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On appelle langues
romanes les langues issues du latin
ou plutôt les langues représentant l'état
auquel est parvenu actuellement par son évolution continue le latin parlé
par le peuple. Cette dénomination est usitée surtout depuis que Diez
s'en est servi dans sa Grammatik der romanischen Sprachen. Avant
Diez, Raynouard avait employé également ce
mot roman, mais dans un autre sens : il supposait dans son Choix
des poésies originales des Troubadours, 1816-1821, que le latin n'avait
pas donné directement naissance aux idiomes romans actuels, qu'il y avait
eu un intermédiaire entre le latin et les langues romanes actuelles, que
cet intermédiaire était la langue romane et que cette langue romane s'était
conservée avec le plus de pureté dans le midi de la France .
On trouve encore à côté de ce nom de langues romanes ceux de langues
latines, novo-latines, néo-latines. Cette dernière expression est
plutôt employée par les philologues italiens.
A l'époque des invasions et des établissements
germaniques, le nom de Romani, que portaient
les habitants de l'ancienne
Rome, était peu à peu devenu celui des habitants,
parlant latin, d'une partie quelconque de
l'Empire romain ,
quelle que fût leur nationalité primitive, particulièrement par opposition
aux étrangers et surtout aux Allemands.
Sur ce nom des habitants de l'Empire, on en fit un pour l'Empire même,
qui fut alors la Romania. La Romania, c'était le Romanumn
imperium et même le monde romain, la civilisation
romaine. Cette expression est restée en usage jusqu'aux Carolingiens.
La lingua romana désigna le latin parlé par les Romani, et de
romana ou romanica se dériva l'adjectif-romanicus
qui donna à son tour l'adverbe-romanice
signifiant : « dans la langue des Romani ». Romanice engendra, par l'évolution
naturelle, le latin impérial romancium, propre, particulier aux
Romani, etc.; enfin, de ce romancium se développa le mot français-
romans, aujourd'hui roman (dont le féminin ancien romance
a été remplacé par le féminin analogique romane), l'italien-
romanzo, l'espagnol-romance,
le ladin romansch ou rournanche, le roumain-
roman. L'espace occupé aujourd'hui par les langues romanes est extrêmement
étendu : tout l'Occident et une partie de l'Orient de l'Europe ,
une grande partie de l'Amérique .
Les Romains,
en fondant leurs colonies, y laissaient
un nombre considérable de soldats qui parlaient latin; la langue
latine pénétrait naturellement - et d'une façon presque générale
- dans les divers pays colonisés par les Romains et y remplaçait la langue
parlée avant la conquête. Cela ne veut pas dire que le latin ait supplanté
très rapidement et partout la langue de tous les pays que Rome avait conquis.
Dans l'Italie ancienne
même le latin ne régnait pas en maître absolu. La latinisation fut très
rapide au Portugal
et en Espagne ;
Strabon
nous dit que les habitants de la Bétique
avaient oublié leur langue maternelle. En Gaule ,
le ligure, le grec, l'ibérien, le
celte
disparurent aussi d'une façon assez rapide. Le grec dans le Sud et le
celte dans le Nord furent les deux idiomes qui offrirent le plus de résistance.
Par suite de certaines circonstances historiques et commerciales, le grec
fit longtemps une forte concurrence au latin. Un auteur latin nous dit
que les Marseillais parlaient trois langues
: graece, latine et gallice. La Suisse
fut dans la partie la plus voisine de la Gaule et de l'Italie
fortement latinisée. En Angleterre ,
on ne peut savoir au juste quels furent les effets de la conquête romaine
: l'invasion saxonne du milieu du Ve siècle
permet toutes les hypothèses, sans qu'on puisse en légitimer aucune.
Le Nord de l'Afrique
fut latinisé dès l'an 146 avant J.-C., et le latin y persista jusqu'en
647 environ, époque où l'invasion des musulmans
mit fin à la puissance romaine. Enfin, en Orient, les idiomes vulgaires
ont cédé au latin : le grec seul lui a résisté toujours victorieusement.
D'ailleurs, partout ou le latin se heurta à des langues étrangères,
il subit une décomposition qui altéra profondément son caractère et
il ne commença à se développer indépendamment dans chaque région que
lorsque les invasions des Barbares
rompirent le lien commun qui avait uni toutes les parties de l'Empire .
Populations
et langues romanes
Groupe oriental.
Les Roumains,
qui se divisent en Daco-Roumains, en Macédo-Roumains et en Istro-Roumains,
sont absolument isolés des autres populations romanes. D'après les textes,
il résulte que c'est au XIVe siècle que
des Valaques, venant de l'Epire
ou de la Macédoine ,
ont atteint le Nord de l'Adriatique .
Les Valaques du Nord et ceux du Sud du Danube
sont de même origine au point de vue linguistique. Aussi nous trouvons-nous
en face d'une question insoluble à propos de l'origine de ces deux groupes;
question qui se pose ainsi : les habitants des deux groupes roumains remontent-ils
indépendamment l'un de l'autre à l'époque romaine ?
