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L'Égypte des Pharaons
Le Nouvel empire
L'Egypte antique
Le Pharaon et l'Etat
L'Ancien Empire
Le Moyen Empire
Le Nouvel Empire
La Basse Epoque
La période Ptolémaïque
L'Egypte romaine
Le Nouvel empire commence avec la XVIIIe dynastie. Il s'étend du XVIeau XIe siècle avant notre ère, et correspond à une nouvelle période de prospérité pour l'Égypte débarrassée de la main-mise des Hyksos (Le Moyen Empire). Cette  dynastie a été celle de la reine Hatshepsout, des Thoutmôsis et des Aménophis (Amen-hotep). Aménophis IV, sous le nom d'Akhenaton, tente de contrer le pouvoir grandissant des prêtres d'Amon à Thèbes en promouvant une religion nouvelle (La religion égyptienne) toute à sa propre gloire. A sa mort le culte d'Amon est restauré, en, même temps que la puissance thébaine. 

Ramsès Ier inaugure la XIXe dynastie en 1307 av. J.-C, et est bientôt être confronté, ainsi que le seront ses successeurs immédiats, avec la menace des Hittites et des autres peuples d'Asie mineure contre lesquels Ramsès Ier, Séti Ier et Ramsès II  (1290-1224) feront des guerres. Ce dernier roi, qui installe sa capitale à Pi-Ramsès (Per-Ramses = la demeure de Ramsès), dans le Delta, étendit au loin ses conquêtes et porta la terreur de ses armes jusqu'aux confins de la Mésopotamie. Le péril extérieur ainsi écarté, la paix revint pendant plusieurs décennies. Ce fut un âge d'or pour l'art, l'architecture et la littérature. Mais les successeurs de Ramsès II dûrent bientôt  faire face à de nouvelles invasions, celles des «-Peuples de la mer », parmi lesquels figuraient les traditionnels ennemis asiatiques de l'Égypte, mais aussi des Grecs.

La XIXe dynastie s'achève ainsi par des troubles et la XXe (1196-1070) qui lui succède ne fait que consacrer le déclin dans lequel est désormais entraîné le pays. Le temps de la grandeur sans partage des pharaons touche à sa fin. Et ce sera le clergé thébain, qui lui n'a cessé de renforcer pendant tous ces remous, qui écrira dans une large mesure l'histoire des siècles suivants.

Dates-clés  :
1550 -1070 av. J.-C. - Nouvel Empire.

1473 - 1458 -  Règne de la reine Hatchepsout.

1391 - 1353 - Règne d'Aménophis III

1353-1335 - Aménophis IV / Akhenaton (période Amarnienne).

1290 -1224 - Règne de Ramsès II.

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L'âge d'or des bâtisseurs

Énumérer les monuments construits par les rois du Nouvel Empire serait (à quelques temples près bâtis par les Ptolémées et les empereurs romains) passer en revue tous les temples de l'Égypte. Le Nouvel empire est, en effet, la période de construction par excellence, ou plus exactement de reconstruction. Les premiers souverains de la XVIIIe dynastie donnèrent le signal en restaurant les édifices qui avaient le plus souffert pendant la guerre de l'indépendance. A partir de Thoutmôsis Ier, les rois ne se contentent plus à si peu de frais : la vallée du Nil se transforme depuis la mer jusqu'au Djebel Barkal en un immense chantier où les bras sont comptés par milliers.

Grâce, en effet, aux populations entières qui sont transportés de tous les pays vaincus en Égypte, des temples de proportions inusitées jusqu'alors s'élèvent et couvrent de règne en règne des espaces de plus en plus grands, chaque roi ajoutant à l'oeuvre de son prédécesseur; des obélisques, des statues colossales se dressent; des avenues de sphinx sillonnent de vastes plaines, si vastes que le voyageur émerveillé en retrouve encore les traces loin du périmètre des villes. 

