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Le
concept de structure algébrique permet de formaliser et d'unifier
l'étude de différents ensembles munis d'opérations internes. Au lieu
d'étudier chaque cas individuellement, on définit des structures qui
partagent des propriétés communes, ce qui permet de développer des résultats
généraux applicables à de nombreux exemples.
Ingrédients d'une
structure algébrique :
• Un
ensemble. - On commence avec un ensemble non vide, qui peut être un
ensemble de nombres (entiers, rationnels, réels,
complexes),
de vecteurs, de matrices, de fonctions, etc. Souvent un deuxième ensemble,
doté de sa propre structure, peut être impliqué dans la définition
de la structure du premier ensemble.
• Une ou plusieurs
opérations internes. - On définit ensuite une ou plusieurs opérations
binaires (lois de composition) sur cet ensemble. Une opération binaire
est une application qui prend deux éléments de l'ensemble et leur associe
un troisième élément du même ensemble. On peut la représenter par
un symbole comme , , ,
o, +, ., . ou tout autre symbole. L'important est que l'opération
soit interne : le résultat de l'opération sur deux éléments de E doit
toujours être un élément de E. C'est ce qu'on appelle la stabilité
ou la fermeture par rapport à l'opération.
• Des axiomes
(ou propriétés) régissant les opérations. - Pour qu'un ensemble
muni d'une ou plusieurs opérations constitue une structure algébrique,
il est nécessaire que ces opérations vérifient certaines propriétés
(ou axiomes), qui définissent le comportement des opérations et permettent
de classer les structures algébriques. Exemples courants de propriétés
: l'associativité, la commutativité, l'existence d'une élément neutre,
l'existence pour chaque élément de son symétrique, la distributivité
(lorsqu'on considère deux opérations).
Les structures algébriques
sont des outils de pensée puissants. Elles permettent de traiter de manière
unifiée des ensembles apparemment différents, dès lors qu'ils partagent
la même structure. Elles permettent aussi de se concentrer sur les propriétés
essentielles des opérations, plutôt que sur les détails spécifiques
des ensembles. Les théorèmes et résultats démontrés pour une structure
algébrique particulière s'appliquent à tous les ensembles qui partagent
cette structure. Cela simplifie l'étude des objets mathématiques en donnant
la possibilité de les catégoriser. Les structures algébriques servent
de base pour classifier les ensembles selon les opérations qu'on peut
y définir et les propriétés qu'elles vérifient.
Jalons
historiques. - A partir du XVIIIe siècle,
les travaux de Leonhard Euler et Joseph-Louis
Lagrange en théorie des nombres ont introduit des idées qui allaient
influencer l'étude des structures algébriques. Par exemple, l'étude
des congruences modulo n a conduit à la notion d'anneaux. Les mathématiciens
ont commencé à s'intéresser à la nature des racines des équations
polynomiales et à leurs relations. Des concepts comme les permutations
des racines ont émergé. Le XIXe siècle
est considéré comme l'âge d'or de la naissance de l'algèbre abstraite.
L'attention s'est déplacée de la résolution d'équations spécifiques
à l'étude des structures sous-jacentes. Les travaux de Niels
Henrik Abel et Évariste Galois ont démontré
l'impossibilité de résoudre les équations polynomiales de degré cinq
ou plus par radicaux (formules utilisant uniquement les opérations arithmétiques
et l'extraction de racines). Les travaux de Galois, en particulier, ont
introduit la notion fondamentale de groupe comme un ensemble d'opérations
(permutations des racines) qui préservent certaines propriétés de l'équation.
La théorie de Galois a révolutionné la compréhension de la résolution
des équations polynomiales et a ouvert la voie à l'étude abstraite des
groupes. Les travaux de Cauchy sur les permutations
ont contribué à la formalisation de la notion de groupe. Arthur
Cayley a donné une définition axiomatique abstraite d'un groupe.
