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L'Affaire du Collier
On désigne sous le nom d'Affaire du Collier un procès historique qui eut un grand retentissement à la veille de la Révolution, et sur lequel le jour ne s'est jamais fait complètement; son importance vint principalement de la date à laquelle il se produisit, et du scandale qui, rejaillissant sur la reine Marie-Antoinette, contribua beaucoup à la déconsidération de la royauté en France; l'intérêt qu'il conserve pour nous vient du mystère qui subsiste encore sur plusieurs des points principaux : les détracteurs de Marie-Antoinette lui donnent peut-être une part trop grande dans cette malheureuse affaire, tandis que les panégyristes enthousiastes de cette princesse veulent, malgré tous les indices suspects, la mettre trop complètement hors de cause. Michelet est l'historien qui paraît avoir le plus justement départagé les responsabilités dans l'affaire du collier.

Un peu avant la mort de Louis XV les joailliers de la couronne, Boehmer et Bassenge, s'occupèrent de réunir les plus beaux diamants en circulation dans le commerce pour en former un collier à plusieurs rangs, plus somptueux que tout ce qui s'était fait jusqu'alors; ils firent des frais considérables pour composer cette merveilleuse parure qu'ils destinaient à Mme du Barry; malheureusement, Louis XV mourut sur ces entrefaites, et les joailliers restèrent avec leur collier. Ils résolurent alors de le vendre à la reine Marie-Antoinette dont ils connaissaient le goût pour les diamants; ils s'adressèrent à M. Campan qu ils chargèrent de proposer le collier à la reine; mais ce gentilhomme refusa et consentit seulement à le mettre sous les yeux du roi.
Louis XVI, malgré ses goûts d'économie, fut, paraît-il, séduit par la beauté des diamants et, comme il était alors dans la dépendance entière de sa femme qui venait de mettre au monde son premier enfant (décembre 1778), lui proposa, dit-on, le collier comme cadeau de relevailles. Mme Campan rapporte que la reine, déjà comblée de pierreries, ne voulut pas, malgré la tentation, accepter ce cadeau de un million six cent mille livres, et répondit qu'il valait mieux consacrer cette somme à l'achat d'un navire : d'autres historiens prêtent le mot à Louis XVI. Ce qu'il faut retenir de cette anecdote, c'est que Marie-Antoinette fut très tentée par les diamants; mais, dans l'état des finances, n'osa pas les accepter.

Boehmer, qui avait engagé sa fortune pour l'achat du collier, fut désespéré de ce refus. Il parcourut à diverses reprises les principales villes d'Europe et tenta de placer ses bijoux dans les cours étrangères; mais le prix très élevé de la parure l'empêcha de la vendre, et, de guerre lasse, il revint à son premier projet; au commencement de 1781, il revint se jeter aux pieds de la reine en la suppliant de le sauver de la ruine et de lui acheter le collier, jurant qu'il allait se noyer si elle ne l'acceptait pas. Marie-Antoinette paraît avoir trouvé cette scène de fort mauvais goût, et lui répondit, selon les mémoires du temps, qu'il n'avait qu'à partager son collier en plusieurs parures pour en trouver facilement le placement, en ajoutant qu'il ne vînt plus la fatiguer de ses obsessions. Quoi qu'il en soit, il est certain que le collier avait beaucoup plu à la reine, qu'elle ne le refusait qu'à regret, et que Boehmer s'en rendait parfaitement compte : cela peut expliquer comment il se prêta un peu plus tard aux négociations mystérieuses de la vente du collier.
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Le collier de la reine, dans l'affaire du Collier.
Le collier de la reine.

