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L'histoire de la Centrafrique
Les premières traces d'occupation humaine en Centrafrique remontent à plusieurs millénaires avant notre ère. Les Pygmées sont considérés comme les premiers habitants de la région. Au fil des siècles, ils sont rejoints par des populations bantoues venues du sud et de l'est, ainsi que par des groupes nilotiques et soudanais venant du nord. Ces populations se répartissent en fonction des conditions climatiques et des ressources disponibles, créant ainsi une grande diversité ethnique et culturelle.

À partir du IXe siècle, des migrations importantes en provenance de l'ouest et du nord conduisent à l'installation de nouvelles populations dans la région. Les Zandé, venant de l'ouest (actuel Soudan du Sud), établissent des royaumes dans le nord-est de la Centrafrique au XVIIIe siècle. Ils fondent des États structurés, dirigés par des rois (appelés sultans), qui dominent les régions environnantes.

D'autres groupes, comme les Banda et les Gbaya, migrent vers le centre et le sud de la région, où ils développent des communautés agricoles. Ces sociétés étaient essentiellement organisées en chefferies et en clans, avec des systèmes politiques décentralisés.

À partir du XVe siècle, la région centrafricaine est progressivement intégrée dans les réseaux commerciaux transsahariens et, plus tard, dans les circuits atlantiques. Le commerce des esclaves devient une activité majeure, notamment avec les royaumes voisins comme le royaume de Baguirmi (actuel Tchad) et le sultanat de Darfour (actuel Soudan). Ces royaumes organisent des razzias pour capturer des esclaves dans les régions situées au sud, notamment en Centrafrique, pour les revendre aux commerçants arabes et européens. Le nord de la Centrafrique subit particulièrement les incursions des marchands d'esclaves arabes, venant notamment du Soudan et du Tchad. Ces raids affaiblissent les sociétés locales et créent une instabilité chronique dans la région.

Avant la colonisation européenne, la région centrafricaine est sous l'influence de puissants empires et royaumes voisins, comme l'empire du Kanem-Bornou au nord et le royaume du Kongo au sud. Bien que ces empires n'aient jamais totalement contrôlé le territoire centrafricain, leur influence culturelle, religieuse et commerciale se fait sentir, notamment à travers l'islam qui pénètre le nord de la région.

À la fin du XIXe siècle, la région centrafricaine devient un enjeu pour les puissances coloniales européennes dans le cadre de la course au territoire en Afrique. Les explorateurs français, belges et allemands commencent à pénétrer dans l'intérieur des terres à la recherche de nouvelles colonies. Pierre Savorgnan de Brazza est l'un des premiers à établir des contacts dans la région.

En 1889, la France établit un poste à Bangui, ce qui marque le début de la colonisation formelle. Les rivalités entre les puissances coloniales aboutissent à la Conférence de Berlin (1884-1885), où la région est finalement attribuée à la France. Le territoire est intégré à l'Afrique équatoriale française (AEF) sous le nom d'Oubangui-Chari, formant la base de la future République centrafricaine.

A partir de 1911, la France a modelé son administration de la colonie, au sein du cadre plus vaste de l'Afrique Equatoriale française, sur le modèle du Congo belge, sous-traitant le contrôle du territoire à des entreprises privées qui collectaient le caoutchouc et l'ivoire. Bien que la France ait interdit la traite domestique des esclaves en Centrafrique dans les années 1910, les entreprises privées ont continué à exploiter sans scrupule la population par le travail forcé. Pour mettre fin au scandale causé par ces pratiques, l'Oubangui-Chari fut transformé en territoire français d'outre-mer. Il acquit une autonomie interne en 1956 et obtint son indépendance de la France sous le nom de République centrafricaine en août 1960. Capitale : Bangui.

Mais la mort du leader indĂ©pendantiste Barthelemy Boganda, six mois plus tĂ´t a conduit Ă  une lutte immĂ©diate pour le pouvoir. L'histoire politique du pays n'a cessĂ© ensuite d'ĂŞtre entachĂ©e par une sĂ©rie de coups d'État, dont le premier  (31 dĂ©cembre 1965) renversa le second prĂ©sident du pays, David Dacko, qui s'Ă©tait rapprochĂ© de la Chine communiste, et amena au pouvoir en 1966 Jean-Bedel Bokassa, un ancien sous-officier de l'armĂ©e coloniale française.

Le régime dictatorial de Bokassa était caractérisé par une corruption généralisée et une intolérance à l'égard de l'opposition, qui s'est manifestée par la disparition de nombreux opposants. En 1976, dans le but de prolonger son mandat, Bokassa s'est lui-même sacré empereur, s'est fait appeler Bokassa Ier, et a changé le nom du pays en Empire centrafricain.

La mauvaise gestion économique de son régime a débouché sur des manifestations étudiantes généralisées au début de 1979. Elles ont été violemment réprimées par les forces de sécurité. Selon Amnesty International, Bokassa aurait participé lui-même au massacre of 80 écoliers et étudiants. Tombé en disgrâce auprès de la communauté internationale, il sera bientôt renversé par un coup d'État activement soutenu par la France (opération Barracuda), qui, jusque là, avait fait montre d'une complaisance sidérante pour ce personnage. Après le départ de Bokassa, le nom du pays est redevenu la République Centrafricaine.

