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L'armée d'Alexandre le Grand

Biographie L'armée d'Alexandre Le monde hellénistique La légende d'Alexandre Alexandre dans l'art
Vainqueur en Grèce, Alexandre s'était trouvé libre de reprendre ses projets d'attaquer l'Empire perse. Une entreprise d'une autre ampleur, car il  y avait, en apparence au moins, une étrange disproportion entre une pareille entreprise et les moyens dont il disposait pour l'exécuter. La Macédoine n'avait pas un trentième de l'étendue des États du grand roi; aux ressources et aux réserves du trésor de Suse, Alexandre n'opposait un trésor endetté; il fut obligé pour ses préparatifs emprunter 800 talents et quand il partit à peine lui en restait-il 60. 

Son point d'appui était la Macédoine avec ses annexes (Tymphée, région du Strymon, etc.), ses dépendances, les Etats vassaux des Péoniens et des Agrianes. Il exerçait une suzeraineté normale sur les peuples de l'Hémus au Danube (Triballes, Autariates, etc.) et sur les Illyriens; les Thessaliens ses alliés étaient dans sa main, l'Epire était simplement alliée. L'Hellade, entrée dans la confédération de Corinthe (sauf Sparte), ne lui donna que peu de secours; il ne lui en demanda pas plus, quoique la flotte d'Athènes par exemple (350 galères) eût pu lui être bien utile. Il préférait ne dépendre que de lui-même; la véritable force de la Macédoine était son armée de terre. L'armée de Philippe comptait 30,000 fantassins et 4000 cavaliers; Alexandre en laissa le tiers à Antipater, son vice-roi en Macédoine, comblant le vide avec les contingents alliés; il n'emmena guère plus de 30,000 fantassins et 5000 cavaliers. La supériorité de cette armée était donc tout entière dans son organisation.
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La bataille d'Issus entre les armées d'Alexandre et de Darius, par A. Altdorfer (détail, 1529).

Dans la tactique grecque l'infanterie pesamment armée, les hoplites, était l'arme principale; Iphicrate créant les peltastes, infanterie plus légère, prépara la défaite de Sparte. Ces deux corps sont aussi les deux principaux de l'infanterie macédonienne, sous le nom de phalange et d'hypaspistes. Les soldats de la phalange, moins chargés que les hoplites, portaient une sarisse, lance de 14 à 16 pieds, une courte épée, une cuirasse, un casque, des jambières, un bouclier rond. Ils étaient rangés sur 16 hommes de profondeur, en 6 bataillons ou taxeis, d'après un système de recrutement régional. Les hypaspistes ont comme les peltastes une cuirasse de lin, un bouclier léger, une lourde épée; c'est le corps d'élite; leur premier bataillon est l'Agêma, garde royale. La même distinction se retrouve dans la cavalerie : la grosse cavalerie est formée par la noblesse macédonienne et thessalienne groupée en escadrons ou Iles; le premier est l'Agêma de la cavalerie; les armes sont le casque, la cuirasse, l'épée et la pique. Viennent ensuite les contingents helléniques et les sarissophores macédoniens. A ces éléments fondamentaux Alexandre en ajouta un autre, jusque-là très négligé, les troupes légères proprement dites, incapables de résister seules, mais très utiles pour qui savait les utiliser. Il employa à ce service les populations du Nord et de l'Est de la Macédoine, montagnards, chasseurs et pillards, Thraces, Agrianes, armés du javelot (acontistes), archers macédoniens et crétois; il les mettait toujours au premier rang. Les Péoniens et les Odryses fournirent une cavalerie légère. Les corps d'alliés avaient des chefs macédoniens; quant aux valets pour les bagages et un par cavalier, ce qui avec une bête de somme donne un total de trois chevaux par cavalier combattant. Le tableau suivant, emprunté à Droysen, indique dans quelles proportions chaque corps figurait dans l'armée :

Cavalerie

Grosse cavalerie 
Hétaires macédoniens(8 Iles)
Thessaliens 
Alliés grecs 
1800
1200
400
 
Total 3400
Cavalerie légère 
Sarissophores macédoniens et Péoniens 
Odryses 
1200
600

Total : 1800

Total de la cavalerie 5200

Infanterie

Hoplites
Pézétaires macédoniens (phalange) 6 taxeis 
Alliés grecs 
Mercenaires 
9000
4000
6000
 
Total 19.000
Peltastes
Hypaspistes macédoniens (5 taxeis) 
Alliés grecs 
Mercenaires 
Acontistes (4 taxeis)
3000
1000
1000
4000

Total 9000
Armés à la légère
Archers macédoniens
Archés crétois 
Acontistes Agrianes 
500
500
1000

Total 2000

Total de l'infanterie 30 000

Total général 

35.200

Voici quel était l'ordre de bataille constant : au centre la phalange; à droite les hypaspistes, puis la cavalerie macédonienne, les sarissophores, les Péoniens, les Agrianes et les archers. Sur le flanc gauche, les Thraces (acontistes), les cavaliers hellènes et thessaliens, les Odryses, et, plus tard, un second corps d'archers. 