C'est à ce moment qu'apparaissent les personnages qui prirent la principale part à l'achat du collier : le cardinal de Rohan et la comtesse de Lamotte-Valois. Il faut rappeler leurs antécédents. Le cardinal de Rohan (Louis-René-Edouard), aumônier de France, évêque de Strasbourg et prince de l'Empire, supérieur général de l'hôpital royal des Quinze-Vingts, proviseur de Sorbonne et l'un des quarante de l'Académie française, était né en 1734; en 1772 il avait été nommé à l'ambassade de Vienne, par les intrigues de ses parentes, Mme de Marsan et Mme de Guéménée, gouvernantes des enfants de France; intelligent et spirituel, mais superficiel et faible, il n'y commit que des inconséquences : il se fit en particulier l'écho des ennemis de la jeune dauphine Marie-Antoinette, et par sa morgue, son irréligion, ses galanteries publiques, se fit rappeler en 1774; mal vu à la cour, où il était tenu en demi-disgrâce par le roi et la reine, il se croyait cependant un homme politique et rêvait de regagner les bonnes grâces de la reine pour devenir premier ministre. En 1781, pendant un voyage en Alsace, Mme de Boulainvilliers lui présenta la comtesse de Lamotte. Jeanne de Saint-Remy de Valois, comtesse de Lamotte, née en 1756, était le second enfant de Jacques de Saint-Remy de Valois qui descendait au septième degré d'un fils naturel de Henri II et de Nicole de Savigny. Le père de Mme de Lamotte avait séduit, puis épousé, la fille du concierge de sa maison dont il eut quatre enfants; très misérable, vivant de rapines à la campagne, il vint à Paris, où sa fille Jeanne mendiait son pain; en 1762 il mourut à l'Hôtel-Dieu. Jeanne, recueillie par Mme de Boulainvilliers, fut épousée par M. de Lamotte qui servait obscurément dans la gendarmerie : les deux époux vinrent ensemble à Paris pour solliciter (1782); ils obtinrent quelques secours, une pension du roi et de l'argent de la cour; Mme de Lamotte ne s'en contenta pas et continua ses sollicitations. En 1781 elle avait fait à Saverne la connaissance du cardinal de Rohan : celui-ci, séduit par son nom de Valois, par sa grâce un peu sauvage, son esprit enjoué, après lui avoir donné quelque argent, s'en éprit et l'entretint fastueusement sur la caisse des pauvres (1783). 

« Dès lors faisant figure et mendiante à quatre chevaux, elle sollicitait à Versailles » (Michelet).
Mal reçue de la Polignac qui se souciait peu d'approcher de la reine une personne charmante et très intrigante, repoussée par Calonne à qui elle réclamait sa terre, elle fut mieux accueillie de la soeur du roi, la comtesse d'Artois et des dames de la reine, excédées du règne de l'éternelle amie; dès lors, elle ne fatigue plus personne de ses réclamations, elle se dit protégée par la reine, montre même des lettres de Marie-Antoinette. Le cardinal de Rohan fut un des premiers avertis de la faveur dont sa protégée disait jouir et il espéra, par elle, regagner les faveurs le la reine : il en parla à Mme de Lamotte, qui lui montra un mot de Marie-Antoinette où celle-ci parlait du cardinal avec bonté; peu de temps après elle lui fit même espérer qu'il obtiendrait une audience : le cardinal avait cinquante ans, mais il était fat et crut pouvoir devenir agréable. Pendant les mois de mai, juin et juillet 1884, Mme de Lamotte se chargeait de faire passer à la reine les lettres du cardinal. Celui-ci, plein de joie de son retour en grâce, sollicitait toujours l'audience qu'on lui promettait depuis si longtemps. Enfin ce jour arriva : à cette époque la reine était fort triste et ennuyée, on voulut sans doute l'amuser aux dépens de M. de Rohan par une scène imitée du Barbier de Séville; on savait son goût, pour les farces et le bas comique italien : Mme de Lamotte avait rencontré dans les jardins du Palais-Royal une demoiselle d'Essigny, femme galante, ou comme l'on disait alors fille du monde, dont le port et la tournure rappelaient un peu Marie-Antoinette : on la baptisa baronne d'Oliva (c'est le mot Valois retourné) et on lui promit 15,000 F pour jouer le personnage de la reine dans une entrevue avec le cardinal. Oliva fut amenée, la nuit, dans un bosquet obscur, au bas du tapis vert, dans le parc de Versailles; Rohan vit l'ombre blanche et légère, il entendit une voix douce qui disait : « tout est oublié » en lui tendant une rose, puis aussitôt Mme de Lamotte accourut criant : « on vient! » et entraîna le cardinal en extase. Il est bien peu vraisemblable que la reine n'ait pas été au courant de la scène, à laquelle elle assistait peut-être : le rendez-vous dans le parc fermé de grilles, la grosse somme (15,000 F) que Mme de Lamotte promit à d'Oliva, le peu de ménagements qu'elle garda pour cette femme, à qui elle ne remit que le tiers du prix promis, tout prouve qu'elle était autorisée. Georgel, apologiste de Rohan, et Mme Campan, de la reine, font une erreur assez grossière en plaçant, pour les besoins de leur thèse, la scène du bosquet (qui est de juillet 1784) en 1785, dans l'affaire du collier, lors du premier payement.

