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Les animaux et les humains
La Fauconnerie et son histoire
On nomme fauconnerie l'art de dresser des oiseaux de proie, désignés sous le nom général de faucons, à chasser d'autres animaux, et surtout des oiseaux. Les Anciens ont connu et pratiqué l'art de la fauconnerie dont Elien a exposé les principes; les Gaulois et les Francs chassaient au faucon et Charlemagne possédait un équipage de fauconnerie. Pendant tout le Moyen âge et encore à la Renaissance, cette chasse fut un privilège nobiliaire et les seigneurs seuls pouvaient s'y livrer. 

Elle se divisait eu deux classes : la haute et la basse volerie; la première seule employait le faucon et le gerfaut; dans la seconde, on se servait de l'autour et de l'épervier. Toutes les deux se faisaient a cheval et les dames y prenaient part. L'oiseau était posé sur le poing ganté du chasseur; on lui couvrait la tête d'un chaperon qu'on ôtait au moment de le lancer sur la proie.
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Faucon pèlerin.
Faucon pèlerin. photo : Frank Doyle.

L'art de dresser les faucons exigeait beaucoup de patience et de soin; mais cette chasse était des plus pittoresques et le vieil auteur d'un Traité de la fauconnerie a écrit : 

« C'est un passe-temps et plaisir si grand qu'il ne cède en rien à celui de la vénerie. » 
Relativement peu pratiquée en Europe depuis un siècle, la fauconnerie, aujourd'hui inscrite au patrimoine culturel mondial par l'Unesco,  est restée vivace dans la région du golfe Arabo-persique, en Afrique et en Asie centrale (Turkestan).

La chasse au vol

La chasse au vol comprend deux classes : la haute volerie dans laquelle les faucons seuls : gerfaut, sacre, faucon pèlerin, alphanet, émérillon, sont employés. Puis la basse volerie où l'on ne se sert que des autours et des éperviers. La différence dans les deux espèces de volerie est minime, et les principes généraux peuvent s'appliquer au dressage des différents oiseaux. Une des principales distinctions consiste en ceci, c'est que les faucons proprement dits sont couverts du chaperon, et que, dans l'autourserie, sauf la période de dressage, l'oiseau n'a pas les yeux recouverts de son capuchon. 
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Epervier brun.
Epervier brun. photo : Donna Dewhurst.

Pour dresser un faucon, quelle que soit sa taille, sa provenance, il faut toujours être armé d'une patience à toute épreuve : c'est là la qualité maîtresse d'un fauconnier. Tous les auteurs, qui ne font en général que se répéter en se copiant, sont unanimes sur ce point. Suivant que le faucon était pris adulte ou sors, ou au nid, on décrivait deux modes d'entratnement. Le dressage de l'oiseau pris au nid ou niais, était plus facile, mais l'élève était moins hardi, moins vaillant. Le faucon pris adulte, soit voletant de branche en branche lors de sa sortie du nid : faucon branchier; soit plus âgé encore : faucon hagard, demandait plus de soins et de persévérance, mais alors on obtenait un animal complet comme moyens, car aux instructions reçues venait s'ajouter la ruse naturelle que lui avait procurée l'exercice de la chasse spontanée.

Le dressage.
Les anciens livres de fauconnerie abondent en termes surannés qui seraient déplacés dans cette étude, qui ne contiendra que ce qui est indispensable, mais suffisant, pour permettre à n'importe qui de comprendre les principes du dressage. Schlegel, dans son merveilleux ouvrage dédié au roi des Belges, a condensé les principes de la fauconnerie, que d'autres contemporains ont ensuite vulgarisé dans des publications plus modestes. Une fois le faucon pris, soit au filet, soit dans son nid, il faut l'armer, c.-à-d. lui passer aux jambes les jets, bracelets en cuir, qui sont fixés par un noeud bouclé. A ces jets ou entraves, on fixe un double anneau, les vervelles ou tourillon, qui permettra de retenir sur son billon ou sur sa perche l'oiseau à l'aide d'une lanière de cuir nommée longe. Un grelot léger mais sonore est fixé au tarse et permettra de se tenir au courant des faits et gestes de l'oiseau quand il se sera éloigné dans une futaie. Une coiffe en cuir dite chaperon empêche l'animal de voir et de se débattre. Le chaperon simple qui sert pendant la période d'instruction est sans plumet et s'appelle chaperon de rust. Il permet à l'oiseau de manger et de rejeter les plumes ou pelotte qui faisaient partie de ce qu'on lui a présenté pour l'habituer à prendre des becquades.
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Faucon pèlerin.
Faucon pèlerin.

