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Les Arénicoles
Le genre Arenicola
Les Arénicoles sont des vers appartenant à l'embranchement des Annélides et rangés dans la classe des Polychètes (Les Chétopodes). Le genre Arénicola a été créé par Lamarck (Système des animaux sans vertèbres, 1802, p. 324) pour des Annélides de la famille des Téléthusiens. Le type de ce genre (Arenicola piscatorum Lamarck, Lumbricus marinus Belon, Linné, etc.), a été étudié par Delle Chiaje, Grube, Schmarda, Milne-Edwards, Claparède et par Vogt et Yung qui en ont donné une monographie détaillée dans leur Traité d'anatomie pratique. C'est une belle Annélide dont la couleur varie du brun foncé, presque noir (A. carbonaria Lamck), au vert et au jaune; les jeunes individus sont plus faiblement colorés et parfois presque transparents. L'Arénicole est très abondante sur toutes les côtes sablonneuses de la Manche et de l'Atlantique. On la trouve également dans la Méditerranée, mais de taille un peu plus petite : tandis que les individus du Nord atteignent jusqu'à 25 cm, la longueur moyenne des exemplaires recueillis dans le golfe de Naples, est seulement de 6 à 7 cm. 

L'Arénicole se creuse dans le sable une galerie tubulaire en forme de siphon. Sa présence est trahie à marée basse par la petit tortillon de sable que l'animal rejette à l'entrée de la branche du siphon dans laquelle se trouve l'extrémité anale; l'autre ouverture du tube s'aperçoit facilement à une distance du tortillon variable avec la taille de l'animal. L'habitat de cette Annélide s'étend de la zone littorale à la zone profonde. Il arrive souvent, après les tempêtes, que de fort belles Arénicoles sont rejetées sur le rivage à la suite des mouvements du fond. Les jeunes paraissent habiter la zone la plus élevée. 

Le corps de l'Arénicole est cylindrique, nous pouvons y distinguer extérieurement trois régions : 

Une région antérieure (région thoracique des auteurs) comprenant, outre le prostomium, six grands anneaux qui portent les soies dorsales et sont séparés par des bourrelets circulaires (tores); lorsque la trompe exsertile est dilatée, l'extrémité antérieure est renflée de manière à simuler une ventouse terminale; elle a la forme d'une massue lorsque la trompe est contractée. Chaque anneau est orné de sillons circulaires au nombre de cinq, en sorte qu'il peut être subdivisé comme les anneaux des Hirudinées en segments plus étroits. Chaque grand anneau ou métamère porte une paire de parapodes peu développés, dans le sommet desquels est implanté un faisceau de soies. Sur la face ventrale, on voit deux renflements qui sont analogues aux rames inférieures (neuropodes) des pieds et qui renferment des soies à crochets placées en série transversale. Le premier anneau ou anneau bucal porte la bouche. L'anatomie prouve que les trois premiers anneaux de la région antérieure ont une signification spéciale. Ils n'acquièrent pas d'organes excréteurs définitifs et correspondant à l'archipodium.
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Arénicole. Arenicola piscatorum. - A, région antérieure abranche; B, région branchifère; Q, queue.

Une région moyenne ou région branchiale (région abdominale des auteurs), qui comprend treize anneaux dont le diamètre diminue légèrement d'avant en arrière. Chaque anneau de cette région porte une paire de branchies dorsales ramifiées en houppes d'une belle couleur rouge: les deux premières paires sont moins développées que les autres.

Une région caudale cylindrique, plissée transversalement et présentant un aspect chagriné, dû à de nombreuses papilles verruqueuses de couleur jaunâtre; les anneaux de cette région ne portent ni parapodes, ni soies, ni branchies; le dernier anneau ou anneau anal se termine par l'anus largement ouvert pour laisser passer le sable expulsé du canal digestif.

Le tégument se compose d'une couche cuticulaire, une couche hypodermique, une couche de muscles circulaires et une couche de muscles longitudinaux. Les dix-neuf premiers anneaux du corps portent de chaque côté un parapode. La rame dorsale de ce parapode a la forme d'un cône tronqué et aplati, dont la coupe transversale est ovalaire, faisant une saillie d'un millimètre environ et dont le bord supérieur porte deux prolongegements lamellaires; les soies du notopode sont droites, finement barbelées à l'extrémité, au nombre de 15 à 20 par chaque faisceau. La rame ventrale est un léger bourrelet portant une vingtaine de soies en crochets. Dans la région de la trompe, la surface du corps est recouverte de très nombreuses papilles ampulliformes, renfermant deux vaisseaux sanguins disposés comme ceux qui se rendent dans les ramuscules branchiales. Cette ressemblance conduit Vogt et Yung à attribuer à ces papilles un rôle important dans la respiration cutanée.