La scène avait si bien réussi que Mme de Lamotte résolut de continuer à tirer parti de la mystification; elle apportait sans doute à la reine pour l'amuser, les lettres d'adoration ridicule du cardinal, et rapportait à celui-ci des réponses encourageantes écrites par un sieur Rétaux de Villette, son amant. Rohan, exalté, croyait toucher au but et remplacer Calonne; la Valois, qui avait besoin d'argent, lui fit alors écrire deux lettres où la reine lui demandait 150,000 livres pour des gens à qui elle s'intéressait; le cardinal se hâta de les donner, et Mme de Lamotte de mener grand train; à ceux qui s'en étonnaient, elle répondait que c'était un effet de la faveur dont elle jouissait près de la reine.

Ce crédit dont elle se vantait lui amenait chaque jour des solliciteurs; parmi ceux-ci se trouvaient un sieur Laporte, avocat au parlement, et son beau-père, le sieur Achet, intimement liés avec le joaillier Bassenge. Connaissant l'histoire du collier et les difficultés de vente, ils eurent l'idée d'en parler à Mme de Lamotte et de lui proposer une grosse somme si elle réussissait à vendre le collier; le 29 décembre 1784, ils allèrent chez elle, rue Neuve-Saint-Gilles, avec Bassenge; elle ne promit rien, mais finit par dire que si l'occasion se présentait elle dirait quelques mots. Elle laissa passer plusieurs semaines, puis se décida, sentant tout le parti qu'elle pouvait tirer de l'affaire qui se présentait. Le 21 janvier 1785, elle dit à Bassenge que la reine voulait faire emplette du collier, mais que ne voulant pas traiter directement avec les joailliers, elle confierait la négociation à un grand seigneur vis-à-vis duquel ils devraient prendre leurs sûretés. Le 24 janvier, le cardinal de Rohan se présenta en effet chez les joailliers, se fit montrer le collier, demanda le prix et les arrangements pour le payement; on lui répondit que le collier valait 1,600,000 livres; il offrit d'en payer une partie comptant (400,000 livres) échéant au terme d'août 1785 et de même, de quatre en quatre mois, jusqu'à parfait payement. 

Le 29 janvier. Boehmer et Bassenge signèrent le papier où le cardinal avait de sa main inscrit les conditions du marché, et deux jours après, quand ils apportèrent le collier, on leur montra le papier approuvé par la reine et signé « Marie-Antoinette de France »; M. de Rohan leur fit lire encore un fragment d'une lettre de la reine et les renvoya persuadés que Marie-Antoinette achetait leur collier. Le jour même (1er février), le cardinal se rendit à Versailles chez Mme de Lamotte qui remit devant lui le coffret contenant les diamants à un homme qu'elle dit envoyé par la reine et qui était probablement Rétaux de Villette. Le 2 février, les joailliers se rendirent à Versailles pour voir si la reine portait le collier, et ne le voyant pas, s'en plaignirent au cardinal qui leur expliqua que la reine voulait d'abord prévenir le roi de son emplette; il les exhorta en même temps à présenter leurs remerciements à la reine. Quelque temps après, Mme de Lamotte, voyant le terme du premier payement approcher avec rapidité, résolut de gagner du temps et transmit au cardinal une petite lettre de Marie-Antoinette sur le papier à vignettes bleues qu'elle avait adopté pour cette fausse correspondance de la reine; aussitôt M. de Rohan fit appeler les joailliers et leur demanda de faire un rabais de 200,000 livres sur le collier, la reine ne voulant plus l'accepter au prix primitif; Boehmer et Bassenge, très surpris de cette proposition, ne l'acceptèrent que lorsque le cardinal eut promis de payer 700,000 livres le 1er août et le prix primitif du collier, si des experts l'estimaient au-dessus de 1,400,000 livres.