Ou bien ces deux groupes ont-ils été d'abord réunis pour n'en fermer
qu'un seul et se sont-ils ensuite trouvés séparés par les circonstances?
Tout ce qu'on petit dire, c'est que si les groupes du Nord et du Sud ont
été séparés, ils ne l'ont pas été longtemps, car leurs langues sont
extrêmement semblables. Une autre remarque qui complique cette question,
c'est que la Dacie
de Trajan ne correspond pas à la Valachie et
à la Moldavie .
Il est difficile de donner une solution satisfaisante à cette question.
Groupe occidental.
Le groupe occidental des langues romanes
est limité : au Nord, par la Manche et une ligne horizontale traversant
la Belgique ,
de Gravelines
à Eupen; à l'Ouest, par l'océan Atlantique ;
au Sud, par la Méditerranée ;
à l'Est par une ligne verticale allant de Eupen aux Alpes
et par la côte occidentale de l'Adriatique .
Çà et là il y a, bien entendu, quelques enclaves où les anciens idiomes
n'ont pas été remplacés par un idiome roman.
Ladin
(romanche).
Dans le Nord et dans le Sud du canton
des Grisons
nous trouvons le ladin, appelé encore
roumanche ou romanche. Il comprend la série d'idiomes romans, qui, suivant
la courbe des Alpes, va des sources du Rhin
antérieur jusqu'à la mer Adriatique. D'après Ascoli (Archivio glottologico
italiano, I, 1), on peut diviser cette série en trois parties qui
sont : 1° la partie occidentale, qui se compose de tous les dialectes
romans des Grisons, en dehors des dialectes
italiens; 2° la partie centrale, qui embrasse les variétés ladines
tridentino-occidentali, et le groupe ladin tridentino-orientale et alto-bellunese;
3° la partie orientale ou le Frioulan. Le ladin est donc aujourd'hui fortement
morcelé. Autrefois il formait une ligne ininterrompue qui descendait bien
plus au Sud : il allait du Vorarlberg jusqu'Ã Venise,
et on retrouve encore de ses traces dans l'île de Chioggia.
Italien.
On donne le nom d'italien
à la langue littéraire et aux dialectes usités dans la péninsule des
Apennins ,
dans le canton suisse du Tessin, dans le Tyrol
méridional, sur les côtes de la Dalmatie ,
en Corse ,
en Sicile ,
en Sardaigne .
On désigne plus particulièrement par ce mot un des idiomes romans parlé
dans la Toscane
et qui est devenu la langue littéraire, administrative et officielle de
l'Italie
tout entière. Mais on y comprend aussi, et d'une façon abusive, une série
de dialectes qui jusqu'ici ont été le mieux classés par Ascoli (Archivio
glottologico italiano, VII et suiv.) Il distingue : 1° les dialectes
gallo-italiens (ligures, piémontais,
lombards,
émiliens, sardes); 2°
vénitien avec
le corse, le sicilien, le napolitain et l'ombrien, et il fait un groupe
à part pour le toscan qu'il appelle la langue littéraire des Italiens.
Il faut éliminer d'Italie certaines enclaves où il y a encore des survivances
de langues apportées à diverses époques : allemand,
grec,
occitan,
albanais, etc.
Espagnol.
Les Celtes
et les Ibères, les Cantabres, les Vascons
habitèrent l'Espagne .
Des derniers, il reste ce qu'on appelle le basque,
qui est parlé dans les provinces de Guipuzcoa, de Biscaye, une partie
de la Navarre
et d'Alava : abstraction faite du basque, l'Espagne comprend l'aragonnais
au Nord-Est, l'asturien au Nord, le léonais au Sud, le castillan au centre,
l'andalou au Sud. Au Nord-Est, on parle également le catalan.
Portugais.
Le Portugal
et la Galice, ainsi que les îles Açores, parlent des langues fort analogues,
connues sous le nom de portugais et
de galicien. Le portugais proprement
dit comprend : le portugais septentrional, entre le Duero
et le Minho; le portugais méridional, au Sud de Mondego. Le portugais
a une riche littérature, mais
la littérature galicienne est peu importante.
Français.
On parle en France deux séries d'idiomes
romans: 1° les idiomes français proprement
dits; 2° les idiomes occitans.
Le latin
populaire des Gaules
fit tout d'abord disparaître le celtique.
Le breton parlé actuellement dans le
Finistère, les Côtes-d'Armor et le Morbihan, a été importé au milieu
du Ve siècle par des habitants de la Grande-Bretagne;
il se perd de plus en plus. Une autre langue non romane qui disparaît
aussi à grands pas, c'est le basque (Pyrénées-Atlantiques).
La disparition du celtique a profondément surpris les historiens qui ne
se sont pas rendu compte de l'état on se trouvait la Gaule en 53 av. J.-C.,
au moment de la conquête de la Gaule par César,
et qui parlent d'une nationalité gauloise : cette nationalité n'existait
pas. Il n'y avait en Gaule que des tribus toujours en guerre les unes contre
les autres. Lorsque le soulèvement de 53 eut lieu, un tiers seulement
de la population y prit part. Les Gaulois n'offraient aucune force de cohésion
capable de résister à la politique romaine. Rome
étendit ses privilèges et ses droits de cité à la Gaule, comme aux
autres provinces qu'elle avait conquises, jusqu'au jour où Caracalla
décréta Romains tous les sujets de l'Empire .
