 |
On peut distinguer,
dans l'histoire de l'architecture
(et de l'art en général) en France ,
trois grandes périodes : d'abord l'architecture antique, qui est apportée
par les Grecs, et se cointinue avec l'art gallo-romain; puis l'architecture
chrétienne, qui s'étend du Ve
au XVIe siècle,
embrassant l'art latin, l'art
roman et l'art ogival ou gothique;
enfin l'architecture de la Renaissance
et l'architecture moderne, qui, avec son Ă©clectisme, est de plus en plus
une architecture européenne et mondiale et de moins en moins une architecture
que l'on peut qualifier de française.
L'Antiquité.
Les colonies grecques
du midi de la Gaule
apportèrent leur système architectural : on voit, au bas de Vernégues,
près de Pont-Royal, les ruines d'un temple grec ;
les musées des villes du Sud de la france renferment des stèles, des
autels,
et autres objets de cette Ă©poque. Les Romains
répandirent dans la Gaule leurs légions de soldats et d'ouvriers, et
la couvrirent de leurs monuments. Aujourd'hui encore nous pouvons admirer
ces prodiges de construction qui ont survécu à tant de siècles : les
ponts de Saint-Chamas, de Sommières,
de Vaison; l'aqueduc
de Nîmes dit le Pont du Gard; les aqueducs
de Lyon et de Metz;
les portes des villes de Saintes,
de Nîmes, d'Autun et de Carcassonne;
les Thermes de Cluny, Ă Paris,
de Saintes, de Nîmes, etc.; les arcs de
triomphe d'Orange, de Carpentras,
de Reims, de Saint-Remy, de Cavaillon ;
les théâtres de Lillebonne, d'Orange, de
Vienne;
les amphithéâtres de Nîmes, d'Arles,
de Saintes; la Maison carrée de Nîmes, le palais de Constantin
Ă Arles, le palais Gallien Ă Bordeaux,
le temple de Livie à Vienne, le temple de Riez; la pyramide funéraire
de Couard près d'Autun, et celle de Saint-Remy; enfin, parmi les constructions
militaires, la tour de CĂ©sar, Ă Provins.
L'architecture
du Moyen âge
Le christianisme
ne modifia pas d'abord l'architecture romaine;
il en adopta les formes et les règles jusqu'au XIesiècle.
Les premiers chrétiens furent obligés de se réfugier dans des souterrains
pour célébrer en secret les cérémonies de leur culte : ces premières
Ă©glises
ou cryptes sont en général petites, sans
autre décoration que quelques peintures
grossières. La crypte de l'église d'Ainay à Lyon,
celle de Saint-Gervais Ă Rouen, et l'Ă©glise
Saint-Paul dans l'ancien cimetière de
Jouarre, peuvent donner une idée de ces monuments primitifs de l'art chrétien.
Lorsque Constantin eut permis aux chrétiens
de célébrer en liberté les mystères de leur religion, ils élevèrent
de tous côtés des oratoires et des églises, modestes constructions faites
sur le modèle des basiliques latines,
ce qui a fait donner à cette première architecture chrétienne le nom
de style latin. Les Francs et les autres
Germains,
en s'Ă©tablissant dans la Gaule ,
ne modifièrent pas davantage le système artistique qu'ils y trouvaient
en usage : ils acceptèrent donc l'art latin, comme ils prirent la religion,
la langue et les moeurs des Gallo-Romains. Jusqu'au
VIIIe
siècle, les constructions sont petites, le plus souvent en bois,
avec une décoration d'un goût sommaire. Les monuments encore existants
de l'époque mérovingienne
sont : l'Ă©glise de Saint-Jean Ă Poitiers,
qui date du Ve
ou VIe siècle;
l'église de Savenières, dont la façade
et la nef sont du VIe
ou VIIe siècle;
l'Ă©glise de Saint-Jean Ă Saumur, et la Basse-Oeuvre
de Beauvais, qui datent du VIIIe.
Avec Charlemagne
on voit paraître les dômes'
byzantins ,
et les formes arrondies de l'église funèbre
de JĂ©rusalem, de Sainte Sophie Ă Constantinople,
et de Saint-Vital Ă Ravenne. Les relations
du grand empereur avec l'Italie
et l'Orient ont imprimé à l'architecture
de nouvelles tendances; mais son règne est trop court pour que l'art prenne
de la fixité et une détermination précise, et, après lui, de nouvelles
ténèbres couvrent la France .