Quelle part avait pris la reine dans toute cette négociation? C'est ce qui n'a jamais été bien éclairci;  elle avait la passion des diamants; elle s'en fit donner à plusieurs reprises de fort chers par le roi, et certainement elle eut envie du collier; mais Louis XVI venait de lui donner Saint-Cloud, elle n'osa pas lui demander les bijoux. Il est fort possible qu'après s'être amusée de la passion du cardinal elle ait autorisé Mme de Lamotte, comme celle-ci l'a toujours soutenu, à acheter le collier; dans ce cas, elle aurait laissé faire; en 1797, à Bâle, les deux joailliers avouèrent à Georgel que la reine savait tout; auraient-ils livré le collier sans cette garantie? On objecte la fausse signature de Marie-Antoinette; mais elle n'écrivait de sa main qu'à sa mère ou à son frère; Vermond et Augeard écrivaient ses lettres; on n'imita pas son écriture, car cela n'était pas nécessaire et les joaillers ni Rohan ne pouvaient s'en étonner; sur le traité d'achat des bijoux on mit Antoinette de France et non « d'Autriche », pour que le collier revint à la couronne. Enfin, comment expliquer la sécurité de Mme de Lamotte, si elle avait simplement volé le collier; elle n'avait qu'à passer en Angleterre, à se sauver. Elle n'en fit rien; bien plus, son mari alla à Londres vendre les petits bijoux pour 300,000 livres et revint. La reine ne pouvait porter le collier, sans confier au roi cette nouvelle folie, mais elle pouvait le dépecer, s'en faire des bracelets à son goût.

Quant au cardinal, il se voyait déjà premier ministre; encouragé par Cagliostro qu'il logeait chez lui, il fut heureux de servir d'intermédiaire pour l'achat du collier. Il fit vendre les petits diamants à Londres sans doute pour le premier payement; M. de Lamotte rapporta 300,000 livres, mais cet argent fut bientôt dissipé par Mme de Lamotte et les parasites du cardinal. Dès lors les événements vont se précipiter; le premier terme arrivait. Le 31 juillet, Mme de Lamotte remet à Rohan une lettre où la reine remettait le payement des 700,000 livres au 1er octobre; Rohan, très inquiet, s'adressa au financier Saint-James, puis, sur l'avis de Mme de Lamotte qui met ses bijoux en gage pour lui donner 30,000 F, remet aux joailliers cet argent; il leur dit que la reine le leur donne pour payer les intérêts du retard qu'on leur fait éprouver. Mais Boehmer et Bassenge commençaient à s'inquiéter de tous ces délais et avertirent Breteuil, ministre de Paris; celui-ci, voyant le moyen de perdre Rohan, informa aussitôt la reine du scandale que causait l'affaire du collier et l'entrevue des bosquets de Trianon qui s'ébruitaient à Paris; la reine interdite, déclare tout ignorer. 

Le cardinal, à cette nouvelle, cache chez lui Mme de Lamotte et son mari, puis les fait partir pour l'Allemagne; de la sorte il aurait pu tout rejeter sur eux; mais Mme de Lamotte s'arrête en route chez elle à Bar-sur-Aube et attend les événements; elle se rend aux fêtes du voisinage et ne se cache pas; elle ne craignait rien. Enfin, le 9 août, Boehmer donna par écrit le récit de l'affaire à la reine; on informe le roi qui, dans sa colère, fait arrêter le cardinal le 15 août, le jour de l'Assomption, en habits pontificaux, au milieu de la cour, et le fait mener à la Bastille; Mme de Lamotte l'apprit à Bar et refusa de fuir; elle fut arrêtée et conduite le 18 août à la Bastille; son mari était si peu inquiet qu'il voulait être arrêté, mais l'exempt refusa n'ayant pas de lettre de cachet pour lui ; le 23 août on arrêta Cagliostro et sa femme; et, un peu plus tard, Rétaux de Villette à Genève, Mlle d'Oliva à Bruxelles. On laissa pourtant au cardinal le temps d'écrire un mot à l'abbé Georgel qui brûla toute la correspondance échangée entre la reine et lui, et Breteuil laissa passer soixante heures avant de faire des perquisitions chez lui : le fait est à remarquer. Le cardinal, par l'ordre du roi, eut le plus bel appartement de la Bastille et liberté de communiquer; ses avocats lui conseillaient de s'en remettre à la clémence du roi, mais il préféra être jugé par le parlement et se confia à son secrétaire, l'abbé Georgel, qui présenta très habilement sa défense; il obtint d'abord du roi que le cardinal désintéressât les joailliers pour le premier payement sur son abbaye de Saint-Waast; le roi était déjà épouvanté du scandale qui allait résulter du procès.

