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Le Royaume d'Arles
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On a donné le nom de Royaume d'Arles, principalement du XIIe au XIVe siècle, à un ensemble de pays qui correspondaient à peu près à l'ancien royaume des Burgondes, à  l'exception de la plus grande partie des pays situés à l'Ouest de la Saône et du Rhône. Jusqu'au XIe siècle, cette dénomination ne s'appliqua qu'à la partie méridionale et orientale de l'ancienne Burgondie (Provence, Dauphiné, Lyonnais, Mâconnais, Savoie, Suisse); du XIe au XIVe siècle, elle prit une extension beaucoup plus grande et comprit tout l'ancien royaume des Bourguignons, à l'exception du duché de Bourgogne; depuis le XIIe siècle, le terme Royaume d'Arles fut usité surtout dans les actes émanés des chancelleries germaniques. L'importante cité gallo-romaine qui a donné son nom au royaume d'Arles en était la ville principale. Le royaume établi par les Bourguignons en 413 subit d'importantes modifications pendant l'espace de cinq siècles qui précéda la fondation du royaume d'Arles. 

La partie méridionale, qui correspondait à l'ancienne Provincia romana, avait été rattachée pendant un certain temps au royaume des Ostrogoths d'Italie (508-535), avant d'être soumise par les Francs comme le reste des pays bourguignons. Les principales parties de l'ancien royaume des Bourguignons qui contribuèrent à former le royaume d'Arles prirent, sous les Carolingiens, différents noms : d'une part, Bourgogne transjurane ou supérieure, ou même Gaule cisalpine, ou simplement Bourgogne jurane; et d'autre part, Bourgogne cisjurane ou Bourgogne inférieure. Il ne faut pas attacher aux termes transjurane et cisjurane la précision qu'on leur a souvent donnée et qui peut devenir une cause de confusions : les montagnes du Jura ne formaient la limite des deux pays que sur une partie seulement de leur frontière; la Bourgogne cisjurane comprenait la partie située en deçà du Jura, par rapport à la France, c.-à-d. les pays riverains de la Saône et du Rhône; mais la Bourgogne transjurane, qui s'étendait sur la plus grande partie de la Suisse, comprenait, en outre, les pays qui ont formé depuis la Franche-Comté et qui sont situés du même côté du Jura que la Bourgogne cisjurane. La partie la plus élevée du Jura, comprise entre le coude méridional du Rhône et le col de la Faucille, à la hauteur du lac de Genève, formait une limite partielle entre les deux Bourgognes. Sous les successeurs de Charlemagne, à l'époque de la constitution de la féodalité, l'ancien royaume de Bourgogne se scinda en plusieurs grands fiefs d'abord étrangers les uns aux autres. En 843, le traité de Verdun, en rattachant le royaume de Bourgogne presque entier à la Lotharingie ou royaume de Lothaire, lui donna la Saône et les Cévennes comme frontière occidentale.

En 855, à la mort de Lothaire, fils de Louis le Débonnaire, ses Etats furent partagés entre ses trois fils : Louis fut nommé empereur et eut le royaume d'Italie; Lothaire eut l'Austrasie, et Charles fut nommé roi de la Provence, qu'il gouverna de 855 à 867. Dans ce dernier pays, où les invasions des Sarrasins rendaient; nécessaire une forte organisation militaire, le fils d'un comte d'Ardenne, Boson, beau-frère de Charles le Chauve, forma de la Provence propre, ainsi que de la partie de l'ancienne Viennoise qui s'étendait depuis le lac de Genève jusqu'à l'embouchure de la Durance, en y comprenant sur la rive droite du Rhône le Vivarais et le pays d'Uzès, un Etat qui porta le nom de royaume de Provence ou de Bourgogne cisjurane (879). Un peu plus tard, après la déposition de Charles le Gros, Rodolfe Ier, fils de Conrad le Jeune et d'abord comte d'Auxerre, fonda le royaume de Bourgogne transjurane, qui comprenait la partie de l'ancienne Helvétie située entre le lac de Genève et la Reuss, avec le Chablais et le Bugey (888). En Provence, Boson régna de 879 à 887. Son fils Louis, dit l'Aveugle, lui succéda (887-929). Il fut proclamé roi d'Italie en 900 et empereur en 901. Détrôné par Bérenger roi de Lombardie, qui lui fit crever les yeux (905), il ne conserva que le royaume de Bourgogne cisjurane. Il établit comte de Provence un seigneur nommé Hugues, fils d'un comte d'Arles. Après la mort de Hugues, Charles-Constantin, fils de Louis l'Aveugle, rentra en possession du comté de Vienne (947- ca. 963). Un de ses fils, Patton, eut une fille qui épousa Guillaume le Grand, comte de Bourgogne, et lui apporta en dot ce comté. Dans la Bourgogne transjurane, Rodolfe Ier régna de 888 à 911. Son fils Rodolfe II régna, comme roi de Bourgogne transjurane, de 912 à 933. En 922 il fut appelé par les Italiens soulevés contre Béranger et proclamé roi d'Italie à sa place. Le comte de Provence, Hugues, lui disputa la possession de l'Italie. Après une courte guerre, Rodolfe abandonna l'Italie à Hugues et celui-ci lui céda, en échange, le royaume de Bourgogne cisjurane (930). 