Les monuments loi nous restent de l'Ă©poque carolingienne
sont plusieurs Ă©glises d'Aix-la-Chapelle,
de Cologne ,
et de Nimègue, l'église de Sainte-Croix à Saint-Lô, Notre-Dame d'Orbieu,
les Ă©glises d'Orcival, d'Issoire ,
de Vermanton, de Saint-Nectaire, de Nantua ,
les abbayes de Fontenelle et de Tournus ,
!'Ă©glise de Saint-BĂ©nigne
Ă Dijon, l'Ă©glise Saint-Martin
Angers,
la Manécanterie de Lyon, et la crypte
de Saint Denis ,
près de Paris.
Toutefois, il ne faudrait pas regarder
comme frappés de stérilité ces longs siècles d'hésitations et de tâtonnements
: il s'opère un travail lent, mais continu, de transformation, et lorsque
les temps deviennent meilleurs, lorsque le calme renaît, on est tout étonné
de voir se produire des idées mûries, des formes nouvelles et savantes
L'architecture
romane.
Après l'an mil
l'architecture romane se développe
presque instantanément dans toute sa beauté. II semblait, selon l'expression
d'un chroniqueur contemporain, que l'Europe
se dépouillât de ses haillons pour revêtir la robe blanche des églises.
II y a bien encore des réminiscences byzantines,
mais le plan de la basilique s'est modifié
: plus de sanctuaire absidal, de transept
sans choeur, de nefs
isolées : le sanctuaire et le choeur sont réunis et allongés; des nefs
absidales et des chapelles rayonnantes les
entourent; le transept s'est reculé et ne forme plus que la tête des
nefs pour laisser plus de place aux fidèles; le plan a pris la forme de
la croix grecque ou latine; la sculpture commence
a déployer ses richesses aux portails. L'art
prend, en outre, un caractère national : tandis que l'Orient conserve
des types et des règles hiératiques dans les représentations religieuses,
l'Occident place dans ses monuments les costumes et les types nationaux,
qui suivent les modifications du goût de chaque pays.
Les monuments de style
roman ou romano-byzantin sont nombreux en France ;
nous citerons parmi les plus remarquables les Ă©glises
de Saint-Germain-des-Prés
Ă Paris, de Saint-Père Ă
Chartres,
de Saint-Sernin
Ă Toulouse, de Sainte-Croix Ă
Bordeaux,
de Saint-Étienne Ă
Caen, de Saint-Étienne
à Beauvais, de Châlons-en-Champagne ,
de Noyon, de Saint-Georges de Boscherville,
de Saint-Benoît-sur-Loire, de Vézelay,
les parties inférieures et la crypte de la
cathédrale
de Chartres, les portails de Saint Trophime
d'Arles et de Notre-Dame de Poitiers.
A la même, époque, des édifices d'un genre différent, imités de l'art
grec qui se développait dans Saint-Marc
Ă Venise, s'Ă©levaient dans quelques provinces,
semblables a ces graines enlevées par les vents et qui donnent naissance
à des arbres étrangers aux pays où elles ont été portées : un de
ces curieux Ă©difices est l'Ă©glise de Saint-Front Ă PĂ©rigueux,
copie exacte de l'Ă©glise de Saint Marc, et qui a servi probablement de
type aux cathédrales de Cahors et d'Angoulême,
aux abbayes de Solignac et de Souillac, et
peut-être à la cathédrale du Puy.
Il est Ă remarquer que les grandes provinces
de France
eurent chacune une école et un style particuliers. Dès le
Xe
siècle, des écoles d'architecture étaient établies dans
les couvents : elles subissaient la domination exclusive des Ă©coles
grecques, dont la richesse se prêtait merveilleusement au luxe déployé
dans les Ă©glises. Mais, au XIIe
siècle, Saint Bernard tonna
en chaire contre ce luxe; alors Ă©clata une scission : l'Ă©cole de Cluny
conserva la richesse du style byzantin, tandis que celle de Cîteaux,
revenant à la simplicité, à la sévérité, abandonna les formes luxuriantes.
Cette dernière école prépara et amena le style
ogival dans sa belle simplicité.