Par les grandes voies
qui relièrent la Manche
à la Méditerranée ,
les Pyrénées
an Rhin ,
les Alpes
à l'Atlantique ,
par les cirques, les théâtres, les temples,
les thermes, les monuments de toute sorte, la romanisation devint très
rapide. Sous Auguste, 1200 hommes suffisaient
à garder la Gaule. Le latin conquit d'abord les villes, puis les campagnes
et ne s'arrêta que devant le grec qui
subsista à Marseille
jusqu'au Ier siècle, le bas-allemand dans
les Flandres ,
le haut-allemand dans l'Alsace
et la Lorraine ,
le gallois dans la Basse-Armorique.
Les limites du gallo-roman sont les suivantes
: la ligne part de Gravelines ,
longe le Nord, passe à Merville, Steenwerek, Nieppe, suit la Lys
et entre en Belgique .
Le flamand se parle dans l'arrondissement de Dunkerque ,
Bergues
et les villages environnants, et à Hazebrouck.
En Belgique, la ligne pénètre dans la Flandre
occidentale et laisse au français Mouseron, Luighes, Hersant, Dottignies,
Espierre, suit la limite frontière commune de la Flandre orientale et
du Hainaut ,
passe sous Lessines, Enghien, pénètre dans le Brabant, coupe Saintes,
Tubize, Braine-le-Château, Wauthier-Braise, Braine-l'Alleud,
Waterloo,
la Hulpe, Wawres, Archennes, Bossut, Beaurechain, l'Ecluse, Jodoigne, le
Nord-Ouest de Liège (où elle laisse Houtain-l'Evêque au flamand), Tongres,
Orange, Herstappe, Roclenge, Bapenge, Wonck, Ebers-Emael, Lanayé, la Meuse
à Visé, Aubel, Eupen, l'Amblève, Malmédy, Sourbrordt, Faymontville,
Oudenval, Ligneuville, Pont, Saint-Vith, Oberbeslingen, Martelange, Arlon,
Longwy. Le français parlé dans cette
vaste région est le wallon qui se distingue
en wallon de Tournai, wallon de Mons, wallon de Liège, wallon de Namur.
A Longwy, la ligne tourne à l'Est, suit la frontière du Luxembourg ,
coupe Fensch, Thionville, la Nied, Remilly, le Rottenbach, Morhange, Metz,
Briey, Albedorf. Dieuze, Lorquin, Sarrebourg, le mont Donon, Winsch, Lützelhausen,
Liepvre, suit la frontière, passe entre Pontroye et Schlierbach d'un côté,
Kayserberg de l'autre, laisse Turckheim à l'allemand, passe à Munster
et suit la frontière jusqu'à la Suisse ,
coupe Masseraux, la Chapelle, Dannemarie, Staueth, Pfeffershausen, Lützel,
et pénètre en Suisse, coupe Laufeu, Soleure (canton), Berne (canton)
jusqu'au lac de Brienne, longe le lac Morat, traverse Fribourg (canton),
le mont de la Berra, le Sud de Berne (canton), le Wildstonbel, Sierre,
le col du Valais, suit la frontière italienne jusqu'à la Savoie ,
longe le Piémont
et arrive à Menton.
La Méditerranée
forme la limite du gallo-roman jusqu'aux Pyrénées .
LÃ se trouve le catalan. La limite du
catalan suit en France
les cantons des Pyrénées-Orientales (département), pénètre à Quérigut,
franchit les Pyrénées, occupe en Espagne
: Girone, Barcelone, Tarragone, Lerida, Castillon de la Plana, Valence,
Alicante et les Baléares. A Lescun la ligne du gallo-roman rencontre le
basque qui est limité par les localités
suivantes : Saint-Engrace, Haux, Tardets, Esquiule, Arrast, Arone, Etcharry,
Domezain, Arberats, Camai-Mixe, Icharve, Bardos, Agherre, Briscous, Urcuit,
Lahonce, Saint-Pierre-d'Imbe, Arbonne, Bidart. Le littoral de Saint-Pierre
d'Imbe à Bidart est roman. Le dialecte gascon entoure le basque, et on
parle français dans les villes. La limite longe ensuite l'Océan Atlantique
et atteint la Bretagne .
Entre le français et le bas-breton, elle part des bouches de la Vilaine,
coupe Elven, Plaudren, Saint-Jean-Brévelay, Moréac, Naizin, Noyil-Pontivy,
laisse à gauche Mûr, Saint-Mayeux, Coray, Saint-Fiacre, coupe Plouagat,
Plélo, Plourhan, rejoint la Manche, enclôt les îles normandes (Jersey,
Guernesey, Alderney (Aurigny), Sercq)
et rejoint la frontière flamande à Gravelines.