David Dacko, qui avait été renversé par Bokassa en 1966, est réinstallé au pouvoir avec l'aide de la France. Sous la présidence de David Dacko, le pays reste instable. En 1981, il est renversé par un coup d'État militaire mené par le général André Kolingba. Kolingba instaure un régime autoritaire dominé par son ethnie, les Yakoma. Pendant son règne, il consolide son pouvoir en écartant ses opposants politiques et en instaurant un régime à parti unique. Face à la pression internationale pour la démocratisation, Kolingba accepte que se tienne en 1987 un premier scrutin est afin d'élire une assemblée nationale restant sous un régime de parti unique, et c'est seulement en 1991, qu'il concède le multipartisme. Cependant, les élections de 1992 sont annulées en raison de fraudes massives. Finalement, des élections transparentes ont lieu en 1993, où Ange-Félix Patassé, un opposant de longue date, est élu président.

La présidence de Patassé est marquée par des difficultés économiques, des tensions ethniques et des rébellions militaires. Patassé, originaire du nord du pays, est rapidement confronté à des mutineries de l'armée, principalement composée de Yakoma, fidèles à Kolingba. Entre 1996 et 1997, trois mutineries successives plongent le pays dans une quasi-guerre civile. En 1997, une force d'interposition africaine, la Mission interafricaine de surveillance des accords de Bangui (MISAB), est déployée pour rétablir l'ordre. En 1999, Patassé est réélu, mais son second mandat est également perturbé par des crises politiques et économiques.

En 2003, François BozizĂ©, ancien chef d'Ă©tat-major de PatassĂ©, mène un coup d'État avec l'appui de l'armĂ©e tchadienne. PatassĂ© est renversĂ© et s'exile. BozizĂ© suspend la constitution. Il organise des Ă©lections en 2005 qu'il remporte, mais son rĂ©gime fait face Ă  de nombreux dĂ©fis, notamment des rĂ©bellions armĂ©es dans le nord du pays. Le rĂ©gime de BozizĂ© est marquĂ© par l'incapacitĂ© Ă  stabiliser le pays. 

Ă€ partir de 2006, plusieurs groupes rebelles, insatisfaits de la gestion du pouvoir, prennent les armes. En 2012, une coalition rebelle appelĂ©e la SĂ©lĂ©ka, majoritairement composĂ©e de musulmans du nord-est, se forme et lance une offensive contre le rĂ©gime de BozizĂ©. En mars 2013, la SĂ©lĂ©ka prend la capitale Bangui et BozizĂ© s'exile. Michel Djotodia, chef de la SĂ©lĂ©ka, se proclame prĂ©sident, devenant ainsi le premier chef d'État musulman du pays. Cependant, son rĂ©gime se montre incapable de contrĂ´ler les violences gĂ©nĂ©rĂ©es par la coalition. Au contraire, les abus gĂ©nĂ©ralisĂ©s de la SĂ©lĂ©ka stimulent la formation de groupes d'autodĂ©fense principalement chrĂ©tiens et animistes qui se sont appelĂ©s les anti-Balaka. Ceux-ci commettent Ă©galement des atteintes aux droits humains contre les populations musulmanes en reprĂ©sailles. 

La situation dégénère en un conflit religieux et ethnique de grande ampleur. En 2014, sous la pression internationale, Michel Djotodia démissionne et une transition politique est mise en place, dirigée par Catherine Samba-Panza. La France lance l'opération Sangaris pour tenter de rétablir la paix, tandis que la MINUSCA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique) est déployée pour protéger les civils.

En 2016, des Ă©lections sont organisĂ©es et Faustin-Archange TouadĂ©ra est Ă©lu prĂ©sident. Bien que la situation se stabilise partiellement Ă  Bangui, de vastes zones du pays restent hors du contrĂ´le de l'État, sous la domination de groupes armĂ©s. MalgrĂ© les efforts de rĂ©conciliation et les accords de paix signĂ©s avec divers groupes armĂ©s, la RCA reste en proie Ă  des violences sporadiques. Des coalitions rebelles continuent de dĂ©fier le pouvoir central, et la crise humanitaire persiste, avec des millions de dĂ©placĂ©s internes et de rĂ©fugiĂ©s. 

Depuis 2018, le groupe paramilitaire russe Wagner soutient le gouvernement du prĂ©sident Faustin-Archange TouadĂ©ra en formant les forces armĂ©es locales et en protĂ©geant les personnalitĂ©s politiques. En Ă©change, Wagner a obtenu des concessions pour exploiter des mines de diamants et d'or. Le groupe joue Ă©galement un rĂ´le clĂ© dans la sĂ©curisation de Bangui et dans les opĂ©rations militaires contre les groupes rebelles. En 2020, TouadĂ©ra est reconduit Ă  la prĂ©sidence, mais les Ă©lections sont marquĂ©es par des violences et des contestations. Les dĂ©fis sĂ©curitaires et Ă©conomiques continuent de peser sur la stabilisation du pays. Un accord de paix signĂ© en fĂ©vrier 2019 entre le gouvernement et les principales factions armĂ©es n'a eu que peu d'effet, et les groupes armĂ©s contrĂ´lent toujours de larges pans du territoire de la Centrafrique. 

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