Le 5 septembre 1785, le parlement fut saisi du procès; il fut aussi peu décisif que possible tout le monde redoutait la clarté. Target, l'avocat du cardinal, prouva sa non culpabilité : il avait été dupe de Mme de Lamotte qui avait volé les bijoux, et son seul crime était d'avoir cru la reine capable de lui rendre sa faveur s'il achetait le collier. La défense de Mme de Lamotte fut beaucoup moins facile; elle changea plusieurs fois de système. D'abord elle accusa le cardinal et Cagliostro d'avoir volé et vendu les diamants: elle nia l'entrevue de Trianon, prétendant n'y avoir aucune part; elle donnait le compte exact et détaillé des petits diamants vendus pour le cardinal. On envoya à Londres un capucin, secrétaire de Rohan, pour établir la vente des gros diamants; cet homme rapporta une pièce qui parut tellement suspecte aux magistrats qu'ils la refusèrent; mais comme elle déchargeait en même temps la reine et le cardinal en prouvant le vol de tout le collier par les Lamotte, le garde des sceaux Miromesnil donna l'ordre au parlement d'accepter la pièce.

L'affaire était donc jugée d'avance; c'était la Valois qui devait en porter tout le poids. Mais le roi s'aperçut alors que si l'on condamnait la Valois, que l'on supposait l'agent de la reine, Marie-Antoinette serait par là même condamnée auprès du public. Il voulut alors reprendre contre Rohan l'accusation de lèse-majesté; il était trop tard; Calonne, que la reine voulait sacrifier, connut ce nouveau plan et fit brusquer le jugement. Tout le peuple était contre la reine, pour le cardinal; les fables les plus scandaleuses circulaient sur Marie-Antoinette; dix mille personnes attendaient le résultat du procès (31 mai 1786): le cardinal de Rohan et Cagliostro étaient déchargés de l'accusation; Cagliostro et la demoiselle d'Oliva, mis hors de cour Rétaux de Villette, banni à perpétuité du royaume; M. de Lamotte, condamné aux galères par contumace, et Mme de Lamotte-Valois condamnée à être battue de verges, marquée d'un fer rouge sur les épaules et enfermée à la Salpêtrière.

L'indignation de la reine et du roi fut immense. M. de Rohan fut envoyé en exil dans son abbaye de la Chaise-Dieu, en Auvergne; émigré pendant la Révolution, il mourut en 1801 à Ettenheim. L'arrêt rendu contre Mme de Lamotte fut exécuté le 21 juin 1786 ; elle fut ensuite enfermée à la Salpêtrière, d'où elle s'échappa en février 1787 pour se rendre à Londres où elle arriva le 4 août et s'occupa de rédiger des Mémoires qui contiennent contre la reine les plus infâmes calomnies. Mme de Lamotte périt misérablement en 1791; elle se jeta par la fenêtre pour échapper à des voleurs, peut-être des assassins. Telle fut la fin des deux principaux auteurs de la négociation du collier. 

A plusieurs reprises, les successeurs de Bassenge et Boehmer actionnèrent la famille de Rohan pour le remboursement du prix du collier; une délégation annuelle de 300,000 F sur les revenus de l'abbaye de Saint-Waast avait été souscrite aux joailliers, mais la Révolution empêcha l'exécution du contrat. En 1803, un sieur Deville, à qui les bijoutiers avaient vendu leurs droits, actionna la princesse Charlotte, nièce et héritière de M. de Rohan. Les héritiers du sieur Deville ont plusieurs fois interrompu la prescription par des actes judiciaires; en 1863, ils ont poursuivi les héritiers de la princesse Charlotte devant le tribunal de la Seine, l'accusant d'avoir dissimulé l'actif de la succession. (Ph. B.).

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