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Histoire de l'art > La peinture
L'histoire de la peinture jusqu'en 1900
La peinture en Allemagne
en Autriche et en Suisse
Aperçu Les écoles gothiques La Renaissance
L'école néo-classique La peinture au XIXe siècle : en Allemagne, en Autriche et en Suisse
La peinture fut cultivée de bonne heure en Allemagne. II ne reste rien des peintures murales dont Charlemagne avait fait décorer son palais d'Aix-la-Chapelle. A la fin du IXe siècle, Raban Maur, abbé de Fulda, donna les dessins d'après lesquels furent exécutées, les peintures de l'église de Mayence. Au siècle suivant, on représenta dans les palais de Mersebourg et de Magdebourg les victoires de Henri l'Oiseleur et d'Othon le Grand sur les Hongrois: Les ecclésiastiques étaient alors les principaux protecteurs de l'art; Bernard, évêque d'Hildesheim, emmenait dans ses voyages plusieurs artistes, pour copier les oeuvres remarquables; Meinwerk, évêque de Paderborn, attachait à son église une école de peinture. Pendant les XIe et XIIIe siècles, les églises et les palais furent décorés de peintures, qui sans doute n'étaient que des ébauches grossières, mais dont le nombre atteste du moins combien le goût des arts était répandu. De tous ces anciens travaux rien n'a survécu; on possède seulement quelques manuscrits enluminés, que conservent les bibliothèques de Munich et de Bamberg

Il y eut aux XIIIe et XIVe siècles, dans la ville de Cologne, une école célèbre, où l'on suivait les principes de l'art byzantin : ce sont, en effet, les mêmes fonds d'or, la même raideur des poses et des draperies, la même absence de perspective. Toutefois, on remarque dans cette école, dont quelques oeuvres existent à la galerie de Munich et dans les églises des bords du Rhin, la tendance à s'éloigner du caractère typique imprimé à la peinture par les Byzantins, et à substituer le génie individuel de l'artiste à la règle liturgique. Déjà l'école allemande prend un cachet particulier; elle imite la nature, mais sans la poétiser; privée des ouvrages de l'Antiquité qui eussent pu diriger son goût, moins portée que les écoles italiennes vers la beauté des formes, elle imprimera à ses oeuvres un caractère plus simple qu'idéal, plus naïf qu'héroïque. La Bohème avait, au XIVe siècle, son école distincte, que représentent Nicolas Wurmser, Kunze et Théodoric de Prague, et dont les oeuvres principales sont au château de Karlstein, près de Prague, et à la galerie de Vienne : on y dessinait moins exactement que dans l'école de Cologne, où brillaient Wilhelm et Stephan. Les archéologues reconnaissent aussi une école westphalienne, à laquelle appartient sans doute le Christ entouré de quatre saints, qui décorait jadis le cloître de Saint-Walbourg à Soest, et qu'on voit aujourd'hui à Munster; et une école bavaroise, dont un bon nombre d'ouvrages ornent les églises Saint-Sébald et Saint-Laurent à Nuremberg.

Dans l'art byzantin, la mosaïque était spécialement employée à la décoration des monuments. Avec l'architecture ogivale, la peinture sur vitraux prit naissance. Dès le XIe siècle, une verrerie était installée au monastère de Tegernesee. Les plus beaux produits de la peinture sur verre jusqu'au XVe siècle furent les vitraux des cathédrales de Strasbourg, de Fribourg, d'Augsbourg, de Francfort, d'Ulm et de Nuremberg, de l'église Sainte-Élisabeth à Marbourg. Parmi les artistes on cite : St Jean l'Allemand, qui orna de ses oeuvres plusieurs églises d'Italie; Paul et Christophe, qui allèrent travailler à la cathédrale de Tolède; Jean de Kirchheim, auteur des vitraux de Strasbourg; Judmann d'Augsbourg, Pierre Baker de Nordlingen, Volckhamer, Hirschvogel de Nuremberg, Jean Wild, Jean Cramer de Munich, etc.