Richard
Dedekind a introduit la notion d'idéal dans le contexte de l'étude
des nombres algébriques, jetant les bases de la théorie des anneaux,
développée plus tard par Emmy Noether. Le concept
de corps (un anneau où tout élément non nul a un inverse multiplicatif)
a également été formalisé. George Boole a développé
une algèbre logique, l'algèbre de Boole, qui s'est avérée fondamentale
en logique, en informatique et dans l'étude des ensembles. Les travaux
sur les matrices et les déterminants ont conduit à l'étude des espaces
vectoriels et des transformations linéaires, formant le coeur de l'algèbre
linéaire. Au XXe siècle, le programme
de Bourbaki, un groupe de mathématiciens, a
eu une influence majeure en formalisant et en unifiant les différentes
branches des mathématiques, en utilisant une approche axiomatique.L'étude
des modules, des treillis, des catégories, et d'autres structures algébriques
s'est développée. Depuis, les structures algébriques ont trouvé des
applications dans de nombreux domaines, notamment en théorie des nombres
(théorie des corps de classes, géométrie arithmétique), en géométrie
(topologie algébrique, géométrie algébrique), en informatique
(cryptographie, théorie des codes, conception de langages de programmation),
en physique (physique des particules, théorie des groupes
de Lie et leurs représentations) et en chimie (symétrie moléculaire
et théorie des groupes ponctuels).
On présentera dans cette page quelques-unes
des structures algébriques les plus courantes (groupes, anneaux, corps,
espaces vectoriels, etc.). Ce sont aussi celles qui ont l'usage le plus
général.
Groupes
(E, )
est un groupe ou possède une structure de
groupe
si et seulement si :
1°) La
loi est une
loi de composition interne (
x, y E : x
y E);
2°) La loi
est associative ( x, y,
z E : x
(y z) = (x
y) z) ;
3°) il existe dans
E un élément neutre e (à gauche et à droite) pour la loi
de composition
( e | x
: x e = x et
e x = x) ;
4°) chaque élément
possède son symétrique ( x
: x' | x
x' = e).
Un sous-ensemble non
vide F de E muni d'une loi
est un sous-groupe de (E, ),
pour le dire sommairement, si et seulement si (F, )
est un groupe. Si l'on veut être plus explicite, on dira que (F, )
est un sous groupe de (E, ),
si et seulement F est stable pour la loi
et si le restriction à F de la loi
(encore notée )
munit F d'une structure de groupe.
Groupes particuliers.
Groupes
abéliens (ou groupes commutatifs).
Si (E, )
est un groupe et la loi de composition
est commutative (x y
= y x,
x, y E). alors (E, )
sera appelé groupe commutatif ou groupe abélien. Exemples
: ( ,+), les entiers relatifs
avec l'addition, ( ,+), les
réels avec l'addition, ( *,×),
les réels non nuls avec la multiplication.
Groupes
topologiques.
Un groupe topologique
combine la structure algébrique d'un groupe avec une structure topologique,
de manière à rendre compatibles les deux structures. Plus précisément,
un groupe topologique G est un groupe muni d'une topologie telle que :
La multiplication μ : G×G→G, définie par μ(a, b) = ab, est continue.
L'inversion i : G→G, définie par i(a) = a−1,
est continue.
Exemples : ( ,
+) avec la topologie usuelle des réels; ( *,
×), les nombres complexes non nuls avec la multiplication et la topologie
usuelle; les groupes de matrices GL(n, ),
SL(n, ), SL(n, ),
O(n), avec des topologies induites par les matrices.
Groupes
de Lie.
Un groupe
de Lie est un groupe topologique qui possède en plus une structure
différentiable, c'est-à-dire où :
La multiplication
μ : G×G→G, définie par μ(a,b) = ab, est différentiable.
L'inversion i : G→G,
définie par i(a) = a−1, est différentiable.
Exemples : ( ,
+), le groupe des réels avec l'addition; GL(n, ),
le groupe des matrices inversibles n×n sur ;
SO(n), le groupe des matrices orthogonales
de déterminant 1.
Un groupe de Lie
est étudié localement à l'aide de son algèbre de Lie, qui contient
des informations sur la structure infinitésimale du groupe.
Structures apparentées
aux groupes.
Monoïdes.