Quand un faucon, un autour ou un épervier adultes viennent d'être pris, ils sont furieux et semblent indomptables. Il faut de suite les entraver, leur mettre le capuchon et nuit et jour, pendant au moins quarante-huit heures, les porter sur le poing sans les laisser dormir. Pendant ce temps-là, on ne cesse de les caresser soit avec la main, soit avec une aile de pigeon : c'est le frist frast des Hollandais. Ce contact adoucit l'oiseau qui se débat de moins en moins et finit par devenir maniable. Une autre caresse auquel il est fort sensible est le chatouillement des pieds pratiqué doucement. Quand le captif semble moins ému, moins effarouché, on lui présente un peu de viande, le pât, et on lui en laisse tirer quelques becquades. Les autres jours on lui donnera le matin une partie tendineuse, pour qu'il s'acharne après elle; ce sera le tiroir. Suivant la taille des oiseaux, les progrès dans la soumission du prisonnier seront plus ou moins rapides. Le gerfaut demande un mois de dressage, tandis que l'émérillon sera préparé en quinze jours : tout cela varie encore suivant le caractère de l'oiseau et l'habileté du fauconnier.

Une fois l'oiseau habitué à ses entraves, au chaperon et à la compagnie de son maître, il faut l'accoutumer à venir sur le poing. A cet effet on le déchaperonne; on se met à deux ou trois pas de lui et on lui présente sur le poing gauche, revêtu d'un gant épais, le pât. Poussé par la faim, l'oiseau oublie sa défiance naturelle et s'élance sur la main; on lui laisse prendre deux ou trois becquades, puis on le replace sur le billot; on s'éloigne ensuite d'une plus grande distance. Après quelques jours de ces exercices, on emmène l'oiseau en plein air; il est retenu par une longue corde de 15 à 20 m; c'est la filière. On le fait venir progressivement sur le poing de plus en plus loin et à chaque fois on le récompense de sa docilité en lui donnant bonne gorge. Pour les oiseaux de haut vol, on se sert d'un leurre pour les faire venir. Le leurre est composé d'une planchette à laquelle sont fixées deux ailes de pigeon. Au milieu on attache le pât, qu'on laisse manger ainsi au faucon. Plus tard, quand l'oiseau sera en liberté et qu'on voudra le rattraper, il suffira de faire tournoyer le leurre à l'aide d'une corde pour voir le faucon se précipiter dessus et venir à la portée de la main de son maître.
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Emerillon.
Emerillon. photo : Karen Laubenstein.

Les oiseaux de basse volerie, les autours, les éperviers, reviennent directement sur la main; aussi les auteurs en fauconnerie distinguaient-ils les oiseaux de haut vol ou de leurre et les oiseaux de bas vol ou de poing. On jetait les premiers par un brusque mouvement de l'avant-bras. On lâchait les seconds qui, n'étant pas chaperonnés, ne prenaient leur essor qu'au moment où le gibier leur partait à portée. Quand l'oiseau semble absolument obéissant, on lui montre le gibier qu'il est destiné à poursuivre. Pour cela on prend des hérons dont on enveloppe le bec dans un étui de roseau et après avoir laissé les faucons jeûner vingt-quatre heures, on les lâche sur la bête. Pour prendre un héron ou un milan, on avait l'habitude d'employer trois faucons. Le premier était dit le hausse-pied; le second, qui fatiguait le héron et l'empêchait de gagner les hauteurs, était appelé le teneur; enfin on lâchait le plus expérimenté le tombisseur qui fondait comme une masse sur l'oiseau de chasse et parfois si vivement, qu'il s'enferrait sur le bec du héron, que celui-ci présentait comme une scie à son adversaire entraîné par son attaque impétueuse. Toussenel, le maître écrivain de l'ornithologie passionnelle, cite d'après un vieil auteur de fauconnerie le cas où le tombisseur ayant vu un de ses acolytes blessé par le héron, « tomba sur icelui si roidement, que du coup lui enleva la tête en ses serres et ains fut le roy privé de son droit ».