La cavité du corps de l'arénicole est très spacieuse; elle renferme un liquide périviscéral qui tient en suspension, en nombre immense, les éléments reproducteurs à l'époque de la maturité sexuelle. Cette cavité est divisée antérieurement en trois chambres correspondant aux trois anneaux de l'archipodium. Vient ensuite une quatrième chambre très vaste s'étendant du quatrième anneau jusqu'au début de la région caudale et renfermant l'intestin, ses glandes annexes, les organes segmentaires, les organes génitaux, etc. 

La région caudale est divisée en autant de chambres qu'il y a d'anneaux, une cloison interne transversale séparant ces dernières les unes des autres. La cavité du corps est tapissée par une fine lamelle péritonéale qui se replie pour prendre part à la formation des cloisons. Elle est traversée par des brides musculaires qui s'insèrent d'un côté dans la couche des muscles circulaires de la paroi du corps et de l'autre contre la paroi de l'intestin. Enfin, dans la région postérieure de la chambre viscérale, une lamelle, également musculaire, s'étend obliquement de chaque côté de la chaise nerveuse jusque dans le voisinage des soies, divisant ainsi la cavité du corps en trois chambres longitudinales, l'une centrale renfermant l'intestin, les deux autres latérales contenant les organes segmentaires. C'est la disposition qui existe également chez les Ophéliadées. 

Le système nerveux consiste en un anneau périoesopbagien et un cordon ventral.
Vogt et Yung ont fait la remarque très importante que ce cordon ne mérite pas le nom de chaîne ganglionnaire et que les prétendus ganglions décrits par certains auteurs sont dus à la contraction résultant de l'emploi de réactifs durcissants. A ce point de vue encore, les Téléthusiens se rapprochent donc des Polygordiens et des autres Ophéliadées. 

L'Arénicole ne possède pas d'yeux; mais il existe un otocyste de chaque côté de la trompe, appliqué contre la face dorsale de l'anneau oesophagien. Cet otocyste est plus compliqué que celui des Architrypane, mais il occupe absolument la même position et présente le même aspect. 

L'intestin s'étend en ligne droite sur toute la longueur du corps : ses parois sont excessivement minces comme chez la plupart des animaux qui vivent dans le sable. Il commence par une bouche inerme, pourvue d'une trompe exsertile atteignant un ou deux centimètres de longueur. La couche des muscles circulaires s'épaissit considérablement au voisinage de la bouche. L'oesophage est cylindrique, renflé dans sa partie moyenne; il se rétrécit en arrière au point où débouchent dans le tube digestif les canaux excréteurs des deux glandes en forme de sacs dont l'extrémité est close, et dirigée en avant. Ces glandes renferment un liquide blanchâtre ou jaunâtre qui joue sans doute un rôle dans la digestion

Vogt et Yung les homologuent aux glandes de Morren des Oligochètes. Nous croyons qu'il convient surtout de les comparer aux organes si développés chez les Hésionides et les Syllidiens et considérés, par Hugo Eisig, comme des vessies natatoires. On a vu ces glandes comme un rudiment d'appareil pulmonaire, et on les appelées pour cette raison glandes pulmonoïdes. Il est clair que, chez l'Arénicole, le rôle physiologique de ces organes est modifié par le genre de vie presque sédentaire de l'animal. 

En arrière de l'oesophage, le canal digestif s'élargit et prend une coloration jaunâtre, qui est due à la présence de glandes nombreuses rappelant les cellules chloragogènes du Ver de terre. Dans la région caudale, le tube digestif se continue par l'intestin terminal, alternativement rétréci aux points d'insertion des cloisons.