Un monoïde est
une structure algébrique plus simple qu'un groupe. Un monoïde (E, )
est un ensemble muni d'une opération binaire
associative, autrement dit : (x y) z
= x (y z),
x, y, z E, et pour
laquelle il existe dans M un élément neutre e, tel que x e
= e x = x,
x, y . Contrairement
à un groupe, un monoïde n'a donc pas besoin que chaque élément ait
un inverse. Exemples : Les entiers naturels ( ,+)
avec l'addition , où 0 est l'élément neutre; les matrices n×n sur un
corps ( , ,… )
sous la multiplication, identité étant l'élément neutre.
Demi-groupes.
Les demi-groupes
sont similaires aux monoïdes, mais sans élément neutre. Ils possèdent
seulement une opération associative. Un demi-groupe (E, )
est donc un ensemble muni d'une opération binaire
qui satisfait seulement la condition suivante : (x y) z
= x (y z),
x, y, z E. Contrairement
au monoïde, un demi-groupe n'a pas besoin d'avoir un élément neutre.
Exemples : ( *, +), l'ensemble
des entiers naturels non nuls; les fonctions de transformations sur un
ensemble X, avec la composition.
Anneaux
Soit (E, , )
l'ensemble E muni des lois de composition interne
et , on dira
que E ( , )
est un anneau si et seulement si :
1°) (E, )
est un groupe commutatif;
2°) la loi
est associative dans E;
3°) la loi
est distributive par rapport à la loi de composition
dans E.
S'il existe dans E un
élément neutre pour la loi .
Cet élément est appelé unité de l'anneau, et l'anneau est dit
d'anneau unitaire. Dans le cas contraire, on parle d'anneau sans
unité.
F étant un sous-ensemble
non vide de l'ensemble E, on dira que (F, , )
est un sous-anneau de (E, , )
si et seulement si F est stable pour les deux lois
et ,
et si ces lois (ou plus précisément leurs restrictions) munissent
F s'une structure d'anneau.
Note
: Lorsqu'on travaille sur les ensembles de nombres ( , , , , ,
… ), la loi notée ici ,
correspond à l'addition, et la loi .
D'où le choix, souvent fait, de noter la première loi +, et la seconde
. ou x, même lors qu'on a affaire à d'autres entités
que des nombres (applications, vecteurs, matrices, etc.). Cela conduit,
notamment, à parler d'opposé pour désigner le symétrique d'un élément
par la loi notée additivement, et d'inverse pour celle notée multiplicativement.
De même, l'élément neutre de la loi de composition correspondant à
l'addition sera noté 0, et celui de la la loi correspondant à la multiplication
sera noté 1. On retrouvera cette convention dans les paragraphes qui suivent.
Particularisations
et généralisations de la notion d'anneau.
Anneaux
Commutatifs.
Un anneau commutatif
est un anneau où la multiplication est commutative. En d'autres termes,
pour tous éléments a et b de l'anneau, on a a. b = b. a.
Exemples : l'ensemble
des nombres entiers relatifs ( )
avec l'addition et la multiplication habituelles; l'ensemble des réels
( ), des complexes ( ),
des rationnels ( )
avec les opérations usuelles, l'ensemble des polynômes
à coefficients dans un anneau commutatif.
La commutativité
de la multiplication simplifie souvent les calculs et rend l'étude des
anneaux plus abordable. Beaucoup d'anneaux couramment utilisés (comme
les nombres) sont commutatifs.
Anneaux
intègres.
Un anneau intègre
est un anneau commutatif non nul (c'est-à-dire qui contient au moins un
élément non nul) dans lequel le produit de deux éléments non nuls est
toujours non nul. Autrement dit, il n'y a pas de diviseurs de zéro autres
que zéro lui-même. On peut aussi dire qu'un anneau intègre est un anneau
commutatif non nul dans lequel si ab = 0, alors a = 0 ou b = 0.
Exemples : l'ensemble
des entiers relatifs ( );
l'ensemble des polynômes à coefficients dans un corps.
Les anneaux intègres
ont une propriété importante : on peut simplifier des égalités par
des éléments non nuls (ac = bc implique a = b si c ≠ 0). Ils sont les
cadres naturels pour étudier l'arithmétique
et les notions de divisibilité.
