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Boulogne ou
Boulogne-sur-Mer, Gesoriacum et Bononia (réunies),
peut-être Itius portus ;
port de mer, dans le département du Pas-de-Calais, à 108
kilomètres au Nord-Ouest d'Arras, à
l'embouchure de la Liane dans la Manche, à 300 kilomètres
de Paris environ. Premier port de pêche
français; muraille flanquée de tours rondes et renfermant
un château fort. Jolie ville, divisée
en haute et basse; 43 600 habitants (2006).
Boulogne comprend deux parties bien distinctes.
La haute ville (ou Vieux-Boulogne) occupe sur la droite de la Liane un
plateau quadrilatéral de 57 m d'altitude et d'environ 1300 m de
tour; il est entouré de murs de défense construits au XIIIe
siècle, et munis, de distance en distance, de demi-tours rondes
dont la hauteur est de 17 m. Au coin Nord-Est se dresse le château
construit par le comte Philippe Hurepel
(1231). Ces remparts du Moyen âge
ne sont plus qu'une suite de promenades (des Dunes, de la Bienfaisance,
de Calais, des Petits-Arbres) : des points les plus élevés,
par un beau temps, on découvre les falaises blanches du Sussex et
le château de Douvres. Les rues du vieux Boulogne sont étroites,
obscures, mais les maisons spacieuses. La basse ville s'allonge au pied;
elle a suivi toutes les transformations naturelles ou artificielles de
la Liane, absorbé une île (Saint-Laurent) qui fait partie
maintenant de la rive droite, franchi le fleuve sur deux ponts; maintenant
elle se développe sur la rive gauche (faubourg de Capécure).
La basse ville, construite d'une façon toute moderne, appartient
au commerce, à l'industrie, aux constructions maritimes; les cinq
ou six mille Anglais qui s'y étaient établis vers la fin
du XIXe siècle avaient contribué
à l'enrichir et ils lui avaient imprimé une physionomie tout
anglaise. Une partie de la ville, le long de la mer, détruite par
les bombardements au cours de la Seconde guerre mondiale, a été
reconstruite depuis, ce qui ajoute encore à la physionomie plutôt
moderne de Boulogne.
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Les
fossés du château de Boulogne.
Les églises
de Boulogne sont elles aussi relativement récentes pour la plupart.
Notre-Dame (1827-1866) a été bâtie sur l'emplacement
de la cathédrale démolie
en 1798; une partie de la crypte est du XIIe
siècle: mais toute l'attention est attirée par la statue
colossale de la Vierge
(oeuvre du sculpteur Bonassieux), et par le chef-d'oeuvre de la mosaïque
moderne, le maître-autel donné
par le prince Alexandre Torlonia. De la deuxième moitié du
XIXe siècle datent aussi Saint-François-de-Sales,
Saint-Vincent-de-Paul, Saint Michel, la chapelle
gothique de Notre-Dame du Saint-Sang, le temple protestant ,
et cinq chapelles anglaises. Une partie de Saint-Nicolas appartient au
XIIe siècle; Saint-Pierre-des-Marins
est du XIVe.
L'ancien palais des comtes de Boulogne ,
où naquit Godefroy de Bouillon, a fait
place à l'hôtel de ville, dont la seule partie ancienne est
la tour du beffroi (XIIIe
siècle). L'ancien évêché, le séminaire
sont du XVIIIe siècle; l'un est
devenu un collège ecclésiastique, et renferme les portraits
des douze évêques de Boulogne l'autre est le musée,
très riche en antiquités romaines, vases et médailles.
La bibliothèque (40 000 volumes) a 300 manuscrits dont plusieurs
très importants (VIe, IXe,
Xe et XVe
siècles).
Sur la route de Calais s'élève
la colonne napoléonne ou de la Grande-Armée (hauteur : 53,50
m). Votée par l'armée de Napoléon
ler pour
perpétuer le souvenir du camp de Boulogne, elle fut construite sur
les plans de l'architecte Labarre (ordre dorique : piédestal
avec bas-reliefs ,
fût uni en marbre gris-brun de Boulogne, avec escalier
intérieur). En 1814, elle était inachevée. Louis
XVIII la destina à célébrer la Restauration; en
1821 elle fut surmontée d'un piédestal circulaire, avec un
globe fleurdelisé et couronné. Louis-Philippe
la rendit à sa destination primitive : le 15 août 1841, était
inaugurée définitivement la Colonne napoléonne, avec
la statue
en bronze due à Joseph Bosio. L'altitude
du monument, au-dessus de la mer, est de 148 mètres. Au Nord-Ouest
de Boulogne, on montre encore quelques vestiges de l'ancienne tour d'Ordre
(vulgairement d'Odre), qui était attribuée à Caligula
et qui fut démolie en 1645.
Histoire.
La ville basse, en amont de la Liane (faubourg
de Bréquerecque) fut, sous le nom de Gesoriacum, un oppidum
du peuple Morin (Morini). La haute ville est d'origine romaine
: il est probable que c'est une colonie de légionnaires césariens,
qui lui donnèrent le nom italien de Bologne (Bononia) : ce
dernier nom devint prédominant à l'époque de Constantin,
et finit par être employé exclusivement. L'embouchure de la
Liane (autrefois : Elne, nom latin inconnu) fut sous l'empire romain
une station navale des plus importantes, et le port d'embarquement ordinaire
pour la Bretagne
(portus britannicus, classis britannica). C'était
le seul point de la côte de Morinie qui présentât les
condition requises de sécurité et de commodité «
à l'abri des coup de mer, à portée des bois et matériaux
de construction ». D'après l'abbé Haigneré,
Ernest Desjardins, Mariette-Bey, Napoléon
III, le docteur Hamy, etc., c'est aussi
de l'embouchure de la Liane que Jules César
serait parti, en 54 et 55. Les Commentaires appellent l'endroit
portus Itius
(aujourd'hui Isques, en amont de la basse-ville); le promontorium Itium
de Ptolémée est placé à
la même latitude
que Gesoriacum, et serait la pointe d'Alprech, et non le cap Gris-Nez,
situé plus au Nord. Cependant d'autres auteurs, Camden,
du Cange, d'Anville, de Sauley, et la commission
de topographie des Gaules plaçaient le portus Itius à Wissant.
