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L'histoire du Kenya
Les premières populations du Kenya comprenaient des groupes de chasseurs-cueilleurs, probablement les ancêtres des actuels Hadza et Sandawe. Ces populations vivaient principalement de la chasse, de la cueillette et de la pêche. Vers 1000 av. JC, des vagues de migrations bantoues commencent à atteindre la région. Les Bantous, originaires d'Afrique de l'Ouest et du Centre, introduisent l'agriculture, la métallurgie du fer et l'élevage. Ils se mêlent aux populations locales et forment la base des communautés agricoles qui se développent dans l'intérieur des terres. Par la suite, les populations couchitiques, venues du nord (région de l'actuelle Éthiopie et Somalie), migrent vers l'actuel nord et est du Kenya. Elles introduisent des pratiques pastorales. Les populations nilotiques, comme les Luo et les Maasai, arrivent du sud du Soudan. Ces populations sont essentiellement pastorales et apportent une culture marquée par l'élevage du bétail.

Dès le Ier millénaire, la côte kényane devient un carrefour commercial important reliant l'Afrique, le Moyen-Orient, l'Inde et plus tard la Chine. Des cités-États, comme Lamu et Mombasa, se développent le long des côtes kenyanes et tanzanienne autour du commerce de l'or, de l'ivoire, des épices et des esclaves. Ce commerce est facilité par l'arrivée des navigateurs arabes et perses, qui apportent l'islam et fondent des communautés cosmopolites le long de la côte, qui est connue  sous le nom de Terre de Zanj, depuis au moins le IIe siècle. Vers le IXe siècle, la population composite d'Africains, d'Arabes et de Perses qui vivent et font du commerce dans ces villees a commencée à être connue sous le nom de swahili ( =« peuple de la côte »). Elle a déjà une langue (kiSwahili),, une langue bantoue enrichie par des emprunts arabes, et une culture distinctes. Le kiSwahili devient la langue véhiculaire de cette région. Entre le XIe et le XVe siècle, les cités-États swahilies prospèrent grâce au commerce maritime. Des villes comme Kilwa, Mombasa et Malindi deviennent des centres commerciaux et culturels importants. L'islam s'ancre progressivement dans la région, influençant les pratiques sociales, l'architecture et la culture swahilie. Les relations commerciales avec les empires arabes et asiatiques renforcent l'influence extérieure dans la région. 

À partir du XVe siècle, les Portugais cherchent à contrôler le commerce de l'océan Indien. En 1498, Vasco de Gama atteint la côte kényane. Les Portugais établissent rapidement leur domination en construisant des forts, comme celui de Fort Jesus à Mombasa en 1593. Les Portugais imposent leur contrôle sur les cités-États swahilies, perturbant le commerce régional. Cependant, leur domination reste fragile et suscite de nombreuses révoltes locales. Au début du XVIIIe siècle, les Omanais, dirigés par l'imam de Mascate, chassent les Portugais et établissent leur influence sur la côte kényane. Ils rétablissent les échanges commerciaux dans la région. Les Omanais contrôlent la côte et, au XIXe siècle, le sultanat de Zanzibar, sous l'autorité de Sayyid Saïd, prend le contrôle des cités côtières comme Mombasa. Le commerce de l'esclavage, de l'ivoire et des épices prospère. Des caravanes de commerce pénètrent plus profondément à l'intérieur des terres, reliant la côte aux régions plus centrales du Kenya et d'Afrique de l'Est. Cette période voit également l'arrivée des missionnaires et des explorateurs européens, qui commencent à manifester un intérêt croissant pour l'intérieur du Kenya.

En 1885, la Conférence de Berlin répartit l'Afrique entre les puissances européennes. Le Kenya devient une partie de l'Afrique orientale britannique. En 1895, le territoire devient un protectorat britannique, et les Britanniques commencent la construction du chemin de fer reliant Mombasa au lac Victoria. Ce projet entraîne l'arrivée d'immigrants indiens, dont beaucoup s'installeront par la suite au Kenya. Les Britanniques exproprient les terres des populations autochtones pour les redistribuer aux colons européens. Les Kikuyus, principalement affectés, résistent aux déplacements forcés. Les inégalités raciales et l'exploitation économique entraînent des tensions croissantes.

Après la Première Guerre mondiale, le mécontentement face aux politiques coloniales grandit. Des organisations comme l'Association des jeunes Kikuyu (Kikuyu Central Association) et le East African Association (EAA) commencent à revendiquer des droits pour les Africains. La figure de Jomo Kenyatta émerge comme l'un des principaux leaders nationalistes. Le protectorat britannique est converti en 1920 en une colonie qui nommée Kenya, d'après le nom de sa plus haute montagne du pays. De nombreux conflits politiques entre la colonie et le Royaume-Uni ont ensuite conduit au violent soulèvement des Mau Mau, , principalement composé de Kikuyus, qui commence en 1952. La révolte est réprimée brutalement par les autorités coloniales, mais elle marque un tournant dans la lutte pour l'indépendance.

