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Les marnes
Le mélange intime de l'argile avec du carbonate de chaux donne naissance, dès que la proportion de ce dernier élément atteint 20%, aux marnes, c.-à-d. à des roches qui, perdant la plasticité habituelle des dépôts franchement argileux, peuvent se présenter compactes, avec un toucher gras onctueux, et sans trace de stratification apparente ou d'autres fois fissiles, débitées en minces plaquettes, voire même feuilletées quand leurs éléments s'alignent. Leur compacité est d'autant mieux accentuée qu'elles sont plus calcarifères; inversement une proportion plus forte d'argile les rend grasses et propres à la fabrication des tuiles. Telles sont dans les environs immédiats de Paris les marnes ou glaises vertes qui avec celles jaunes, très feuilletées, à cyrènes sous-jacentes, déterminent à flanc de coteau, sous la masse puissante des sables de Fontainebleau, un niveau d'eau important, en se présentant partout exploitées pour tuileries, tandis que de gros rognons de strontiane sulfatée inclus dans la masse sont recherchés pour les feux d'artifice.

Le plus souvent marquées de colorations claires, grisâtres, il en est de très calcarifères qui, dans les assises tertiaires, comme celles oligocènes supragypseuses de Pantin ou éocènes comme les marnes blanches thanétiennes de Meudon, peuvent atteindre, avec l'aspect, la blancheur de la craie; par contre, les teintes brunes sont le signe caractéristique de la prédominance de l'élément argileux. La présence du fer, suivant son degré d'oxydation et d'hydratation, y engendre ensuite des colorations vives, jaunes, rouges ou bariolées de vert (marnes irisées du Triassique); en même temps essentiellement argileuses, ces marnes ferrugineuses fournissent partout des terres grasses, collantes, impropres à la culture. Par contre, leur mélange avec des particules quartzeuses extrêmement fines donne naissance à des marnes sableuses, sans consistance, capables de fournir dans leurs affleurements un sol plus profitable. Fréquemment aussi ces dernières, dans les assises crétacées (Cénomanicn et Turonien), deviennent glauconieuses en se présentant piquetées de grains verts de glauconie ou mieux encore micacées quand elles se présentent chargées de paillettes de mica orientées (Glimmer mergel).

Le carbonate de magnésium, en s'associant au calcaire en proportion notable dans de pareils dépôts argileux, engendre à son tour des marnes magnésiennes, le plus souvent feuilletées, à texture fine, fragiles, et dont de bons types s'observent dans notre région parisienne au milieu des assises saumâtres éocènes de la série de Saint-Ouen. A ce niveau s'observe également une variété fort intéressante ou la magnésie s'isole sous une forme silicatée à l'état de grandes lamelles micacées offrant tous les caractères d'une magnésite cristallisée.

Sans nous étendre davantage sur les autres variétés qui peuvent dériver de la présence de matières bitumeuses, ligniteuses ou de substances accidentelles telles que le gypse et la pyrite, voire même de fossiles dans les marnes dites coquillières, nous nous contenterons d'indiquer que le type normal est toujours représenté par une roche tendre, terne, friable, happant à la langue, dégageant sous l'insufflation une odeur argileuse, fusible au chalumeau, délayable dans l'eau et faisant effervescence avec les acides. Chacun sait ensuite que les marnes fusant à l'air s'effleurissent, se délitent, puis se réduisent finalement en une poudre grisâtre que les plantes s'assimilent facilement; d'où l'emploi bien connu des plus calcarifères pour le marnage des sols argileux ou siliceux; tandis que celles argileuses peuvent, en raison de leur fusibilité, servir à la fabrication des tuiles, briques et poteries grossières. Très répandues dans les terrains stratifiés de divers âges, secondaires ou tertiaires, les marnes, qu'elles soient d'origine sédimentaire, lacustre ou marine, correspondent toujours, comme du reste le sont toutes les formations argileuses, à des dépôts résultant de la chute sur le fond, au sein d'eaux tranquilles, d'éléments préalablement tenus en suspension à l'état de vase fine; ainsi s'explique l'extrême régularité aussi bien que l'homogénéité de leurs couches sur de grandes étendues, régularité qui s'accentue quand, circonstance fréquemment réalisée, elles se présentent disposées par couches minces alternant avec de petits bancs de calcaires marneux, d'autant plus que dans ce cas elles apparaissent schisteuses et cela sans qu'aucune action mécanique soit intervenue pour déterminer leur fissilité, cette structure feuilletée étant tout entière due aux circonstances mêmes du dépôt.

A cet égard, il y a lieu de remarquer que la concentration par place du calcaire peut rendre les marnes noduleuses, quand le ruissellement ou toute cause d'altération extérieure détermine dans leurs affleurements la mise en saillie de ces parties durcies. Cette dernière condition est surtout bien réalisée dans les faciès à spongiaires de l'Argovien et du Rauracien (Oxfordien) ou cette concentration du calcaire se fait volontiers autour des fossiles nombreux dans ces horizons. (Ch. Vélain).

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