|
L'histoire
du Guatemala se rattache d'abord à celle du Mexique.
C'est du Mexique où ils s'étaient établis vers le
milieu du VIe siècle, que vinrent
au Guatemala, au XIIIe siècle, les
envahisseurs toltèques, les Quichés,
les Cachiquels, les Zutugils. En 1524, le conquistador don Pedro
de Alvarado, venant du Mexique, entre dans le Soconusco, aujourd'hui
province mexicaine et alors occupée par les Quichés du Guatemala,
avec ses alliés les Indiens Tlascalans. Tecuc Umam, roi des Quiçhés,
leur livra bataille sur les bords de la rivière Samala et fut vaincu.
S'il fallait en croire les récits des Espagnols,
l'armée indienne aurait été de 232 000 hommes, et
les eaux de la rivière se seraient changées en sang à
cause du massacre. Alvarado entra dans Xeleluh, située près
de la ville moderne de Quezaltenango, tua Tecuc Umam dans un nouveau combat,
dispersa les restes de son armée sous les murs de la capitale Utatlan,
aujourd'hui Santa Cruz del Quiché. Le roi des Cachiquels appela
lui-même les étrangers; Alvarado s'établit sur son
territoire. Le conquistador bâtit la capitale du nouveau royaume
à la base du volcan de Agua. Il soumit dans la même année
les Zutugils des bords du lac d'Atitlan, les Cachiquels de Mexico et les
Pipiles de la côte. Les exactions des Espagnols amenèrent
bientôt des révoltes les rois des Quichés et
des Cachiquels soulevés furent vaincus et faits prisonniers. Les
Indiens furent baptisés de force, marqués au fer rouge et
réduits en esclavage. La population,
qui devait être très dense, diminua rapidement.
Le Guatemala sous
la domination espagnole comprenait, outre la république actuelle
de Guatemala, les Etats de Chiapas et de Soconusco dans le Mexique
et toute l'Amérique
centrale, jusqu'à la baie de Thiriqui. Il fut gouverné par
une audience royale, dont le président était à la
fois chef civil et capitaine général et relevait directement
de la métropole. Cette organisation spéciale explique le
nom de royaume donné au Guatemala, bien qu'il fut compris officiellement
dans la vice-royauté de la Nouvelle-Espagne. En 1821, le Guatemala,
suivant l'exemple du Mexique, se proclama libre. Lorsque Iturbide eut dissous
par son coup d'Etat du 18 mai 1822 la junte qu'il avait instituée
à Mexico et se fut proclamé roi, le Guatemala suivit sa fortune.
A la fin de sa dictature, le Guatemala redevenu maître de lui-même,
le 21 janvier 1823, se constitua (25 janvier - 22 novembre 1824) en république
fédérative avec les autres Etats de l'Amérique centrale.
Après 1824,
le Guatemala, réduit à ses frontières actuelles, n'a
cessé d'être secoué à l'intérieur par
la lutte entre les libéraux ou lucios et les cléricaux
ou serviles, tandis que diverses tentatives de fédération
forcée des diverses républiques centro-américaines
le mettaient en guerre avec ses voisins. Les libéraux, maîtres
du pays après la chute d'Iturbide, abolirent
l'esclavage, donnèrent aux Indiens le titre de citoyens, établirent
le mariage civil et le jury. Le clergé et les familles nobles qui
détenaient la puissance territoriale cherchèrent à
s'allier aux Indiens pour reconquérir le pouvoir, et suscitèrent
plusieurs insurrections. En 1838, les conservateurs ou serviles du Guatemala
réussirent à soulever les Indiens contre la fédération;
mais ils furent bientôt effrayés de leur oeuvre, quand ils
virent leurs alliés en qui s'était réveillée
la haine des Européens et qui se
disaient envoyés par la vierge Marie,
pour soumettre les hérétiques, s'emparer de la république
et entrer triomphateurs dans la capitale même du Guatemala. Le jeune
péon Rafaelo Carrera, fils d'un Indien Cachiquel et d'une Noire,
qui, paré du titre de général, avait mené les
Indiens à la victoire, était un homme d'un grand sens politique.
Il sut éviter le massacre, ramener les Indiens dans l'obéissance
et, malgré ses origines, devint le chef du parti des Blancs. Carrera
fit sortir le Guatemala de la confédération centro-américaine,
battit en 1840, dans la ville même de Guatemala, le général
Morazan, président constitutionnel de l'Amérique centrale.
Devenu dictateur, il réforma l'administration, augmenta le commerce,
accrut les revenus de l'Etat, mais il eut à lutter contre la révolution.
Des troubles éclatèrent
au mois de janvier 1845 et furent bientôt réprimés;
mais une nouvelle révolution plus importante se déclara au
mois de janvier 1847; en 1848, mille insurgés battirent les troupes
du gouvernement; en 1850, la capitale fut ensanglantée par une nouvelle
révolution. Les insurgés s'appuyant sur les Etats voisins,
Carrera, qui en 1842 avait rattaché le Guatemala à la confédération
centro-américaine, l'en sépara par un décret du 21
mars 1847 et dut en 1850 faire la guerre au Salvador
et au Honduras coalisés. Il battit ses adversaires à San
José. Maître enfin du pays en 1851, il donna une constitution
au Guatemala; il réunit une Chambre de cinquante-neuf membres dans
laquelle l'aristocratie, le clergé régulier et les divers
établissements ecclésiastiques étaient surtout représentés.
