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Histoire de la philosophie
Histoire de la philosophie
La philosophie italienne
jusqu'en 1900
[La philosophie]
S'il fallait faire remonter la philosophie italienne jusqu'à l'époque où l'on vit paraître des philosophes en Italie, on devrait partir de Pythagore et descendre jusqu'à l'époque romaine inclusivement; mais toutes ces diverses périodes appartiennent à la philosophie grecque. Aussi ne commencerons-nous à en résumer l'histoire qu'à partir de la philosophie médiévale, qui inaugure la philosophie italienne proprepent dite.

La philosophie italienne médiévale

C'est à peine si au Moyen âge l'Italie occupe une place un peu marquée dans la scolastique. Les efforts de quelques hommes depuis Cassiodore et Boèce jusqu'à Gerbert n'avaient pas été infructueux; le monastère de Bobbio était devenu l'asile des lettres dans l'Italie septentrionale, mais tout se bornait à sauver quelques débris du passé. Au XIe siècle, il y avait à Milan deux endroits où l'on enseignait la philosophie; on cite Anselme le péripatéticien et Drogon son maître : cependant il n'y avait aucune école de renom. Pierre le Lombard, le Maître des sentences, n'est qu'un compilateur.

Au Moyen âge, les dialecticiens dont on a retenue noms étudient et professent ailleurs que dans leur pays. Il en est ainsi de Lanfranc de Pavie, qui afondé l'école de l'abbaye du Bec et formé des disciples illustres, entre autres Béranger de Tours et saint Anselme d'Aoste, tous deux morts archevêques de Canterbury. Ce dernier fut un réaliste fameux; son plus grand mérite fut d'avoir, un des premiers, tenté de concilier la foi et la raison. C'était à Paris que Lotulfe de Lombardie, Anselme de Baggio, et tant d'autres, parmi lesquels brillèrent au premier rang Saint Thomas et Saint Bonaventure, venaient s'instruire et briller.

Saint Thomas d'Aquin fit un grand effort systématique : sa Somme est une construction puissante, sans cohésion suffisante, cependant, et sans véritable unité, où il est question de tout, de physique et de métaphysique, de religion et de morale. Ce Doctor angelicus ou universalis se montra du moins fidèle aux tendances de la philosophie italienne, en ce que le péripatéticien prédomina chez lui sur le platonicien. Après lui, les seuls noms à citer sont ceux du Doctor seraphicus, saint Bonaventure, et de Pétrarque, qui, dans ses derniers écrits, inclina au mysticisme. Malgré Brunetto Latini, Guide Cavalcanti, et leurs disciples Dante et Pétrarque, ce ne fut qu'à partir de la Renaissance que l'Italie vit naître quelques écoles dignes d'être citées. C'est même, en Italie que s'est à peu près toute concentrée la renaissance philosophique.

La philosophie italienne à la Renaissance

Gémiste Pléthon et le cardinal Bessarion y font connaître Platon quelques années avant la chute de Constantinople. Après cet événement, l'étude de l'Antiquité philosophique donna naissance, en Italie, à deux écoles, l'une platonicienne, et l'autre péripatéticienne. 

Les Platoniciens.
La première eut pour chef Marsile Ficin, qui traduisit Platon, Plotin, une partie des écrits de Porphyre, de Jamblique, de Proclus, et qui laissa une Théologie platonicienne.

On cite Jean Pic et François de la Mirandole, Francesco Patrizzi, qui tenta une conciliation entre Platon et Aristote, Campanella, auteur de l'étrange Cité du Soleil, qui voulut entreprendre une réforme de toutes les parties de la philosophie, Telesio, l'adversaire passionné d'Aristote, qui rappelle Démocrite et Parménide et en appelle à l'expérience; et le martyr de la libre pensée, Giordano  Bruno, le plus célèbre de cette école idéaliste, tout à la fois précurseur de Spinoza et de Leibniz, qui reproduisit la doctrine des nombres de Pythagore, ce qui le conduisit à soutenir le système de Copernic

Les Aristotéliciens.
L'école péripatéticienne comprend deux branches : l'une, dite alexandriste, du nom d'Alexandre d'Aphrodisie qu'elle prit pour guide, est sensualiste pure; l'autre, dite averroïste, d'Averroès, qu'elle avait pris pour maître, avait adopté un sensualisme qui conduit au panthéisme

Branche alexandriste.
Dans la première, qui fleurit surtout à Bologne on remarque P. Pomponace, Zarabella, F. Piccolomini, et Cremonini.

Branche averroïste.
Dans la seconde, Alexandre Achillini, qui commence à suivre Averroès, Zimara, Césalpini d'Arezzo et Jules-César Vanini, qui fut brûlé à Toulouse comme Giordano Bruno l'avait été à Venise. Parmi les derniers, sur les confins de la philosophie moderne, n'oublions pas Machiavel, qui préconisa, avant Hobbes, la morale politique de la force, Léonard de Vinci, qui professa l'enthousiaste observation de la nature, surtout Galilée, qui appliqua dans toute leur rigueur les lois de la méthode expérimentale, sans avoir rien dû à Bacon.

