| Alcée est un poète lyrique grec, né à Mytilène, dans l'île de Lesbos, florissait vers l'an 604 av. J.-C. . De ses deux frères, Cicis et Antiménide, qui avaient aidé Pittacus à renverser le tyran Mélanchrus, le dernier s'était particulièrernent illustré en combattant pour les Babyloniens, et Alcée avait consacré une de ses plus belles odes à célébrer leur gloire. Le poète lui-même quittait souvent la lyre pour l'épée, et sa maison, remplie d'armes guerrières, semblait être plutôt la demeure d'un soldat que celle d'un enfant des Muses. Fort sans doute de sa conscience, et de son courage, maintes fois éprouvé, il avait accepté gaiement sa mésaventure de Sigée, et les railleries des Athéniens sur la perte de son bouclier. Banni, à la suite de la défaite du parti aristocratique, dont il était un des champions le plus énergiques, il fit maints voyages, qu'il prit pour sujet de ses chants, et il alla jusqu'en Egypte. Puis ayant cru l'occasion favorable, il réunit les bannis, et envahit son île. Mais Pittacus le repoussa, et, vainqueur, il proclama une amnistie. Il est probable qu'Alcée mourut à Lesbos. Alcée, homme de parti avant tout, ne put sentir tout ce qu'il y avait de grand dans la simplicité de Pittacus. Ses odes politiques, que les anciens admiraient surtout, étaient des satires pleines de fiel et d'outrages, de ces outrages honteux pour celui-là seul qui s'abaisse à s'en servir. Quand il aura bien ri des pieds plats, du ventre, des engelures de Pittacus, le sage n'en avait pas moins sauvé deux fois Lesbos, qu'Alcée n'avait jamais su défendre. On sent trop souvent le dépit et la colère dans ce qu'on cherche à nous faire prendre pour les nobles inspirations du patriotisme. Mais quand il chantait les combats, quand il poursuivait la tyrannie de ses invectives ardentes, quand il représentait le vaisseau de la patrie, battu parles tempêtes civiles, près de s'enfoncer dans les flots, Alcée avait trouvé des accents dignes de son génie, et l'antiquité tout entière avait rendu hommage à la grandeur des pensées, à la verve, à l'émotion du perte. Quintilien compare le style rapide et magnifique d'Alcée au style d'Homère. Horace fait plus; il l'imite, et le traduit souvent. Cependant la muse menaçante d'Alcée savait sourire quelquefois, et de retour des camps ou de l'exil, s'asseoir à un joyeux banquet pour chanter les dieux du plaisir. La perte de ses poésies, quoique beaucoup moins estimées que les odes politiques, ne laisse pas d'être regrettable encore. On y eût entendu le chef farouche de l'aristocratie soupirer pour Sapho, devenue tout à coup insensible. « Couronnée de violettes, ô Sapho, au sourire si chaste et si doux, je veux dire quelque chose, mais la honte me tient. » Et Sapho : « Si tu avais la passion du bien et du beau, et si la langue n'eût pas conçu quelque chose de mauvais, la honte ne couvrirait pas tes yeux, mais tu parlerais sur ce qui est juste. » Alcée, comme tous les aèdes primitifs, avait consacré une partie de ses chants aux dieux. Il reste de lui quelques fragments d'hymnes à Apollon, à Hermès, à Héphaistos. Les odes d'Alcée se distinguent par les innovations qu'il introduisit dans le rythme. « Les mètres lyriques d'Alcée sont fort variés, et il est probable que la plupart étaient de son invention. Il est certain du moins que la strophe nommée alcaïque [...]. était inconnue en Grèce avant Alcée. Cette strophe est une des plus heureuses combinaisons possibles des anciens pieds, dactyle et spondée, avec le trochée et l'iambe; elle est courte, nette, et preste, et je ne sache rien de mieux approprié à l'expression des sentiments passionnés, rien de plus animé, rien enfin de plus lyrique. » (A. Pierron). | |