Une fois le gibier pris, il était d'usage de donner gorge chaude à l'oiseau, en lui présentant soit le foie, soit le coeur de sa victime. C'était suivant l'expression lui faire courtoisie. Quand un faucon avait ainsi chassé deux ou trois fois, on le considérait comme bien affaité et de bonne affaire. Une des déceptions des fauconniers, c'était de voir leur élève partir sans retour. Il emportait ses sonnettes. Pour éviter ce contretemps, il ne faut pas faire voler les faucons au temps des amours et par la pluie ou la trop grande chaleur. La plus grande intimité doit exister entre le fauconnier et ses oiseaux. Parmi ceux-ci, il en est qui ont le caractère ombrageux; il faut donc les accoutumer le plus possible avant de les lâcher au bruit des chevaux, au contact des personnes et de la vue des chiens.

L'autourserie.
L'autourserie était une des variétés de la chasse à l'oiseau de proie et n'en différait qu'en ceci : c'est que l'autour ne chassait que le gibier comestible, d'où son nom de cuisinier. La chasse au gerfaut, au faucon lanier, au faucon sacre exigeait de grands frais et avait surtout comme objectif la prise du milan, du héron, de la buse et servait plus à la mise en scène qu'au profit. L'autour était aussi très recherché pour la chasse à l'oie sauvage, au canard, au faisan. Toussenel dit avoir vu en Italie des éperviers prendre plusieurs douzaines de cailles dans une journée. L'émérillon est sans rival pour la chasse à l'alouette. C'est dire combien il est facile à peu de frais de se procurer un plaisir qui jadis était réputé l'apanage exclusif des grands et des nobles. La connaissance des principes élémentaires contenus dans cette notice montre qu'avec un peu de constance peut devenir fauconnier qui en aura le temps et la volonté. Le point essentiel est d'être le plus souvent possible avec l'oiseau qu'on tient sur le poing ganté. Au bout d'un certain temps, le faucon finit par s'attacher à son maitre comme le ferait le chien le plus fidèle. Les auteurs du Moyen âge sont remplis de récits touchants à propos des témoignages d'affection donnés à leurs maîtres ou maîtresses par les faucons. Au moment de la mue, les oiseaux ne sont plus en état de chasser; on les laisse alors à la perche. Une fois leur plumage repoussé, on a soin de les baigner et de les saupoudrer de poudre de pyrèthre pour leur enlever les insectes auxquels ils sont très sujets et qui les désolent. (Dr Sam. Ambrésin).

Histoire de la fauconnerie

La fauconnerie, bien qu'elle ait été connue des peuples de l'Antiquité classique, ne semble pas avoir bénéficié d'une grande attention; elle paraît avoir été bien plus prisée en Perse et en Inde. Ctésias, médecin et historien grec, contemporain de Xénophon, rapporte que certaines populations de l'Inde passaient de son temps pour chasser le lièvre, la gazelle et le renard à l'aide d'oiseaux de proie dressés. C'est Julius Firmicus Maternus, qui, au IVe siècle, fait le premier mention de la chasse au vol d'une manière un peu précise; car c'est à peine si l'on peut ajouter foi à certains récits qui veulent que les Chinois aient connu ce mode de chasse dès l'an 690 avant l'ère chrétienne. Il est hors de doute que nos premiers Mérovingiens ont connu et pratiqué la fauconnerie telle qu'elle a été exercée pendant le Moyen âge. Francs, Burgondes et Wisigoths attachaient un grand prix à leurs oiseaux dressés à la chasse, si l'on en juge par les peines sévères que leurs lois prononçaient contre ceux qui osaient tuer ou voler un de ces oiseaux. 
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Emerillons.
Emerillons.

