|
. |
|
Nous réunissons
ici toutes les pratiques, dévotions, cérémonies
et fêtes chrétiennes ayant
pour objet l'image et le culte de la croix.
Le
signe de croix.
« En cheminant, en entrant, en sortant, en nous habillant, en nous chaussant, en entrant au bain, en nous mettant à table, en allumant les lumières, en nous couchant au lit, en toutes nos actions et mouvements, nous nous imprimons au front le signe de la croix. Que si tu réclames obstinément une loi tirée de l'Ecriture pour ces disciplines et usages ou autres du même genre, tu n'en trouveras aucune; mais on t'indiquera la tradition, qui en est l'auteur; la coutume, qui les confirme ; la foi, qui les observe (De Corona militis, III). »Bien que Tertullien reconnaisse que l'institution du signe de la croix ne se trouve pas dans l'Ecriture, on le prétend recommandé par certains textes fort élastiquement interprétés, notamment par ces paroles d'Ezéchiel (IX, 4) : « Fais une marque sur le front de ceux qui gémissent à cause des abominations qui se commettent au dedans de Jérusalem, »;et par diverses indications de l'Apocalypse (VIII, 3; IX, 4; XIV, 1). Il semble que primitivement le signe de la croix était fait avec le pouce de la main droite, ordinairement sur le front, accidentellement sur d'autres objets. Mais la signification symbolique attachée à ce signe et certaines ressemblances naturelles devaient peu à peu le faire appliquer à d'autres parties du corps : « Nous avons le signe de la croix sur notre front, sur notre coeur et sur nos bras : sur notre front, parce que nous devons toujours confesser Jésus-Christ; sur notre coeur, parce que nous devons toujours l'aimer; sur nos bras, parce que nous devons toujours travailler pour lui (Ambroise, Vie d'Isaac). »On finit par toucher ces diverses parties en une figuration unique du signe. Pour l'exécuter, la main droite est élevée au front, puis abaissée sur la poitrine, de là ramenée sur l'épaule gauche et enfin sur l'épaule droite (Eglise d'Occident) ou ramenée sur l'épaule droite et enfin sur l'épaule gauche (Eglise d'Orient). Cette différence a été une des causes du schisme des deux Eglises. Dans la liturgie des consécrations et des bénédictions, le signe se fait en l'air, au-dessus des personnes ou des objets. La manière dont les doigts sont tenus en cette opération n'est point indifférente : les cinq doigts étendus représentent les cinq plaies de Jésus-Christ; trois, les personnes de la divine trinité; un, l'unité de Dieu. Pour la bénédiction du calice et des oblations, Léon IV ordonna d'étendre deux doigts et de porter le pouce au-dessous : c'est le seul vrai signe de croix trinitaire. Ce pape recommandait aux clercs de s'appliquer à le bien faire; sinon, ils seraient incapables de rien bénir. Le geste est ordinairement accompagné de la prononciation de cette formule : Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. - Une croix (église Saint-Pierre, Chartres). © Photo : Serge Jodra, 2011. Il est vraisemblable que les anciens chrétiens se servaient du signe de la croix pour se reconnaître parmi les païens; mais l'histoire ne fournit que peu, sinon point, d'indications sur ce fait. Elle contient, au contraire, de nombreux témoignages attestant que les chrétiens employaient surtout cette pratique en vue des effets qui lui sont attribués. Elle chasse les démons; elle sanctifie la chair et fortifie l'âme; elle soutient dans les épreuves et elle sauve dans les dangers, tant spirituels que corporels; elle guérit les maladies et déjoue les maléfices; elle décèle ou neutralise les poisons; contre la tentation à certains péchés, elle est un secours toujours efficace; elle purifie les lieux et les objets souillés par les humains ou par les malins esprits qui sont dans les éléments. Par bref du 28 juillet 1863, Pie IX a accordé cinquante jours d'indulgence à tous les fidèles, chaque fois que, d'un coeur contrit, ils font le signe de la croix, en prononçant la formule trinitaire : Au nom du père, etc. Un autre bref du 23 mars 1866 élève l'indulgence à cent jours, lorsque le signe est fait avec de l'eau bénite. Certains passages des Apologistes et des
Pères indiquent que le signe de la croix
devint, dès les premiers temps, un trait caractéristique
du culte chrétien. Luther l'avait conservé;
mais la plupart des Eglises luthériennes
ont fini par l'abandonner, à cause des effets que partout et en
tout temps la superstition est disposée
à lui prêter. Les Eglises réformées
ne l'ont jamais toléré.