A Napata, à Soleb, à Semneh, à Ouadi Halfa, à Abou Simbel, en plus de vingt villes, aujourd'hui bourgades de la Basse-Nubie, à Éléphantine, à Syène, à Ombos, à El Kab, à Esneh, à Hermonthis, à Thèbes surtout, où l'activité ne se ralentit que sous Aménophis IV, et de Thèbes jusqu'à Memphis, de Memphis jusqu'aux bouches du Nil, dès que la politique asiatique de Ramsès II eût rendu au Delta et même accru l'importance qu'il avait avec les rois memphites, l'Égypte se couvrit de temples, de forteresses, d'arsenaux, de magasins, pour recevoir l'impôt, de belles villas; les hautes falaises de calcaires qui bordent le Nil se creusèrent pour abriter trente générations de morts en luxueuses syringes où l'art le plus consommé nous révèle aujourd'hui comme par enchantement les merveilles de cette extraordinaire civilisation. 

La XVIIIe dynastie

La XVIIIe dynastie a été fondée par Ahmos Ier (Amosis), le vainqueur des Hyksos (Moyen Empire), elle marque sa place dans l'histoire par une série de conquêtes qui assurent, pour près de quatre siècles, la prépondérance des rois. L'inscription du tombeau d'Ahmos, fils d'Abna, commandant de la flottille, nous apprend que le roi, son homonyme, poursuivit les Hyksos jusqu'à Sharouhana (peut-être Sharouken de Siméon), leur infligea l'an VI de son règne une sanglante défaite, et qu'après la prise de Sharouhana, il tourna ses armes vers la frontière Sud. Sa campagne dans le Khontnefer (région de Nubie entre la première cataracte et Assouan)  fit rentrer dans l'obéissance une partie des anciennes populations tributaires du haut Nil. Favorisé par ses victoires, Ahmos Ier  s'appliqua à remettre en vigueur les traditions délaissées pendant de longs règnes : il partagea son activité entre la guerre qui lui fournit d'importantes ressources et l'embellissement de sa capitale qui les absorba. Il ne borna pas ses soins à Thèbes et au sanctuaire d'Ahmos : le temple de Ptah à Memphis en eut sa très grande part. Ahmos tenait ses droits au trône de Nofertari, sa femme, fille du roi Kamos (Kamès), dernier souverain de la XVIIe dynastie, et de la reine Aah-Hotep. Il en eut un fils, Amenhotep Ier (Amenophis), qui lui succéda.

Amenhotep épousa sa soeur Aahhotep II, conformément à un usage qui se perpétua en Égypte jusqu'à l'introduction du christianisme. La mort de son père ne le mit pas en pleine possession du trône : il dut le partager avec la reine mère Nofertari qui incarnait à un trop haut degré la légitimité pour perdre ses droits par le veuvage. Au point de vue militaire, le règne d'Amenhotep fut fécond en beaux résultats. La Haute-Nubie, maintenue dans le devoir, devint une colonie si prospère qu'on ne distinguait plus entre les territoires au Nord et les territoires au Sud de la première cataracte. Les richesses agricoles du Dongola furent exploitées par des colons qui trouvèrent alors dans le pays de Koush une sécurité égale à celle des provinces de l'Égypte proprement dite. 
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Le siphon, une invention égyptienne. La plus ancienne
représentation remonte au règne d'Aménophis II.

Thoutmos (Thoutmôsis) ler, fils et successeur d'Amenotep, contribua à cette sécurité en se montrant sur le haut Nil comme son prédécesseur. Une inscription gravée sur les rochers de la troisième cataracte marque les traces de son passage. Thoutmos avait d'ailleurs mieux à faire qu'à batailler contre le Sud. Depuis le temps des Hyksos, l'Asie s'était affirmée comme la source des plus grands dangers que pouvait courir l'Égypte. Thoutmos prit les devants. A peine couronné, il envahit le pays des Canaanites, et fit pour la première fois sentir le poids des armes égyptiennes aux Rotenou, peuplade sémitique maîtresse des territoires compris entre le Liban et le désert de Syrie. Une stèle élevée sur les bords de l'Euphrate montre qu'à la défaite des Rotenou, il ajouta celle des tribus du Naharina (Mésopotamie euphrato-orontienne). Son fils et successeur, Thoutmosis II, ne paraît pas lui avoir longtemps survécu. 