L'ensemble des dialectes gallo-romans se
divise en deux parties : les dialectes de langue
d'oc (occitan) et ceux de langue d'oïl
(français). En effet, la distinction entre le mode d'affirmation des langues
romanes avait porté Dante à faire une distinction
entre les langues qui affirment en disant oc, celles qui affirment
en disant oïl et celles qui affirment en disant si. Ce critérium
est bien faible, mais l'autorité de Dante lui a donné un tel prestige
que ce vocabulaire est resté. D'ailleurs, toute division de ce genre est
artificielle : on ne peut se servir de ces distinctions que pour la commodité
de l'exposition; si elles correspondent à des besoins géographiques ou
à des raisons historiques, elles ne sont guère fondées au point de vue
linguistique. Ce qui existe réellement ce sont des traitements différents
du latin dans les diverses régions de chaque domaine du roman, et les
distinctions qu'on peut faire au point de vue linguistique doivent reposer
sur un fait, précis qui sert de base : par exemple on peut distinguer
le traitement de a tonique libre latin dans
les différentes parties du groupe gallo-roman, celui du c+a dans les mêmes
conditions, etc. Le nom de français, désignant primitivement le parler
de l'Ile-de-France ,
on a appliqué peu à peu le nom de français à tous les dialectes qui
entouraient le français. Et comme celui-ci était le français de la cour
royale, le dialecte parlé ainsi eut la prééminence sur tous les autres
et finit par s'imposer à tout le Nord de la France ,
après avoir été graduellement imposé à l'aristocratie et à la littérature.
Dans le Sud de la France, il n'en était pas de même : aucun des dialectes
écrits n'avait plus de valeur et ne pouvait prendre plus de valeur officielle
qu'un autre, et si nous désignons le gallo-roman du Sud par le mot occitan.
Bien des divisions ont été proposées
pour le groupe du français. Roger Bacon (Opus
majus, III, 44) distingue quatre dialectes : le
français,
le picard, le normand
et le bourguignon. C. Fallot distingue
le normand, le picard et le bourguignon. Il est inutile de citer les autres
essais de classification, et on doit se borner à énumérer les dialectes
d'après leur position géographique. Les variétés du français du Nord
examinées à ce point de vue sont les suivantes : le wallon
dans les limites indiquées ci-dessus, le bourguignon, le lorrain,
le picard, le normand, qui détacha en Angleterre
au XIe siècle l'anglo-normand, le
poitevin.
Quant à l'occitan, il peut se distinguer en
gascon (Pyrénées-Atlantiques, sauf région
basque, Hautes-Pyrénées, Landes, sud de la Haute-Garonne, Gers, Gironde),
en languedocien,
limousin,
provençal, dauphinois, savoyard, dialectes
de la Suisse romande. Ascoli a cru découvrir un groupe dialectal important
qu'il appelle le franco-provençal et qu'il décrit ainsi dans ses Schizzi
franco-provenzali (Archivio glottologico italiano, III, 61-62) :
«
Cette série de patois s'étend en France dans la partie septentrionale
du Dauphiné (département de l'Isère) ; de là elle passe le Rhône en
suivant une double direction vers l'Ouest pour occuper une partie et peut-être
la plus grande partie du Lyonnais, et vers le Nord pour embrasser la partie
méridionale de la Bourgogne (département de l'Ain) ; puis elle semble,
en suivant une ligne longitudinale, pénétrer, non sans souffrir bien
des dommages, entre le français à l'Est et à l'Ouest, pour traverser
la Franche-Comté tout entière et entrer dans le territoire lorrain (partie
des départements du Jura, du Doubs, de la Haute-Saône et des Vosges).
En France, la Savoie est aujourd'hui toute franco-provençale; et dans
la Suisse, les dialectes propres des cantons de Genève, de Vaux, de Neufchâtel
avec un petit espace de celui de Berne (entre le Jura et le lac de Vienne),
de la plus grande partie du canton de Fribourg et de la partie occidentale
du canton du Valais sont tous franco-provençaux. En deçà , des Alpes,
enfin, les dialectes romans qui sont propres à la vallée d'Aoste et au
val Loana appartiennent aussi à ce système ».
Du
latin vulgaire aux langues romanes
L'existence d'une langue
latine populaire à côté d'une langue savante, de la langue
employée dans les livres par les écrivains classiques, n'a rien qui doive
étonner. Cela ne veut pas dire que les deux langues ne se pénètrent
pas mutuellement, qu'il y ait forcément deux langues dont l'une soit incompréhensible
à l'autre. Evidemment il y avait facilité pour un Romain
instruit à comprendre le latin d'un paysan ou d'un soldat : la réciproque
ne serait peut-être pas si sûre. Le latin populaire a son existence prouvée
indirectement par la communauté des faits phonétiques et morphologiques
des diverses langues romanes et directement par les témoignages historiques.