« Ce n'est pas la croix que les chrétiens adorent, mais le Christ mort sur la croix; Regem,... Christum qui pependit in ligno... non lignum » (Ambroise, In obitum Theodosii, XLVI).Ce qu'ils vénèrent, ce n'est pas le bois, mais la rédemption accomplie sur ce bois. Il est peu probable que les païens n'aient pas établi une pareille distinction entre leurs idoles et les divinités qu'elles représentaient. S'ils attribuaient à ces images une puissance propre, les chrétiens, eux aussi, crurent bientôt à une vertu surnaturelle de la croix, produisant des effets que la seule invocation du Christ n'aurait pas produits : les récits de ces miracles abondent chez les écrivains ecclésiastiques. Naturellement on adore ce qui accomplit des miracles; peu importe le nom donné à ce culte. Dès le commencement du IVe siècle, les poètes chrétiens l'appelaient adoration : Flecte genu lignumque Crucis venerabite adora.L'Eglise d'ailleurs a consacré le mot, en Occident comme en Orient : adoratio, proskynêsis. L'Eglise occidentale a longtemps célébré cette adoration le Vendredi saint. Pour la liturgie qui la concerne, on lit dans le Sacramentaire Grégorien : Venit Pontifex, adoratam deosculatur crucem.En l'Eglise d'Orient, ce culte a lieu le troisième dimanche de Carême et pendant toute la semaine suivante. Invention
de la sainte croix.
Hélène et Constantin firent construire une église magnifique au-dessus du sépulcre. Une partie de la croix fut laissée à Jérusalem, enchâssée dans un reliquaire d'argent; l'autre fut envoyée à Constantin avec les clous qui avaient percé les pieds et les mains de Jésus. L'empereur fit placer la portion qu'il avait reçue dans sa propre statue, laquelle fut élevée sur une colonne de porphyre, dans le forum de Constantinople. L'historien Socrate affirme que cette précieuse relique devait rendre la ville imprenable. Un des clous fut attaché au casque de l'empereur, un autre à la bride de son cheval; et ainsi fut réalisée, suivant divers Pères, cette prophétie de Zacharie : « En ce temps-là, il y aura sur les sonnettes des chevaux la Sainteté à l'Eternel (XIV, 20).-»Un autre clou servit plus tard à façonner la couronne de fer de Lombardie. Eusèbe (Vita Constantini, III et suiv.), racontant l'exploration du sépulcre et les mesures ordonnées par Constantin pour en dégager et en purifier l'emplacement et pour y construire un sanctuaire, ne fait aucune mention de la vraie croix. La relation d'un voyage fait à Jérusalem en 333 (Itinerariurn Burdegalense) indique la crypte où le corps de Jésus avait été déposé, et la basilique élevée par Constantin; mais elle ne parle pas non plus de la croix. Les premières mentions qui en soient faites se retrouvent dans les Catéchèses de Cyrille de Jérusalem (IV, 10; IX, 19 ; XIII, 4), composées vingt ans au moins après la prétendue découverte. Il y est dit que des parcelles ont été détachées de la Sainte Croix et qu'elles sont répandues dans tout l'univers, mais il n'y est point fait allusion aux faits contenus dans la légende que nous avons résumée. Dès le commencement du Ve siècle, cette légende semble acceptée par tous les écrivains ecclésiastiques comme authentique, quoique avec diverses variantes. De tous les miracles de la Sainte Croix, le plus grand est peut-être la mystérieuse puissance de reproduction dont elle est douée. Dans sa lettre à Sévère, saint Paulin affirme qu'on peut en retirer indéfiniment des parcelles sans la diminuer. On a comparé cela à la multiplication des pains au désert. Tous ces fragments, s'ils étaient réunis, formeraient la charge de plus de dix ânes. Il est vraisemblable qu'une fête a été instituée très anciennement à Jérusalem pour commémorer l'invention de la Sainte Croix, et qu'elle a été introduite successivement dans d'autres églises. Papebroch (Acta sanctorurn, III) affirme qu'elle n'a été célébrée d'une manière générale que vers 720. Dans l'Eglise latine, elle a lieu le 3 mai. L'Eglise grecque la joint à la fête de l'Exaltation de la Sainte Croix. Fête
de l'exaltation de la Sainte Croix.
Chemin
de la croix ou chemin du calvaire.