Chez les Francs, celui qui avait volé un autour était frappé d'une amende de 3 sous; si l'oiseau était sur sa perche, l'amende était élevée à 15 sous, et elle n'était pas moindre de 40 sous, si l'autour était enfermé sous clef. La loi Gombette  (Les Lois des Burgondes) est encore plus menaçante : elle ordonne que le voleur devra laisser l'autour volé lui manger six onces de chair sur la poitrine, à moins, toutefois, que le voleur ne préfère payer 6 sous au propriétaire de l'oiseau, plus 2 sous d'amende. Si l'on s'en fie aux rares textes de ces époques lointaines, il semble bien que jusque vers le VIIIe siècle on n'ait pas fait grand usage des oiseaux qu'on nomma plus tard les oiseaux de haut vol. Dans tous ces textes, en effet, il n'est jamais question que des oiseaux de bas vol, c.-à-d. des éperviers et des autours. Mais à partir de cette époque et pendant tout le Moyen âge la chasse au vol est à son apogée; elle est réglementée et considérée par un grand nombre de hauts seigneurs comme plus noble que la vénerie elle-même. Ce débat des veneurs et des fauconniers sur La prééminence de leur art durera jusqu'au XVIe siècle l'auteur du livre du Roy Modus, Gaces de La Digne, Guillaume Tardif posent la question, qui devait être une question à la mode, et la discutent sans oser la résoudre. 

Le Débat de deux dames sur le passe-temps de le chasse aux chiens et aux oiseaux, par Guillaume Crétin, prouve que fort tard encore cette question était restée l'un des sujets de dispute favoris parmi les gens du bel air. Jacques du Fouilloux, plus hardi, tranche carrément la question et donne sans hésiter la préférence à la vénerie. C'est qu'à l'époque où écrivait du Fouilloux, seconde moitié du XVIe siècle, la fauconnerie semblait destinée à disparaître bientôt. Il n'en fut pas ainsi, grâce à Louis XIII qui essaya de la faire renaître, mais qui ne réussit qu'à la faire pratiquer par ses courtisans désireux de plaire au maître. Dès le règne de Henri IV, la fauconnerie était morte : ce n'était plus qu'une tradition; ravivé un instant par le goût passionné de Louis XIII, cet art était dès lors oublié de la noblesse. Louis XIV ne chassa au vol que parce que cette chasse faisait partie de l'étiquette. Au XVIIIe siècle, Louis XV montra encore pendant sa jeunesse un certain goût pour cet exercice, mais il l'abandonna dès qu'il fut parvenu à l'âge d'homme, et son successeur ne prit qu'une seule fois en sa vie l'oiseau sur le poing, toujours par respect de la tradition. 
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Fauconnerie au Moyen âge.
La fauconnerie au temps de Frédéric II selon De arte venandi cum avibus, ca. 1240.

A la fin du XIXe siècle on a tenté en plusieurs endroits de remettre en honneur ce genre de sport; des fauconniers ont été formés; de grandes chasses ont été organisées ; c'est un simple passe-temps d'amateurs. La fauconnerie à partir de cette époque est plutôt un jeu d'érudits qu'une véritable chasse, même si on y a recours aussi depuis quelques dizaines d'années pour chasser les oiseaux aux environs de certains aéroports. Mais, pendant toute la durée de la féodalité, elle a été une institution pourvue de règles fixes. Le droit de posséder des faucons était, dans presque toutes les provinces, réservé aux seuls gentilshommes. Chevaliers et dames portaient dans les cérémonies civiles ou religieuses leur oiseau sur le poing en signe de noblesse. Les bourgeois des bonnes villes avaient droit seulement à l'autour, au milan et à l'épervier, oiseaux roturiers ou ignobles, c.-à-d. non nobles, par opposition aux faucons des diverses variétés réputés oiseaux gentils et qui devaient être traités par tous avec les plus grands égards. 