Cicéron écrit par exemple (Ad fam.,
IX, 21) Veruntamen quid tibi ego in epistulis videor? Nonne plebeio
sermone agere tecum? Quid enim simile habet epistula aut judicio aut contioni?...
epistulas vero cotidianis verbis taxere solemus. Bien des écrivains
nous donnent les expressions : lingua laica, lingua rustica, lingua
vulgaris, lingua plebeia, lingua militaris. Ces diverses expressions
doivent être interprétées sans exagération et ne doivent jamais faire
croire à l'existence de deux langues nettement séparées. D'ailleurs,
par sa nature même le latin vulgaire nous est presque inconnu. Le Vokalismus
de Schuchhardt (Vok. der Vulgärlateins, 1866-1869) n'est pas suffisant
: il faudrait recueillir toutes les inscriptions, toutes les médailles
éparses çà et là sur le territoire de la Romania et écrites
en roman pour dresser un inventaire complet de tous les fragments du latin
vulgaire du Ier au Ve
siècle environ. On a signalé également les fautes qui se trouvent dans
les manuscrits comme des traces de latin
vulgaire : c'est une source bonne, mais à condition d'y recourir avec
prudence. C'est ainsi qu'on ne peut tirer de la Bible
une étude du latin vulgaire, mais qu'on en peut tirer une du bas-latin.
Les formules sont à la limite du latin vulgaire et du bas-latin, parce
qu'elles étaient écrites pour être comprises par des gens qui ne comprenaient
que le langage parlé. Le bas-latin de l'époque mérovingienne
est en effet presque entièrement calqué sur la langue parlée; mais les
Pères de l'Eglise écrivent assurément un bas-latin
littéraire. Il suffit de comparer n'importe quel passage d'un livre quelconque
de l'Eglise à la première formule venue pour
se rendre compte de la différence. Derrière ces formes barbares l'induction
permet de découvrir des formes parlées dont il ne reste aucun monument.
Il faut, en outre, rechercher dans les comédies
de Plaute, de Térence,
dans les satires de Pétrone,
de Perse, et dans celles d'Horace,
les locutions parlées dont beaucoup retrouvent leurs correspondantes dans
les différentes langues romanes actuelles. Quand on s'occupe des auteurs
bas-latins, il faut toujours, pour trouver le latin vulgaire dont ils se
servent, partir de cette idée qu'ils n'ont jamais voulu écrire le latin
parlé, qu'ils se sont toujours proposé comme modèle le latin écrit,
sinon le latin classique, et qu'il est bien hasardeux de chercher le latin
parlé sous ce latin écrit. Pour les formules, le travail est plus simple.
Voici quelques exemples qui nous donnent de ce latin une idée très nette
:
Qualiscumque a quemcumque epistolas de nomine nostro manus nostras firmatas,
ostensas fuerint [...] vacuas permaneant (Rosières,
Formules,
CXXIX) - Vendedi ad illo campello ferente modius tantus
(Id., CCLLXXX).
- De ces deux exemples de bas-latin nous pouvons tirer une foule d'observations
qui doivent avoir également trait au latin vulgaire, parce qu'elles correspondent
à des faits supposés par le développement de langues romanes. Le nominatif
féminin pluriel a disparu pour faire place à l'accusatif : epistolas
fermatas ostensas fuerint; l'ablatif féminin pluriel a également
disparu devant l'accusatif : manibus nostras.
Vendédi a
remplacé vendidi; les prépositions remplacent les cas, parce que
les désinences casuelles sont la plupart du
temps atones : de nomine au lieu de nominis; ad illo
au lieu de illi; l'm de la désinence -um, -em, avait disparu, et
o se confondait avec u : illo, campello, ferente, modius, tantus au
lieu de illum, campellum, ferentem, modios, tantos; le diminutif remplace
le positif : campello au lieu de campum ou mieux agrum.
Le bas-latin est surtout intéressant à étudier jusqu'au VIIIe
siècle. De ce siècle nous avons un glossaire qui est à ce point de vue
extrêmement important : c'est celui de Reichenau, ainsi appelé parce
qu'il provient de l'abbaye de ce nom; il est
conservé aujourd'hui à la bibliothèque de Karlsruhe
(ms. 115). C'est dans sa première et plus grande partie un commentaire
des mots de la Vulgate jugés trop latins, trop difficiles à comprendre
pour les laïcs. L'étude des mots glosants permet de conclure que l'auteur
du glossaire était du Nord de la France .
Un autre glossaire un peu postérieur à celui de Reichenau, le glossaire
de Kassel
(bibl. de Kassel. théol. 24; fin du VIIIe
ou commencement du IXe siècle), est latin
allemand. Les mots romans latinisés subissent l'influence du scribe allemand
qui confond les c et les g, les b et les p, les f et les v, etc. (cf. Foerster
et Koschwitz, Altfranzosisches Uebungsbuch, I, col. I, 44). A l'époque
carolingienne, sous Charlemagne,
il se produit une renaissance des lettres
latines, et la langue tend à se rapprocher du latin classique. Jusqu'au
XVIe siècle on se servit du bas-latin,
continuation du Moyen âge
du latin classique et qui présente par rapport à celui-ci et dans le
lexique et dans la syntaxe des différences notoires, bien qu'il ait des
traditions grammaticales régulières. Il vécut jusqu'au XVIe
siècle où le mouvement humaniste remit en honneur le latin cicéronien.