Ce fut depuis la réunion du royaume de Bourgogne cisjurane ou de Provence avec celui de la Bourgogne transjurane, qui formait les Etats héréditaires de Rodolfe II, qu'ils furent tous deux compris sous la dénomination commune de Royaume d'Arles (933). Il est à remarquer du reste que le titre de roi d'Arles ne fut jamais pris officiellement par aucun des souverains qui régnèrent sur ce pays; il ne leur est attribué que par les chroniqueurs et les historiens.

La période d'indépendance du royaume d'Arles dura un siècle (933 -1033). Pendant cette période, ses frontières changèrent peu. Il comprit les pays qui correspondaient en général aux provinces ecclésiastiques d'Arles, d'Aix, d'Embrun, de Vienne et de Tarentaise, plus les diocèses de Lyon, de Lausanne et de Bâle; ses villes principales furent Arles, Aix, Fréjus, Forcalquier, Manosque, Orange, Saint-Paul-Trois-Châteaux, Valence, Vienne, Belley, Genève, Avenches. Le comté de Vienne ne fit point d'abord partie du royaume d'Arles, mais releva directement du roi de France. Hugues, ancien comte de Provence, devenu roi d'Italie, conserva aussi quelques terres dans son ancien comté. La ville de Lyon ne fut rattachée au royaume d'Arles qu'au milieu du Xe siècle. Les rois d'Arles indépendants furent au nombre de trois, Rodolfe II (933-937); Conrad le Pacifique (937-993) et Rodolfe III le Fainéant (993-1032). Rodolfe II régna quatre ans comme roi d'Arles. A sa mort (937), il laissait deux enfants mineurs, Conrad et Adélaide. Le roi d'Italie, Hugues, espérant reprendre les pays qu'il avait cédés, maria son propre fils Lothaire à Adélaïde et épousa lui-même la veuve de Rodolfe II. L'empereur d'Allemagne, Otton Ier, prit sous sa protection le jeune Conrad et lui assura la possession de l'héritage de son père. Hugues fut réduit au royaume d'Italie, qui lui fut enlevé par Bérenger d'Ivrée en 945. 

Conrad régna pendant près de 57 ans (937-993), et la prospérité qu'il ramena dans ses Etats lui valut le surnom de Pacifique. Ce fut sous son règne que les Sarrasins furent chassés du Dauphiné (933-955), puis de la Provence, où le vicomte de Marseille, Guillaume, leur enleva leurs dernières colonies (965-972). Conrad le Pacifique épousa, en secondes noces, vers 955, Mathilde, fille de Louis IV d'Outremer, qui lui apporta en dot la ville de Lyon. Il n'eut qu'un fils, Rodolfe, qui fut son successeur, et plusieurs filles, qu'il maria aux chefs des principales maisons féodales : Berthe, qui épousa d'abord Eudes Ier, comte de Blois et de Chartres, puis fut remariée en 995 au roi Robert le Pieux; Gisèle, femme de Henri, duc de Bavière; Gerberge, femme de Hermann II, duc de Souabe; Mathilde, qui épousa Baudouin III, comte de Flandre, puis Godefroi d'Ardennes, dit l'Ancien, comte de Verdun. Conrad le Pacifique mourut le 19 octobre 993. Son fils Rodolfe III lui succéda (993-1032). Son surnom de Fainéant lui vint de l'abandon qu'il fit de ses Etats à l'empereur d'Allemagne. En 1046, il fit à l'empereur Henri Il une donation des deux Bourgognes, ou du royaume d'Arles, qui fut confirmée deux ans après par L'assemblée des seigneurs ecclésiastiques et laïques de ce royaume. L'empereur Henri Il étant mort en 1024, Rodolfe III, dans son testament, confirma la donation précédente en faveur de l'empereur Conrad Il et l'institua son héritier (1026).