Des faucons et des princes.
Nous aurions de la peine à nous figurer aujourd'hui l'importance des moindres détails de l'art de fauconnerie, art dans lequel tout était réglé et soumis à des lois d'étiquette incompréhensibles pour nous. Chaque oiseau devait avoir son nom inscrit sur le bloc qui lui servait de perchoir. Un bon fauconnier devenait un personnage dont la renommée se répandait au loin et que princes et seigneurs se disputaient. La langue des fauconniers demandait aussi une véritable étude; et cette langue différait encore lorsqu'il s'agissait de l'autourserie qui ne devait pas être confondue avec la fauconnerie proprement dite. Un grand nombre de mots de cette langue spéciale ont survécu à l'institution et sont passés aujourd'hui dans le langage courant. La médecine particulière aux oiseaux de chasse avait aussi des règles : ce n'était guère qu'un ramassis de recettes empiriques ou superstitieuses, et c'est merveille que des oiseaux aient pu supporter sans périr de pareils traitements; mais c'était le dogme, et les anciens traités de fauconnerie sont presque entièrement composés de ces recueils de recettes étranges. Quant à l'éducation des oiseaux, elle était faite aussi suivant des principes immuables, mais assez raisonnables. 
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Scènes de chasse au vol dans le Codex Manesse (première moitié du XIVe s.).

Pendant tout le Moyen âge et jusqu'au XVIIe siècle, les cadeaux entre princes consistaient presque exclusivement en faucons, quelquefois en chiens, mais plus rarement. Sous Louis XV et même encore sous Louis XVI, le roi du Danemark, le duc de Courlande et l'ordre de Malte envoyaient chaque année au roi de France des faucons qui étaient reçus par celui-ci avec un cérémonial particulier. Ce n est qu'en 1787 que le roi de Danemark cessa d'envoyer à Louis XVI des faucons d'Islande. Ce n'était pas seulement en cadeaux qu'étaient offerts les oiseaux dressés à la chasse; souvent aussi ils étaient donnés à titre de redevances féodales. Il n'est pas rare non plus de rencontrer dans les cartulaires des indications qui prouvent que des vassaux ou des communautés religieuses étaient soumis à l'obligation de nourrir les faucons du seigneur. Les veneurs et les fauconniers furent toujours ennemis à la cour des rois de France, et il subsista jusqu'au XVIe siècle une coutume assez singulière. A la sainte croix de mai, les veneurs, tout habillés de vert et armés de gaules vertes, venaient chasser de la cour les fauconniers; quand arrivait au contraire la sainte croix d'hiver, le grand fauconnier, accompagné de ses capitaines et fauconniers, mettait hors de cour les veneurs. Malgré cet antagonisme, la fauconnerie et la vénerie ont toujours suivi une marche si parallèle et subirent des modifications si semblables que l'histoire de leurs institutions et de leurs coutumes a toujours été à peu près identique.
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Un fauconnier en Inde vers 1600.

Le Grand Fauconnier. 
« Encores, dit du Tillet, que les rois de France de tout temps ayent esté sur tous autres addonnez à la chasse, ces deux offices (de grand veneur et de grand fauconnier) ne sont anciens. » La charge de grand fauconnier n'est pas antérieure au commencement du XVe siècle : c'est Eustache de Gaucourt, dit Tassin, qui en fut le premier investi en 1406. Avant lui les rois de France avaient eu des fauconniers et des maîtres fauconniers : c'est ainsi que, suivant Hincmar, Charlemagne entretenait quatre veneurs et un fauconnier, qui se trouvaient subordonnés aux trois principaux officiers de la maison du roi, c.-à-d. au sénéchal, au bouteiller et au connétable. Plus tard, on voit apparaître de temps en temps dans les comptes de la maison du roi les noms de quelques fauconniers, sans qu'il soit possible d'en conclure qu'il y ait eu, au moins jusqu'au XIIIe siècle, une véritable charge de fauconnier du roi. En 1231, on trouve mentionnés deux fauconniers royaux, Gaufredus et Herricus; mais sous ce même saint Louis commence la série, à peu près ininterrompue, des fauconniers ou maîtres fauconniers du roi : ce qui ne veut pas dire que nous sachions quelles étaient à cette époque les attributions de ces officiers. Suivant Gaces de La Bigne, le maître fauconnier jetait son faucon le premier, et le roi ne lançait le sien qu'en second lieu. Sous François Ier, le grand fauconnier n'avait pas sous ses ordres moins de cinquante gentilshommes et de cinquante fauconniers aides, qui tous étaient nommés par lui; cet officier pouvait chasser partout où bon lui semblait, dans toute l'étendue du royaume; il avait aussi le droit de lever un tribut sur tous les oiseleurs de France, qui ne pouvaient vendre un seul oiseau sans sa permission, sous peine de voir leur marchandise confisquée. La fauconnerie, de même que la vénerie, suivait le roi en quelque lieu qu'il se rendit. 

