| Le Déisme est la croyance (Foi religieuse) a l'existence de Dieu et aux assertions des religions, exclusion faite de tout ce que la révélation peut y ajouter. C'est « Un athéisme déguisé », dit Bossuet (Variat., V). Quant à Pascal, il dit à ce sujet : " Le Déisme est presque aussi éloigné de la religion chrétienne que l'athéisme, qui y est tout à fait contraire"; et ailleurs : "Tous ceux qui cherchent Dieu hors de J.-C., et qui s'arrêtent dans la nature, par là tombent, ou dans l'athéisme ou dans le Déisme, qui sont deux choses que la religion chrétienne abhorre presque également". On ne voit pourtant pas d'abord comment un mot qui signifie par lui-même croyance en Dieu a pu prendre un sens si contraire. En fait, c'est un terme mal défini qui appartient surtout au vocabulaire théologique, ou plutôt à celui de la polémique religieuse, et qui n'a point d'usage bien précis dans la langue philosophique. La vérité est que, théologiens ou philosophes, tous ceux qui croient savoir beaucoup de choses sur la divinité, tiennent pour des impies ceux dont le credo est plus limité à cet égard, à plus forte raison ceux qui se bornent à admettre l'existence d'un Dieu sans rien de plus. C'est ainsi que prêtres et croyants appellent déiste, avec pitié ou mépris, selon leur humeur, le philosophe qui admet Dieu, mais nie les révélations, ignore les dogmes et ne pratique point de culte. Le philosophe spiritualiste, à son tour, appellera déiste celui qui admet une cause première, voire une intelligence immanente, ordonnatrice de l'univers, sans admettre comme lui le Dieu personnel, la création ex nihilo, la providence particulière. Ainsi de suite : le déisme pour chacun est toute croyance métaphysique plus réservée que la sienne propre, parfois même simplement différente de la sienne. Le Déisme a été professé en Angleterre par une école philosophique assez nombreuse, qui compte parmi ses principaux adhérents Herbert, comte de Cherbury; Shaftesbury, petit-fils de l'homme d'État ami de Locke; Tindall, Toland, Woolston, Anthony Collins, etc. Les doctrines de ces libres penseurs, ont été recueillies et propagées en France par Voltaire et par les encyclopédistes. On a parfois dit que Leibniz aurait aussi penché vers le Déisme. (B-E.). Pourquoi déisme et théisme ne sont-ils pas synonymes? Il n'y a à cela aucune raison dans les mots, qui sont formés tout de même, l'un du latin, l'autre du grec. Voltaire ne semble pas en faire la distinction : s'il se vante d'être théiste, il ne se défend pas d'être déiste. Théisme et déisme, c'est tout un pour lui, à savoir : une religion sans dogmes révélés et sans culte, le tond général et commun de toutes les religions, la croyance purement rationaliste en « l'existence d'un être suprême bon, puissant et juste » (Dictionnaire philosophique, art. Théisme et Théiste ; Essai sur les moeurs, chap. CXXXVI; et Questions sur les miracles). C'est Kant, semble-t-il, qui, avec son besoin de diviser et de classer, a assigné un sens nettement distinct à ces deux mots. Le déisme, pour lui, c'est la théologie rationnelle transcendantale; il consiste à « penser Dieu d'après des concepts purs et vides d'intuition, comme être premier et cause du monde ». Le théisme, c'est la théologie naturelle : il consiste à reconnaître Dieu comme auteur du monde, en le concevant par analogie avec l'homme, et d'après les données de l'expérience (Critique de la Raison pure et Prolégomènes). Si arbitraire qu'ait pu être l'attribution exclusive de ce sens à chacun de ces mots, elle est à peu près reçue aujourd'hui; et comme elle fixe une distinction utile, le mieux est sans doute de la respecter. (H. Marion).
| En bibliothèque - Leland, Démonstration évangélique, 1768. | | |