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Jean Callot est un héraldiste. Premier héraut d'armes du duché de Lorraine et de Barrois. II était avocat à la cour souveraine de Nancy en 1576, lorsqu'il succéda à son père dans la charge de héraut d'armes qui avait été possédée par son grand-père. Il est l'auteur du Recueil des armes et blasons de la noblesse de l'ancienne chevalerie de Lorraine et Barrois, ouvrage in-fol., entièrement gravé, qu'il dédia à M. du Chastellet, maréchal de Lorraine, et qui est devenu excessivement rare. Jean Callot est le père du graveur Jacques Callot, qu'il faisait travailler sous ses yeux, à la composition des armoiries. (G. de G.). | ||
Jacques Callot est un célèbre graveur et dessinateur français, né à Nancy en 1592, mort dans la même ville le 24 mars 1635. Fils du précédent, dont la famille était originaire de la Bourgogne, il montra de bonne heure un goût très vif pour le dessin, et reçut les premières notions de deux compatriotes honorablement connus dans l'histoire de l'art, Claude Henriet et Jacques Bellange, et de Demange-Crocq, graveur des monnaies du duc de Lorraine; mais, tourmenté du désir de voir l'Italie et de s'inspirer directement de l'exemple des grands maîtres, il partit à pied pour Rome en 1604, avec une bande de bohémiens qu'il abandonna dès qu'il fut parvenu au terme de son voyage. Il passa presque aussitôt à Florence où il reçut les conseils de Remigio Canta-Gallina. Reconnu à Rome par des marchands lorrains et ramené par eux au pays natal, Callot échappa une seconde fois à la surveillance paternelle; cette fois, il ne dépassa pas Turin et se soumit bon gré mal gré aux remontrances de son frère Jean, qui l'y avait rejoint. La copie d'un portrait de Charles III (1607) lui valut enfin l'autorisation de se livrer en toute liberté à sa vocation. Il fit, en 1609, un troisième voyage en Italie, ou il accompagna l'ambassade envoyée par Henri Il de Lorraine pour notifier au pape son avènement. Il devint à Rome l'élève d'un graveur français, Philippe Thomassin, qui l'employait à des copies d'après Sadeler et d'autres artistes; mais, pour couper court aux soupçons que Thomassin avait conçus touchant les sentiments de sa femme à l'égard de son jeune compatriote, Callot résolut de se fixer à Florence où il séjourna jusqu'en 1622. Pensionnaire de Côme Il de Médicis et admis dans l'atelier de Giulio Parigi, il grava dès l'année 1612 la série en quinze planches de la pompe funèbre de Marie-Marguerite d'Autriche, femme de Philippe Ill d'Espagne et belle-soeur de Côme II. Callot adopta pour ces planches le procédé de l'eau-forte qui lui convenait mieux que le burin dont il usa pour un certain nombre de sujets de piété d'après André del Sarto, Titien, Stradan, oeuvres médiocres où rien ne trahissait encore sa future originalité. A cette même période de tâtonnements se rattachent diverses estampes des fêtes célébrées à Florence en l'honneur du duc d'Urbin (1615) et des Intermèdes (1616-1647), toujours d'après son maître G. Parigi. Jacques Callot (1592-1635) Callot avait vingt-quatre ans quand il mit au jour sa spirituelle suite des Bossus (Varie figure Gobbi) et ses Caprici di varie figure qui ne comportaient pas moins de quarante-huit scènes ou personnages et auxquels succédèrent diverses pièces officielles, telles que la Bataille des Tisserands et des Teinturiers sur l'Arno (1619) et les Obsèques de l'empereur Mathias (id.). L'année suivante, la grande planche connue sous le titre de l'Impruneta ou de la Foire de Florence vint mettre le sceau à sa réputation. « C'est, a dit Mariette, un tableau accompli de tout ce qui se peut imaginer pour exprimer un grand concours de peuple occupé à une infinité d'actions différentes. »Malgré les succès qu'il avait obtenus à Florence, Callot résolut, après la mort de Côme Il (1622), de revenir chez lui et s'y maria (1625) avec Catherine Kuttinger, de Marsal. Appelé à Bruxelles par l'infante Elisabeth-Claire-Eugénie d'Autriche, il y