| Antonio Bregno, dit le Rizzo, est un architecte et sculpteur, né à Vérone vers 1430, mort à Foligno le 14 mars 1498. Le surnom de Riccio ou Rizzo ( = le Frisé) a induit en erreur certaines personnes. Selvatico, par exemple, au lieu d'un seul artiste n'hésite pas à eu reconnaître deux. La vie presque tout entière de Bregno se passa à Venise où, avec raison, on le considère comme l'un des principaux champions de la Renaissance. Pietro Lombardo lui-même, qui dans l'histoire artistique tient une bien plus grande place, n'a fait que suivre son exemple. Les deux statues d'Adam et Eve qui se voient dans la cour du palais des Doges, vis-à-vis l'escalier des Géants, commencent la série des oeuvres connues de Bregno. Elles sont datées de 1462 et se distinguent surtout par la vérité des attitudes. En outre, les têtes ne manquent pas d'expression et le maître jouirait d'une plus grande renommée s'il eût persisté à nous donner d'aussi bonnes figures décoratives. Mais son tombeau du doge Nicolas Tron (mort en 1473), dans l'église des Frari, laisse beaucoup à désirer. On sent que trop de hâte a présidé à l'exécution des dix-neuf statues et des bas-reliefs plus nombreux encore, qui confusément s'entassent pour former un monument presque colossal. Bregno évidemment a dû de bonne heure se distinguer par quelques constructions importantes, car autrement on ne s'expliquerait pas, vers 1464, sa nomination au poste de directeur de la Bottega di Tajapiera, c.-à-d. de l'atelier où prenaient place tous les scarpellini et tous les scultori (tailleurs de pierre et ornemanistes), spécialement attachés au palais des Doges. Mais en l'absence de documents certains, nous ne voulons pas, comme Bernasconi, nous livrer à des conjectures. De ce que le nom de Pietro Lombardo, par exemple, à propos de San Giobbe (1451-1493), ait été trop légèrement mis en avant, il ne s'ensuit pas que celui de Bregno puisse être accepté. Et le même raisonnement s'applique à certains édifices élevés quelques années plus tard, tels que la Madonna dei Miracoli (1484-1489) et le palais Vendramin-Calergi (1484-1485). L'origine des uns et des autres est loin d'être sortie encore de la période d'obscurité. En 1474, les Turcs étant venus assiéger Scutari d'Albanie, les deux généraux chargés de défendre la place, Antoine Lorédan et Louis Quirini, s'adjoignirent Bregno comme ingénieur. Celui-ci rendit non seule ment de grands services dans ses nouvelles fonctions, mais encore il se distingua par une éclatante bravoure qui, à la suite d'une grave blessure, le força de retourner à Venise où le Sénat décréta qu'une pension lui serait servie durant vingt ans. Bregno, lorsque sa guéri son fut achevée, reprit-il la direction de l'atelier indiqué plus haut? Nous l'ignorons; toutefois la chose est probable, car, en 1483, nous le voyons, en qualité de principal architecte, commencer la reconstruction de l'aile orientale du palais des Doges, récemment détruite dans un incendie. Il reçoit même à cette occasion un traitement annuel de 125 ducats, bientôt porté à 200, ainsi que nous l'apprend un document. La Seigneurie voulait l'attacher aux devoirs de sa charge et elle en prenait les moyens. Mais ce sacrifice était loin de suffire à Bregno qui, durant plusieurs années, ne cessa d'appliquer à ses besoins personnels une partie des fonds dont la distribution lui était confiée. La vérité fut seulement connue en 1496 et c'est alors que, pour échapper à un châtiment mérité, eut lieu sa fuite à Foligno. - L'escalier des Géants (Palais des Doges, à Venise). Photo : © Odette Jodra, 2012. Cette fin déplorable ne saurait nous empêcher de rendre justice à Bregno. Principalement dans la façade du palais des Doges qui donne sur le canal de Canonica, il a fait preuve d'un grand talent et l'on admire, en même temps ne la sévère majesté de l'ensemble, l'exquise perfection des détails. C'est, du reste, la seule partie qui ait été entièrement reconstruite. Les étages inférieurs, du côté de la cour, montrent toujours leurs anciennes fenêtres que déguisent à peine des ornements dans le goût nouveau. Autant que possible on a cherché à dissimuler certaines irrégularités désagréables. L'escalier des Géants, qui est également de Bregno, contribue beaucoup à ce résultat. (Léon Palustre). | |
| Lorenzo Bregno est un sculpteur vénitien, né vers 1460, mort vers 1520. On le considère généralement comme un neveu ou un fils du précédent. Ses oeuvres connues sont 1° dans l'église des Frari, au-dessus de la porte de la sacristie, la mausolée de Benedetto Pesaro, généralissime des armées vénitiennes, tué à Corfou en 1503; 2° à Santa-Maria-Mater-Domini, trois statues (saint André, saint Pierre et saint Paul), sur le premier autel, à droite en entrant; 3° à San-Zanipolo (église des Saints-Jean-et-Paul), au-dessus de la porte du transept, le monument du condottiere Dionisio Naldo de Briseghella, mort en 1510. Quant aux deux statues d'Adam et Eve, qui se voient aujourd'hui au palais Vendramin-Calergi, après avoir longtemps orné le tombeau du doge André Vendramin (mort en 1476), dans la même église des Saints-Jean-et-Paul, c'est à tort, selon nous, qu'on les attribue à Lorenzo Bregno. Ce sculpteur était presque un enfant à l'époque où elles ont été exécutées. (Léon Palustre).. |