Hatshepsout.
La mort de ce prince rendit le pouvoir à la reine Hatshepsout, sa soeur et épouse. Fille de la reine Ahmes, Hatchepsout avait, en effet, déjà fait l'apprentissage de la puissance royale du vivant d'Amenophis, qui l'avait associée au trône : à la mort de Thoutmosis II, elle l'assuma, en qualité de régente, c.-à-d. en attendant la majorité de Thoutmosis III, fils du roi précédent et de sa concubine Isis.
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Hatshepsout en Osiris.
Statues d'Hatshepsout en Osiris, devant son temple funéraire à Deir el-Bahari.
Source : The World Factbook.

Le nom de cette régente, dont la tradition classique n'a pas conservé le souvenir, est pourtant un des plus grands personnages de l'histoire d'Égypte; car, si jamais l'esprit d'entreprise s'est manifesté en ces temps lointains dans un but essentiellement pacifique, c'est seulement lors du gouvernement de la reine Hatshepsout. Non contente de reprendre l'exploitation des districts miniers du Sinaï délaissés depuis la XIIe dynastie (Moyen Empire), elle expédia une flotte dans le To-Nouter (le pays des Somalis) à la recherche des produits naturels que la renommée plaçait dans ces régions reculées.

« Les Égyptiens, descendus à terre, dressèrent une tente dans laquelle ils entassèrent leurs pacotilles pour les échanger contre les produits du pays. Les indigènes appartenaient à la même race que les Koushites de l'Arabie méridionale et de la Nubie. Ils étaient grands, élancés, d'une couleur qui varie entre le rouge brique et le brun presque noir [...]. Les principales conditions du marché se réglèrent probablement dans un banquet, où l'on servit aux barbares toutes les délicatesses de la cuisine égyptienne. Les envoyés reçurent d'eux entre autres objets précieux trente-deux arbrisseaux à parfums, disposés dans des paniers avec des mottes de terre. Hatshepsou les fit planter par la suite dans ses jardins de Thèbes : c'est, je crois, le premier essai connu d'acclimatation.-» (Maspéro.) 
Thoutmôsis III.
Hatshepsout paraît avoir exercé le pouvoir jusqu'en l'an XX du règne officiel de Thoutmôsis ll; toujours est-il que dès l'an XXI, ce dernier règne seul. A peine débarrassé de cette longue tutelle, il s'efforça d'abolir les traces d'un passé humiliant pour son orgueil, en s'acharnant avec une rage iconoclastique contre la mémoire de la reine. Ce tempérament d'une énergie brutale le prédestinait à devenir, dans le domaine de la guerre, le personnage capital de l'histoire d'Égypte. Les trente-cinq ans que dura son règne depuis la mort d'Hatshepsout furent marqués par tant d'expéditions militaires qu'on pourrait se demander non combien d'années mais de mois l'Égypte put jouir de la paix, si l'on ne savait par avance que la guerre, telle que la pratiquaient les chefs des grands empires orientaux, n'était le plus souvent qu'une parade armée organisée à travers des pays dont la capitulation était assurée. Ces expéditions, qui n'avaient d'autre but que d'ajouter aux revenus des pharaons l'énorme impôt que des voisins trop faibles payaient pour acheter la paix, ne devaient guère durer qu'une saison et n'absorbaient pas de contingents assez forts pour que l'agriculture s'en ressentit. Les moindres guerres civiles ou féodales au dedans exerçaient plus lourdement leur action sur la vie régulière que trente ans de campagnes au dehors, qui accumulaient dans la nation victorieuse un butin énorme d'esclaves et de denrées de toute sorte. De l'an XXIV à l'an XXVIII, Thoutmos parcourt quatre fois la Syrie et la Phénicie. La défaite des Rotenou à Mageddo (an XXIII) après une bataille insignifiante, lui donna immédiatement la mesure de sa supériorité. Dès lors rien ne l'arrêta. L'an XXIX, il pousse jusqu'à l'Euphrate, pille Tounipou et Karkemish. Il revenait chargé de butin de cette expédition lointaine, lorsque la richesse du pays de Djahi (la Phénicie septentrionale) le détourna de l'Égypte.
« L'abondance fut si grande au camp du vainqueur, que les soldats purent se gorger d'huile d'olive chaque jour, luxe qu'ils ne se donnaient en Égypte qu'aux jours de fête. » (Maspéro).
Les campagnes de l'an XXX et XXXI mirent à la merci de l'Égypte Qadesh, Symira, Arad, Arrotou, celle de l'an XXIIII  ramena Thoutmôsis devant les Khiti du Naharina; c'est au retour de cette expédition qu'il s'empara de Nii, ville de la Syrie septentrionale qu'on a confondue avec Ninive. D'autres noms de villes ou de peuples de la même région ont été ainsi identifiés à plaisir avec des villes ou des peuples reculés, et l'on a longtemps cru pouvoir dire avec Mariette que l'empire s'étendait alors depuis l'Abyssinie et le Soudan jusqu'à l'Irak Arabi, le Kurdistan et l'Arménie. En réalité, toutes les guerres de Thoutmôsis, depuis la campagne de l'an XXII jusqu'à celle de l'an XLII, ont eu pour théâtre, en Asie occidentale, la région comprise entre le Taurus, l'Euphrate et la lisière du désert de Syrie; sur mer, les îles les plus voisines de l'Égypte, Chypre et la Crète. Au Sud, il dut, à l'exemple de ses prédécesseurs, pousser beaucoup plus loin et asseoir sa puissance sur la plus grande partie du bassin du Nil. 