Ce traité fut principalement dé à l'influence de l'impératrice Gisèle, nièce de Rodolfe III. En 1027, Rodolfe III accompagna Conrad II à Rome pour assister à son couronnement. Rodolfe III mourut le 6 septembre 1032 sans laisser d'enfants. Il avait investi un seigneur saxon, du nom de Bérold, du comté de Maurienne et de Savoie. L'empereur Conrad II ne fut pas reconnu sans difficulté comme le successeur de Rodolfe III. Les parents et alliés de celui-ci s'opposèrent à l'élection de Conrad II. Eudes II, comte de Champagne, petit-fils de Conrad le Pacifique par sa mère, était le principal prétendant. Il fut soutenu par un grand nombre d'évêques, de villes et de seigneurs du royaume d'Arles, qui refusèrent de reconnaître l'empereur d'Allemagne. L'empereur Conrad Il établit son autorité dans la Bourgogne transjurane et menaça d'envahir les Etats d'Eudes, qui fut obligé de se soumettre. 

Conrad Il fut élu roi d'Arles à Payerne, le 2 février 1033, par une assemblée laïque et ecclésiastique, qui lui conféra le titre de roi en lui mettant entre les mains la lance de saint Maurice. Il se fit ensuite couronner à Genève, dans une assemblée d'évéques et de seigneurs allemands, bourguignons et italiens (1er août 1034). Il eut encore à lutter contre l'opposition des autres prétendants au royaume d'Arles. En France, Eudes de Champagne attaqua l'Empire par la Lorraine, mais fut tué dans une expédition contre le duc Gozzelo (1037). En Allemagne, Conrad II eut à combattre le célèbre duc Ernest de Souabe, devenu plus tard un personnage légendaire sous le nom de Herzog Ernst, et qui était proche parent de Rodolfe Ill. Le duc Ernest et sn companon Werner de Kiburg tinrent longtemps en échec les forces de l'empereur. Conrad II s'efforça de rétablir l'ordre dans le royaume d'Arles et y favorisa le développement de l'institution de la trêve de Dieu.

Le royaume d'Arles, tombé sous la dépendance des empereurs d'Allemagne, fut, de tous les Etats de l'Empire germanique, celui où les contestations féodales sur la suzeraineté furent le plus fréquentes. Il fut considéré, tantôt comme réuni définitivement à l'empire germanique; tantôt comme un royaume possédé seulement à titre particulier et héréditaire dans la maison de Franconie, à laquelle appartenait Conrad II, qui en avait hérité. Quoi qu'il en soit, les empereurs d'Allemagne se considérèrent longtemps comme les suzerains légitimes du royaume d'Arles.

Pendant la période impériale de l'histoire du royaume d'Arles (XIe-XIVe siècle), l'acception de Royaume d'Arles prit une plus grande extension que pendant la période précédente. Quand les empereurs eurent étendu leur autorité dans toute la partie de l'ancien royaume des Bourguignons comprise entre le Jura et la Saône, la dénomination de Royaume de Bourgogne fut de nouveau donnée à toute l'étendue des pays occupés autrefois par les Bourguignons et presque reconstitués dans leur unité, c.-à-d. à la Bourgogne située au Nord du Rhône, entre Genève et Lyon, réunie à la Bourgogne située au Sud de cette limite, et qui formait le royaume d'Arles primitif. La partie de l'ancien royaume de Bourgogne transjurane qui comprenait la Suisse moderne, entre les Alpes et le Jura, prit le nom de Petite Bourgogne. Les deux expressions Royaume d'Arles et Bourgogne eurent la même valeur, surtout lorsqu'elles furent employées dans des documents germaniques. Sous les Hohenstaufen (1437-1254), l'expression Royaume d'Arles continua à désigner l'ensemble des pays relevant de l'empire germanique dans les limites de l'ancienne Gaule, mais le terme de Bourgogne perdit peu à peu de son extension et ne s'appliqua plus qu'à la partie comprise entre la Saône, le Rhône et le Jura, c.-à-d. que le nom de Bourgogne ne fut plus donné qu'à une des parties constituantes du royaume d'Arles. Le royaume d'Arles comprenait alors la Provence, le Dauphiné, la Savoie, le Bugey, la Bresse, le Lyonnais, le Velay, le pays de Vaud, les cantons de Berne, de Soleure, de Fribourg et de Bâle, la Franche-Comté et le Mâconnais. Le duché de Bourgogne, qui ne comprenait alors que le Dijonnais, l'Autunois, le Châlonnais, l'Auxois et le pays de la Montagne, et s'étendait presque entièrement à l'Ouest de la Saône, relevait du roi de France et était occupé par une branche de la maison capétienne.