Entre le XVIIe siècle et la seconde moitié du XIXe

L'Italie, depuis Giordano Bruno jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, ne compte guère plus en philosophie qu'en politique. Vico est un historien systématique plutôt qu'un philosophe; l'économiste Galiani, le criminaliste Beccaria, Gioïa, encore un économiste, le jurisconsulte Romagnosi et Genovesi, lui-même économiste, n'ont pas d'autre philosophie que celle de d'Holbach, de Condillac ou de Locke

Au XVIIe siècle la philosophie jette peu d'éclat en Italie; la révolution opérée par Descartes y trouve à peine quelques représentants, Th. Cornelio et Ch. Majillo ; Descartes y trouva un aversaire illustre, Vico, si connu par sa théorie de la philosophie de l'histoire, théorie qu'il développa dans la Science nouvelle; en outre il prétendit donner la solution du problème de la certitude en plaçant le criterium de la vérité dans l'assentiment unanime du genre humain; c'était le fond de son opposition au cartésianisme

Malebranche trouva un sectateur zélé dans Fardella, professeur à Padoue; mais cet idéalisme ne réussit pas en Italie, surtout au XVIIIe siècle. L'économie politique fut cultivée avec succès, ainsi que le droit de la nature et des gens par Filangieri, Mario Pagano, Beccaria et Verri; la morale fut représentée par Muratori et Stellini. Dans le siècle actuel, Rosmini et Gioberti se sont distingués comme métaphysiciens; mais, en général, le procédé éclectique semble dominer entièrement, avec une tendance au spiritualisme, comme on le voit chez Galuppi et Mamiani, Tedeschi et Mancini. 

Ainsi Galuppi, vers 1820, inaugure une voie nouvelle : sa doctrine est un empirisme critique. L'influence de la philosophie allemande se fera de plus en plus sentir, avec ses disciples, hégéliens tempérés, et avec les Spaventa, de Sanctis, de Meis, Morselli, Vera, hégéliens orthodoxes. L'idéalisme plus ou moins uni à la métaphysique chrétienne s'annonce : Rosmini (1797-1855), Gioberti (1801-1852), Mamiani (1799-1885). Il est combattu par Franchi, qui professe ouvertement le scepticisme et la négation de la science. Cependant le positivisme, auquel devait bientôt succéder, combinée avec l'hégélianisme, la philosophie de l'évolution, s'accusait déjà chez deux disciples de Romagnosi, dont l'un, Ferrari, excluait le surnaturel de l'histoire, et l'autre, Cattaneo, excluait la métaphysique du nombre des sciences. Ce furent là des essais de tout ordre, plus que des constructions véritables; mais tout ce travail d'assimilation et de discussion a préparé le travail plus considérable de la fin XIXe siècle.

La philosophie italienne à la fin du XIXe siècle

A cette époque, on peut noter quatre directions principales de la philosophie italienne, à savoir : 

Philosophie néothomiste.
La philosopphie catholique officielle, néothomiste, fondée par le cardinal Pecci, frère du pape Léon XIII; la catholique d'opposition ou rosminienne (car elle s'appuie sur les ouvrages mis à l'index du théologien de Rovereto), qui publie à Alexandrie (Piémont) Il Nuovo Risorgimento, revue mensuelle soutenue par le parti conservateur du Parlement.

Ecole de la Rivista di filosopfia.
Il y a aussi une philosophie qui se proclame indépendante de l'Eglise, mais cherche un modus vivendi avec elle, et comprend toutes les nuances de la philosophie non expérimentale. Sa revue (Rivista italiana di filosofia), qui paraît à Rome, est dirigée par un péripatéticien distingué, L. Ferri, ancien élève de l'Ecole normale française, ancien secrétaire du comte T. Mamiani. Elle compte des rosminiens catholiques, comme Billia, des kantiens théistes, comme C. Cantoni, des disciples de Schelling, comme Corleo, qui a fondé à Palerme la Filosofia, autre revue du même genre, des herbartiens, comme Bonatelli et Fornelli, des hégéliens de la gauche, comme d'Ercole, des hégéliens du centre et de la droite orthodoxe comme B. Mariano. 

Monisme mécaniste.
Le monisme mécaniste, qui a eu pour organes trois revues : la Rivista di filosofia scientifica de Morselli, à Turin et à Gênes (1881-1891); la Rassegna Critica d'Angiulli, à Naples (1880-1889), et le Pensero Italiano d'Aporti (1890-1894), sans compter l'Archivio di psichiatria, la Scuola positiva, et autres périodiques de la nouvelle école de droit criminel de Lombroso et E. Ferri, etc. Cette philosophie a compté des adhérents plus ou moins remarquables, tels que le spencérien Siciliani (la Psicogenesi, la Nuova Biologia) qui a pris sa bonne part au renouvellement de la pédagogie, l'épicurien G. Trezza. (Epicura, Lucrezio), le positiviste-évolutionniste Angiulli, déjà cité, le physiologue Moleschott. 

Il faut, encore citer : Ardigo, dont les derniers volumes sur la Sociologie, le Vrai, la Science de l'éducation, sont très importants; Morselli, dont l'Anthropologie, sous presse, montre la rare et sûre érudition; Sergi, auteur d'une Psychologie physiologique et directeur du Laboratoire de psychologie expérimentale de Rome; Cesca, néokantien libre, critique solide, mieux renseigné que personne sur la philosophie allemande. 

Monisme dynamique.
Enfin le monisme dynamique de E. Caporali, qui, de 1884 à 1892, dans sa ville de Todi (Ombrie), s'est appliqué à rédiger seul la Nuova Scienza, revue renouvelant la philosophie italique de Pythagore, de G. Bruno et de Galilée : monisme, comme il le dit lui-même, de l'énergie, qui voit la cause de l'évolution cosmique dans la tendance de tous les éléments à l'unité. (Bernard Pérez / R.).

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