Rouages | Les passages de Vénus A l'époque où Vénus est conjonction intérieure, elle peut produire une espèce d'éclipse annulaire ou plutôt nous cacher une petite portion circulaire du Soleil. Mais il ne suffit pas que la planète soit en conjonction; il faut encore (comme pour les éclipses produites par la Lune) que l'astre soit très près du plan de l'écliptique et par conséquent de l'un de ses noeuds. Alors la planète apparaît sur le disque du Soleil comme une tache noire parfaitement ronde, qu'il est impossible de confondre avec les taches propres du Soleil. Celles-ci sont ordinairement entourées d'une pénombre; leurs contours très irréguliers se rétrécissent dans un sens, par un effet de perspective (projection orthographique), quand les taches se rapprochent des bords du Soleil; enfin elles mettent 14 jours à aller d'un bord à l'autre, de l'Est à l'Ouest. Vénus, au contraire, traverse le disque entier du Soleil en 5 ou 6 heures (aussi de l'Est à l'Ouest, parce que son mouvement apparent est alors rétrograde); elle va, avec la même vitesse, d'un bout à l'autre de la corde qu'elle décrit sur le Soleil; son disque noir est parfaitement rond, sans pénombre, et conserve la même forme sur les bords comme au milieu du Soleil. Les passages de Vénus se reproduisent périodiquement comme les éclipses de Soleil par la Lune, bien qu'ils soient beaucoup plus rares. On on en calcule le moment et les circonstances par des procédés analogues. Comme Vénus ne circule pas en réalité sur l'écliptique, mais sur un plan incliné à celui-là d'environ 3° 25' 31", le phénomène que nous venons de décrire n'a pas lieu lui non plus à toutes les conjonctions inférieures; il s'en faut de beaucoup; il arrive cependant quelquefois. Quand la planète, à la conjonction inférieure, arrive sur le cercle de latitude du Soleil, la ligne qui va de la Terre à Vénus, au lieu de coïncider comme nous l'avons supposé, font un angle qui varie de 0° à 3° 23' 31 ". Quand cet angle, qui mesure alors la latitude de Vénus, est nul, c'est-à-dire quand la planète, à la conjonction inférieure, arrive à l'un de ses noeuds sur l'écliptique, le phénomène en question a lieu : Vénus passe sur le Soleil et décrit à très peu près un diamètre du disque solaire : c'est ce qu'on appelle un passage central; il dure près de huit heures, comme ce fut le cas en 1153. Quand, à l'époque de la conjonction, l'angle qui mesure latitude de Vénus, sans être nul, est moindre que le demi-diamètre apparent du Soleil, il est évident que la planète doit passer sur le Soleil; mais alors le petit cercle noir, au lieu d'un diamètre du disque, parcourt une corde plus ou moins éloignée du centre. Enfin quand la latitude de Vénus à la conjonction inférieure est plus grande que le demi-diamètre apparent du Soleil, il n'y a pas de passage. De plus, si les noeuds de Vénus étaient fixes sur l'écliptique, cet astre ayant passé une fois sur le Soleil, y passerait ensuite tous les 8 ans; car 8 fois 365 jours = 5 fois 584 jours ou 5 fois la durée de la révolution synodique de Vénus; de sorte que si Vénus se trouve à l'un des noeuds au moment d'une conjonction inférieure, elle s'y retrouverait 8 ans après, à la conjonction suivante. Mais les noeuds de Vénus ne sont pas fixes; de le l'irrégularité de la période des passages. Le dernier a eu lieu le 6 décembre 1882. Il n'y en a donc eu aucun au XXe siècle. Et après ceux du 8 juin 2004 et du 6 juin 2012, il faudra attendre jusqu'au 11 décembre 2117. Après un passage comme celui de 2004, il s'écoule 8 ans pour qu'il s'en présente un second; puis le troisième ne revient qu'après 113 ans 1/2 ± 8 ans, et ainsi qu'il suit : 8 ans, 121 ans 1/2, 8105 ans 1/2, etc. Le phénomène a lieu en décembre ou en juin (calendrier grégorien), époques auxquelles les longitudes du Soleil sont 255° ou 75°, c'est-à-dire celles des noeuds de la planète. Au cours des siècles passés, seulement cinq passages ont déjà été observés de façon certaine :le 4 décembre 1639, le 5 juin 1761, le 3 juin 1769, le 8 décembre 1874 et le 6 décembre 1882, les derniers, notamment, par un nombre considérable de missions scientifiques envoyées sur les différents points du globe ou le phénomène était visible. L'enjeu de ces expéditions était la détermination de la parallaxe du Soleil et, partant, des dimensions absolues du Système solaire. Jusqu'au XXe siècle, en effet, les deux seules possibilités pour faire cette mesure passaient par la détermination de la parallaxe de Mars ou de Vénus, lorsque ces deux planètes sont le plus près possible de la Terre (La distance des astres). A ce titre, toutes les conjonctions intérieures de Vénus seraient des instants favorables; mais, par des circonstances particulières dont nous ne saurions donner ici une complète, les conjonctions où Vénus se projette sur le Soleil sont, entre toutes, les plus avantageuses pour la précision des mesures. Ce sont les passages célèbres de 1761 et surtout de 1769 qu'on a surtout utilisés pour déterminer la parallaxe de Vénus par des observations faites sur le disque même du Soleil. (Les Passages de Vénus devant le Soleil). Les passages de Mercure
Presque tout ce que nous venons de dire à propos des passages de Vénus sur le Soleil s'applique évidemment à Mercure, qui passe aussi sur le Soleil. Simplement, Mercure, dont le diamètre apparent est environ cinq fois plus petit que celui de Vénus, peut être plus facilement, dans le champ d'un petit télescope d'amateur, confondu avec une tache solaire, même si ici encore, la netteté des contours du disque noir de la planète, et la brièveté du passage (quelques heures comme pour Vénus) permettent de lever aisément toute ambiguïté. Les passages de Mercure sont moins rares que ceux de Vénus, et sont pour beaucoup une occasion de voir enfin cette élusive planète, si difficile à repérer en temps ordinaire. Ils reviennent à des intervalles irréguliers, 13, 7, 10, 3, 10 et 3 ans. Les trois premiers et le cinquième de chaque cycle tombent d'ailleurs en novembre, le quatrième et le sixième en mai. Cependant, bien que plus nombreux que ceux de Vénus, les passage de Mercure devant le Soleil n'ont jamais été utilisés pour tenter de déterminer la parallaxe solaire, du fait de la trop grande proximité de la planète au Soleil, qui rend la méthode inopérante. (La Découverte de Mercure). | |