La discussion des textes l'examen des distances, surtout si l'on prend
à la lettre le mot de César (de Bello gallico, IV,
21 : brevissimus, in Britanniam trajectus), fournissent des raisons
sérieuses en faveur de Wissant. Mais la topographie n'en fournit
aucune, et il est impossible de prouver que cette dernière localité
ait présenté un port suffisant pour 900 navires portant chacun
150 hommes, et un emplacement convenable à un camp et à des
communications faciles avec l'intérieur. Quant à l'analogie
étymologique de Wissant et de Itius, elle n'existe pas; Wissant
veut dire sable blanc (white sand). Ajoutons enfin cette
preuve, que les Romains, très attachés au souvenir de Jules
César auraient sans doute colonisé Wissant, et que les grandes
voies s'y rattacheraient : ce qui n'est vrai que de BouIogne.
En tout cas, c'est bien à Boulogne
que s'embarquèrent les empereurs Claude
et Hadrien. C'est la plage de Boulogne qui avait
vu Caligula s'avancer avec une armée
munie de toute espèce d'engins de guerre, puis ordonner à
ses soldats de remplir de coquillages
leurs casques et leurs tuniques, et revenir triompher à Rome : auparavant
il avait fait construire une tour très élevée, qui
servit de phare jusqu'en 1645 (tour d'Ordre), Carausius,
l'usurpateur d'origine gauloise qui prit la pourpre en Bretagne
(287), avait reçu le commandement de la flotte de Boulogne, dont
il se servit pour sa révolte; la prise de Boulogne, devenu un repaire
de pirates, par Constance Chlore (292),
entraîna la perte de Carausius (293).
Constantin
séjourna deux fois à Boulogne. Occupée par les Francs,
elle fut fortifiée par Charlemagne;
prise par les Vikings
(882), elle devint le chef-lieu du comté de Boulogne ou Boulonnais ,
avec lequel elle confond en grande partie son histoire. En 1347, elle résiste
à Édouard III; en 1544, elle est prise par Henri
VIII; elle est restituée par le traité d'Outre-Eau (24
mars 1550); elle est le chef-lieu d'une sénéchaussée,
présidial (ressort du Parlement de Paris),
et d'un gouvernement particulier. En 1553, Charles-Quint
ayant détruit entièrement Térouanne, le siège
épiscopal de cette ville est transféré à Boulogne.
Le
Beffroi de Boulogne.
Boulogne avait son palladium chrétien,
une statue
très ancienne de la Vierge ,
à qui l'on attribuait des miracles .
Louis XI lui fit hommage du Boulonnais
(1478). La légende disait que cette madone était entrée
d'elle-même dans le port de Boulogne sous le règne de Dagobert.
En 1544, elle fut prise par les Anglais; elle revint, toujours miraculeusement
selon la légende, en 1550 : et la preuve en était qu'on la
retrouva en 1607 dans un puits! Le culte de Notre-Dame est resté
très populaire à Boulogne, et a provoqué de nombreux
pèlerinages.
Quant aux événements qui
se sont passés à Boulogne sans l'intéresser directement,
ce sont : le traité du 19 octobre 1360, signé par la Dauphin
Charles (plus tard Charles V) et Édouard
III, confirmé par Jean le Bon alors
prisonnier, et qui ratifia et compléta le traité de Brétigny
(8 mai); le traité (de commerce) de 1497 (24 mai) entre Charles
VIII et Henri VII. Lorsque l'Angleterre
eut rompu (1803) la paix d'Amiens, c'est à
Boulogne que Napoléon prépara
contre l'Angleterre une expédition maritime déjà projetée
en 1801 (premier camp de Boulogne). La coalition de l'Angleterre avec la
Russie
et l'Autriche
força l'empereur à lever le second camp de Boulogne (24 août
1805).
On appelle tentative de Boulogne la seconde
entreprise insurrectionnelle du prince Louis-Napoléon
Bonaparte contre le gouvernement de Juillet. Au moment où la
question d'Orient
reconstituait contre la France
une véritable Sainte-Alliance, le « neveu de l'empereur »
crut le moment favorable pour se présenter en vengeur de l'honneur
national. Débarqué à Wimereux le 5 août 1840,
il fut aussitôt arrêté, traduit devant la cour des pairs,
et enfermé, d'abord au Vieux-Château de Boulogne, puis au
château de Ham
d'où il s'évada en 1846. Cette tentative n'avait paru que
ridicule, et n'avait pas empêché Louis-Philippe
d'inaugurer, le 15 août 1841, la colonne de Boulogne. Mariette,
Daunou, Cuvelier,
Sainte-Beuve sont nés à Boulogne.
(H. Monin).
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Les
armoiries actuelles de Boulogne, qui lui ont été concédées
par Charles X (lettres patentes du 5 février
1830), sont-
: D'or à trois tourteaux de gueules, qui sont du comté, et
en abyme un écusson du même chargé d'un cygne d'argent,
qui sont de la ville. |
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