Son fils Amémophis II et son petit-fils Thoutmôsis IV suivirent son exemple et tinrent en haleine les bataillons de l'Égypte par des expéditions répétées. Sous Aménophis III, la suzeraineté de l'Égypte sur les petits États asiatiques se trouvait tellement consolidée, qu'il n'y eut guère plus de résistance de la part des princes vassaux. Les relations pacifiques se multiplièrent, provoquant l'action d'influences diverses et favorisant, par le voyage, le commerce, la diffusion des langues, le développement des deux civilisations. 


Princesse de la XVIIIe dynastie.
(Musée du Louvre).

Aménophis IV (Akhénaton).
Le règne d'Aménophis IV (Amenhotep IV, Khounaton ou Akhenaton) nous offre le curieux spectacle des plus anciennes luttes du sacerdoce et de l'empire : un roi provoquant un schisme pour anéantir la puissance du grand prêtre d'Amon. Le dieu de Thèbes, Amon, avait profité de la fortune de la maison royale; de simple divinité locale, il était parvenu à la suprématie de l'Olympe égyptien  (La religion égyptienne). Son grand prêtre n'avait pas eu la plus maigre part à cet avancement, qui se traduisait non seulement par un grand accroissement d'influence religieuse, mais surtout par l'extension d'une sorte de pouvoir temporel qui s'exerçait dans l'administration des domaines du temple. Amon n'avait pu s'affirmer comme le principal dieu sans devenir en même temps le principal propriétaire foncier de l'Égypte. Parmi les antiques sanctuaires qui perdirent le plus au triomphe de ce parvenu, celui d'Héliopolis, qui avait doté l'Égypte de son système religieux, était au premier rang. L'égo d'Aménophis IV l'associa assez ingénieusement à sa rancune. Il lui emprunta, comme machine de guerre, une forme secondaire de son dieu soleil, opposa cette divinité jusqu'alors assez effacée, Aton (le disque), au dieu de Thèbes, lui constitua d'importants domaines dans la Moyenne-Égypte et fit de sa métropole, Khounaton ou Akhetaton (actuellement Tell el-Amarna), la capitale de l'empire. Aménophis IV, auto-proclamé Aton terrestre, seul dieu qu'il fût désormais pêrmis de vénérer, légitima ainsi sa main basse sur tout ce qui jusqu'alors avait échappé aux roi d'Égypte, malgré leur supposée toute-puissance. Le signe de cette concentration du pouvoir peut aussi se lire dans l'évolution qu'il donne au sens du mot pharaon. Ce n'est plus la Maison royale (Ancien Empire); désormais le Pharaon, c'est lui, et lui seul. Mais la puissance d'Amon était trop solidement assise pour être ébranlée par un dieu secondaire, et Aton ne survécut pas longtemps à son champion. 

