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Un spectres, un revenant ou un fantôme est une apparence sans corps; c'est la figure fantastique d'un mort, d'un esprit que l'on croit voir, d'après les superstitions populaires. La croyance à ces apparitions vient, peut-être, soit des images fantastiques du sommeil, soit des apparences que la terreur objective et auxquelles elle donne une forme visible, soit encore des visions et hallucinations qui accompagnent régulièrement certaines maladies et états nerveux. En tout cas, le fantôme reste la meilleure métaphore poétique qu'on ait jamais trouvé pour parler du processus de deuil. La croyance aux fantômes et aux revenants, que l'on retrouve un peu partout à travers le monde, a toujours rencontré un aliment dans les idées que les religions se faisaient de ce que deviennent les âmes après la mort. La foi dans l'immortalité se compliquait, dans l'Antiquité comme chez les Juifs, de la croyance que l'âme des humains assassinés errait sans repos jusqu'au jour où le meurtrier avait été puni et où la victime avait obtenu une sépulture honorable. Dans la littérature et la poésie on s'est servi constamment de ces apparitions qui se dressent comme un remords devant la mauvaise conscience du criminel; au théâtre, c'est d'un effet sûr, qui a été très employé (Voyez l'usage qu'en fait Shakespeare dans Hamlet, par exemple). L'Antiquité classique fêtait les âmes des morts à des jours spéciaux (lares et lemures). Le Christianisme adopte également ce thème par le dogme du purgatoire, et de nombreux Pères de l'Église ont soutenu la réalité des apparitions de spectres, comme avaient fait avant eux nombre de philosophes grecs : tant que les péchés terrestres d'une âme n'ont pas été rachetés, l'âme peut revenir sur la Terre et tourmenter ses descendants jusqu'à ce qu'ils aient, par des messes et de bonnes oeuvres, délivré l'âme coupable; elle s'attache au lieu de ses forfaits et y apparaît à ceux qui l'habitent. Ces croyances fortifient les récits de fantômes et d'esprits qui reviennent dans les châteaux et les cloître, des feux-follets (âmes des enfants non baptisés); c'est à ces conceptions que se rattachent aussi les histoires de vampires et d'incubes. Dans les récits populaires modernes, les revenants ne peuvent plus parler que pendant la nuit, de minuit à une heure, bien que les enfants doués de seconde vue (nés le dimanche) et les voyants puissent distinguer les fantômes à toutes les heures de la nuit. La croyance aux spectres a trouvé un dernier refuge dans les imaginations de la poésie et dans les contes populaires, mais elle tend à disparaître de plus en plus. Cependant une nouvelle superstition s'est créée au XIXe siècle sous le nom de spiritisme et prétend « évoquer l'âme des morts » et entrer en communication avec eux; l'occultisme donne le nom d'élémentaires « aux êtres désincarnés par la mort »; il estime qu'ils se manifestent aux habitants de la Terre, soit spontanément, soit avec le concours de la volonté d'un évocateur, et, dans ce dernier cas, tantôt par acte d'auto-hypnose conscient de celui-ci, tantôt par l'entremise d'agents inconscients doués du pouvoir tout passif de communication avec le plan astral, dits médiums. Selon les occultistes, les productions de phénomènes de ces divers ordres peuvent aussi bien émaner d'êtres d'une évolution physique qualifiée par eux d'inférieure (autrement dit des animaux) que de morts ayant appartenu au plan d'existence qui est actuellement le nôtre. Apparition d'un fantôme. (Almanach Rolland, 1914). A la fin du XIXe siècle, une association anglaise, la Society for psychical researches, a entrepris une vaste enquête sur les apparitions de fantômes (Phantasms of livings), en particulier sur celles qui se produiraient au moment de la mort, le fantôme se manifestant à cet instant à des êtres aimés situés parfois à de grandes distances. L'authenticité d'aucune des apparitions n'a pu être démontrée de manière à satisfaire aux règles de la critique rationnelle. Les faits constatés s'expliquaient soit par des confusions de la mémoire qui transpose les dates, soit par des rêves, des hallucinations, des suggestions et souvent par de simples fraudes. La situation ne changera pas beaucoup au XXe siècle... Histoires de fantômes. Le fantôme d'Arles. Le fantôme d'Epinal. Un jour, Hugues ayant ordonné à sou valet de seller son cheval et (le lui donner à manger, le valet différa de faire ce qu'on lui commandait; l'esprit fit soit ouvrage, au grand étonnement de tout le monde. Un autre jour, Hugues, voulant se faire saigner, dit à sa fille de préparer des bandelettes. L'esprit alla prendre une chemise neuve dans une autre chambre, la déchira par bandes, et vint la présenter au maître, en lui disant de choisir les meilleures. Un autre jour, la servante du logis ayant étendu du linge dans le jardin pour le faire sécher, l'esprit le porta au grenier elle plia plus proprement que n'aurait pu faire la plus habile blanchisseuse. Ce qui est remarquable, c'est que, pendant six mois qu'il fréquenta cette maison, il n'y Le fantôme de Constance.