Après une série de négociations, le Kenya obtient son indépendance le 12 décembre 1963, avec Jomo Kenyatta comme Premier ministre, puis président en 1964 lorsque le pays devient une république. Sous la présidence de Kenyatta, le Kenya adopte une politique de réconciliation nationale, malgré les divisions ethniques et politiques. Cependant, le régime de Kenyatta devient de plus en plus autoritaire, avec une concentration du pouvoir et la marginalisation de certains groupes ethniques. Les premières années de l'indépendance voient une croissance économique, mais aussi des inégalités persistantes. Le Kenya devient un acteur clé en Afrique de l'Est, mais les tensions ethniques et politiques continuent de poser des défis.

Après la mort de Jomo Kenyatta en 1978, son vice-président, Daniel arap Moi, prend la tête du pays. Au début de son mandat, Moi prône l'unité nationale sous le slogan nyayo ( = marcher sur les traces de Kenyatta). À partir des années 1980, le régime de Moi devient de plus en plus autoritaire. En 1982, une tentative de coup d'État menée par l'armée est violemment réprimée, et le Kenya devient un État à parti unique sous le parti KANU (Kenya African National Union). Le Kenya connaît à cette époque des difficultés économiques croissantes, notamment en raison de la corruption, de la mauvaise gestion et de la baisse des prix des matières premières. Ces problèmes exacerbent les tensions ethniques et sociales. Sous la pression internationale et nationale, notamment après des manifestations massives pour la démocratisation, Moi est contraint de réintroduire le multipartisme en 1991. Cependant, les premières élections multipartites de 1992 et 1997 sont marquées par la violence, la fraude et les divisions ethniques.

Après 24 ans au pouvoir, Moi est contraint de quitter la présidence en 2002. Mwai Kibaki, candidat de la coalition d'opposition NARC (National Rainbow Coalition), remporte les élections. C'est un moment historique pour le Kenya. Le gouvernement de Kibaki met en oevre des réformes économiques et lutte contre la corruption, ce qui entraîne une croissance économique soutenue. Cependant, ces avancées sont ternies par des scandales de corruption au sein du gouvernement. Les élections présidentielles de 2007 se terminent par des allégations de fraude massive, déclenchant d deux mois de violences ethniques post-électorales causent la mort de plus de 1100 personnes et le déplacement de plus de 600 000 personnes. La crise expose les fractures ethniques du pays. La médiation parrainée par l'Union africaine et dirigée par l'ancien secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, aboutit à un accord de partage du pouvoir qui amène Odinga au gouvernement dans le poste rétabli de Premier ministre. L'accord de partage du pouvoir comprend un vaste programme de réforme, dont la pièce maîtresse est la réforme constitutionnelle. 

Une nouvelle Constitution est ainsi adoptée massivement lors d'un référendum national en 2010. Elle introduit  des freins et contrepoids supplémentaires au pouvoir exécutif et délègue des pouvoirs et des ressources à 47 comtés nouvellement créés.Elle supprime le poste de Premier ministre. Uhuru Kenyatta, fils de Jomo Kenyatta, remporte les élections de 2013 sous la coalition Jubilee, avec William Ruto comme vice-président. Leur victoire survient alors qu'ils font face à des accusations de crimes contre l'humanité devant la Cour pénale internationale (CPI) pour leur rôle présumé dans les violences de 2007-2008. Les charges seront plus tard abandonnées. Sous Kenyatta, le Kenya continue de connaître une croissance économique soutenue, soutenue par de grands projets d'infrastructures comme le chemin de fer reliant Mombasa à Nairobi. Cependant, la corruption reste endémique et les inégalités sociales persistent. Après les élections controversées de 2017, qui sont marquées par des violences et des contestations, Kenyatta et son principal opposant Raila Odinga concluent un pacte symbolisé par une poignée de main (le Handshake) en 2018. Ce geste vise à apaiser les tensions politiques et promouvoir l'unité nationale.

William Ruto, ancien vice-président de Kenyatta, remporte les élections présidentielles de 2022 sous la coalition Kenya Kwanza. Sa victoire est serrée et contestée par Raila Odinga, mais la Cour suprême confirme la légitimité des résultats. Au programme du  gouvernement Ruto : faire face à l'inflation et à la dette publique croissante, renforcer la lutte contre la corruption et la mettre en oeuvre des réformes promises, tout en naviguant dans un environnement politique toujours polarisé.

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