Toutankhamon et la réaction thébaine.
Le successeur d'Akhenaton, Toutankhamon occupe peu de place dans l'histoire de l'Égypte, et est surtout connu parce que sa tombe, découverte en 1922 dans la vallée des Rois (Thèbes) est la seule connue à n'avoir pas été pillée. Il semble qu'il ait été le fils d'Akhenaton et de l'une de ses soeurs. D'une santé fragile, atteint de paludisme et d'une maladie osseuse, il n'a régné que neuf ans (entre 1333 et 1323) et apparaît surtout comme le témoin de retour au culte d'Amon, qui est est piloté par celui qui lui succèdera bientôt, Aï.  Gendre d'Aménophis IV, Aï avait jugé prudent de rentrer dans les bonnes grâces du dieu thébain, sans pourtant tout à fait abandonner son rival. Mais mais, après une période de troubles persistants, son successeur Harembebi (Horemheb), allié au sacerdoce thébain, se fit l'instrument de la réaction et assura la solidité du trône en exerçant contre Aton les représailles d'Amon. Il ne fut pas seul à recueillir le fruit de son habileté. La suprématie resta à Thèbes pour près de trois siècles. 

La XIXe dynastie

Sous la XIXe dynastie, inaugurée en 1307 par le règne de Menpehtirê (Ramsès Ier) , l'Égypte, sans rien perdre de sa force vitale, ne fut plus comme par le passé l'arbitre du sort de ses voisins d'Asie. Une puissance rivale, celle des Khiti ou Hittim, qui jusqu'alors n'avait songé qu'à se défendre contre les invasions des conquérants de la XVIIIe dynastie, avait profité de l'affaiblissement momentané de l'Égypte après la mort d'Aménophis IV pour secouer le joug des pharaons et substituer sa propre suzeraineté sur les États syro-phéniciens à celle de l'Égypte. 

L'histoire des guerres égypto-hittites est le fait le plus saillant de cette nouvelle période. Une première campagne se termina par un traité conclu entre Sapaloul et Ramsès Ier. Une seconde campagne mit aux prises leurs successeurs Morousar et Séti Ier (Sethi). Mais Seti (Mériamon), qui était très facilement venu à bout des Shasou, des Libnanou et autres populations de la Syrie méridionale, rencontra de la part des Hittites une résistance tout à fait imprévue. C'est qu'il n'avait plus affaires aux Khiti qu'avaient battus et razziés Thoutmôsis IV, mais à une nation puissante faisant non seulement la loi chez elle, c.-à-d. dans le Naharina, mais encore dans la plus grande partie de l'Asie Mineure, la Cilicie, la Lycie, la Mysie. Ilion (Troie) et Pedasos étaient ses tributaires et formaient avec elle une sorte de fédération militaire assez forte pour se faire respecter, et même en mesure de s'organiser pour la conquête. Seti Ier jugea prudent de mettre fin à des victoires incertaines par un bon traité qui fixait à l'Oronte la démarcation des deux zones d'influence. 

« Restreinte à la Syrie du Sud et à la Phénicie, l'autorité des pharaons, dit Maspero, gagna en solidité ce qu'elle perdait en extension. Il semble que Seti Ier, au lieu d'exiger simplement le tribut, imposa à chacun des peuples vaincus des gouverneurs d'origine égyptienne et mit des garnisons permanentes dans quelques places, comme Gaza et Magidi. »
Ce n'est pas de là que devait venir le danger. Les peuples de l'Asie Mineure qui savaient par leurs relations avec les Khiti quelle riche proie devait être l'Égypte, tentèrent une invasion par mer favorisée par les Libyens, mais ils furent battus par Ramsès II (Ousimarê), que son père Seti avait, sur ses vieux jours, associé à l'empire. Au nombre de ces peuplades se trouvaient des Shardanes ou Sardinens, ses prisonniers, qu'il incorpora dans sa garde. Jusqu'alors l'armée égyptienne n'avait emprunté son élément étranger qu'aux populations du Haut-Nil; Ramsès préluda ainsi à l'organisation des troupes mercenaires qui supplanta, dans la suite, l'armée nationale. 

