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Le Livre de Daniel

Le Livre  de Daniel, appartenant à la troisième section du canon de la Bible hébraïque, c.-à-d. à la catégorie des Kethoubim ou Hagiographes, rapporte une série d'aventures dont un jeune Israélite, Daniel, est le héros ces scènes sont placées à l'époque de la déportation à Babylone, VIe siècle avant notre ère. Nous en donnerons l'indication succincte, mais exacte. 
I. Nabuchodonosor, vainqueur de Jérusalem, attache à sa personne quelques jeunes Israélites que distinguent leur naissance et leur bonne mine, à savoir Daniel et trois autres; ces jeunes gens, bien que, par scrupule religieux, ils refusent le vin et la viande du roi et acceptent seulement des légumes, se portent admirablement et font des progrès extraordinaires dans les sciences, de façon à surpasser tous les sages de la Chaldée. 

II. Le roi somme ses astrologues de lui donner l'explication d'un songe qui l'a troublé, mais dont il a oublié le contenu. Ils en sont incapables; mais Daniel, grâce au secours divin, raconte le songe et procède ensuite à son interprétation. Il s'agissait d une statue gigantesque, à la tête d'or, à la poitrine d'argent, au ventre d'airain, aux jambes de fer, aux pieds partie de fer, partie d'argile, qu'une pierre frappe aux pieds, c.-à-d. dans la partie la plus fragile, et renverse; la pierre, à son tour, devient une grande montagne, qui remplit la terre. Cette statue symbolise la succession de plusieurs empires à partir du temps présent, et l'avènement d'un royaume indestructible qui prendra leur place. 

III.  Les trois compagnons de Daniel sont jetés dans une fournaise pour s'être refusés, par scrupule religieux, à adorer la statue de Nabuchodonosor, mais ils traversent les flammes sans en être touchés et l'épreuve tourne à la gloire du Dieu d'Israël. 

IV. Nabuchodonosor expose à tous les peuples de son empire qu'à la suite d'un songe dont Daniel lui a expliqué le sens, il a été momentanément privé de raison en punition de son orgueil; en conséquence, il s'humilie devant le Dieu d'Israël, le « roi des cieux ». 

V. Pendant un grand festin que donne le roi Balthasar et ou il profane les vases du temple de Jérusalem, une main trace sur la muraille des caractères mystérieux; Daniel les explique dans le sens d'une prochaine catastrophe. En effet, dans cette même nuit, Darius s'empare de Babylone.

VI. Daniel, ayant contrevenu à un édit du roi Darius, interdisant d'adresser pendant trente jours des prières à un autre que lui-même, et continué ses exercices religieux accoutumés, est jeté dans la fosse aux lions, d'où il sort sain et sauf, ce qui amène la glorification publique du Dieu d'Israël. 

VII. Aux scènes ou épisodes précédemment décrits succèdent des visions communiquées à Daniel. La première, rapportée aux temps de Balthasar, a trait à différents animaux féroces, symbolisant la succession de différents empires; le dernier d'entre eux se livre à des violences inouïes contre les saints, c.-à-d. les Juifs, mais Dieu intervient pour le châtier d'une façon terrible et établir à jamais le royaume glorieux des descendants deJacob, qui commanderont à tous les peuples. 

VIII. Sous le même règne de Balthasar, Daniel a une nouvelle vision, où il est insisté sur la lutte entre un bélier (la Perse) et un bouc (Alexandre), qui foule aux pieds le premier et fonde un grand empire destiné à se briser bientôt en quatre royaumes. Dans l'un d'entre eux on signale un roi, qui se livre à d'abominables attentats contre le Temple de Jérusalem. Ce criminel ne restera pas impuni.

IX. Au temps de Darius, Daniel médite sur la prophétie de Jérémie annonçant la restauration de Jérusalem au bout de soixante-dix ans. L'ange Gabriel vient lui expliquer que ce chiffre désigne non des années, mais des semaines ou septaines d'années et lui expose les éléments d'un calcul, dont le terme marquera la fin des épreuves imposées aux Juifs. 

X. Au temps de Cyrus, Daniel reçoit de nouvelles révélations sur l'avenir glorieux qui succédera à d'aussi cruelles souffrances. De longues indications sont données sur les luttes entre les Ptolémées d'Egypte et les Séleucides de Syrie; le roi profanateur (Antiochus Epiphane) dont on a déjà relaté les fureurs et les violences, succombera dans un délai qui suivra de près le moment où il aura mis fin aux cérémonies légales du culte à Jérusalem.

Cette brève analyse suffit à faire comprendre l'esprit du livre. Le trait commun aux six récits, c'est la glorification du Dieu d'Israël, qui arrache ses serviteurs aux plus effroyables dangers et obtient l'hommage des monarques païens par les preuves éclatantes de sa toute-puissance. Les quatre visions qui remplissent le reste du livre roulent sur la succession des empires à partir de Nabuchodonosor, en insistant sur la fondation de l'empire d'Alexandre, sur les faits relatifs au royaume des Séleucides et sur l'effroyable persécution religieuse qu'un roi de cette dynastie dirigera contre les Juifs et leur religion. Ce roi est visiblement Antiochus Epiphane, dont le châtiment ou le « jugement », opéré par l'intervention surnaturelle de la divinité, marquera l'inauguration de l'ère messianique. Avant cette époque de glorieuse délivrance, se seront succédé quatre empires, le chaldéen, le mède, le perse, le grec : c'est trois ans et demi après la profanation infligée au temple par Antiochus que la divinité se vengera d'une façon éclatante en donnant aux Juifs l'empire de la terre.

Il  résulte de ces simples considérations que le livre de Daniel est un pseudépigraphe; que son auteur, qui vivait réellement à l'époque d'Antiochus Epiphane (170 avant notre ère) a, par une fiction ingénieuse, mis ses espérances sous le couvert d'un personnage illustre du passé. 

Daniel passait, en effet, pour un sage et un homme d'une piété extraordinaire (Ezéchiel, XIV, 14). S'il subsiste encore quelques difficultés d'interprétation dans le détail, notamment en ce qui concerne le calcul des soixante-dix semaines, l'ensemble est parfaitement clair et, sauf des opinions isolées, les exégètes s'accordent à placer la composition de ce livre entre 170 et 160 avant notre ère. La circonstance qu'il est écrit, partie en hébreu, partie en chaldéen, est encore un indice qu'il appartient aux derniers siècles qui précèdent le christianisme. C'est à tort que Ernest Havet a contesté cette date et prétendu ramener le livre de Daniel aux temps mêmes d'Hérode le Grand. La traduction des Septante, sur laquelle s'est guidée la Vulgate, présente, le même texte avec d'importantes additions, qui consistent dans les prières et chants d'Azarias et de ses compagnons dans la fournaise, l'histoire de Suzanne et des deux vieillards, le récit de Bel et du dragon.

Le Livre de Daniel est resté le modèle du genre apocalyptique et pseudépigraphe (Apocalypses juives). (Maurice Vernes).

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