La peinture gothique

Jusqu'au XVe siècle, les peintres s'étaient servis de couleurs à la détrempe, avec lesquelles ils peignaient sur les murs, sur des panneaux de bois, ou sur des toiles enduites de plâtre. La découverte de la peinture à l'huile, perfectionnée par Van Eyck (L'école de Bruges), accéléra la marche de l'art, et les Allemands, abandonnant entièrement le style byzantin, se mirent à imiter l'école Flamande. Alors parurent Isaac de Meckenen, Frédéric Herlin de Nordlingen, Martin Schoen, supérieurs à tous les autres peintres du même temps. Plus d'originalité existe chez Michael Wolgemut de Nuremberg, Martin Zagel et Jacob Walch.
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Wolgemut : Portrait d'Ursula Tucher.
Lochner : Martyre de saint Jean.
Portrait d'Ursula Tucher (1478),
par Michael Wolgemut.
Le Martyre de saint Jean (1440),
par Stefan Lochner.

Les origines des écoles allemandes.
De la Flandre à l'Allemagne, la transition est facile; entre les deux pays se sont établies d'étroites relations artistiques. La fidélité y est grande aux traditions gothiques; longtemps elles se maintiennent, sans qu'on surprenne la préoccupation marquée de l'Antiquité ou de l'Italie; mais dans tous les arts plastiques s'accentue la tendance au réalisme. Elle est visible chez les sculpteurs, dont plusieurs, Adam Krafft, Pierre Vischer, Veit Stoss, qui tous trois ont travaillé à Nuremberg, montrent beaucoup de vérité et de vie : le tombeau de S. Sebald à Nuremberg, que P. Vischer exécuta de 1508 à 1510, est l'oeuvre maîtresse de la sculpture allemande à cette époque. Cependant la peinture devient l'art par excellence. 

Dès le XIVe siècle, des écoles fleurissent à Prague, à Nuremberg, à Cologne surtout. L'école de Cologne a produit des oeuvres d'une candeur d'expression et d'une fraîcheur de coloris exquises. Stephan Lochner (mort en 1452) en fut le maître par excellence (ses oeuvres se trouvent à la cathédrale et dans les musées de Cologne). Ces mêmes qualités, avec un remarquable don d'expression dramatique, se retrouvent chez un peintre qui travailla à Hambourg, dans la première moitié du XVe siècle, maître Francke (ses oeuvres sont à la Kunsthalle de Hambourg). Martin Schongauer ou Schoen, de Colmar (vers 1450-1491), peut-être élève de Van der Weyden, outre quelques tableaux, a laissé de nombreuses gravures burinées avec fermeté et souplesse. L'Allemagne a disputé, non sans raison, à l'Italie l'honneur d'avoir pratiqué la première la gravure sur cuivre; des artistes habiles en ce genre avaient même précédé Martin Schoen.

La Renaissance

Le commencement au XVIe siècle vit fleurir les principaux maîtres de l'art allemand. Ce fut alors qu'Albrecht Dürer personnifia dans sa plus grande originalité la peinture en allemagne pour le pittoresque,  et son penchant vers le fantastique : peintre assez fécond pour que toutes les galeries importantes aient pu posséder plusieurs de ses tableaux, coloriste plein de fantaisie dans le jeu de la lumière et des ombres, graveur inventif et d'une rare finesse, Dürer introduisit dans l'école allemande une manière plus franche et plus libre, et exerça sur les pays voisins une grande influence, dont les Italiens Jean Bellini, André del Sarto, Pontormo, etc., ne cherchèrent pas à s'affranchir. Sur ses traces marchèrent Jean de Kulmbach, Scheuffelin, Aldegrever, Altdorfer, Beham, Pens, Grunewald de Nuremberg, Gutlinger et Burgmaier d'Augsbourg. A la même époque, Lucas Cranach était le chef d'une école rivale en Saxe. Dans la haute Allemagne, à Ulm, une autre école encore avait pour représentants Zeitblom et Martin Schaffner. Enfin, Hans Holbein, d'Augsbourg, avant d'aller se fixer en Angleterre, forma à Bâle une école qui a illustré la Suisse, et qui compte parmi ses maîtres Asper, Amberger, Stimmer, Amman, Meyer, les Füssli, etc.
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Altdorfer : Saint-Jérôme.
Saint-Jérôme (détail d'un diptyque), par A. Altdorfer (1507).