Ramsès II.
Toutes ces guerres de Ramsès II s'effacent devant sa fameuse campagne de l'an V, célébrée par une sorte d'épopée qu'un poète aux gages du roi, Pentaour, composa pour la circonstance. Cette longue pièce, gravée en entier et en abrégé sur plusieurs temples, nous est également parvenue par des copies manuscrites. Motour, fils de Morousar, avait été fidèle aux engagements pris par son père, mais son frère et successeur, Khitisar, n'imita pas son exemple. Les peuples de l'Asie Mineure ne demandaient qu'à marcher contre l'Égypte; il se mit à la tête de la coalition, et 
« l'on vit des bandes troyennes traverser la péninsule dans toute sa longueur et venir camper en pleine vallée de l'Oronte, à trois cents lieues de leur patrie. » 
L'armée égyptienne n'offrait pas un moins singulier mélange :
« Elle renfermait, remarquait Maspéro, à côté des Égyptiens, des Libyens, des Mashouasha de Libye, des Maziou, des Shardana, débris de l'invasion repoussée victorieusement quelques années auparavant. » 
Ce fut à Shabtouna, petite bourgade syrienne, située un peu au Sud-Ouest de Qadesh, que les deux armées se rejoignirent. Celle de Ramsès y fut surprise par l'ennemi, qui avait mis les Bédouins de l'endroit dans son jeu. Deux de ces Bédouins vinrent faire un faux rapport au pharaon et l'attirèrent, lui et toute son escorte, dans un guet-apens dont il ne se tira que par des prodiges de valeur. La victoire lui resta finalement et Khitisar demanda la paix. Mais la guerre ainsi rallumée en pays cananéen ne prit pas fin de sitôt. Fomentée par le roi de Khiti, elle dura jusqu'à ce, que les deux puissances également fatiguées éprouvèrent spontanément le besoin d'une paix définitive. Elle fut signée l'an XXI du règne de Ramsès. Le texte du traité nous a été fort heureusement conservé, grâce à la coutume épigraphique d'alors, qui faisait des murailles des temples de véritables archives. L'alliance qui garantissait les nombreuses clauses de cet acte fut quelque temps après consolidée par un mariage politique. Ramsès épousa la fille aînée de Khitisar et entretint des rapports d'amitié avec son beau-père qui se décida à faire le voyage d'Égypte. Une stèle commémorative fut gravée en l'honneur de cet heureux événement qui fait le plus singulier contraste avec les épithètes injurieuses que les princes de pays étrangers ne manquaient alors jamais de se décerner dans les actes de chancellerie. 
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Ramsès II face à Horus.  (Source : bigfoto.com).

Les « Peuples de la mer ».
Les quarante-six années de paix qui s'écoulèrent entre la fin des hostilités et la mort de Ramsès furent suivies d'une période de troubles qui fit perdre à l'Égypte le fruit de ses dernières conquêtes. Un des résultats du long règne de Ramsès II avait été d'user de son vivant toute une série d'héritiers présomptifs et d'élever au trône un prince déjà vieux, Merenptah (Menephtah), son treizième fils. L'an V de son règne, le Delta eut à subir une nouvelle invasion des peuples de l'Asie Mineure, connus sous le nom de «-Peuples de la mer ». Aux Tyrrhéniens, aux Shardanes et aux Syriens que Ramsès avait déjà défaits s'étaient joints des tribus nouvelles, les Akaiousha (Achéens) et les Shakalousha (Sicules). Ils avaient débarqué chez leurs alliés de Libye et s'étaient avancés jusqu'à Prosopis. La vaillance des troupes de Merenptah qu'un songe empêcha d'assister à la bataille conjura le danger.

