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Les cours d'eau
Fleuves, rivières, ruisseaux
Au sens général du mot, rivière est synonyme de cours d'eau. C'est, du moins, le langage de la navigation et du droit. Les géographes, au contraire, ont coutume de distinguer les fleuves, qui se jettent dans la mer par une embouchure en forme d'estuaire ou de delta, et les rivières, qui se jettent en un point appelé confluent dans un fleuve ou dans une autre rivière, ou encore dans un lac. En outre, lorsque le cours d'eau a une allure impétueuse, que sa pente excède, en moyenne, 0,05 m à 0,06 m par mètre, on l'appelle plus spécialement torrent. Si son lit est peu large et son débit minime, c'est un ruisseau ou un ru.

Le point où un cours d'eau a son origine est sa source. De cette source à son confluent ou à son embouchure, il reçoît, de part et d'autre, directement ou par l'intermédiaire d'affluents, toutes les eaux qui découlent des terrains plus élevés. La région, délimitée par une ligne de faite ou ceinture, dont il reçoit ainsi les eaux, constitue son bassin. Tout cours d'eau, si faible soit-il, a un bassin. On appelle plus particulièrement bassin fluvial celui qui embrasse les bassins d'un fleuve et de ses divers affluents.

Certains cours d'eau ne peuvent jamais être utilisés par la navigation, soit que leur largeur ou leur profondeur restent jusqu'à la fin insuffisantes, soit que leur courant demeure torrentiel, ou que des obstacles barrent leur lit. Pour les autres, on distingue le point où ils deviennent flottables et celui où ils deviennent navigables. Ces points, qui sont déterminés officiellement dans chaque pays, et que marquent respectivement sur les cartes une petite rame (symbole pratiquement abandonné aujourd'hui) et une petite ancre, ne correspondent d'ailleurs pas toujours à la réalité. Ainsi, la Seine, qui, administrativement, est déclarée navigable à partir de Méry, ne le devient, en fait, que 26 kilomètres plus bas, à Marcilly.

Le tableau ci-dessous permet la comparaison entre les  fleuves les plus importants.
 

Afrique
Nil
Congo
Niger
Zambèze
Orange
Kasaï
Sénégal
Cubango / Okavango
Volta
Limpopo
Bénoué
Chari
Oubangui
Gambie
Chiré
6700
4374
4200
2660
1860
1940
1700
1700
1600
1600
1360
1200
1160
1127
350 

Océanie (Australie)

Murray
Darling
2575
2450 

Amérique

Amérique du Nord
 

Mississippi-Missouri
Mackenzie-Slave
Saint-Laurent
Rio Grande del Norte
Yukon
Arkansas
Colorado
Ohio-Alleghany
Columbia (Oregon)
Snake
Saskatchewan
Churchill
Tennessee
Yellowstone
6260
4241
3058
3027
3290
3300
2250
2102
1950
1670
1931
1600
1600
1600 
Amérique du Sud
Amazone
Madeira - Mamoré
Purus
Parana
São Francisco
Japura (Caqueta)
Tocantins
Pilcomayo
Paraguay
Rio Negro
Orénoque
Tapajoz
Magdalena
Ucayali
Uruguay
6517
3500
3380
3300
3161
2800
2640
2500
2240
2200
2160
1980
1700
1600
1580 

Europe

Volga
Danube
Oural
Kama
Don
Dniepr
Dniestr
Tisza
Rhin
Dvina septentrionale
Elbe
Vistule
Tage
Loire
Warta
Meuse
Ebre
Oder
Douro
Dvina occidentale
Rhône
Prut
Seine
3700
2850
2534
2000
1967
1950
1500
1300
1298
1220
1127
1091
1006
1012
974
950
927
911
850
840
812
811
776 

 

Maros (Muresh)
Weser
Drave
Save

Guadiana
Guadalquivir
Garonne
Moselle
Inn
Main (Mein)
Dordogne
Maritza
Escaut
Tamise
Tibre
Néva
756
732
724
712
675
640
579
575
550
525
525
460
437
430
400
370
60 



Asie
Yangzi (Yang-tsé-Kiang)
Huanghe (Hoang-Ho)
Ob
Amour
Léna
Mékong
Iénisseï
Indus
Irtych
Brahmapoutre
Syr-Daria
Euphrate
Gange
Amou-Daria
Kolyma
Salouen
Irraouaddi
Xijiang (Sikiang)
Tarim
Tigre
Sungari
5500
5200
5150
4350
4270
4180
3800
3040
2970
2900
2860
2780
2700
2620
2600
2500
2250
2100
2000
1950
1819 
N.B. : les longueurs peuvent différer d'un auteur à l'autre selon le choix
qui est fait de tel ou tel affluent comme origine du fleuve.

