cour de Catherine de Médicis et l'ifluence de ses courtisans, et dont certaines libertés de langage lui valurent des remontrances du conseil de Genève; les Prémices ou le premier livre des Proverbes epigrammatizez (1594), et, par-dessus tout, l'Introduction au traité de la conformité des merveilles anciennes avec les modernes, ouvrage connu sous le nom d'Apologie pour Hérodote (1566, petit in-8 ; éd. critique donnée par P. Ristelhuber, Paris, 1879, 2 vol. in-8), tableau vivant de la société de son époque et surtout satire virulente contre les moeurs du clergé. Cette oeuvre, mêlée d'une foule d'anecdotes souvent très piquantes, est assurément l'un des textes les plus intéressants de la littérature française du XVIe siècle. Henri Estienne s'y montre, avec de grandes qualités de style, le précurseur de Pascal pour la justesse de l'esprit. Si comme écrivain et comme érudit il surpasse son père, il ne possédait pas au même degré le sens artistique en typographie. Il eut pour fils et successeur Paul Estienne, et pour gendre le célèbre Casaubon.
Robert II Estienne. François II Estienne. L'aîné de ses fils, Gervais, reçu libraire à Paris en 1612, exerçait encore en 1627; le second, Adrien, reçu libraire en 1614 et imprimeur en 1616, eut deux fils : Pierre (né à Paris le 21 août 1618) et Jérôme (né à Paris le 10 septembre 1630), dont le premier fut reçu libraire et imprimeur en 1638, et le second en 1657, et qui furent les derniers de leur branche. Paul Estienne. Robert III Estienne. Son frère, Henri, fut trésorier des bâtiments du roi. Le fils de celui-ci, Robert IV Estienne, avocat au Parlement, bailli de Saint-Marcel, puis de Saint-Denis, fut imprimeur de 1630 à 1633, mais ses descendants renoncèrent à la noble profession qui avait illustré leurs ancêtres. L'une de ses filles épousa le marquis de Saint-Marc, et cette branche s'éteignit à la troisième génération. Antoine Estienne. Son frère Joseph, né en 1603, nommé imprimeur du roi à La Rochelle en 1629, y fut victime de la peste cette même année. Antoine eut trois fils: Jean-Jacques, né à Paris en 1622; qui fut reçu libraire et imprimeur en 1642, mais n'exerça point, de même que François, né en 1627; le troisième, Henri, né à Paris en 1631, libraire et imprimeur en 1646, mourut avant son père, le 6 octobre 1661, « ebrietate », ajoute Lottin. Ainsi finit la branche aînée de cette grande dynastie typographique. L'histoire des Étienne a été écrite par Maittaire, Londres, 1709, par Renouard, 1837, et par A.-F. Didot, 1856. Le rattachement des deux autres familles de ce nom, se disant descendantes de la même souche, et dont l'une a exercé la librairie à Paris au XVIIIe siècle, n'est pas prouvée. (G. Pawlowski). |
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