Les principaux fiefs du royaume d'Arles étaient les suivants : la comté de Provence, fondé par Boson, neveu du roi de Provence du même nom, en 926 ; le comté de Forcalquier (1054-1209) ; le comté d'Orange, dont l'origine remonte au célèbre Guillaume au Court Nez, fondé au Xe siècle; le comté et Dauphiné de Viennois, au milieu du XIe siècle ; le comté de Valentinois et de Diois, fondé vers le milieu du Xe siècle par une maison qui s'éteignit en 1116, époque à laquelle les comtes de Toulouse réunirent à leurs domaines le comté, qui porta le nom de marquisat de Provence; le comté de Lyonnais et de Forez, fondé vers 890; la sirerie ou baronnie du Beaujolais, fondée au commencement du Xe siècle; la seigneurie de Bresse, vers 1023; le comté de Mâcon; fondé vers 920, réuni temporairement par les comtes de Bourgogne; le comté de Bourgogne (Bourgogne supérieure, Haute-Bourgogne, Franche-Comté), qui prit aussi le nom de Palatinat de Bourgogne, et où les rois de Bourgogne transjurane établirent quatre comtes, soumis à un archicomte (915); le comté de Chalon-sur-Saône (968); la sirerie de Salins (920); le comté de Neuchâtel (vers 1034); le comté de Montbéliard (Mômpelgard), fondé en 1034; le comté de Ferrette (Pfirt), qui fut rattaché plus tard au duché d'Alsace (vers 1104). La plupart des grands feudataires du royaume d'Arles avaient le droit de battre monnaie, qui leur fut généralement concédé par les empereurs d'Allemagne

L'empereur Conrad II et ses successeurs furent tous couronnés rois d'Arles : Henri IlI le Noir, en 1038; Henri IV, en 1036; Henri V, en 1106. Pendant la querelle des Investitures, le royaume d'Arles fut divisé entre les partisans de l'empereur et ceux du pape : la partie méridionale, ou ancien royaume de Provence, se mit généralement du côté de l'Eglise, tandis que la Bourgogne propre soutint les droits de l'Empire. Les empereurs d'Allemagne sentirent de bonne heure le besoin d'avoir des représentants puissants dans ces provinces. Dès le milieu du XIe siècle, Rodolphe de Reinfelden, duc de Souabe, reçut le titre de dux et rector Burgundiae (1043). Un duc de Zähringen, Berthold II (1078-1111), fut nommé avoué impérial dans les pays de Thurgovie et de Zurich. L'empereur Henri V mourut en 1125. Ce fut le dernier empereur de la maison de Franconie. Lothaire, duc de Saxe, lui succéda (1125-1137). Ce fut sous le règne de Lothaire Il que fut définitivement organisée l'institution du Rectorat de Bourgogne, établi dans l'intention de rattacher plus étroitement à l'Empire les pays qui s'en étaient presque complètement séparés pendant la querelle des Investitures. Le recteur de Bourgogne (dux et rector Burgundiae) fut le représentant de l'empereur dans le royaume d'Arles et fut chargé de maintenir les vassaux de l'Empire dans l'obéissance qu'ils devaient à l'empereur et de veiller à l'accomplissement de leurs obligations féodales envers l'Empire. 

Conrad II, duc de Zähringen (1123-1152), reçut le titre de recteur de Bourgogne, qui fut conféré à sa famille à titre héréditaire. Il eut à soutenir une série de guerres contre les seigneurs du pays pour rétablir l'autorité impériale. Le comte de Bourgogne, Rainaud, fut l'un de ceux qui refusèrent de prêter au nouveau gouverneur le serment de fidélité et se distinguèrent par leur résistance, et c'est peut-être à cette circonstance qu'il faut faire remonter le nom de Franche-Comté, qui fut donné à ses fiefs. La maison de Zähringen conserva jusqu'à son extinction, qui eut lieu en 1218, la charge du rectorat. Conrad Il de Zähringen, qui prit parti pour les Guelfes contre les Hohenstaufen, dans la lutte des Guelfes et des Gibelins (1139), attira sur ses possessions une guerre qui n'était pas finie à sa mort et qui l'empêcha d'exercer ses fonctions impériales en Bourgogne. L'empereur Frédéric Ier-Barberousse disposa du royaume d'Arles et nomma recteur son fils Otton. Le fils et le successeur de Conrad II, Berthold IV de Zähringen (1152-1186), se rangea du coté de Frédéric Ier et rentra en possession de ses Etats héréditaires et de sa dignité de recteur de Bourgogne. 