Anneaux
de valuation.
Un anneau de valuation
est un anneau intègre dans lequel pour tout élément non nul x du corps
des fractions de l'anneau, soit x est dans l'anneau, soit x⁻¹ est dans
l'anneau.
Exemples : l'anneau
des entiers p-adiques; l'anneau des séries formelles.
La notion d'anneau
de valuation est liée à la théorie des valuations, qui est une manière
d'attribuer des "tailles" ou "ordres" aux éléments d'un corps. Ces anneaux
permettent aussi d'étudier finement la structure d'un corps, notamment
en définissant des notions de "proximité" et de "convergence". Les anneaux
de valuation jouent un rôle important en théorie des nombres et en géométrie
algébrique.
Semi-anneaux.
Un semi-anneau est
une structure algébrique qui ressemble à un anneau, mais où l'addition
n'a pas forcément d'inverse. Autrement dit, il n'est pas forcément vrai
que pour tout a, il existe b tel que a + b = 0. On peut aussi dire que
(A, +, .) est un semi-anneau si (A, +) est un monoïde commutatif (associativité,
élément neutre, commutativité) et (A, .) est un semi-groupe (associativité
de la multiplication), la multiplication étant distributive par rapport
à l'addition.
Exemples : l'ensemble
des entiers naturels ( ) avec
l'addition et la multiplication habituelles; l'ensemble des idéaux
d'un anneau avec l'addition et la multiplication.
Les semi-anneaux
sont importants en informatique théorique et dans d'autres domaines où
l'on souhaite modéliser des situations sans nécessairement la présence
d'inverses pour l'addition (ex : dans la théorie des automates).
Anneaux
ordonnés.
Un anneau ordonné
est un anneau muni d'une relation d'ordre total (≤) compatible avec les
opérations de l'anneau : si a ≤ b, alors a + c ≤ b + c pour tout c;
si 0 ≤ a et 0 ≤ b, alors 0 ≤ a.b.
Exemples : l'ensemble
des entiers relatifs ( ), des
rationnels ( ),
et des réels ( ) avec l'ordre
usuel.
Les anneaux ordonnés
permettent de formaliser la notion de comparaison et de travailler avec
des inégalités.
Anneaux
gradués.
Un anneau gradué
est un anneau qui est une somme directe de sous-groupes additifs, indexés
par des éléments d'un monoïde. En termes plus simples, l'anneau est
"découpé" en parties (appelées composantes homogènes) selon un certain
système.
Exemple : l'anneau
des polynômes, où les composantes homogènes sont les polynômes de même
degré.
La graduation permet
de simplifier l'étude de certains anneaux en les décomposant en parties
plus faciles à manipuler. Ils sont utilisés en algèbre, en géométrie
algébrique et en physique.
Anneaux
booléens.
Un anneau booléen
est un anneau dans lequel tout élément x vérifie x² = x. Les
anneaux booléens sont toujours commutatifs et vérifient x + x = 0 pour
tout x.
Exemples : l'ensemble
des parties d'un ensemble, muni des opérations de différence symétrique
(l'addition) et d'intersection (la multiplication); l'ensemble {0,1} avec
+ défini comme XOR (OU exclusif) et . comme AND (ET).
Les anneaux booléens
sont liés à la logique, à la théorie des ensembles et à l'informatique.
Anneaux
de matrices.
Un anneau de matrices
Mn( ) est l'ensemble des matrices
carrées de même taille à coefficients dans un anneau ,
muni des opérations d'addition et de multiplication matricielles.
Exemple : l'ensemble
des matrices 2x2 à coefficients entiers.
Ils permettent d'étudier
des transformations linéaires et ont des applications importantes en algèbre
linéaire, en géométrie et dans la théorie des représentations.
En général, ils ne sont pas commutatifs, sauf si l'anneau des coefficients
est nul.
Corps
et étant
deux lois de composition interne définies sur une ensemble E, (E, , )
est un corps si et seulement si :
1°)
(E, )
est un groupe abélien;
2°) (E, )
est un groupe;
3°) La loi
est distributive par rapport à la loi
dans E.