Cette Chambre qui
devait faire toutes ses volontés, le nomma président de la
république et en 1854 président à vie. Après
quelques années de paix, les métis écartés
des affaires recommencèrent à s'agiter. En 1862, les récoltes
furent mauvaises, la cochenille, la principale richesse du pays manqua.
Des bruits de révolution se répandirent; deux officiers furent
arrêtés, accusés d'avoir organisé une conspiration
pour assassiner Carrera à la cathédrale.
Le 1er mai, le major général
de la place fut assailli sur sa porte même par trois hommes qui déchargèrent
sur lui leurs revolvers sans l'atteindre, tandis que le feu éclatait
au palais dans les magasins attenant au dépôt des poudres.
Cette conjuration fut sévèrement réprimée.
En 1863, la guerre
éclata entre le Guatemala et le Salvador
dont le président Barrios voulait reconstituer l'unité centro-américaine;
Carrera exigeait qu'en cas d'union chaque Etat gardât son autonomie.
A la suite d'un article offensant pour lui, paru dans la Gazette officielle
du Salvador, il franchit la frontière le 18 février 1863
avec 2700 hommes. Barrios lui livra bataille le 24 à Coalepeque
et le mit en pleine déroute. Carrera s'allia au Nicaragua
et, après avoir réprimé une insurrection dans sa capitale,
il s'avança avec ses alliés contre les forces réunies
du Salvador et du Honduras. Vainqueur le 16 juin à Santa Rosa, il
força Barrios à prendre la fuite et le Salvador à
changer de président. Après la mort de Carrera (14 avril
1865),
la Chambre élut à la présidence le général
Vicente Cerna qui continua la politique conservatrice. En 1867, une révolte
dirigée par le général Serupio Cruz échoua,
mais en 1871 un mouvement insurrectionnel renversa Vicente Cerna. Les libéraux,
parvenus au pouvoir, chassèrent les jésuites
et proclamèrent la liberté religieuse. Ils consolidèrent
leur situation en s'alliant au libéral Honduras. Leurs conquêtes
furent sanctionnées par la constitution de 1879.
En 1873, le général
Rufino Barrios fut porté à la présidence; le gouvernement,
décidé à vaincre le clergé, prononça
la dissolution des couvents et l'interdiction de l'enseignement des missionnaires.
Des tentatives de révoltes fomentées parle clergé
motivèrent des mesures plus sévères, le bannissement
de l'archevêque de Guatemala, la dissolution des congrégations,
la confiscation à titre provisoire d'abord, puis définitif,
des importantes propriétés des églises. Le pouvoir
des cléricaux fut brisé. Barrios eut ses pouvoirs proroges
pour quatre ans, puis, en 1880, pour six ans. En 1884, à la suite
de la convention passée entre les Etats-Unis
et le Nicaragua
pour la construction d'un canal, il crut l'indépendance du Guatemala
et de toute l'Amérique centrale menacée; il résolut
de grouper fortement les Etats de l'Amérique centrale et proclama
en février 1885 la confédération centro-américaine.
Le Salvador
refusant d'y adhérer, Barrios en mars envahit son territoire, mais
il fut tué au combat de Chachuya et son armée battue et débandée
rentra au Guatemala. Par l'intermédiaire des consuls, la paix fut
conclue le 14 avril avec le président du Salvador Zaldivar, par
le général Barillas qui prit en main le gouvernement du Guatemala.
En mars 1892, le général Reyna Barrios, libéral avancé,
fut élu président de la république après ballottage,
par 35 000 voix contre 30 000 données au Dr Francisco Lanifiesta,
libéral.
Au mois de mai 1906,
un commencement de révolution avait éclaté au Guatemala,
dirigé contre l'administration du président en exercice,
Estrada Cabrera. La frontière mexicaine était le centre de
cette agitation, qui fut rapidement réprimée par les troupes
du gouvernement.
Au commencement de
juillet, un nouveau soulèvement eut lieu, organisé cette
fois par des réfugiés guatémaltèques que la
république de Salvador
avait accueillis et probablement encouragés. Il avait pour principal
chef l'ancien président Barrillas, adversaire malheureux d'Estrada
Cabrera. Le Guatemala, ayant réprimé le mouvement insurrectionnel,
demanda comme réparation au Salvador que le général
Regalado, ancien président de la République et ministre de
la guerre, fût écarté de cette fonction. Sur le refus
du Salvador, les hostilités éclatèrent, et à
la bataille d'El Jicaro (12 juillet), les troupes du Guatemala étaient
battues; mais le général salvadorien Regalado était
tué. D'autre part, le Honduras s'était uni au Salvador. Devant
la gravité du conflit, les Etats-Unis
se hâtaient d'intervenir, de concert avec le Mexique; le 19 juillet,
le navire de guerre américain Marble-head, transportant le
ministre Merry, négociait une pacification générale
de l'Amérique centrale, que la disparition du général
Regalado, adversaire personnel d'Estrada Cabrera, rendait facile. (Chofardet). |
|