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Aigle -
Cet oiseau, emblème de la force et de la majesté, intervient dans de
nombreux mythes à divers titres. Symbole céleste qui le fait opposer
couramment au serpent, symbole
chtonien,
il est couramment l'attribut de divinités ouraniennes - et de préférence
du dieu suprême, et le plus souvent l'accompagnateur de ces dieux, et
le complice.
Plusieurs évocations de cet oiseau apparaissent
ainsi dans la Bible .
Dans le Deutéronome ,
par exemple, c'est Yahveh qui est comparé Ã
un aigle. Quant aux anges, tels que les décrits Ezéchiel, et selon une
tradition qui persistera longtemps encore, ils sont imaginés avec une
face d'aigle. Plus tard l'évangéliste
Jean sera lui aussi associé à l'aigle, et ce sera parfois même le cas
de Jésus au Moyen-Age.
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L'aigle
Garouda, à Swayambhu (Népal). Photos : © Serge
Jodra, 2011.
En Orient, c'est, entre autres, Garouda,
la monture de Vishnu, et chez les Amérindiens,
et spécialement en Méso-Amérique (Aztèques, Zuñi, etc.), l'aigle est
couramment associé au Soleil ou encore au feu.
Presque partout, on lui attribue le pouvoir de contempler la lumière la
plus vive sans se brûler les yeux : il est l'oiseau des devins.
Il est aussi l'Oiseau-tonnerre des Indiens
des Plaines... et des Grecs. Qui en
ont fait le porteur de la foudre
de Zeus et l'ont célébré sous la forme d'une
constellation ,
qui figure toujours sur nos atlas. Eratosthène
dans ses Catastérismes* résume
ainsi le mythe :
"C'est l'oiseau
qui a transporté Ganymède au ciel, et l'a
donné à Zeus pour lui verser à boire. Mais on
dit que les dieux s'étant partagé les oiseaux, Zeus prit l'aigle pour
lui, et le mit par là au ciel. Il est le seul qui vole contre le Soleil,
sans en être ébloui et il est le roi des oiseaux. Il est représenté
volant, et les ailes étendues. Aglaosthène dit dans ses Naxiaques,
que Zeus, que l'on cherchait pendant qu'il était élevé dans l'île de
Crète, en fut enlevé par l'aigle, qui le
porta à Naxos. Zeus, devenu grand, devint
aussi roi, étant parti de Naxos avec son aigle, pour faire la guerre aux
Titans, et l'aigle lui ayant été ainsi de bon
augure, il se le consacra et le plaça parmi les astres. Telle est la cause
de l'honneur qu'il lui fit."
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Cet
oiseau se trouve souvent sur les chapiteaux
antiques et dans les frises, ainsi que sur
les médailles (par exemple, celles d'Agrigente).
II est l'attribut de Zeus / Jupiter, l'emblème
de la toute-puissance; on place la foudre entre ses serres. Dans le langage
hiéroglyphique,
l'aigle désigne les villes d'Émèse, d'Antioche,
de Tyr, d'Héliopolis. Les graveurs en
pierres fines ont exécuté des ailles sur de grandes sardoines,
dont la couche enfumée semble ombrer les plumes; on voit deux beaux camées
antiques de ce genre, au cabinet de Vienne (Autriche), et au cabinet parisien
des antiques.
L'image
de l'aigle a été adoptée également comme enseigne militaire par différents
peuples ou comme armoiries par plusieurs familles. Le mot est au féminin,
lorsqu'on parle de la figure héraldique qui représente alors cet oiseau.
Celui-ci se voyait sur les étendards des rois de Perse et des Ptolémées
d'Égypte. Sous la république romaine (depuis Marius)
et sous l'empire, l'aigle surmontait les enseignes des légions. Charlemagne
adopta le même signe, et après lui les empereurs d'Allemagne.
L'aigle
a été souvent employé comme sujet de décoration dans les monuments
religieux; on en cite de remarquables exemples, dont le plus célèbre
est l'aigle sculpté de l'église des Saints-Apôtres, à Rome. Dans les
catacombes, on trouve déjà l'aigle comme attribut de saint Jean l'Evangéliste.
Depuis, on l'a sculpté, dans la même intention, sur les ambons des basiliques
chrétiennes.
Napoléon
I le reprit en 1804; il fut rétabli sur les drapeaux français en
1852. Il avait été aussi adopté par l'ordre
teutonique et la Pologne; l'aigle impériale figure (ou a figuré)
aussi, sous différentes formes, dans les armes d'Autriche,
de Russie, de Prusse,
de Pologne, de Sicile, d'Espagne,
de Sardaigne, etc.; l'Autriche, la Russie et la Prusse portaient l'aigle
à deux têtes.
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L'aigle héraldique
Dans
le Blason, l'aigle est dite becquée, languée, membrée, couronnée, diadémée,
quand son bec, sa langue, ses membrés, la couronne ou le diadème qu'elle
porte, sont d'une autre couleur que son corps; naissante ou issante, quand
on ne voit que la tête et une partie de son corps; contournée, quand
elle regarde la gauche de l'écusson; onglée, quand les serres sont d'un
émail différent. |
Deux
ordres de ce nom ont été fondés en Prusse, l'un de l'Aigle-Noir, l'autre
de l'Aigle-Rouge. Le 1er, fondé en 1701, sera porté par les membres de
la famille royale et les grands du royaume. On ne pouvait l'obtenir qu'après
avoir été en possession du second. Celui-ci, fondé en 1705 par le prince
de Bayreuth pour les sujets de son margraviat,
ne devint ordre prussien qu'après la cession du margraviat à la Prusse,
en 1790. L'ordre de l'Aigle-Blanc, en Pologne, fut institué en 1705 par
Auguste II. Il a été ensuite réuni aux ordres impériaux de Russie.
Le Wurttemberg a aussi possédé à partir
1702 un ordre de l'Aigle, et le duché de Modène eut, à partir de 1856,
un ordre de l'Aigle-d'Este. |
Ajoutons qu'on donne le nom d'Aigle au
pupitre ou lutrin des églises, quand il représente
un aigle dont les ailes étendues (cette position
s'est maintenue jusqu'Ã nos jours, Il existe encore quelques lutrins des
XIIIe, XIVe,
XVe, et XVIe
siècles) servent à supporter les livres de chant, et on choisit
primitivement cette forme de pupitre pour le livre des Évangiles, parce
que, dans l'iconographie chrétienne, l'aigle est l'attribut de saint Jean
l'Évangéliste. L'aigle buvant dans un calice est, sur les monuments,
l'emblème de la force qu'on puise dans l'eucharistie.
On a en fait aussi le symbole de la Résurrection et de l'Ascension, et
celui d'une âme élevée au-dessus des choses terrestres.
(B.). |
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