Etant données les difficultés qu'il y
a de reconnaître ou de reconstituer le bas-latin, il est nécessaire de
s'attacher de plus en plus à le recherche de ses caractères et, avant
tout, à en dresser une chronologie : c'est ce que Mohl a essayé de faire
dans sa Chronologie du latin vulgaire (Paris 1899 ; cf. Mario Roque,
dans la Romania, t. XXIX, p. 266), et dans ses Etudes sur le
lexique du latin vulgaire (Prague, 1900,cf. Am. Salmon, dans le
Moyen-Age, nov.-déc. 1900).
Le lexique.
Bien que le latin
ait supplanté les diverses langues qui se parlaient sur les territoires
conquis par la Romania, on doit reconnaître dans le roman bien
des éléments étrangers. La plupart sont germaniques,
il y en a beaucoup de grecs, il y en a
d'arabes dans le roman d'Espagne
et dans celui de la Sicile .
Il faut aussi bien distinguer entre les éléments étrangers pré-romans
et les éléments étrangers post-romans , introduits par suite des contacts
barbares que les peuples romans eurent à subir, par suite des relations
de toute sorte des divers peuples entre eux, qui introduisent, avec les
produits divers, des mots nouveaux désignant ces produits, et par toute
une série de causes extrêmement nombreuses qui sont les modes, les besoins
du commerce, etc. Le grec a laissé de nombreuses traces dans le français,
mais la plupart des mots grecs avaient passé par le latin, et il est souvent
fort difficile de savoir si ces mots sont empruntés directement au grec
ou bien s'il sont arrivés par la voie du latin populaire. En italien,
en sicilien, en occitan
et en espagnol, on conserve encore plusieurs
termes techniques maritimes qui ont été empruntés aux divers dialectes
grecs. Le valaque est à ce point de vue fort riche, comme cela s'explique
naturellement par sa position géographique : pour l'Italie
a été étudiée que par Ascoli, Archivio glottologico italiano,
X, 1-17. Il a démontré qu'on rencontre dans le lexique latin des synonymes
dont l'un est romain, l'autre sabin, que tous les mots ayant au lieu d'un
b ou d'un p un f intervocalique ne sont pas de pure origine latine comme
refus à côté de robus, sulfur au lieu de sulpur.
De plus, bien des mots
osques s'y tiennent
à côté de mots provenant d'une foule de dialectes. Les dialectes du
centre sont moins mêlés d'éléments étrangers; ceux du Midi contiennent
beaucoup d'éléments grec, et arabes. L'élément celtique n'a laissé
que peu de traces en France
: Diez avait expliqué un certain nombre de mots à étymologie obscure
par des mots celtiques : Thurneysen
a repris cette étude et a laissé subsister bien peu de ces mots (Keltoro
manisches; Halle, 1884). En italien il y a également quelques mots
qui doivent être celtiques : becco, braca, camicia, duna, gamba, palefreno,
pezza, saio, vamello, veltro, etc. En français, citons braz, matras,
mauvis, mègue, verne; en espagnol, ou ils sont assez rares, berro,
lona, jisca. On ne peut guère retenir dans l'espagnol et le portugais,
comme provenant du basque, que les mots
péramo, navo, vega (espagnol) veiga (portugais); espagnols
: legamo, pizarra, perro. Quant aux dialectes pré-romans des Ladins
et des Roumains on n'a absolument aucune
donnée permettant d'affirmer les emprunts à la langue pré-romane indigène.
L'élément germanique
a laissé de nombreuses traces dans les diverses langues romanes : le gothique
a laissé des noms propres italiens comme
Hildebrando, Aliprando en occitan.
et en français tregua et
trève
du gothique triggwa; amanavir, amanevir du gothique
manwjan
(précédé du latinad). Les Lombards,
les Wisigoths,
les Bourguignons, les Francs
en France ,
les mêmes en Espagne
ainsi que les Alains, les Vandales,
les Wisigoths, les Longobards en Italie
ont laissé dans les diverses langues des traces nombreuses de mots germaniques.
Citons d'après Diez : bando, guerra, guancia, spella, bosco, guanto;
français broigne, bac, renard, lippée, groseille, estout; espagnol
haca, hornabeque, azcona, etc. Chose plus curieuse encore : la prononciation
allemande transforma parfois la prononciation
française: le mot haut, du latin altus, prit un h aspiré
sous l'influence de l'allemand
hoch; le mot harpe, qui a
bien en grec une aspiration représentée
par un h latin, n'a pas d'h aspiré dans
d'autre langue romane que le français,
et cela très vraisemblablement sous l'influence de l'allemand Harpe.
D'après Diez, 930 mots d'origine germanique auraient pénétré dans les
langues romanes, abstraction faite des dialectes, des dérivés et des
noms propres: 450 en français, 140 en italien, 50 en espagnol et portugais,
le reste en valaque; 300 mots germaniques seraient communs à toutes les
langues romanes. Il est peu vraisemblable que ces 300 mots allemands communs
à tout le roman aient été apportés par les légionnaires germains employés
par les Romains, comme l'a prétendu Ascoli.