Les « Peuples de la mer » furent battus et l'Égypte délivrée d'une invasion qui, si elle s'était produite vingt ans plus tard, auraient pu singulièrement changer la face des choses. Le peu de monuments de toute nature qui nous sont parvenus de cette époque nous montrent en effet l'Égypte gouvernée par des princes sans autorité qui laissent usurper presque toute l'étendue de leurs pouvoirs par des vice-rois ou des ministres. Des collatéraux, au mépris de la règles successorales, s'intercalent entre le règne d'un père (Mereptah) et de son fils (Seti II). L'autorité éphémère de ces princes s'étendait-elle au moins sur toute l'Égypte? C'est fort douteux. En tous cas, la Syrie, délivrée par ses garnisons égyptiennes, rappelées en toute hâte par Mereptah, s'est affranchie du tribut. 

L'usurpation d'un chef syrien, «Arisou qui fut chef parmi les princes des nomes et força le pays entier à prêter hommage devant lui », mit fin à la XIXe dynastie.

La XXe dynastie

La XXe dynastie, qui commence avec le bref règne de Sethnakht ou Nekthseti (1196-1194), et se poursuit par la série ininterrompue des Ramsès numérotés de III à XI (Ramessides), va nous faire assister à la ruine de la puissance thébaine. Sans doute Ramsès III, fils de Nekthseti, qui avait renversé l'usurpateur Arisou et rétabli avec la légitimité la paix en Égypte, eut-il un règne au bilan relativement positif. A l'exemple des grands souverains de la XVIIIe et de la XIXe dynastie, et surtout de Ramsès II, qu'il s'était donné comme modèle, il avait fait plus que conjurer les dangers dont le Delta fut menacé du fait des Libyens et des confédérés d'Asie Mineure. Après avoir repoussé une première invasion des Shasou du désert arabique, deux invasions libyennes et, dans l'intervalle, une troisième attaque des Tyrrhéniens, des Shakalash et des Danaens, ralliés au prince du Khiti, venus par terre et par mer jusqu'à Raphia, il avait restauré la suzeraineté des pharaons sur la Syrie, concédé des territoires aux Masbouasha à l'Ouest et aux Pelishti à l'Est de la frontière égyptienne, et intéressé ainsi à la prospérité du pays des tribus turbulentes qui, dès lors, combattirent dans les rangs de ses légions; il avait repris l'exploitation des mines du Sinaï, et, comme la reine Hatchepsout, envoyé ses flottes jusqu'aux rives lointaines du Pount et du To-Nouter. Mais, victorieux au dehors, il n'avait pu faire disparaître au dedans les germes de décomposition qui, depuis plus d'un siècle, travaillaient profondément l'Égypte. 

Au milieu du désarroi général, résultat de plusieurs siècles de guerres qui avaient modifié les caractères et les moeurs, une seule puissance était restée debout et, à la faveur des circonstances, en était venue d'empiétements en empiétements à balancer l'autorité royale; c'était le haut clergé de Thèbes. Déjà le premier prophète d'Amon, Nekhtou, s'était élevé à une sorte de souveraineté spirituelle à côté de Ramsès IV et de ses successeurs éphémères; son fils Amenhotep n'en laissa rien perdre. Quand le dernier des Ramsessides mourut, en 1070, le grand prêtre Hrihor, successeur d'Amenhotep qui s'était, du vivant du roi, fait décerner le titre princier de vice-roi de Nubie, prétendit à la royauté, et, fort de son union avec la reine Nodjemit, usurpa le cartouche, tout en conservant comme nom d'intronisation le titre sacerdotal. Le roi-prêtre Hrihor-Siamon ne semble pas avoir joui longtemps de la pleine souveraineté sur toute l'Égypte. Le Delta qu'il avait favorisé lui-même, à l'exemple des rois de la XIXe dynastie, lui suscita un concurrent, Nsibindid ou Smendès (le Mendès de Manéthon) qui l'emporta et installa sur le trône de Tanis, élevée au rang de capitale, la XXIe dynastie. Ainsi commence, selon la terminologie habituelle, la troisième période intermédiaire, qui sépare dans l'histoire égyptienne le Nouvel Empire de la Basse Époque. (Georges Bénédite).

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