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Le droit des pauvres

Le droit des pauvres était un impôt au dixième du prix des billets d'entrée dans les spectacles et concerts quotidiens ou semi-quotidiens (loi du 7 frimaire an V) et au quart de la recette brute des lieux de réunions ou de fêtes où l'on entre en payant (loi du 8 thermidor an V). C'est une des principales ressources des bureaux de bienfaisance. L'idée même de cet impôt remonte très haut, jusqu'à une ordonnance de Charles VI, du mois d'avril 1407; il fut principalement réglementé par une ordonnance de Louis XIV, du 26 février 1699. 

En fait, les administrateurs des entreprises théâtrales prélèvent le montant du prix sur la recette brute et le versent à l'administration hospitalière. Il semble, dès lors, que l'impôt frappe l'entreprise théâtrale elle-même, et alors voici l'objection qu'il soulève, c'est que, étant assis sur la recette brute, il est souverainement injuste, attendu qu'à une très forte recette brute correspond assez souvent une faible recette nette, que le prélèvement du prix des pauvres sur la recette brute menace de beaucoup trop réduire ou même d'absorber qu'ainsi il paraîtrait beaucoup plus équitable que l'impôt fût assis sur la recette nette et que chaque entreprise payât à raison de ce qu'elle gagne. 

Si, en effet, telle était la base de l'impôt, cette critique, bien souvent formulée par les diverses entreprises théâtrales, serait pleinement justifiée. Mais les textes sont conçus dans un autre esprit. Ils exigent l'impôt du spectateur lui-même. C'est uniquement pour éviter à celui-ci l'ennui de payer à deux guichets que les directeurs de théâtre confondent l'impôt et le prix principal des billets en un prix unique jet se chargent de la perception. Dès lors n'est à aux, dans leurs calculs, de n'évaluer comme recette que les neuf dixièmes du prix des entrées probables.

D'une façon plus précise, sont soumis au droit du dixième les théâtres, opéras, les concerts quotidiens et semi-quotidiens, les panoramas, théâtres pittoresques ou mécaniques, les établissements à pantomime et à représentation équestre, les marionnettes. Sont soumis au droit du quart, les bals publics, les feux d'artifices à entrée payante , les concerts non quotidiens, courses et exercices de chevaux, les établis sements dont les billets d'entrée donnent droit à des consom mations, ceux dont l'entrée est gratuite mais qui contiennent des divertissements payants. Sont complètement exemptées les réunions, mêmes payantes, organisées dans un but d'intérêt général ou ayant la caractère d'instruction rattaché à un service public, exposition, des beaux-arts, de l'industrie, de l'agriculture. 

Ajoutons que, sont également soustraits à tout droit, le prix des chaises dans les églises, même quand il est augmenté à raison d'une solennité quelconque, les billets gratuits, les représentations gratuites, les spectacles ou amusements en plein vent dans des lieux non clos (saltimbanques, marionnettes, voitures aux chèvres). Les bureaux de bienfaisance exercent ce droit de trois manières, soit par la régie simple, soit par le bail à ferme, soit par la régie intéressée. 

Dans la régie simple, la perception du droit est opérée par un préposé; dans le bail, par un adjudicataire ; dans la régie intéressée, par un régisseur qui, au-dessus d'un certain prix, a une remise proportionnelle sur l'excédent. Quant au mode de perception, c'est, ou le prélèvement jour par jour sur la recette quotidienne (c'est le cas le plus fréquent), ou l'abonnement (décret du 9 décembre 1809, art. 3). La compétence des contestations appartient au conseil de préfecture (arrêté du gouvernement du 10 thermidor an XI et décret du 8 fructidor an XIII). 

Cet impôt a existé jusqu'en 1942, date à laquelle le régime de Vichy l'a remplacé un impôt sur les spectacles, jeux et divertissements, perçu directement par les communes.
(H. Saint-Marc).

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