Trois innovations caractérisent l'armée d'Alexandre et contribuèrent à assurer sa supériorité :

1° l'emploi des troupes légères;

2° la proportion de la cavalerie; dans les armées grecques, il y avait très peu de cavalerie; Épaminondas en augmenta la proportion qu'il porta à 1/10 de l'effectif; Alexandre le porta à 1/6, il savait que la principale force des armées du grand roi était dans leur cavalerie; il lui fallait des troupes à la fois très solides et très mobiles; aussi les corps d'élite de son armée sont-ils sa grosse cavalerie et les hypaspistes, infanterie relativement légère;

3° la troisième grande nouveauté fut la création d'un véritable corps d'officiers, d'un état-major, recruté par des cadets qui servaient au roi de gardes du corps.

Il est enfin une chose qu'il ne faut pas oublier, c'est l'artillerie; Alexandre avait des ingénieurs et des machines très supérieures à celles des Perses et une de ses grandes supériorités tient à la manière dont il conduisit les sièges. Une armée peu nombreuse, admirablement exercée, mais à la fois très solide et très mobile, réunissant tous les avantages de la tactique grecque, voilà sur quoi comptait Alexandre quand il partit au printemps de 334 pour la conquête de l'Empire perse.

Une armée, qui était d'ailleurs bien plus qu'une armée, comme nous le rappelle Droysen :
« L'armée d'Alexandre n'était pas seulement un corps militaire, elle embrassait d'autres éléments, accomplissait d'autres fonctions; c'était tout un monde avec son caractère bien à lui. Le camp était aussi la cour; il comprenait l'administration centrale d'un immense empire, les plus hauts services civils, la trésorerie, l'intendance, le service des approvisionnements d'armes, de vêtements, de vivres, le service médical. A la suite on voyait des marchands, des fournisseurs et spéculateurs de toute sorte, bon nombre de littérateurs, des hôtes hellènes ou asiatiques, laïcs ou prêtres, certainement aussi des courtisanes, des prisonniers ou des otages. C'était une sorte de capitale ambulante de l'Empire. Les mille intérêts qui s'y croisaient, les rivalités, les intrigues, la perpétuelle succession de campements et de combats, de fêtes et de rudes campagnes, de superflu et de dénuement, de sévère discipline en campagne, de licence sans frein dans les cantonnements, le déplacement vers des pays toujours nouveaux, sans souci de l'avenir, tout cela contribuait à donner à l'entourage d'Alexandre un caractère aventurier et fantastique, qui convenait bien au merveilleux éclat de ses victoires. » (Droysen). 
De quels moyens Darius III, fils de Codoman, souverain de l'Empire perse, disposait-il pour lui résister? Sa monarchie était presque en dissolution, les satrapes étaient à peu près indépendants, chacun chez soi; l'Asie Mineure indifférente, l'Égypte prête à se soulever. La tactique des Perses était inférieure à celle des Grecs; l'expédition des Dix mille qui s'étaient promenés de l'Euphrate au Pont-Euxin avait révélé cette faiblesse. Néanmoins un Darius ler ou un Ochus aurait probablement repoussé le roi de Macédoine; le grand roi commandait de l'Iaxarte à la mer Egée, de l'Indus au désert Libyen; les populations guerrières de la Perse, de l'Ariane et de la Bactriane ne le cédaient guère en valeur aux soldats grecs; de plus l'expédition des Dix mille, en révélant la supériorité des Grecs, avait décidé le grand roi à en prendre à sa solde; c'est avec des mercenaires grecs qu'il avait reconquis l'Egypte et ses inépuisables trésors lui permettaient d'en lever autant qu'il serait nécessaire. Une armée de mercenaires grecs et de cavaliers de l'Asie orientale, commandée par un tacticien de l'école d'Iphicrate, pourrait au moins tenir en échec le jeune aventurier qui s'attaquait à la Perse. Darius, maître de la mer par ses 400 galères phéniciennes et chypriotes, pourrait facilement subventionner dans l'Hellade un soulèvement qui réduirait l'assaillant à la défensive. Tout cela était possible, mais il eût fallu le faire et on ne prit que des demi-mesures. Memnon le Rhodien, chargé d'organiser la résistance, arrêta et refoula les lieutenants d'Alexandre, l'arménien et Kalas; mais la jalousie des satrapes le paralysa; l'armée rassemblée, 20,000 mercenaires grecs et 20,000 cavaliers, était excellente mais sans chefs. (A. B.).
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Dictionnaire biographique
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