Le sang de l'Arénicole est d'un beau rouge. Le système vasculaire comprend trois troncs longitudinaux constituant, vec le coeur, la partie centrale de l'appareil; 

1° le vaisseau dorsal, qui s'étend sur toute la longueur du corps dans la ligne médiane de la face dorsale de l'intestin; 

2° le vaiseau ventral, situé au-dessous de l'intestin auquel il est relié par un repli de péritoine;

3° le vaisseau sous-intestinal, paralèlle au précédent, situé directement au-dessus de lui; il reçoit, dans les six premiers segments de la région branchiale, un vaisseau afférent, venant de la branchie correspondante. 

Ce n'est qu'à partir du septième segment branchifère qu'on voit les pieds recevoir des anses vasculaires normales, c.-à-d. formées par une branchie portant le sang du vaisseau ventral au pied et à la branchie, et par une branche ramenant le sang de la branchie au vaisseau dorsal. Il y a donc deux modes bien distincts de circulation branchiale. Dans les six premiers segments branchifères, l'artère vient du vaisseau ventral pour se rendre directement à la branchie, et le sang en revient par une veine accolée, pour ainsi dire, à cette autre veine, qui va le déverser dans le vaisseau ventral de l'intestin. Dans toute cette région le vaisseau dorsal ne reçoit que des minuscules intestinaux. Mais, à partir du septième segment, le sang, mené par l'artère ventrale à la branchie, revient par la veine se liter dans le vaisseau dorsal. Les anses vasculaires de la région antérieure (prébranchiale) suivent un parcours tout semblable.

L'Arénicole possède un coeur éminemment contractile, composé de deux ventricules réniformes, situés de chaque côté de l'oesophage, immédiatement en arrière des glandes pulmonoïdes. Chaque ventricule reçoit du sang du vaisseau dorsal ainsi que des vaisseaux latéraux, qui se dilatent pour former l'oreillette médiane, et enfin du vaisseau sous-intestinal.

L'Arénicole possède treize paires de branchies dorsales, du septième au dix-neuvième anneau. Chaque branchie est composée d'un tronc basilaire très court, qui se ramifie, presque à fleur de la surface du corps, en troncs secondaires au nombre de huit à douze, qui se subdivisent eux-mêmes en rameaux très fins, disposés dans des plans différents et formant des houppes touffues. Chaque rameau renferme deux vaisseaux, l'un afférent, l'autre efférent. Les branchies sont histologiquement des papilles cutanées très développées et ramifiées.

Les organes segmentaires sont au nombre de six paires. Trois appartiennent à la région thoracique et trois à la région branchiale. Ils s'étendent par conséquent du quatrième au dixième anneau. On peut y distinguer trois parties : l'entonnoir, la vésicule et l'appendice glandulaire. 

Au moment de la reproduction, l'entonnoir et la vésicule sont remplis d'oeufs ou de spermatozoïdes. Les sexes sont séparés. Les ovaires et les testicules naissent de la différenciation des cellules péritonéales localisées sur les organes segmentaires au bord inférieur et interne de la vésicule et dans le prolongement de la base de l'entonnoir. 

L'Arénicole pond pendant les mois de février et mars. Les pontes se trouvent en abondance dans les petites dépressions que la mer laisse, en se retirant, sur les plages de sable fort remuées par les gros temps, ordinaires en cette saison. Les pontes se présentent sous la forme de petits tas ovoïdes, gélatineux, terminés par un pédoncule qui s'enfonce dans le sable. Ces masses gélatineuses sont produites par une sécrétion des glandes cutanées de la partie antérieure de l'animal, sécrétion qui retient les oeufs dans une sorte de manchon d'où l'Arénicole se retire ensuite par un mouvement de haut en bas. L'embryogénie est condensée. 

Les espèces les plus intéressantes du genre sont, outre le type que nous venons d'étudier : 

1° l'Arenicola ecaudata Johnston, très facile à distinguer par ses branchies plus nombreuses (25 à 27) et par la brièveté de la région caudale, qui atteint à peine la longueur d'un des anneaux de la région branchiale. Cette espèce n'est pas rare à Saint-Vaast-la-Hougue, à Roscoff, à Concarneau. Elle est très commune au Croisic (jetée de Penbron). Claparède l'a observée dans la Méditerranée; 

2° l'Arenicola glacialis Murdock. Cette espèce est très voisine de A. marina, mais présente seulement six segments sétigères antérieurs à la région branchiale, laquelle comprend douze segments. Elle se rencontre en Alaska. (A. Giard).

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