Hydrologie et hydrométrie

Origine et régime des eaux fluviales. 
La pluie, après sa chute, se divise en trois parties, variables avec la nature du sol (et d'autres facteurs tels que la température) : l'une qui s'y infiltre, l'autre qui ruisselle à sa surface, la troisième qui s'évapore à nouveau ou est absorbée par la végétation. C'est aux deux premières que les cours d'eau doivent naissance. Plus les terrains sont perméables, plus les eaux d'infiltration prédominent, plus les sources sont nombreuses et abondantes. Si, au contraire, le sol est essentiellement imperméable, les cours d'eau se trouvent surtout formés par les eaux de surface ou eaux sauvages, qui descendent le long des versants des vallées, pour s'écouler par le thalweg, et les crues sont, en général, hautes et rapides. Nombre de circonstances peuvent, d'ailleurs, modifier les effets de la constitution géologique du sol : une forte gelée, par exemple, peut rendre momentanément imperméables des terrains éminemment perméables, et la fonte subite, à la suite d'une forte pluie, de la neige qui les recouvre, déterminer une crue désastreuse.

Le régime d'un cours d'eau est l'ensemble des phénomènes qui, se produisent dans ses états successifs. Ses deux éléments essentiels sont l'étiage, c.-à-d. le niveau des basses eaux normales en chaque point du cours d'eau, et le niveau des plus hautes eaux, c.-à-d. le niveau le plus élevé qui se soit produit lors des grandes crues. Le plus bas niveau observé porte plus spécialement le nom de plus bas étiage, celui correspondant aux basses eaux normales et fixé une fois pour toutes comme base des observations étant l'étiage proprement dit ou étiage conventionnel. Le niveau des hautes eaux au delà duquel toute navigation doit cesser constitue les plus hautes eaux de navigation. Enfin on appelle eaux moyennes celles qui s'observent pendant une partie notable de l'année et assurent, en même temps, à la navigation un mouillage convenable, sans que la vitesse devienne gênante. Comme la précédente, cette dernière désignation est, on le conçoit, moins que précise.

Les circonstances atmosphériques n'influent pas seules sur le régime des fleuves et des rivières, sur les débits d'étiage et sur l'importance des crues. Toute une série d'autres causes interviennent, la plupart défavorablement, appauvrissant les étiages et aggravant les crues : la destruction des forêts, qui réduit considérablement l'imbibition du sol, le dessèchement des étangs, qui diminue aussi l'emmagasinement, le développement des irrigations, qui absorbe les sources et favorise l'évaporation, les endiguements et les curages, dont les effets réflexes se font sentir loin en aval. Les cultures ont également sur le régime des fleuves et des rivières une action considérable. Quant aux époques des étiages et des grandes eaux, elles varient beaucoup avec la région où le cours d'eau prend naissance. Si c'est dans une vallée commandée par des massifs montagneux d'une grande hauteur, on la précipitation de la vapeur d'eau se fait sous forme de neige, il y a, d'une part, un étiage d'hiver et un étiage d'été, d'autre part, des crues de printemps, d'automne et même aussi d'hiver. Ailleurs, il n'y a qu'un étiage d'été et que des crues d'automne et d'hiver.

Le nombre de mètres cubes d'eau qui passent dans l'unité de temps, la seconde ordinairement, de l'amont à l'aval du profil transversal d'un cours d'eau en un point donné, est ce qu'on appelle le débit du cours d'eau en ce point. Son calcul ne va pas, du reste, sans de grandes difficultés. Le seul débit qu'on puisse déterminer, aussi bien à l'étiage qu'aux plus hautes eaux, est un débit apparent, pouvant être fort diffèrent du débit réel. Dans tous les cas, la valeur élevée du rapport entre le débit en hautes eaux et le débit à l'étiage est la caractéristique d'un régime torrentiel. Il est, pour la Loire, de 261 à Briare et de 161 à Tours; pour la Garonne, de 167 à Toulouse et de 143 à Langon; pour le Rhône, de 47 en aval du confluent de la Saône et de 38 en aval du confluent de la Durance; pour la Seine, de 34 à Paris; pour la Somme, à Abbeville, de 2,2. On appelle module le débit moyen par seconde calculé sur l'année entière. Le module du Rhône, à Lyon, est, par exemple, de 865 m3.
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Chutes d'Iguazu.
Les chutes de l'Iguazu, affluent du Parana, à la frontière de l'Argentine et du Brésil.