Au XVIIIe siècle encore, dans les cérémonies officielles, les fauconniers étaient tenus d'accompagner le roi, le faucon sur le poing. A cette époque, la grande fauconnerie du roi se composait de neuf vols ou équipages de vols : deux pour milan, un pour héron, deux pour corneille, un pour les champs, un pour rivière, un pour pie et un pour lièvre. Le grand fauconnier était le premier officier de la grande fauconnerie; il devait prêter serment entre les mains du roi et avait droit de nomination à toutes les charges de chefs de vols. Mais il faudrait bien se garder de croire que le grand fauconnier eût quelque autorité sur la fauconnerie du cabinet du roi; cette dernière, tout à fait indépendante de la grande fauconnerie, était commandée par un capitaine général; elle comprenait cinq vols : corneille, pie, les champs, émérillon et lièvre. A chacun de ces vols étaient attachés un capitaine-chef, un lieutenant-aide, un maître-fauconnier. Quand on dit que le grand fauconnier nommait tous les chefs de vols, il faut donc entendre seulement les chefs de vols de la grande fauconnerie; il n'avait aucun droit sur les chefs des oiseaux du cabinet du roi, pas plus que sur les chefs des oiseaux de la chambre.(Henry Martin).

Voici la liste des maîtres fauconniers du roi et grands fauconniers de France : 

Jean de Beaune, fauconnier du roi, de 1250 à 1258; Etienne Granche, maître fauconnier en 1274; Simon de Champdivers, mort en 1316; Pierre de Montguignard ou Montguyard, 1313 et 1321; Pierre de Neuvy, 1325; Jean de Campdavaine, 1317 et 1337; Philippe Danvin, 1338, 1344, 1350 et 1353; Jean de Pisseleu, 1343 et 1354; Eustache de Cechy ou Sissy, 1354, 1367, 1371; Nicolas Thomas, 1371; André de Humières, seigneur de Vaux, dit Drieu, 1372-1373-1378; Enguerrand de Dargies, 1380 et 1393; Jean de Sorvillier, 1393-1404. A partir de 1406 commence la série des grands fauconniers : Eustache de Gaucourt, dit Tassin, 1406, 1410 et 1412; Jean Malet de Graville, 1415; Nicolas de Bruneval, 1416; Guillaume des Prez, 1418 et 1419; Philippe de La Chastre, seigneur de Bruillebault, 1429-1452; Georges de La Chastre, 1452, 1455 et 1459; Olivier Salart, avant 1464; Jacques Odart, seigneur de Curzay, 1480; Raoul Vernon, seigneur de Montreuil-Bonnin, 1514; René de Cossé-Brissac, 1521; Charles de Cossé-Brissac, maréchal de France, 1553; Timoléon de Cossé-Brissac, tué en 1569; Charles II de Cossé-Brissac, mort en 1621; Robert, marquis de La Vieuville, 1596, Charles, duc de La Vieuville, mort en 1653; André de Vivonne, 1612-1616; Charles d'Albert, duc de Luynes, 1616-1621; Claude de Lorraine, duc de Chevreuse, mort en 1657; Louis-Charles d'Albert, duc de Luynes, 1643-1650 ; Nicolas Dauvet, comte des Marests, 1650-1672 ; Alexis-François Dauvet, 1672-1688; François Dauvet, 1688-1718; François-Louis Dauvet, 1718-1748; Louis-César de La Baume-le-Blanc, duc de La Vallière, 1748-1780 ; Joseph-Hyacinthe-François-de-Paule Rigaud, comte de Vaudreuil, 1780, émigré en 1789, mort en 1817.
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