| Le Sommeil (Hypnos, en grec) est une personnification mythologique, déjà connue d'Homère, chez qui, sous la forme d'un oiseau de nuit, elle endort Zeus à la prière d'Héra. Hésiode fait du Sommeil un frère de la Mort, et de tous les deux des fils de la Nuit et de l'Erèbe; Homère avait fixé le lieu de sa résidence dans l'île de Lemnos; les poètes postérieurs le logent tantôt sur la terre, tantôt dans les régions infernales, et Lucien imagine une île des Songes, d'où le Sommeil se répand avec eux parmi les humains. D'un vol silencieux et léger, il plane, touchant les fronts avec un rameau trempé dans l'eau du Léthé, répandant des breuvages soporifiques ou encore assoupissant par le bruissement de ses ailes. Les Romains, dans leur poésie, se sont contentés de reproduire les traits dont l'ornait celle des Grecs : mais ni chez les uns ni chez les autres le Sommeil n'est l'objet d'un culte véritable et les poètes, qui ont si souvent dépeint son action bienfaisante en le personnifiant, se sont abstenus de lui fabriquer une légende. L'art ne l'a représenté d'abord sur les plus anciens vases peints que sous les traits d'une figure ailée qui resterait indéterminée si l'ensemble des scènes ne précisait son rôle. Sur le coffre de Cypselos décrit, par Pausanias, la Nuit portait dans ses bras deux génies, l'un noir, l'autre blanc, le premier figurant la Mort, le second le Sommeil; mais la distinction ne devint tranchée que vers le milieu du Ve siècle avant notre ère; sur les lécythes blancs de l'Attique, Thanatos (la Mort) a l'aspect sévère et la figure barbue; Hypnos (le Sommeil) est imberbe, d'expression douce et souriante. La sculpture des temps d'Alexandre le Grand accentue encore le caractère juvénile et doux, la démarche légère, mais supprime les larges ailes du dos en les remplaçant par de petites ailes fixées aux tempes; c'est ainsi que le Sommeil glisse au ras du sol, tenant à la main ou le rameau (virga) qui endort ou la corne (rhyton) d'où tombe la rosée assoupissante. Souvent ses yeux se ferment à moitié, comme si le dieu exerçait sur lui-même sa propre puissance. Tel nous le montrent ou un fragment de bas-relief aujourd'hui au Louvre, ou une statue de marbre conservée à Madrid, ou des petits bronzes dont un des plus remarquables est au musée de Vienne. Plus tard, les sculpteurs donnent au Sommeil les traits d'un vieillard barbu et chevelu, qui s'endort debout sur son bâton; ils lui restituent les grandes ailes dans le dos, sans supprimer d'ailleurs celles qui lui sortent des tempes; parfois ils exploitent le type des génies ailés (Amours) en leur donnant les attributs de la Mort et du Sommeil. Pour le célèbre groupe de San Ildefonso, aujourd'hui à Madrid et qui représente peut-être, en les idéalisant suivant les procédés chers à la Renaissance attique, les deux divinités. (J.-A. Hild). | |