Albrecht Dürer.
C'est chez A. Dürer (1471-1528) que l'originalité de la peinture germanique du XVIe siècle se manifeste avec le plus de force et d'originalité. Il est né à Nuremberg, si pittoresque encore aujourd'hui, et qui était alors une des villes les plus prospères de l'Allemagne. Il étudia dans l'atelier de Wolgemut, à la fois peintre et sculpteur. A cette époque l'école de peinture de Nuremberg se transformait sous l'influence des Pays-Bas : elle devenait plus énergique, plus réaliste. Son apprentissage terminé, Dürer voyage quatre ans en Allemagne, peut-être même visite-t-il déjà Venise. En tout cas, si dès lors il connaît les gravures de Mantegna, s'il fait des emprunts aux maîtres d'au delà des Alpes, l'art italien n'exerce aucune influence profonde sur son talent déjà formé.

A partir de 1494, sa vie s'écoule presque entière à Nuremberg. Longtemps on a répété que l'humeur désagréable et cupide de sa femme, Agnès Frey, avait troublé son existence; mais des recherches consciencieuses ont prouvé qu'A. Dürer n'avait pas été si malheureux qu'on se l'imaginait. Deux voyages qu'il fit, l'un à Venise (1505-1507), l'autre aux Pays-Bas (1520-1521), sont connus par ses lettres et son journal. Sa renommée l'y avait précédé, ses estampes étaient recherchées à Venise, et Marc-Antoine lui-même les contrefaisait. Giovanni Bellini lui témoignait beaucoup d'amitié, Raphaël fut en relations avec lui, et la jalousie d'autres artistes, dont il se plaint, est une preuve même de la réputation qu'il avait conquise à l'étranger. En Allemagne, l'empereur Maximilien le chargeait de nombreuses commandes, assez mal payées, il est vrai, et notamment de dessins pour des arcs de triomphe, des cortèges. Il adhéra à la Réforme dès ses débuts et fut en rapports avec Luther, Melanchthon, Zwingle.
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Dürer : Melancholia.
La Mélancolie, par Albrecht Dürer (1513). Une gravure au burin qui symbolise
d'une façon  puissante et originale le néant de la science humaine.

A. Dürer a exécuté un assez grand nombre de tableaux. Parmi les meilleurs, on peut citer : l'Adoration des Mages, de 1504 (Florence, musée des Offices), la Crucifxion, de 1506 (musée de Dresde), la Madone, de 1516, la Trinité adorée par tous les saints (Vienne, Belvédère), les Quatre Apôtres (musée de Munich); mais ses dessins et ses gravures le font mieux connaître. Allemand par la pensée et par la forme, son imagination est puissante, mais sombre et fantasque; il se plaît aux sujets douloureux, aux conceptions étranges (Mélancolie, le Chevalier et la Mort, l'Apocalypse, etc.). D'autre part, l'expression est chez lui d'un réalisme que rien n'arrête : il introduit dans ses compositions les types les moins nobles, les détails les plus familiers, mais pour en tirer des effets imprévus de grandeur et de pittoresque. 

Si ses oeuvres peuvent paraître parfois rudes et sans harmonie, elles sont toujours pleines de vigueur et de sève. Quand il traite des sujets chrétiens (Passion du
Christ, Scènes de la vie de la Vierge), il leur donne un caractère local : types, costumes, moeurs, paysages, tout y rappelle l'Allemagne, mais il y mêle une poésie intime qui transforme la composition et la marque d'un caractère religieux. Ce sont bien les personnages de l'Évangile, mais sous les formes réelles et concrètes que leur prêtait l'imagination populaire. De même que Luther traduit la Bible dans la langue commune, A. Dürer traduit les croyances chrétiennes dans un art que, tous peuvent comprendre. Au point de vue technique, c'est encore un grand maître. Dans ses gravures, il procède avec une sûreté et une vigueur extraordinaires, en même temps qu'il sait s'attacher aux moindres détails, quelquefois même avec une trop minutieuse complaisance.

Hans Holbein.
A. Dürer est le chef de l'école de Franconie, l'école souabe, d'où sortent les Holbein, est moins indifférente aux préoccupations de beauté et d'élégance. Ces tendances s'accentuent chez son fils, et, s'il reste bien Allemand, il subit plus que Dürer l'influence de l'Italie; elle est sensible notamment dans l'architecture et dans les encadrements. Né en 1497 à Augsbourg, dès 1515 il est établi à Bâle. Les anecdotes qu'on a fait courir sur sa paresse et son ivrognerie sont des légendes. De 1526 à 1528, il tente une première fois fortune en Angleterre, il y retourne en 1532, et, sauf un court voyage à Bâle en 1538, il y reste jusqu'à sa mort (1543), fort apprécié et, à partir de 1536, employé par Henri VIII. Portraitiste, il est d'une sincérité et d'une précision incomparables (plusieurs portraits au musée de Bâle, portraits d'Érasme, d'Anne de Clèves, au Louvre, etc.). 
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Le Maître d'école (miniature), par Holbein le Jeune (1517).