Autrement dit, (E, , )
est un corps si et seulement si (E, , )
est un anneau unitaire dans lequel tout élément différent de l'élément
neutre pour la loi
a un symétrique pour la loi .
On parle de corps commutatif lorsque la
loi est commutative.
Etant donné une
sous-ensemble non-vide F de l'ensemble E, des conditions analogues à celles
qui ont permis de définir la structure de sous-anneau sont nécessaires
pour définir la structure de sous-corps : (F, , )
est un sous-corps de (E, , )
si et seulement si F est stable pour
et si (F, , )
a une structure de corps.
Un
corps est dit algébriquement clos si tout polynôme non constant à coefficients
dans ce corps admet au moins une racine dans ce corps. En d'autres termes,
tout polynôme de degré supérieur ou égal à 1 peut être factorisé
complètement en polynômes de degré 1.
Exemple et contre-exemple : Le
corps des nombres complexes
est algébriquement clos, comme le stipule le théorème fondamental de
l'algèbre. En revanche, le corps des nombres réels (
n'est pas algébriquement clos, car il existe des polynômes non constants
à coefficients réels (comme (x2 + 1))
qui n'ont pas de racines réelles.
Si un corps K est algébriquement clos, alors
tout polynôme de degré n à coefficients dans K a exactement n racines
(comptées avec leur multiplicité). Un corps algébriquement clos ne peut
pas avoir d'extensions algébriques non triviales (c'est-à-dire, différentes
de lui-même).
Espaces
vectoriels
On dit que (E, ,
•) un espace vectoriel sur (F, , )
si et seulement si :
1°) La
loi est une
loi de composition interne dans E telle que (E, )
soit un groupe abélien; les éléments de E sont appelés
vecteurs.
2°) Les deux lois
et dotent
F d'une structure de corps commutatif; les éléments de F sont appelés
scalaires.
3°) La loi de composition
externe • définie dans F x E vérifie les quatre propriétés suivantes
pour tout scalaire x, y et pour tout vecteur u, v-
:
x • (y
• u) = (x
y) • u
(x
y) • u = (x • u)
(y • u)
x • (u
v) = (x • u)
(x • v)
il existe
dans F un élément neutre e pour la loi de composition externe
• (pour tout v appartenant à E, e • v = v • e = v).
G, sous ensemble de
E, est un sous-espace vectoriel d'un espace vectoriel (E, ,
•) sur un corps commutatif (F, , )
si et seulement si : 1°) G est stable pour les lois
dans E et • dans E; 2° les restrictions à G de ces deux lois munissent
G d'une structure d'espace vectoriel sur F.
La
branche des mathématiques qui étudie les espaces vectoriels s'appelle
l'algèbre linéaire, en référence
à certaines applications, appelées applications linéaires, dont
l'étude y occupe une place importante : f est une application linéaire
de E sur le corps F si elle vérifie l'égalité :
f (x •u
y • v) = x • f(u)
y • f(v).
On
nomme dual algébrique de E l'ensemble de toutes les applications
de E dans F, et on le note E* (attention à ne pas confondre cette écriture
avec celle employée notamment pour nommer les ensembles de nombres auxquels
on a ôté le zéro).
Un
espace vectoriel (E, ,
•) sur (F, , )
peut aussi impliquer d'autres lois de composition. Un exemple, d'usage
très courant lorsqu'on étudie les vecteurs sur ( ,
+ x) en est fourni par le produit scalaire (notons-le "."
) entre deux vecteurs u et v, et dont le composé k est un scalaire (u.v
= k). Cette loi ne répond ni à la définition d'une loi de composition
interne, ni à celle d'une loi de composition externe.
Modules.
Les modules
sont une généralisation des espaces vectoriels où le corps de scalaires
est remplacé par un anneau. Essentiellement, un module est un ensemble
sur lequel on peut effectuer deux opérations : l'addition (comme dans
un groupe abélien) et la multiplication par des scalaires (mais ces scalaires
appartiennent à un anneau, et non nécessairement un corps comme dans
les espaces vectoriels).