On ne s'explique pas que divers soldats appartenant à diverses légions,
envoyés à tous les coins de l'Europe ,
aient introduit les mêmes mots, d'autant plus que ces mots sont souvent
très spéciaux et d'un usage assez rare.
De même que le germanique pénétra dans
les langues romanes et en particulier dans le français, de même l'arabe
implanta beaucoup de termes en roman et surtout en espagnol.
Les échanges commerciaux, les croisades ,
la longue domination des Maures en
Espagne, la conquête de la Sicile ,
l'occupation d'un lambeau de la France mérionale par les sectateurs de
l'islam ; le rôle joué dans l'enseignement de
toute l'Europe par les universités arabes de Séville.
de Tolède, de Grenade,
de Cordoue, la diffusion soit directe, soit
par traductions latines, des livres arabes de mathématiques ,
d'astronomie ,
de médecine ,
d'alchimie, sont des faits connus et qui font
comprendre l'extension de l'arabe dans le roman. Les mots arabes ont pénétré
en espagnol avec une régularité telle qu'on a pu essayer d'établir certaines
règles de phonétique pour la transformation des voyelles et des consonnes
(cf. Grundriss, t. I, pp. 402-403). Dans les autres langues romanes, les
emprunts sont beaucoup moins nombreux et fort irréguliers : ce sont des
à -peu-près, reproduits parfois d'une façon extrêmement bizarre par
des personnes entendant des sons étrangers auxquels l'oreille n'était
pas façonnée et qu'ils ne pouvaient correctement reprononcer : ainsi
artichaut de harchaf, et les noms propres cités par Devie
: Sensadonias
Noscardin, Hariadan, qui représentent Chems-eddin, Nasr-eddin,
Kheir-eddin. Les noms de plantes, les termes de médecine, d'alchimie,
d'astronomie, de géométrie, d'industrie,
de commerce, de musique sont les plus nombreux.
Le nombre des mots arabes, qui a été très grand en espagnol a diminué
au fur et à mesure des progrès du castillan, et maintenant il fait Ã
peine le dixième du vocabulaire espagnol. En français, il y a environ
un millier de mots d'origine arabe venus en France surtout par l'intermédiaire
des langues hispaniques, du catalan, de
l'occitan et de l'italien. L'arabe a eu également une grande influence
sur les vocabulaires du portugais, de la Sicile, de la Basse-Italie, de
la Sardaigne ;
le maltais est un dialecte arabe avec des éléments italiens. Le roumain
est, au point de vue du lexique comme à tous les autres points de vue
d'ailleurs, dans une position tout à fait particulière. Le fond du vocabulaire
est assurément le latin vulgaire, mais
la pénétration des éléments du bulgare-touranien, de l'albanais,
du slave, du hongrois,
du néo-grec et du turc
en ont altéré profondément la physionomie. En outre il doit y avoir
bien des éléments différents, si l'on en juge par le nombre considérable
des mots roumains qui n'ont pas d'étymologie sûre ou possible. Le défaut
de textes anciens pour la langue en rendra toujours l'étude fort aride
et fort dangereuse.
Outre ces éléments pré-romans et post-romans,
on trouve des échanges continuels entre les diverses langues romanes le
français par exemple emprunte au XVIe
siècle une foule de mots espagnols et
surtout
italiens. L'occitan
actuel contient un nombre de plus en plus grand de mots français. Des
causes toutes différentes peuvent encore enrichir le lexique. Au XVIIIe
siècle, le développement des sciences introduit dans les nomenclatures
spéciales quantités de mots latins et encore plus de grecs.
De nos jours, toutes les nouvelles inventions se revêtent de mots tirés
et en général mal tirés du grec. L'anglais
importe une série de mots relatifs aux courses, aux chevaux, aux modes
de tout genre. L'italien pénétra une seconde fois à la fin du XVIIIe
siècle en français pour donner sa terminologie musicale. Le vocabulaire
peut encore s'enrichir pur les onomatopées. Il en est ainsi de la plupart
des noms de cris d'animaux (cocorico, croasser, etc. ; le vieux
mot ahaner, s'efforcer; zig-zag qui est la notation du bruit
fait par une vergette frappant l'air vivement à droite et à gauche, etc.)
Au point de vue de l'étymologie, on divise
le lexique de chacune des langues romanes en deux parties : l'une qui comprend
les mots populaires, l'autre qui comprend les mots savants. Les mots populaires
sont ceux qui sont passés insensiblement de la bouche des Latins dans
celle des Romans. Un mot comme panis,
panem par exemple,
a toujours été en usage : c'est le mot pain. Les mots savants
sont ceux qui sont calqués sur le latin
écrit et introduits dans la langue par des gens instruits : le mot philosophie
par exemple venant de philosophia. Parmi les mots populaires qui
ont existé de tout temps dans les langues romanes et qui remontent au
latin populaire par une tradition ininterrompue, beaucoup ont pris, au
cours du temps, toute sorte de significations diverses ; mais un nombre
assez considérable a gardé le sens des mots latins qui sont leur origine.