Chacune des quatorze stations est affectée à un souvenir de la passion. Parmi ces souvenirs il y en a plusieurs que l'Evangile ignore. L'un d'eux surtout, celui qui se rapporte à Véronique, provient d'une source plus que suspecte. Toutes les stations doivent être marquées par des croix bénites, mais les tableaux ne sont point indispensables. Les croix seules procurent les indulgences. Les chemins de la Croix peuvent être établis dans les églises ou en dehors. Le privilège de les ériger et de les bénir appartient en propre aux frères mineurs de l'Observance et, par extension, aux capucins, qui sont un rameau de l'ordre franciscain. Néanmoins, des rescrits pontificaux permettent personnellement à des évêques n'appartenant pas à l'ordre de Saint-François et même à de simples prêtres dément autorisés de l'ordinaire, d'ériger et de bénir des chemins de la Croix. L'érection faite par eux n'est pas valide, si elle a lieu en dehors des églises. Croix
pectorale.
Croix
héraldique.
On donne encore le nom de croix à la réunion du pal et de la fasce. (B.). Applications du mot croix à des dénominations d'ordres ou de congrégations. Religieux
de Sainte-Croix.
En 1169, Alexandre III donna aux croisiers d'Italie une règle et des constitutions. En 1656, Alexandre VII les supprima pour cause de relâchement et attribua leurs biens à la république de Venise, afin de soutenir la guerre contre les Turcs. Chanoines
réguliers de la Sainte-croix.
Pour la connaissance des choses du catholicisme, il est intéressant d'indiquer les privilèges conférés à cet ordre en matière d'indulgences. Un indult de Léon X (20 avril 1516) avait accordé au général et à ses successeurs la faculté d'appliquer aux chapelets de cinq, dix ou quinze dizaines une indulgence de cinq cents jours pour chaque Pater et chaque Ave, sans qu'il fût nécessaire de dire tout le chapelet. Le 13 juillet 1845, Grégoire XVI a rendu l'indulgence applicable aux âmes du purgatoire. Le 9 janvier 1848, Pie IX a concédé au général le pouvoir de communiquer cette faculté à tous les prêtres de son ordre; Léon XIII l'a déclarée exclusivement propre à l'ordre de la Sainte-Croix. Une congrégation de Chanoines réguliers de Sainte-Croix fut aussi instituée en Bohème, par un croisé qui avait connu les religieux de Sainte-Croix en Palestine. Elle fut confirmée par Grégoire IX (14 avril 1238). Clément X et Innocent XI, approuvant les statuts de cette congrégation, l'appellent un ordre militaire. Les empereur donnaient à ces croisiers le nom de Chevaliers de la Croix. On leur confia un grand nombre d'hôpitaux en Bohême, en Pologne et en Lituanie. Chevaliers
de la vraie croix.
Autres
congrégations.
Une congrégation de Sainte-Croix (du Mans) a été organisée en 1833 par le père Moreau. Elle comprenait les pères Salvatoriste (deux maisons en France, vingt-huit clercs réguliers), voués aux missions, à l'instruction de la jeunesse et au ministère paroissial; les Frères joséphites (cinquante-trois maisons en France, deux cent soixante-trois frères), qui doivent leur origine (1806) à Jacques Dujarié, curé de Ruilly-sur-Loire : instruction secondaire et instruction primaire; les Soeurs Marianistes, chargées des soins de lingerie et d'infirmerie dans les séminaires et les collèges de la congrégation et qui s'occupent aussi de l'instruction des jeunes filles dans des maisons particulières. Cette congrégation complexe, dont le supérieur général réside à Rome, possède de nombreux établissements en Europe, aux Etats-Unis, au Canada, au Bengale, en Australie. En 1625, Guérin, curé de Roye, forma une maison de Filles de la Croix, pour l'instruction des jeunes filles. Mme de Villeneuve les établit à Brie-Comte-Robert et à Paris; elle fit prononcer par une partie de ces filles les trois voeux simples de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Les autres voulurent conserver leur liberté : ce qui les obligea à se séparer. Avant la Révolution, chacune des deux congrégations avait sou supérieur général. Le recensement spécial de 1861 indique pour, la France trente-quatre Dominicaines de la Croix (une maison); trente-quatre Religieuses de la Croix de Jésus (neuf maisons) ; huit cent quatre Soeurs de la Croix (sept maisons mères, quatre-vingt-trois maisons); quatre-vingt-une Soeurs de la Saint-Croix (vingt-deux maisons). (E.-H. Vollet). |
. |
|
|
|||||||||||||||||||||||||||||||
|