Constitution et forme du lit.
Le sillon dans lequel se maintiennent les eaux, en temps ordinaire, est le lit mineur. Les berges en sont les bords au-dessus de l'étiage. La portion de la vallée recouverte par les plus hautes eaux est le lit majeur. Le , qui a un lit mineur de 1 à 2 kilomètres de largeur, a un lit majeur de 5 à 60 kilomètres. Le Nil, avant d'avoir son cours régulé par le Haut-barrage d'Assouan, passait, de même, dans sa basse vallée, de 650 ou 700 m à 16 km. La Loire, au contraire, ne varie guère, sur la plus grande partie de son cours, que du simple au double ou au triple. Le sol du lit mineur est formé, d'une façon générale et sauf dans quelques gorges rocheuses, par des couches alternées de gravier et de sable plus ou moins vaseux, que les eaux corrodent et affouillent, entraînant, dès qu'elles en ont la puissance, les matériaux qui les constituent, soit qu'elles les roulent, soit qu'elles les prennent en suspension, et les reposant aussitôt que, pour une cause quelconque, cette puissance est retombée au-dessous de sa limite d'efficacité. De là ces déplacements intermittents et par étapes, cette extrême mobilité du lit, qu'on constate dans tous les cours d'eau. L'importance en varie, du reste, non seulement avec la masse des eaux et la pente, qui favorisent la puissance d'entraînement, mais aussi avec la grosseur, le poids spécifique et la forme des matériaux, qui opposent, suivant les cas, une résistance plus ou moins grande. Ainsi l'argile de potier et le gros sable jaune anguleux se mettent en mouvement, d'après les expériences faites, dès que la vitesse dépasse respectivement 0,08 m et 0,22 m par seconde, tandis que les petits galets arrondis, d'un pouce de diamètre, et les pierres anguleuses à fusil, de la grosseur d'un oeuf, ne cèdent qu'aux vitesses respectives de 0,65 m et de 1 m. Ce mouvement des matériaux est ce qu'on appelle le débit solide du cours d'eau. Il suit les périodes du mouvement des eaux. Dans les torrents, où, par définition, la violence du courant est grande, il atteint des proportions souvent considérables, et on n'a eu que trop souvent à déplorer les ravages de ces masses de déjections. Le Var, seul, charrie ainsi 11 millions environ de m3 de limon par an, le Rhône 21 millions, le 40 millions, le Danube60 millions.
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Les méandres de la rivière Deep Fork, en Oklahoma (Etats-Unis).

La forme du lit peut être envisagée sous trois aspects, suivant que l'on considère son plan, son profil en travers ou son profil en long. La forme en plan est toujours sinueuse. Elle est constituée par une série de courbes et de contre-courbes, se succédant en sens inverse et réunies par des raccordements plus ou moins brusques. La profondeur est inégalement répartie dans le profil en travers. Elle est plus grande dans les parties du lit qui présentent le moins de résistance à l'entraînement. Le profil en long du thalweg ne présente ni une pente uniforme, ni une pente continue, mais un certain nombre de pentes principales, dont les brisures et l'inclinaison sont déterminées par les seuils de rochers ou les grands affluents. Dans l'intervalle de ces points de passage, il est composé d'une suite de pentes et de contre-pentes formant une ligne sinueuse, qui oscille, en s'en rapprochant plus ou moins, autour de la pente moyenne de la région. 

Les reliefs et les creux de cette ligne sinueuse sont déterminés par les affluents secondaires et par la distribution des résistances dans l'étendue du lit. Celui-ci est formé par une série de fosses (ou mouilles) séparées par des seuils (ou hauts-fonds, maigres), et le profil en long de la surface des eaux affecte l'apparence d'un escalier dont les paliers correspondraient aux fosses et les marches aux seuils. Cette forme est d'autant plus accentuée que la pente générale du cours d'eau est plus forte; elle est surtout sensible quand les eaux sont très basses. Elle s'atténue, et la pente superficielle tend vers la régularité à mesure que le débit augmente. Chaque crue renouvelle les matériaux qui tapissent le lit et modifie sa forme. La nouvelle forme se rapproche de l'ancienne par ses dispositions générales : sinuosités des rives et du profil du thalweg; elle en diffère plus ou moins, suivant les circonstances, par le tracé des sinuosités, la position des profondeurs, la situation; l'orientation et le relief des seuils. Mais quand, sur un cours d'eau, les rives sont solidement fixées, les crues ordinaires ne modifient plus que dans des proportions très restreintes la forme da plan et, après leur passage, les profondeurs se reproduisent aux mêmes points. Les seuils se reforment aux mêmes placés et ne diffèrent plus que par le relief et l'orientation. (GE).
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Le Nil près de Jinja, en Ouganda.
Le Nil aux chutes de Bujagali, près de Jinja, en Ouganda. Images : The World Factbook.


Ph. Leveau, Burno, Fleuves et marais, une histoire au croisement de la nature et de la culture, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2004.

Collectif, Le fleuve, un système, des territoires, des acteurs, La Documentation française (IAURIF n° 141), 2005.

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