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La déduction immédiate

Raisonner, c'est tirer d'un ou de plusieurs jugements donnés un autre jugement qui en est la conséquence. Dans le raisonnement déductif, qui conclut du général au particulier, la conséquence découle nécessairement des prémisses par cela seul qu'elles sont données.

La déduction est donc une inférence dans laquelle la conséquence dérive de jugements antécédents en vertu de la forme même de la pensée, indépendamment de sa matière. Dans le raisonnement inductif, qui va du particulier au général, le passage de quelques cas à tous les cas du même genre ne peut être expliqué, uniquement par l'analyse des lois de l'esprit. C'est pourquoi la déduction seule relève de la Logique formelle.

La déduction est de deux sortes :

1° Immédiate, quand elle tire une conclusion d'un jugement donné sans recourir à un jugement intermédiaire. C'est de cette sorte de déduction qu'il sera traité dans cette page.

2° Médiate, quand elle recourt à un jugement intermédiaire (Syllogisme). 

On obtient une déduction immédiate soit par opposition, soit par conversion.
 

Opposition

I. - Définition.
On nomme opposition  le procédé logique qui consiste à conclure immédiatement, de la vérité ou de la fausseté d'une proposition, la vérité ou la fausseté d'une proposition opposée.

Or deux propositions sont opposées, lorsque, composées des mêmes termes, elle diffèrent par leur quantité ou leur qualité. 

La quantité dépend de l'extension du sujet.

La qualité dépend de l'affirmation ou de la négation par rapport à l'attribut. 


II. - Espèces.
Toute proposition ayant à la fois quantité et qualité, on a quatre espèces de propositions opposées :

Universelle affirmative A
      »             négative   E
Particulière affirmative I
      »              négative  O
Asserit A, negat E, verum generaliter ambo. Asserit I, negat O, sed particulariter ambo.

D'où quatre espèces d'oppositions :

1) Contradictoire, entre deux propositions différant à la fois en qualité et en quantité.

2) Contraire, entre deux propositions de même quantité universelle et de qualité diffférente.

3) Subcontraire, entre deux propositions de même quantité particulière et de qualité différente.

4) Subalterne, entre deux propositions de même qualité et de quantité différente.

Ill. - Conclusions immédiates par opposition.

A) Contradictoires.
De la vérité ou de la fausseté de l'une des propositions on peut conclure la vérité ou la fausseté de l'autre (Principe du tiers exclu : Une chose est ou n'est pas. Non datur medium

Vg. 1° Tout homme est mortel (vrai). Donc la contradictoire est fausse : Quelque homme n'est pas mortel.

2° Nul homme n'est mortel (faux). Donc la contradictoire est vraie

Quelque homme est mortel.

B) Contraires.
De la vérité d'une des propositions on peut conclure la fausseté de l'autre, mais non vice versa, car datur medium :

Vg. 1° Tout homme est mortel (vrai). Donc la contraire est fausse : Nul homme n'est mortel.

2° Tout homme est savant (faux). Donc la contraire n'est pas nécessairement vraie : Nul homme n'est savant, car datur medium : Quelque homme est savant.

C) Subcontraires.
De la fausseté d'une des propositions on peut conclure la vérité de l'autre, mais non vice versa, car toutes deux peuvent être vraies :
Vg. 1° Quelque homme n'est pas mortel (faux). Donc la subcontraire est vraie : Quelque homme est mortel.

2° Quelque homme est savant (vrai). Donc la subcontraire n'est pas nécessairement fausse, car deux subcontraires peuvent êtres vraies Quelque homme n'est pas savant (vrai aussi).

D) Subalternes.
a) De la vérité de la subalternante on peut conclure la vérité de la subalternée, mais non vice versa :
Vg. 10 Tout homme est mortel (subalternante vraie). Donc la subalternée est vraie : Quelque homme est mortel.