Peintre religieux, il a exécuté de nombreuses madones; parmi les plus belles est celle de Darmstadt. Son Christ mort du musée de Bâle (1521), oeuvre réaliste, où le dessin et la couleur conspirent à accuser les horreurs du cadavre, est effrayant de vérité. Mais, en même temps, l'expression qu'ont gardé les traits du Christ au moment de la mort est d'une beauté tragique. Tout s'y lit, les ardeurs passées, les luttes douloureuses, la foi dans l'oeuvre, les angoisses de l'agonie morale : la bouche est entrouverte comme pour un dernier cri, dernière adjuration. Cette inspiration se retrouve dans d'autres oeuvres, et notamment dans les dix dessins de la Passion (musée de Bâle), où toutes les souffrances du Christ sont rendues d'une façon poignante. 

Ces dessins sont certainement ce qu'il a fait de plus puissant comme composition. Ses portraits au crayon et à la plume, légèrement relevés de tons de chair, sont merveilleux de précision, de souplesse et de vie; jamais la physionomie n'a été saisie avec plus de simplicité et de naturel. Il avait abordé aussi la grande décoration et les sujets antiques dans ses peintures murales de la salle du Conseil à Bâle, qui, par malheur, ont presque entièrement disparu. Enfin Holbein a composé de nombreux dessins pour la gravure : les 83 dessins pour l'Éloge de la Folie d'Érasme, l'Alphabet de la Mort, les Simulacres de la Mort, où il retrace avec une verve inépuisable et une ironie lugubre les triomphes de la Mort sur la puissance et la beauté comme sur la misère.
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Holbein : le Duc de Norfolk.
Cranach : le Vieil amoureux.
Portrait du Duc de Norfolk (1539),
par Hans Holbein.
Le Vieil amoureux,
par Lucas Cranach.

Lucas Cranach.
Parmi les contemporains d'A. Dürer et d'Holbein, Lucas Cranach (1472-1553), sans les égaler, possède un talent original. Ses madones sont de jeunes Allemandes, fraîches et fines, dont le visage séduit par un mélange de candeur et de mièvrerie. En outre, il aime à peindre le nu (plusieurs figures d'Adam et d'Ève) et emprunte des sujets à la mythologie païenne (Vénus, au Louvre); mais, par la conception comme par le style, il est étranger à l'art antique; ses figures, aux formes souvent pauvres et trop longues, sont posées avec une élégance maniérée.

Une influence de la Réforme?
On a discuté l'influence qu'exerça la Réforme sur les arts. Sans doute les idées nouvelles ont parfois déchaîné contre les anciens monuments religieux des bandes d'iconoclastes; cependant Luther ne proscrivait pas les arts; A. Dürer, Holbein, Cranach étaient protestants et ne renoncèrent ni à la peinture ni aux sujets sacrés. Peut-être les doctrines qu'ils adoptèrent contribuèrent-elles à les affranchir du respect des traditions et développèrent-elles chez eux la tendance à donner à l'art chrétien une forme populaire; mais, avant Luther déjà, c'était de ce côté que se dirigeait l'école allemande.

Le XVIIe et le XVIIIe siècle

La peinture en Allemagne, dès la seconde moitié du au XVIe siècle. Ce déclin s'accentura encore au au XVIIe siècle  : Schwartz, Goltzius, Rottenhammer, Heinz, Elzheimer, Sandrart, Screta, Kupetski, Joseph Werner, Brandel, Pierre de Strudel, se proposèrent les Italiens pour modèles. Zingelbach, Kneller, Poelenburg, Mignon, Dietrich, s'attachèrent de préférence aux maîtres flamands et hollandais. Puis l'école française du temps de Louis XIV trouva aussi des imitateurs, Brandmuller, Rugendas, Huber, etc.