grava en six planches l'historique du siège de Breda et quatre vues de Bruxelles et de ses environs, employées plus tard à l'ornement d'un plan de cette ville devenu très rare. C'est pendant son séjour dans les Flandres que Van Dyck peignit son portrait dont le burin de Vorstermann a fidèlement rendu l'élégance. Lorsqu'en 1631, Nancy dut capituler devant l'armée française, Callot refusa énergiquement de retracer sur le cuivre ce douloureux épisode et mérita, par sa résistance même, les éloges du roi qui l'en avait sollicité. Le chagrin que lui causa le dénouement de cette lutte inégale et une maladie d'estomac due à son assiduité au travail, hâtèrent sa fin. Il s'éteignit à quarante-trois ans, sans postérité. Peu d'artistes français ont joui de leur vivant et après leur mort d'une célébrité aussi incontestée que Callot. « Il ne paroistra pas si tôt un pareil homme, », écrivait Mariette sur les marges de l'Abecedario d'Orlandi, et ce jugement d'un curieux de grand goût, mais le plus souvent sévère jusqu'à l'injustice pour ses compatriotes, n'a jamais été infirmé. Sans doute il est des parties de l'oeuvre de Callot qui ne nous causent plus le plaisir qu'elles procuraient aux amateurs des derniers siècles. Quand Mariette encore nous assure que dans les sujets grotesques « le ridicule est si bien marqué qu'on ne se peut tenir de rire en les voyant », on nous permettra de croire que la fibre moderne se défend moins aisément, mais nous sommes pleinement d'accord avec Mariette lorsqu'il protestait contre l'assimilation du nom et du talent de Callot avec tout ce qui est « hideux ou burlesque », assimilation, pour le dire en passant, qu'on retrouve aussi bien sous la plume de Gresset que sous celle de Victor Hugo. Callot, pas plus que Daumier ou Charlet, n'est, à proprement parler, un caricaturiste, c'est un peintre de moeurs. Ses gueux si pittoresquement délabrés, ses estropiés si lamentables, ses gentilshommes et ses capitans d'une si fière tournure sont plus précieux que de simples documents iconographiques sur une période déterminée de l'histoire : ils incarnent, sous leurs pourpoints ou leurs guenilles l'éternel orgueil et l'éternelle misère de notre humanité. Les Misères de la guerre, les Supplices émeuvent en nous le sentiment douloureux qu'ils devaient éveiller chez les contemporains de Callot, tant est profond cet accent de vérité qui l'inspirait. Pour lui, d'ailleurs, il n'est pas de genre « noble », point de préoccupations académiques : il rend ce qu'il a vu ou ce qu'il veut dire avec les modèles qui lui tombent sous la main, et de la plus humble réalité il dégage une poésie pénétrante, comme dans la charmante pièce connue sous les nom du Benedicite, inspiration naïve bien supérieure, selon nous, à ses plus célèbres diableries et nommément à cette Tentation de saint Antoine, si connue, où l'artiste s'est évertué à rassembler toutes les formes du cauchemar; traduites d'une pointe correcte et toujours maîtresse d'elle-même, elles font songer aux inventions troublantes et pénibles d'un autre Nancéien, J.-J. Grandville. Les procédés matériels mêmes employés par Callot accentuent encore cette précision singulière dans le fantastique le plus abracadabrant. Il avait en effet substitué au vernis mou des graveurs le vernis dur des luthiers qui, en lui permettant de travailler simultanément, paraît-il, à plusieurs planches, assuraient à celles-ci une conservation pour ainsi dire indéfinie. A sa mort il fut fait deux lots de ses oeuvres : l'un passa des mains d'Israël Henriet à son neveu Israël Silvestre; celle qui échut à Jean Callot, frère de l'artiste, parvint à une arrière-petite-nièce, Mme de Graffigny, auteur des Lettres péruviennes. La tradition veut que, dans un moment de détresse, elle ait vendu ces cuivres à un chaudronnier, et que vers la fin du XVIIIe siècle M. de Craon ait possédé une cuvette taillée dans l'un d'eux. Les planches provenant de Henriet et de Sylvestre sont, après des fortunes diverses, rentrées