Un fantôme cité en justice. -Vos inquiétudes, répliqua cet homme, ne peuvent égaler les miennes; car, comme j'étais couché cette nuit, sans être encore endormi, votre mari m'est apparu, couvert de blessures, et m'a dit qu'il avait été assassiné par son ami John Dick, et que son cadavre avait été jeté dans une marnière.La fermière, alarmée, fit des perquisitions. On découvrit dans la marnière le corps blessé aux endroits que le voisin avait désignés. Celui que le revenant avait accusé fut saisi et mis entre les mains des juges, comme violemment soupçonné du meurtre. Son procès fut instruit à Warwick; les jurés l'auraient condamné aussi témérairemnent que le juge de paix l'avait arrêté, si lord Raymond, le principal juge, n'avait suspendu l'arrêt. - Messieurs, dit-il aux jurés, je crois que vous donnez plus de poids au témoignage d'un revenant qu'il n'en mérite. Quelque cas qu'on fasse de ces sortes d'histoires, nous n'avons aucun droit de suivre nos inclinations particulières sur ce point. Nous formons un tribunal de justice, et nous devons nous régler sur la loi; or je ne connais aucune loi existante qui admette le témoignage d'un revenant; et quand il y en aurait une qui l'admettrait, le revenant ne paraît pas pour faire sa déposition. Huissiers, ajouta-t-il, appelez le revenant.Ce que l'huissier fit par trois fois, sans que le revenant parût. - Messieurs, continua lord Raymond, le prisonnier qui est à la barre est, suivant le témoignage de gens irréprochables, d'une réputation sans tache; et il n'a point paru, dans le cours des informations, qu'il y ait eu aucune espèce de querelle entre lui et le mort. Je le crois absolument innocent, et , comme il n'y a nulle preuve contre lui, ni directe ni indirecte, il doit être renvoyé. Mais par plusieurs circonstances qui m'ont frappé dans le procès, je soupçonne fortement la personne qui a vu le revenant d'être le meurtrier; auquel cas il n'est pas difficile de concevoir qu'il ait pu désigner la place, les blessures, la marnière et le reste, sans aucun secours surnaturel; en conséquence de ces soupçons, je me crois en droit de le faire arrêter, jusqu'à ce que l'on fusse de plus amples informations.Cet homme fut effectivement arrêté; on fit des perquisitions dans sa maison; on trouva les preuves de son crime, qu'il avoua lui-même à la fin, et il fut exécuté aux assises suivantes. Un autre procès... « Les peuples du nord, dit Walter Scott, reconnaissent aussi un genre d'esprits qui, lorsqu'ils avaient obtenu la possession d'une maison ou le droit de la hanter, ne se laissaient expulser ni par les exorcismes des prêtres ou les charmes des sorciers; mais devenaient traitables quand on dirigeait légalement contre eux des poursuites judiciaires. L'Eyrbiggia daga nous apprend que la maison d'un respectable propriétaire d'Islande fut, peu de temps après les établissements formés en cette île, exposée à une persécution de ce genre. Cette circonstance fâcheuse fut produite par le concours de certains phénomènes mystiques et d'apparitions de spectres, bien propres à causer une telle persécution. Vers le commencement de l'hiver, à l'époque de ces retours périodiques de ténèbres et de crépuscule qui font la nuit et le jour sous cette latitude, il survint, au sein d'une famille distinguée et dans le voisinage, une maladie contagieuse qui emporta, à différentes époques, plusieurs membres de cette famille, et qui semblait menacer de mort tous les autres. Mais la mort de ces individus fut suivie d'un incident singulier : on vit les spectres des défunts errer dans le voisinage de la maison, et ils épouvantaient et même maltraitaient ceux des survivants qui se hasardaient à sortir. Comme le nombre des morts de cette malheureuse famille commençait à surpasser celui des vivants, les esprits se permirent d'entrer dans la maison, et de montrer leurs formes aériennes et leur physionomie décharnée jusque dans le poêle, où un feu était allumé pour l'usage général de tous les habitants, et qui, pendant l'hiver, en Islande, est le seul endroit où toute une famille puisse se réunir commudément. Mais les survivants, effrayés par la vue de ces spectres, préférèrent se retirer à l'autre extrémité de la maison, et abandonner un appartement bien chauffé, plutôt que d'endurer la compagnie de ces fantômes. ils firent enfin des plaintes à un pontife du dieu Thor, nommé Snorro, qui avait beaucoup d'influence dans toute l'île. D'après son conseil, le jeune propriétaire de la maison assembla un jury ou tribunal d'enquête composé de ses voisins, et constitué en la forme judiciaire en usage, comme pour juger une affaire civile ordinaire, et il procéda en leur présence à citer individuellement les fantômes qui portaient la ressemblance des membres défunts de sa famille, pour qu'ils eussent à prouver le droit qu'ils avaient de lui disputer, ainsi qu'à ses serviteurs, la possession tranquille de sa maison, et alléguer leurs motifs pour venir ainsi tourmenter les vivants. Les spectres des morts comparurent à mesure que le nom de chacun d'eux était appelé; et, ayant murmuré quelques regrets d'être obligés d'abandonner leur demeure, ils partirent ou s'évanouirent aux yeux des juges étonnés. Un jugement par défaut fut alors rendu contre les esprits; et le jugement par jury, dont nous pouvons ici trouver l'origine, obtint un triomphe que n'a connu aucun des écrivains célèbres qui ont fait de cette institution l'objet de leurs éloges. » Les personnes qui ont vécu dans l'intimité de Walter Scott, affirment qu'il était très superstitieux, et racontait, en homme convaincu, dans les réunions intimes, des légendes où le merveilleux était dominant. On ajoute que s'il a peu parlé des esprits dans ses romans, c'est qu'il lui répugnait d'exposer au ridicule des choses auxquelles il accordait une foi entière.(J. Collin de Plancy / A19).
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