L'école néo-classique.
Au XVIIIe siècle, deux artistes, d'un goût très différent, voient le jour en Allemagne. Le premier, Chodowieki (1726-1801), médiocre peintre d'histoire, se montre fin observateur et quelque peu ironiste dans les sujets de genre, dont s'emparent les graveurs; l'autre, Raphaël Mengs (1728-1779), imbu des idées de Winckelmann, son ami, est l'un des champions de la renaissance néo-classique, dont le succès s'affirme dans les divers pays durant la seconde moitié du XVIIIe siècle. Pris au sérieux pour un temps, et à Rome même où il décora la villa Albani et dota de fresques la bibliothèque du Vatican, Mengs a vu sa réputation décroître avec les années, son art étant rejeté comme convaincu d'aridité académique.
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Mengs : le Jugement de Pâris.
Le Jugement de Pâris, par Raphaël Mengs (1757).

On cite encore J.-A. Tischbein (1722-1789), rallié aux mêmes principes, et dont le musée de Kassel conserve un caractéristique Ecce homo. Bref, si l'Allemagne, en ce siècle de grâce et de spirituelle observation, veut participer à un art de séduction, force lui est de demander la collaboration d'artistes étrangers, français comme A. Pesne (1683-1757) et Ch.-A.-Ph. Van Loo (1719-1795), ou italiens comme Canaletto et J.-B. Tiepolo, décorateur prestigieux du château de Wurtzbourg.

Le XIXe siècle

Les Nazaréens.
Sous l'influence du romantisme grandissant, au XIXe siècle, le Viennois Moritz von Schwind (1804-1871) fut le premier à traiter des épisodes du Moyen âge. Mais la principale réaction partit, vers 1810, d'un groupe d'artistes, catholiques ardents, surnommés les Nazaréens, qui vivaient à Rome : Overbeck (1789-1869), Cornelius (1783-1867), Fürich (1800-1876), Schnorr von Carosfeld (1794-1879), travailleurs et instruits, mais au talent limité. Overbeck n'a exécuté que des pastiches maladroits de primitifs italiens. Cornelius et Kaulbach ont peint à Berlin et à Munich des cycles d'oeuvres à tendances philosophiques, lourdes de pensées et d'intentions.
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Kaulbach : la Bataille de Salamine.
La Bataille de Salamine, par Wilhelm von Kaulbach (1868).

Des Nazaréens prirent la tête des deux grands centres artistiques allemands : Munich et Dusseldorf. L'école de Munich fut fondée par Cornelius, qui en fut avec Kaulbach (1805-1874) le principal protagoniste. Ils servirent les desseins de Louis Ier qui les avait appelés, car il voulait faire de sa capitale une Athènes allemande, bâtie avec des copies de temples grecs et de palais florentins. 

A la génération suivante, cette école se continue par des peintres d'histoire tels que Piloty (1826-1886), inféodé aux Français et à Delaroche, et Makart (1840-1884), virtuose imitateur des Vénitiens qui joua plus tard un grand rôle à Vienne. Ensuite, elle subit une éclipse. Un autre Nazaréen avait fondé, en 1826, l'école de Dusseldorf, imprégnée de romantisme rhénan, de vieilles légendes que traduisent Hildebrandt (1804-1874), Sohn (1805-1867), Steinbrück. Ils avaient été précédés dans ce genre par Rethel (1816-1859), auteur de la Salle impériale à Aix-la-Chapelle, et par Moritz von Schwind, déjà cité, qui avait traité des sujets romantiques à Stuttgart, Munich et Vienne

C.-D. Friedrich.
Caspar David Friedrich, souvent rattaché au romantisme, mais qui occupe une place singulière, est un peintre paysagiste allemand. Il est né à Greifswalde le 5 septembre 1774 mort à Dresde le 7 mai 1842. Il étudia à Copenhague sous Ouisdorf. Ses ouvrages les plus connus sont deux toiles au château de Berlin, d'autres au château de Tetschen en Bohème et surtout le Wanderer über dem Nebelmeer (ou le Promeneur au-dessus de la mer de nuages). Il fut nommé professeur à l'Académie de Dresde en 1807 et en 1840 membre de l'Académie de Berlin. Il a aussi gravé sur cuivre.
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Friedrich : Der Wanderer über dem Nebelmeer
Le Promeneur au-dessus d'une mer de nuages,
par Caspar David Friedrich (1818).

