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La littérature Catalane
jusqu'en 1900
La littérature catalane fleurit et se développa en même temps que la nationalité de l'Aragon; elle en suivit toutes les phases, et est toujours vivace. 

On peut distinguer dans la littérature catalane deux périodes principales : dans la première, l'esprit des Catalans est tourné vers l'imitation des troubadours français, et même la littérature catalane ne s'est jamais complétement dégagée de cette influence étrangère. En effet, on ne voit aucun genre traité en catalan qui ne l'ait été antérieurement en limousin ou en français. Durant cette période, la Catalogne ne compte donc en poésie que des troubadours, dont les principaux sont : Hugues de Mataplane, Guillaume de Berga, Serveri de Girone, Guillaume de Cabestaing. Leurs noms figurent dans le Cancioner provençal du Vatican, confondus avec les troubadours aquitains, limousins et provençaux. 

En prose, les productions de cette période sont plus remarquables, et, à certains égards, originales : ce sont des chroniques, parmi lesquelles on doit placer au premier rang celles de Jacques Ier, surnommé el Conquistador, et de Ramon Muntaner. L'ouvrage de ce dernier annonce un degré de réflexion et de maturité bien supérieur au récit de Joinville, dont il est à peu près contemporain. 

On distingue encore des traductions de l'Antiquité, des traités de théologie (au premier rang Crestia de Ximenès), des satires, des hymnes, écrits en catalan. Mais tous ces ouvrages avaient certainement leurs modèles en provençal; il n'y a encore là rien d'original.

L'originalité commence à s'introduire dans la poésie des Catalans, vers 1450, lors de l'apogée de la puissance catalane, quand les Deux-Siciles, la Sardaigne, la Corse, appartiennent à l'Aragon, et que la marine catalane est sans rivale dans la Méditerranée. Les poésies d'Ausias March en sont la preuve la plus remarquable, qu'il ne faudrait chercher ni dans la vision de Rocaberti, laquelle n'est qu'une imitation du Roman de la Rose, ni dans les chansons de San Jordy, trop plein du souvenir de Pétrarque

C'est aussi l'époque de la composition du roman chevaleresque de Tirant le Blanch, par Joannot Martorell. Bien que nourri des poésies des troubadours, qu'il admire et dont il reconnaît l'autorité, Ausias March a cependant réussi à marquer ses élégies d'une empreinte originale. Sa sensibilité est plus vraie, ses sentiments moins convenus, moins systématiques que ceux exprimés dans les Cansos des troubadours. 

On trouve aussi quelque originalité dans les satires de Jayme Roig et de ses amis Gaçull et Venollar. Les poésies d'Ausias March, la traduction de l'Enfer de Dante par Vebrer, les chroniques de Jacques ler et de Muntaner, celle de Miguel Carbonell, qui renferme les Mémoires de Pierre IV le Cérémonieux, enfin le roman de Tirant le Blanch, si cher à Cervantes, suffisent à marquer à la littérature catalane une place notable dans la littérature générale de l'Europe. On peut même affirmer que la Catalogne eût produit des oeuvres encore plus remarquables, sans l'union des deux couronnes de Castille et d'Aragon. 

Un édit de Louis XIV, en 1676, défendit de prêcher en catalan dans les églises de Perpignan; en 1700, un nouvel édit ordonna de ne plus employer, dans tout le Roussillon, d'autre langue que le français pour les actes publics. L'usage du catalan dans les actes administratifs ou judiciaires fut interdit par Philippe V à Valence en 1707 et en Catalogne en 1714. Cette langue n'en resta pas moins toujours nationale pour les Catalans, et les poètes populaires continuèrent de s'en servir. 

La Catalogne possède un grand nombre de chants populaires. Mais s'il est vrai que ces chants décèlent une imagination qui est propre à la Catalogne, nous croyons qu'ils ne peuvent soutenir un moment la comparaison avec le Romancero castillan. (E. B.).

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