Frédéric Ier et son fils Henri VI s'efforcèrent de rattacher le plus étroitement possible le royaume d'Arles à l'Empire germanique, afin d'en faire le rempart de l'Empire contre la France, l'Angleterre, qui occupait la Guyenne, et l'Aragon, qui s'emparait du comté de Provence, et aussi pour s'y assurer une nouvelle route vers l'Italie par Bâle, Lyon et Arles. Ce fut sous le rectorat de Berthold IV que fut fondée la ville de Fribourg, dans l'Uechtland ou pays d'Avenches. Son fils Berthold V (1186-1218) fonda les villes de Berne, Berthoud (Burgdorf), Yverdon, Moudon (Milden), et raffermit l'autorité impériale dans toute l'étendue du royaume d'Arles. Il fut secondé par les dispositions favorables que la plupart des feudataires montrèrent envers l'empire d'Allemagne, par suite de la crainte que leur inspirèrent les progrès du roi de France, surtout après la bataille de Bouvines. Dans la Provence cependant, qui fut, sous la domination des comtes de la maison d'Aragon, la partie la plus indépendante du royaume d'Arles, la guerre des Albigeois, pendant laquelle le roi de France soumit à son autorité tous les pays à l'Ouest du Rhône, favorisa le développement de l'influence française et de l'influence du pape. L'empereur Frédéric II défendit à Amauri de Montfort d'empiéter sur les terres qui relevaient de l'Empire.

Avec l'extinction de la puissante maison de Zähringen (1218), finit aussi la dignité de recteur de Bourgogne. En 1229, l'empereur Frédéric II créa le titre de vicaire impérial, qu'il conféra à Hugues d'Arles. Ce ne fut que pendant une partie de son règne que l'empereur eut l'autorité nécessaire pour maintenir le royaume d'Arles dans l'obéissance à l'Empire. Pendant les guerres qu'il fit en Italie il exigea des feudataires de Bourgogne le service militaire, qui lui fut refusé après son échec au siège de Brescia (1238). Depuis cette époque, les relations féodales entre l'Empire et le royaume d'Arles furent presque complètement détruites.

Le concile oecuménique de Lyon (1245), où Frédéric Il fut excommunié, et l'anarchie qui occupa en Allemagne la période du grand interrègne (1254-1273), achevèrent la séparation. Au contraire, l'influence française se développa pendant cette période dans le royaume d'Arles, par la cession que la comtesse de Mâcon, Alix, fit de ses fiefs à saint Louis (1239), et par l'alliance du frère de saint Louis avec l'héritière du comté de Provence (1246). Quand l'Empire germanique fut reconstitué, Rodolfe de Habsbourg fit valoir les droits de l'Empire sur le royaume d'Arles, et donna l'investiture de la Provence, d'abord à la reine Marguerite, veuve de saint Louis, puis à Charles d'Anjou, roi de Sicile (1280). Ces droits furent revendiqués par tous les successeurs de Rodolfe, jusqu'au XVIe siècle. L'empereur Charles IV, pendant le voyage qu'il fit en France en 1378, établit le dauphin (devenu ensuite Charles VI), vicaire général de l'Empire dans le royaume d'Arles.

Les modifications apportées successivement à la situation féodale du royaume d'Arles par la cession du Dauphiné à la France par le dauphin Humbert II (1349), et par la réunion de la Provence à la France, par suite de legs (1481), obligèrent les empereurs d'Allemagne à restreindre leurs prétentions sur le royaume d'Arles. Dans l'organisation de l'Empire en cercles, qui fut faite sous le règne de Maximilien Ier (1494), le cercle de Bourgogne ne comprit, de toutes les parties de l'ancien royaume d'Arles, que la Franche-Comté, tandis que le reste du cercle était formé par les possessions flamandes des ducs de Bourgogne. Certaines parties de la Franche-Comté, et notamment la ville de Besançon, furent comprises dans le cercle du Haut-Rhin. Charles-Quint essaya encore de faire valoir les revendications de l'Empire, après sa victoire sur François Ier, et fut sur le point de réunir à l'Empire tous les Etats des ducs de Bourgogne, que lui céda François Ier pendant sa captivité (1526), mais qu'il abandonna en toute possession à la France par le traité de Cambrai en 1529. Depuis cette époque, l'Empire ne conserva plus que la Franche-Comté, que Louis XIV réclama comme dot de Marie-Thérèse (1668), et le comté de Montbéliard, réuni à la France en 1792. (E.-D. Grand).

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