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James Bradley
est un astronome né à
Shireborn (Gloucestershire), en 1692, mort le 13 juillet 1762. Il est peu
d'hommes qui aient marqué leur place dans la science d'une manière
plus brillante que Bradley; il n'en est pas dont la vie ait été
plus exempte des tracasseries, des embarras, des angoisses qui trop souvent
ont signalé la carrière de ceux à qui la nature avait
accordé le génie.
Ses parents le destinèrent à
l'état ecclésiastique. Après avoir achevé ses
études à l'Université d'Oxford, il fut nommé
ministre de Bridstow, et ensuite de Welfrie, dans le comté de Pembroke;
mais un penchant naturel le portait à s'occuper d'astronomie. Son
oncle Pound, l'ami de Newton, l'encouragea dans
ce dessein, et lui donna des leçons de mathématiques, dont
il profita si bien, qu'il remplça Keill,
en 1721, comme professeur d'astronomie au collège de Saville, à
Oxford.
Antérieurement à celte époque,
Bradley avait présenté à la Royal
Society de Londres divers Mémoires d'astronomie. On voit
aussi dans le Recueil de même la Société, aux
dates da 1724 et de 1726, des observations d'une comète
et le calcul de différentes longitudes.
Rien ne révélait jusque-là le grand astronome qui
devait tant contribuer aux progrès de la science.
Après avoir pris part aux observations
que Molyneux avait commencées en 1725
à Kew, avec un secteur de Graham de 7,30
m, et qui furent interrompues par la nomination de ce savant à la
place d'un des lords de l'amirauté, Bradley voulut les compléter,
et dans cette vue il installa à Wansted un nouveau secteur de 3,05
m, avec lequel il fit sa belle découverte de l'aberration.
Cette découverte parut dans les Transactions philosophiques
de 1728, avec l'indication de sa cause physique.
En 1730, Bradley avait été
nommé professeur d'astromomie et de physique au muséum d'Oxford.
En 1741, il remplaça Halley à l'Observatoire
de Greenwich. Ce fut huit ans après, en 1748, qu'il publia dans
les Transactions philosophiques un mémoire sur la nutation,
complément de sa découverte de l'aberration.
Nous ne dirons rien ici de ses recherches
empiriques sur les satellites de Jupiter, ni même de ses travaux
sur les réfractions atmosphériques, qui, malgré tout
l'intérêt qui s'y rattacha, pâlissent à côté
des deux grandes découvertes de l'aberration et de la nutation [a].
Bradley consacra les vingt-deux années pendant lesquelles il fut
à la tête de l'Observatoire de Greenwich, à l'amélioration,
nous dirions presque à la refonte entière de cet établissement.
[a]
Ces deux découvertes ont une grande importance, car elles confirment
le système de Copernic, la démonstration
du mouvement de la lumière et la loi de l'attraction
universelle.
Après la mort de Bradley, ses héritiers
ayant considéré le recueil manuscrit des observations faites
dans l'Observatoire royal comme leur propriété, s'en emparèrent.
La Commission royale des longitudes leur intenta un procès; mais
afin de ne pas avoir le dessous dans la lutte judiciaire qu'ils avaient
provoquée, les héritiers se décidèrent à
faire présent des manuscrits, objets du litige, à l'université
d'Oxford. La publication de ces observations éprouva bien des retards
: elles ne virent le jour qu'en 1798. Bessel a
discutées dans ses Fundamenta astronomiae.
Un trait suffira pour donner une idée
du caractère de Bradley. On raconte que la reine d'Angleterre ayant
été un jour à Greenwich, apprit combien la place de
directeur était peu rétribuée, et manifesta l'intention
de faire attacher à ses fonctions un traitement plus convenable
: "Madame, lui dit Bradley, ne donnez pas suite à votre
projet; le jour où la place de directeur vaudrait quelque chose,
ce ne seraient plus les astronomes qui l'obtiendraient."
Bradley fut nommé associé
de l'Académie des sciences de Paris en 1748, et membre de la Société
royale de Londres en 1752. Les biographes français ont déduit
de la comparaison de ces deux dates la conséquence que le mérite
éminent de l'illustre astronome a été reconnu chez
nous plus tôt que dans sa propre patrie. Mais on a oublié
qu'on peut devenir associé de l'Académie des Sciences sans
qu'on soit obligé de se mettre sur les rangs, tandis qu'on n'arrive
à être un des cinq à six cents fellows of the Royal
Society, qu'après en avoir fait la demande expresse et s'être
engagé à fournir une certaine cotisation annuelle. Il y a
donc quelque chose à rabattre de la conséquence qu'on a tirée
de la nomination tardive de Bradley à la place de fellow de la Société
Royale de Londres. (Arago, c.1840). |
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