pour la plupart à Nancy; mais elles ne fournissent plus que des tirages indignes de l'amateur le moins difficile. Si les belles épreuves de Callot sont rares, ses dessins authentiques ne sont pas communs non plus. Il existe cependant, et par centaines, des croquis à la plume ou à la sépia classés sous son nom au Louvre, à Rouen (collection Leber), au musée Wicar à Lille, à Florence, à Vienne, etc. Mais pour des juges exercés, bon nombre de ces dessins sont l'oeuvre des copistes et des faussaires que devait tenter la popularité de Callot; néanmoins le Louvre en possède une soixantaine, et la galerie des Uffizi de Florence près de trois cents qui paraissent hors de toute contestation. Plus encore que les dessins, les peintures mises sous le nom de Callot ont éveillé le scepticisme de la critique moderne. Vainement alléguera-t-on que le Louvre conserve de sa main l'esquisse peinte d'un Martyre de saint Sébastien (provenant de Mariette et non exposée, ainsi d'ailleurs que ses autres croquis), vainement la galerie des Uffizi fait-elle figurer dans sa célèbre série des artistes peints par eux-mêmes un portrait de Callot, il n'est pas moins vraisemblable que les tableaux exposés à Rome, à Florence, à Venise, à Nancy, sont de simples copies et l'on va même jusqu'à nommer le principal auteur de cette entreprise, Jacob Heusch, dont le faire se rapproche singulièrement de la sécheresse de dessin et de la couleur criarde de ces prétendus originaux. Il est à noter d'ailleurs qu'aucun contemporain de Callot ne fait allusion à son talent de peintre et que l'épitaphe pompeuse du tombeau érigé au couvent des Cordeliers n'en souffle mot. Un iconophile, dont le nom est désormais inséparable de celui de Callot, Edouard Meaume, a combattu en toute occasion une légende qui, selon lui, nuisait plus à la gloire de son maître préféré qu'elle ne la servait. L'un des portraits les plus fréquemment cités des Caractères de La Bruyère est celui de Démocède, le curieux d'estampes, dans lequel on a voulu voir Michel de Marolles ou plus vraisemblablement M. de Béringhen : « J'ai tout Callot, dit Démocède, hormis une seule qui n'est pas, à la vérité, de ses bons ouvrages; au contraire, c'est un de ses moindres, mais qui m'achèverait Callot. Je travaille depuis vingt ans à recouvrir cette estampe, et je désespère enfin d'y réussir : cela est bien rude ! »Le nom de Callot n'avait pas été choisi au hasard par La Bruyère : son oeuvre était de ceux que devait posséder en première ligne tout cabinet sérieux. Marolles, Béringhen (vulgairement appelé M. le Premier, c. -à-d. le premier écuyer du roi), Mariette, Quantin de Lorangère, avaient donné ou suivi l'exemple. Le catalogue rédigé par Gersaint (1741), pour la vente de Lorangère, et un autre catalogue publié à Londres (1804), et attribué à Claussin, sous le pseudonyme de Green, ont longtemps été les seuls guides des collections de Callot : ils ont été bien dépassés par le travail de Meaume, auquel on ne peut reprocher, outre quelques omissions ou erreurs inévitables en pareil cas, que l'absence d'un index général destiné à abréger singulièrement les recherches. L'oeuvre de Callot, tel que Meaume est parvenu à le reconstituer, comporte près de quinze cents numéros (images de piété, figures de l'Ancien et du Nouveau Testament, fantaisies, vues topographiques, scènes historiques, portraits, allégories, frontispices, armoiries, etc.), tant en originaux qu'en copies ou contrefacons et qu'en pièces douteuses ou perdues aujourd'hui. Le portrait de Callot a été gravé deux fois de son vivant : par Vorstermann, d'après Van Dyck, ainsi qu'il a été dit plus haut (la planche appartient, comme toutes celles de la même série, à la chalcographie du Louvre), et par Michel Lasne (1629). Une autre effigie (posthume), surmontant l'épitaphe du tombeau des Cordeliers de Nancy, est due à la collaboration d'Abraham Bosse et d'Israël Henriet. (Maurice Tourneux). |
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