Soit A un anneau
(commutatif ou non) avec élément neutre 1 (par exemple, les entiers,
les réels, les polynômes, etc.). Un A-module (à gauche) est un ensemble
M muni de deux opérations :
• Addition
(interne). - L'addition, notée +, munit M d'une structure de groupe abélien
: elle est associative, commutative, il existe un élément neutre, noté
0, et chaque élément m a son symétrique noté -m.
• Multiplication
par des scalaires (externe). La multiplication par un scalaire, notée
., satisfait les propriétés suivantes pour tous a, b dans A et
m, n dans M : distributivité par rapport à l'addition dans A , distributivité
par rapport à l'addition dans M , associativité mixte et existence d'un
élément neutre (de l'anneau), noté 1.
Les modules se différencient
des espaces vectoriels d'abord par la nature des scalaires : dans un espace
vectoriel, les scalaires appartiennent à un corps (par exemple, les réels,
les complexes). Dans un module, les scalaires appartiennent à un anneau,
qui n'a pas nécessairement d'inverse pour chaque élément non nul. Par
ailleurs, les corps ont des propriétés que n'on pas nécessairement les
anneaux (comme l'existence d'inverses multiplicatifs) qui permettent des
constructions et des résultats qui ne sont pas toujours vrais pour les
modules.
Les modules permettent
d'étudier des structures algébriques plus générales que les espaces
vectoriels. Ils sont fondamentaux en algèbre commutative, notamment dans
l'étude des anneaux, des idéaux et des extensions de corps. La théorie
des modules est étroitement liée à la théorie des représentations
de groupes. Les modules apparaissent dans de nombreux domaines, comme la
topologie, la géométrie algébrique (pour définir les concepts de variétés
algébriques, de schémas, de faisceaux, etc.) et l'informatique théorique.
En analyse, les modules sont utilisés pour définir les concepts de fonctions
analytiques, de séries de Taylor, de transformations
de Fourier, etc. En physique, les modules sont utilisés pour définir
les concepts de particules élémentaires, de champs, de forces, etc.
Algèbres.
Une algèbre
(algèbre associative) est une structure algébrique qui combine
les propriétés d'un espace vectoriel et d'un anneau. Plus précisément,
c'est un espace vectoriel sur un corps (ou un anneau commutatif) où l'on
définit une multiplication entre les éléments de cet espace, compatible
avec les opérations vectorielles.
Exemples d'algèbres
: l'ensemble des matrices n × n à coefficients dans un corps K,
avec l'addition matricielle et la multiplication matricielle; l'ensemble
des polynômes à coefficients dans un corps K, avec l'addition polynomiale
et la multiplication polynomiale, l'ensemble des fonctions d'un ensemble
X vers un corps K, avec l'addition et la multiplication définies point
par point.
La structure d'algèbre
offre un cadre mathématique puissant pour étudier de nombreuses structures
et concepts mathématiques. C'est une notion essentielle dans de nombreux
domaines comme l'algèbre linéaire, l'analyse fonctionnelle, la géométrie,
la physique théorique et bien d'autres.
Algèbre
de Lie.
Une algèbre
de Lie est un espace vectoriel avec une multiplication interne non
associative, appelée crochet de Lie (opération bilinéaire, antisymétrique
et satisfaisant l'identité de Jacobi). Ces algèbres sont importantes
en physique et géométrie.
Algèbre
de Clifford.
Utilisées en physique
et en géométrie, les algèbres de Clifford sont construites à
partir d'un espace vectoriel et d'une forme quadratique.
Autres structures
importantes
Treillis.
Un treillis
est un ensemble partiellement ordonné où, pour toute paire d'éléments,
il existe une borne supérieure (maximum) et une borne inférieure (la
plus grande limite inférieure, ou minimum).