Citons au hasard : amorem, amour; animam, âme : annum, an;
aquam,
eau; asinum, âne, etc., qui ont également le même sens dans les
autres langues romanes non citées ici faute d'espace (cf. Arsène Darmesteter,
Vie des mots, 1887, Appendice I). La plupart des mots savants disparurent
presque vers le IXe siècle dans les diverses
provinces de la Romania; les idées philosophiques, littéraires,
scientifiques, artistiques sombrèrent avec la civilisation qui les avait
développées et, ne reparurent qu'après le IXe ,
siècle, époque à laquelle ils commencèrent à pénétrer à nouveau
dans les diverses langues romanes. Nous avons donc des mots savants qui
remontent extrêmement haut, au IXe
siècle.
Au XIVe siècle, les emprunts se
multiplient, et au commencement du XVIe
siècle quelques auteurs nous présentent un vocabulaire surchargé de
mots tirés artificiellement du latin. Dans beaucoup de cas il y a des
mots qui sont demi-savants, semi-populaires ; et dans beaucoup d'autres
des mots latins ont formé deux mots français, dont l'un est savant et
l'autre populaire c'est ce qu'on appelle les doublets; nous avons par exemple
cause et chose venant du latin causa;
hôpital
et hôtel venant du latin hospitalem : prédicateur
et prêcheur, du latin predicatorem;
capital et cheptel,
de capitalem; dignité et daintié, de dignitatem;
ration et raison, de rationem, etc.
Grammaire.
La phonétique s'occupe de la transformation
des sons latins dans leur passage en roman; la morphologie s'occupe des
formes des diverses parties du discours; la syntaxe, des rapports entre
eux dans une phrase.
La phonétique ne veut que constater les
développements des sons. Une règle générale domine tous les autres
faits : l'accent du latin se conserve dans les mots romans à la place
même où il se trouve sur les mots latins correspondants. L'accent de
amare étant sur a, tous les dérivés romans de ce mot seront accentués
sur a ou son représentant: ancien françaisamer;
portugais,
espagnol,
italienamar.
Cette règle ne s'applique, bien entendu, qu'aux mots populaires et non
aux mots savants : l'accent de apprehendere, par exemple, est fidèlement
conservé dans le mot populaire apprendre, mais il est déplacé
dans le mot savant appréhender. Toutes les exceptions apparentes
à cette règle s'expliquent par le latin vulgaire qui avait dû déplacer
l'accent dans les mots qui n'ont pas dans les langues romanes l'accent
à la place qu'il occupe dans les mots du latin classique correspondants.
Cette règle indique qu'il faut soigneusement, en phonétique, déterminer
la nature de la voyelle qui peut avoir divers traitements suivant sa longueur
et sa position. Aussi distingue-t-on entre voyelles toniques et voyelles
atones, celles-ci se subdivisant en antétoniques ou protoniques, contretoniques
ou intertoniques, posttoniques. Ainsi dans bonitatem, bo est la
protonique, ni est la contretonique,
ta est la syllabe accentuée
et tem est la posttonique. La voyelle est dite libre, non en position,
ou en syllabe ouverte lorsqu'elle est finale, suivie d'une voyelle, d'une
consonne simple ou des groupes pr, br, tr, dr, gr. Une voyelle est entravée,
en position, ou en syllabe fermée lorsqu'elle est suivie de deux ou plusieurs
consonnes (autres que les groupes ci-dessus). Dans amare, toutes
les voyelles sont libres; dans arcus, a est entravé. La phonétique
divise les voyelles en voyelles simples et en diphtongues. Il y a pour
le français un groupe spécial de voyelles dites voyelles nasales. Chacune
des langues romanes a une division spéciale pour ses consonnes.
Expansion
des langues romanes en dehors de l'Europe
Le français
a été transporté au XVIe siècle
en Amérique du Nord
où il est parlé en Louisiane, en Nouvelle-Ecosse, et au Canada .
Dans les Antilles ,
il a formé avec des langues africaines
un mélange appelé créole. En Afrique ,
la colonisation a répandu la langue française au Maghreb
(ce qui a pu être vu, à l'époque coloniale, comme une restitution Ã
la Romania des côtes de la Méditerranée ),
et dans une grande partie de l'Ouest du continent.
L'italien
et l'espagnol se parlent en Argentine .
Le catalan se parle dans l'île de Cuba
et en Argentine, concurremment à l'italien et à l'espagnol. L'espagnol
est parlé dans l'Amérique du Sud
et en Amérique centrale, au Mexique ,
dans une partie de la Californie et du Texas, aux îles Philippines, aux
Canaries, dans les îles d'Annobon et de Fernando-Pô, aux îles Mariannes,
Palau et Carolines. Le portugais a été
transporté en Inde, en Afrique (Angola, Mozambique), dans la Guinée méridionale,
dans les îles Açores, dans le groupe de Madère, dans les îles du Cap
Vert, du Prince et de Saint-Thomas, au Brésil .
La plupart des langues romanes parlées
dans les anciennes colonies extra-européennes présentent avec les langues
des métropoles des différences notables. Ces différences sont surtout
remarquables pour le français du Canada
qui s'est développé dans une autre direction que le français de France .
(A.
Salmon, L. Brandin) |
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