|
Guillaume de Champeaux
est un philosophe scolastique, né
à Champeaux (Seine-et-Marne) vers la fin du XIe
siècle, mort en 1121. Dans la lutte engagée au Moyen âge
entre le réalisme et le nominalisme
(Universaux),
il prit parti pour le premier et eut l'honneur de compter parmi ses adversaires
son plus illustre élève, Abélard.
Découragé par les succès de son rival, il abandonna
l'école qu'il avait fondée à Paris
et se retira, dès 1108, dans un faubourg de la capitale, près
d'une chapelle consacrée à saint Victor où il créa,
en 1113, la célèbre abbaye
de ce nom. Il ne resta pas longtemps inactif et reprit son enseignement
dans cette retraite jusqu'au moment où il fut élevé
au siège épiscopal de Châlons, quelques mois après.
Le réalisme de Guillaume de Champeaux
n'était pas aussi accentué que celui de Jean
Scot Erigène, ni même que celui de saint
Anselme; il était plus éclairé, plus scientifique.
Guillaume est considéré par tous les historiens de la philosophie
comme le premier dialecticien de la secte réaliste.
Le premier et le dernier mot de son système est que toute conception
de l'intellect correspond nécessairement à une réalité;
que l'idée la plus générale est la représentation
vraie de la substance la plus générale, de même que
l'idée la plus particulière est l'image exacte de ce qu'il
y a, dans la nature, de plus individuel; mais comme l'un se pose avant
le multiple, l'un est le grand être, l'être unique, lequel,
capable de recevoir les contraires, revêt la forme de toutes les
individualités et leur communique tout ce qu'elles ont d'essence.
C'est sur cette thèse que la dispute
s'engagea. On prouva à Guillaume de Champeaux que la science des
êtres ne peut avoir un fondement aussi chimérique; que, d'une
part, les personnes reçoivent leur nom de ce qui constitue leur
individualité et que si, d'autre part, les choses dépourvues
de raison prennent des noms communs, cette communauté de nom n'implique
pas assurément une communauté de substance. Guillaume sentit
la nécessité de modifier sinon le fond même, au moins
les termes de sa doctrine. Il déclara que la chose n'était
pas, sous chaque individu, la même essentiellement, mais la même
individuellement (non essentialiter sed individualiter) ou, comme
porte une autre leçon, indifféremment (indifferenter).
Victor Cousin,
dans son Introduction aux oeuvres inédites d'Abélard,
explique ainsi cette seconde leçon :
«
L'identité des individus d'un même genre ne vient pas de leur
essence même, car cette essence est différente en chacun d'eux,
mais de certains éléments qui se retrouvent dans tous ces
individus sans aucune modification, indifferenter. »
Les seuls ouvrages imprimés de Guillaume
de Champeaux sont deux traités ayant pour titre Moralia abbreviata
et De Origine animae et un fragment sur l'Eucharistie
inséré à la suite des oeuvres de saint
Bernard. Les manuscrits découverts par Ravaisson
dans la bibliothèque de la ville de Troyes, ne présentent
que peu d'intérêt philosophique. La plupart des courts fragments
qu'ils renferment sont théologiques. (Alfred Gary).
|
En
bibliothèque - B. Haureau,
De la Philosophie scolastique; Paris, 1850, 2 vol. in-8. - V.
Cousin, Fragments de philosophie scolastique; Paris, 1865 et
1866, dans l'édit. in-8, en 5 vol. - Introduction aux ouvrages
inédits d'Abailard; Paris, 1844, in-4. - Dictionnaire des
sciences philosophiques, pp. 1805 et 1806. - E. Michaud, Guillaume
de Champeaux et les écoles de Paris au XIIe siècle, d'après
des docum. inédits; Paris, 1867, 2. édit., 1868. |
|
|