On peut voir un treillis
comme une structure algébrique en définissant deux opérations binaires,
∨ (a ∨ b = sup (a,b)) et ∧ (a ∧ b = inf (a,b)) , qui satisfont
les propriétés suivantes pour tous les éléments a, b, et c dans le
treillis :
Idempotence
: a ∨ a = a et a ∧ a = a
Commutativité
: a ∨ b = b ∨ a et a ∧ b = b ∧ a
Associativité
: (a ∨ b) ∨ c = a ∨ (b ∨ c) et (a ∧ b) ∧ c = a ∧ (b ∧ c)
Absorption
: a ∨ (a ∧ b) = a et a ∧ (a ∨ b) = a
Exemples : l'ensemble
des parties d'un ensemble , ordonné par l'inclusion ( );
l'ensemble des entiers naturels, ordonné par la relation de divisibilité
("a divise b").
En informatique,
les treillis peuvent être utilisés pour la modélisation de l'information,
les bases de données ou la compilation de langage (analyse de code).
Algèbres booléennes.
Une algèbre
booléenne est un treillis distributif et complémenté, qui le rend
approprié pour la logique booléenne. Dans un treillis distributif, les
lois de distributivité suivantes sont vérifiées :
a ∧ (b
∨ c) = (a ∧ b) ∨ (a ∧ c)
a ∨ (b ∧ c) =
(a ∨ b) ∧ (a ∨ c)
Un treillis complémenté
est un treillis qui contient des éléments "0" (la plus petite borne)
et "1" (la plus grande borne) où, pour chaque élément a, il existe un
complément a' tel que a ∨ a' = 1 et a ∧ a' = 0.
Une algèbre booléenne
est ainsi un ensemble avec deux opérations binaires, ∨ et ∧, une opération
unaire (complémentation) ¬, et deux éléments neutres 0 et 1. Ces opérations
satisfont un ensemble d'axiomes qui peuvent être exprimés en termes de
ces éléments et opérations (treillis, distributivité, complément).
Exemples : les propositions,
reliées par les connecteurs logiques (ET, OU, NON), forment une algèbre
booléenne; les portes logiques (AND, OR, NOT) et les signaux qu'elles
traitent (0 ou 1) suivent les lois d'une algèbre booléenne; l'ensemble
des parties d'un ensemble avec union (∨), intersection (∧) et complément
(¬) est une algèbre booléenne.
Catégories.
Une catégorie
est une structure composée d'objets et de morphismes
(ou flèches) entre ces objets. Elle est basée sur l'abstraction des relations
entre objets plutôt que sur les objets eux-mêmes.On peut voir une catégorie
comme une structure algébrique avec une loi de composition (associative)
de morphismes, ainsi qu'une identité pour chaque objet (qui peut être
vue comme des "boucles" allant de l'objet vers lui même). Plus formellement,
une catégorie contient :
Une collection d'objets.
Pour chaque paire
d'objets A et B, une collection de morphismes (flèches) de A vers B, notée
Hom(A, B).
Une loi de composition
de morphismes : si f : A → B et g : B → C sont des morphismes, alors
il existe un morphisme g o f: A → C.
Pour chaque objet
A, un morphisme identité idA: A → A.
Ces éléments satisfont
les axiomes suivants :
• Associativité:
h o (g o f) = (h
o g) o f (où les compositions sont bien définies)
• Identité: idBo
f = f et f o idA = f (où f :
A → B).
L'intérêt des catégories
tient à leur haut niveau d'abstraction : les objets peuvent être n'importe
quoi (ensembles, groupes, treillis, programmes informatiques, etc.), et
les morphismes sont toutes les relations entre ces objets qui sont jugées
intéressantes (fonctions entre ensembles, homomorphismes entre groupes,
relations entre bases de données, transformation entre états de programme,
etc.).
Exemples : la catégorie
des ensembles, où les objets sont des ensembles, les morphismes sont les
fonctions entre ces ensembles; la catégorie des groupes, où les es objets
sont des groupes, les morphismes sont les homomorphismes de groupes; la
catégorie des treillis, où es objets sont des treillis, les morphismes
sont les morphismes de treillis (qui préservent les opérations ∨ et
∧); la catégorie des graphes, où les objets sont des graphes, les morphismes
sont les morphismes de graphes (qui préservent les sommets et les arêtes). |
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