2° Quelque homme est savant (subalternée vraie). Donc la subalternante n'est pas nécessairement vraie, car Tout homme est savant (faux).

b) De la fausseté de la subalternée on peut conclure la fausseté de la subalternante, mais non vice versa.
 
Vg. 1°, Quelque homme n'est pas mortel (subalternée fausse). Donc la subalternante est fausse : Nul homme n'est mortel.

2°, Nul homme n'est savant (subalternante fausse). Donc la subalternée n'est pas nécessairement fausse, car Quelque homme n'est pas savant (vrai).

Conversion

I. - Définition.
On nomme conversion le procédé logique qui consiste à conclure, d'une proposition donnée, une proposition nouvelle, de même qualité, par la transposition des termes.

II. - Règle générale.
Ddans la proposition convertie, les termes doivent garder leur extension première, ou tout au moins ils ne doivent pas en avoir une plus grande.

L'extension du sujet est toujours manifeste.

L'extension de l'attribut est indiquée par ces deux lois :
 

1° L'attribut des propositions affirmatives est pris seulement dans une partie de son extension, vg.

Tout A est B = Tout A est quelque B.

Les boeufs sont ruminants = quelques ruminants, c'est-à-dire une espèce du genre ruminant.

Quelque A est B = Quelque A est quelque B.

2° L'attribut des propositions négatives est pris dans toute son extension, vg. :

Nul A n'est B = Nul A n'est aucun B.
Nul homme n'est immortel = Nul homme n'est aucun immortel, n'appartient au genre immortel.
Quelque A n'est pas B = Quelque A n'est aucun B.
Quelque homme n'est pas immortel = n'est aucun immortel.

III. - Règles particulières : 
1° Les universelles affirmatives A se convertissent en particulières affirmatives I.

Tout homme est mortel = Quelque mortel est homme. C'est ce qu'Aristote appelle la conversion imparfaite ou par accident kata meros.

2° Les universelles négatives E et les particulières affirmatives I se convertissent sans changement :

a) Nul homme n'est quadrumane (E).
Donc nul quadrumane n'est homme (E).

b) Quelques hommes sont savants (I).
Donc quelques savants sont hommes (I).

3° Les particulières négatives O n'ont pas de conversion régulière. On fait une contraposition, c'est-à-dire qu'on les ramène d'abord à des particulières affirmatives; puis on convertit celles-ci Quelques oiseaux ne sont pas capables de voler (O). On la ramène à une particulière affirmative :
Quelques oiseaux sont non-capables de voler (I).
On convertit cette dernière d'après la règle ordinaire (2°). 
Quelques non-capables de voler sont oiseaux.


IV. - Critiques de Hamilton (Discussions on philosophy and literature).
1° Il n'accepte pas que dans toute proposition affirmative l'attribut soit toujours particulier; donc on peut quelquefois convertir une proposition affirmative universelle en une autre affirmative universelle.

Réponse.
C'est vrai, quand la proposition est réciproque, exprime une définition, car alors l'attribut a exactement la même extension que le sujet :

Tout homme est animal raisonnable.
Donc tout animal raisonnable est homme.

2° Il prétend que dans toute proposition négative l'attribut n'est pas toujours universel; donc, conclut-il, les négatives universelles ne peuvent pas toujours se convertir en universelles négatives :

Les hommes ne sont pas quelques animaux.
Donc quelques animaux ne sont pas hommes.
Réponse.
Hamilton a été trompé par l'ambiguïté des termes. Dans la proposition citée : « Les hommes ne sont pas quelques animaux », quelques n'est pas un terme particulier, c'est-à-dire pris dans un sens indéterminé; il est pris au contraire dans un sens déterminé, pour signifier telle espèce d'animaux. Il équivaut par conséquent à un terme individuel, qui, comme nous l'avons vu, doit être pris dans toute son extension. C'est pourquoi la proposition peut se convertir en une autre négative universelle :
Les hommes ne sont pas quelques animaux - les animaux sans raison,
Donc les animaux sans raison ne sont pas les hommes.  (G. Sortais).
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