Naturalisme et réalisme.
Ensuite, le centre artistique de l'Allemagne du Nord se déplaça. Berlin voulut être une capitale de l'art. C'est dans le milieu berlinois plus précis et moins rêveur que s'élabora la réforme réaliste de Menzel (1815-1905); il rompt avec ses prédécesseurs par ses tableaux de genre qui l'apparentent à Meissonier et par ses scènes de la vie contemporaine. Il a pour lieutenants Werner (né en 1843), Gussow et Max Michel. Après Menzel, le chef du réalisme dans l'Allemagne du Nord sera Max Liebermann (1849-1935). Cependant, Munich redevient la capitale de l'art. Ses deux sociétés aux nombreux membres. ses expositions, les plus célèbres de toute l'Allemagne, lui assurent de nouveau l'hégémonie artistique. Un groupe d'artistes, les élèves d'Arthur de Ramberg, au premier rang desquels se place Leibl (1844-1900), le champion du réalisme en Allemagne, reçoit triomphalement Courbet. De même, en 1879, c'est Munich qui révèle les impressionnistes à l'Allemagne.

Après Leibl, Lenbach (1836-1904) est à Munich le principal représentant du réalisme. Intelligent et érudit, ce serait uniquement un virtuose ayant su analyser et s'approprier les manières de plusieurs grands maîtres, si ses portraits, notamment ceux de plusieurs célébrités de I'Allemagne contemporaine, Bismarck, Moltke, etc., n'étaient remarquables par leur acuité psychologique. Cependant l'idéalisme reprend ses droits. 

Retour à l'idéalisme.
C'est Munich qui lance le Bâlois Boecklin (1827-1899), inventeur d'un nouvel art aux yeux des Allemands, sur qui il exerça une profonde attraction non point tant par ses paysages que par ses mythologies pesantes au trait alourdi, parfaitement germaniques d'inspiration. Hans von Marées (1837-1887) est, avant tout, un décorateur dont les compositions, notamment ses fresques à l'Aquarium de Naples, montrent des recherches originales, quoique desservies par un dessin sans force et un coloris sombre et terne. Le sculpteur Klinger se montre, dans ses tableaux, raffiné et poétique. Hans Thoma (1839-1924) interprète de vieux contes dans une manière naïve calquée sur les primitifs allemands. Plus jeune, Fritz von Uhde (1848-1911 ) mêle le réalisme à l'idéalisme dans des scènes évangéliques à costumes modernes. Franz Stuck (né en 1863), chef de la jeune école munichoise, procède de Boecklin (Böcklin) avec un style plus synthétique. 
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Stuck : le Péché.
Le Péché, par Franz Stuck (1893).

Les Sécessions et les autres groupes.
Avec Trübner, Uhde et Stuck fondent, à Munich, en 1892, le mouvement et la revue Sécession en réaction contre l'art académique du moment. Munich verra aussi naître quelques années plus tard (1901), le groupe die Phalanx ( = la Phalange),  initié par Kandinsky, d'où sortira la Nouvelle Association des Artistes (Neue Künstlervereinigung), plus connue sous le nom de Cavalier Bleu (der Blaue Reiter). De son côté,  Gustav Klimt crée à Vienne une autre Sécession, orientée vers l'Art Nouveau en 1897. Enfin, une Sécession berlinoise se crée en 1899, à l'initiative de Lieberman, de laquelle naîtra une Nouvelle Sécession (expressionniste), en 1910. Parmi les autres mouvements nés de cette effervescence, on doit aussi nommer, dans les premières années du XXe siècle, le groupe die Brücke ( = le Pont), constitué en 1905 par E.-L. Kirchner, E. Heckel, F. Bleyl, K. Schmidt-Rottluf, et qui a certaines affinités avec les Fauvisme, tout en constituant, avec le Cavalier Bleu, l'un des jalons de l'Expressionnisme.

Ailleurs, dans l'espace germanophone.
Terminons en disant deux mots des autres pays de langue allemande. Outre Boecklin, la Suisse allemande a donné Hodler (1853-1918), de Zurich, qui a surtout évoqué l'histoire de Suisse en des compositions au dessin très appuyé et aux couleurs extrêmement vives. Quant à l'activité de I'Autriche, on l'a vu déjà avec la Sécession viennoise, elle se confond en partie avec celle de l'Allemagne. C'est là que sont nés Moritz von Schwind, Makart, Gabriel Max. Il faudrait aussi nommer Ferdinand Georg Waldmüller ou Friedrich von Amerling, parmi beaucoup d'autres. C'est chez Piloty que se forma le Hongrois Munkacsy (1844-1900), auteur du Christ devant Pilate, qui connut en son temps, à Paris, un triomphe éclatant suivi de défaveur. Son compatriote Lazlo (né en 1869) a fait son éducation à Paris. (B. / HGP).

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