| Valentin Conrardt est un écrivain français, né en 1603 à Paris, mort dans la même ville le 29 septembre 1675. Selon Tallemant des Réaux, son père, calviniste austère, qui le destinait aux finances, ne lui fit donner aucune éducation littéraire et ne lui fit pas apprendre le latin et le grec. Après la mort de son père, Conrart se livra à son goût pour les belles-lettres et apprit plusieurs langues vivantes, en particulier l'italien et l'espagnol. Il se lia avec la plupart des littérateurs de son temps, recherchant les écrivains célèbres et se plaisant à vivre en leur compagnie : sa maison leur était ouverte et l'affabilité de son accueille rirent dès l'abord beaucoup rechercher. La maison de Conrart, située au centre de Paris, rue Saint-Martin, fut le berceau de l'Académie française. Un certain nombre d'écrivains et de beaux esprits choisirent un jour de la semaine pour s'y retrouver. Les habitués, pour nourrir la conversation, apportaient tour à tour des pièces de vers on des écrits de leur composition qu'ils lisaient et soumettaient à l'admiration de leurs amis : les premières réunions datent, selon Pellisson, de 1629. On y trouvait Godeau, qui fut plus tard évêque; Gombauld, Chapelain, Giry, Habert, l'abbé de Cerisy, Serizay, Maleville : c'est l'indiscrétion de ce dernier qui révéla le secret de ce cercle intime pour y introduire Faret, qui y lut son Honnête Homme; Desmarets de Saint-Sorlin y entra ensuite et lut le premier volume d'Ariane; après lui, son ami Boisrobert, familier du cardinal de Richelieu, voulut en être, et, charmé de ce qu'il y vit, en parla à Richelieu; celui-ci, voyant le parti qu'il pourrait en tirer, fit offrir sa protection à la compagnie qui, assez contrariée, n'osa refuser (1634); en 1635, l'Académie reçut les lettres patentes dont le Parlement ajourna l'enregistrement pendant deux ans. L'Académie s'installa d'abord dans la maison de Conrart, mais celui-ci ayant pris femme, la compagnie déménagea et se rendit chez Desmarets, chez Chapelain, Montmor, etc.; ce n'est qu'au bout de quinze ans que l'Académie se fixa; on l'avait appelée successivement Académie des beaux esprits, Académie de l'éloquence, Académie éminente, enfin Académie française. Conrart fut élu secrétaire perpétuel et remplit cette charge avec zèle pendant plus de quarante ans; c'est à partir du 13 mars 1643 qu'il commença à tenir registre des séances et il continua avec exactitude jusqu'à sa mort. Conrart était d'un commerce agréable; il supportait ses attaques de goutte avec une grande égalité d'humeur, et était aimé de tous pour la douceur de son caractère. La justesse de son esprit et son goût ont fait illusion à quelques-uns de ses amis comme Guez de Balzac et à ses contemporains, qui en parlaient comme d'un homme remarquable. Il écrivait beaucoup, mais publiait fort peu. On prétend qu'il recourait à d'Ablancourt quant il devait payer de sa personne comme secrétaire de l'Académie. Selon Tallemant, il avait la vanité de vouloir imiter tout ce que les autres écrivaient et, dès qu'on parlait d'un bon mot, il en rappelait un semblable de sa façon. Boileau a été assez dur pour lui dans un vers devenu proverbial : J'imite de Conrart le silence prudent. Il eut sans doute un peu plus de prétentions que de mérite, mais son nom restera; il rendit service aux lettres autant qu'il put pendant sa vie, et protégea les littérateurs. Godeau, Pellisson, Fléchier eurent beaucoup à se louer de lui. Après sa mort il a laissé des manuscrits qui se trouvent à la bibliothèque de l'Arsenal : c'est une sorte de compilation, recueil des beaux morceaux de vers ou de prose dont il eut connaissance ou qu'il entendit lire par ses contemporains; on peut y trouver de précieux renseignements. Ses oeuvres imprimées se composent d'une Epître dédicatoire, en tête de la Vie de Philippe de Mornay (Leyde, 1647), une Epître en vers, insérée dans les oeuvres de Boisrobert; une Ballade, en réponse au Goutteux sans pareil de Sarrasin; une Préface des traités posthumes de Gombauld touchant la religion; les Psaumes retouchés sur l'ancienne version de Clément Marot (Charenton, 1677); des Lettres familières à M. Félibien (Paris, 1681); enfin des Mémoires sur l'histoire de son temps, publiés en 1825 par Monmerqué dans la collection Petitot; c'est son ouvrage le plus important, bien qu'il soit court. (Ph. B.). | |