A partir du XIIesiècle,
les écoles architecturales peuvent se reconnaître à la différence des
matériaux qu'elles emploient et du style de leurs monuments ce sont :
1° l'École ligérine,
qui s'est développée le long de la Loire ,
dans le Blaisois ,
la Touraine ,
l'Anjou ,
le Maine
et le Poitou ;
elle se distingue par l'élégance et la profusion des ornements qu'elle
jeta autour des portes et des fenĂŞtres,
sur les murailles, les frises et les chapiteaux,
tels qu'enroulements, guirlandes, bouquets, branches chargées de
feuilles
et de fruits, fleurs, dessins en
arabesques,
par la solidité de ses
voûtes en plein
cintre, par la grandeur, le choix et la régularité de l'appareil;
2° l'École aquitanique, qui a
conservé avec ténacité jusqu'au XIVe
siècle le style romano-byzantin, et qui, remarquable, comme
la précédente, par la pureté et l'élégance de ses sculptures,
n'a employé qu'exceptionnellement les chevrons
brisés, les méandres, les échiquiers ou damiers, les tores rompus, les
losanges et toutes les moulures anguleuses,
préférant les lignes arrondies et flexueuses;
3° l'École auvergnate, dont les
membres, se consacrant uniquement Ă l'architecture religieuse, s'intitulaient
les logeurs du bon Dieu, les monuments quelle Ă©leva offrent des
contre-forts
plus rares et moins prononcés que dans le Nord, des colonnes
moins courtes et moins ramassées que celles du roman
primitif, des tours peu développées, peu de richesse dans les moulures,
une marqueterie décorative aux archivoltes,
aux frontons, au pourtour des absides,
enfin de petites et persistantes arcatures;
4° l'Ecole bourguignonne, qui conserva
les pilastres cannelés de l'architecture
antique;
5° l'Ecole normande, la plus importante,
la plus féconde, la plus pure de tout alliage, inférieure par rapport
Ă l'ornementation tant que dura le
style romano-byzantin, mais qui prit un grand essor Ă l'Ă©poque
ogivale, et dont les monuments, de vastes proportions, se couronnèrent
de belles tours carrées et de flèches élancées.
L'architecture gothique.
Jusqu'au XIIe
siècle les architectes ont emprunté leur système décoratif
à l'étranger, et ils ont conservé les voûtes
et les arcs à plein cintre de l'Antiquité .
Une forme nouvelle apparaît; c'est l'ogive,
qui est appelée à opérer une révolution radicale. Quelque opinion qu'on
adopte sur l'origine de cette nouvelle forme, il paraît certain que la
première application en fut faite en France ,
et que les artistes y furent les premiers Ă comprendre tout le parti qu'on
pouvait en tirer. Dès la première moitié du
XIIe
siècle l'ogive fait son apparition : nous la voyons au portail
de Saint-Denis en 1140,
Ă celui de Chartres en 1145,
au choeur de Saint-Germain-des-Prés
en 1163, Ă celui de Notre-Dame de
Paris
en 1182. Les plus anciens monuments
de la transition, ceux oĂą l'on trouve l'art
ogival (ou gothique) primitif, ne se rencontrent qu'en France; c'est
un fait acquis. La première église ogivale
d'Angleterre
est celle de Canterbury, qui date de 1174
et a été bâtie par un Français, Guillaume de Sens; la cathédrale
de Cologne
est postérieure à celles d'Amiens et de
Beauvais,
et tracée sur leur plan; l'église de Wimpfen-en-Val fut bâtie de 1263
à 1278 par un Français; la cathédrale
de Prague est due Ă Mathieu d'Arras et Ă
Pierre de Boulogne, et celle d'Upsala en Suède ,
Ă Pierre Bonneuil, tailleur de pierre de Paris;
Philippe Bonaventure et Mignot, tous deux de Paris, ont élevé le Dôme
de Milan, et Hardouin l'Ă©glise de Sainte-PĂ©tronne
Ă Bologne .
Le gothique dura environ trois siècles; on le divise en France en style
ogival
primitif ou Ă lancettes (de 1150
Ă 1300), style
ogival rayonnant (de 1300
Ă 1400), et style ogival fleuri
ou flamboyant (de 1400 Ă 1550
). Les monuments les plus remarquables de ces trois Ă©poques sont :
1° les cathédrales
de Paris, Reims,
Chartres,
Rouen,
Amiens,
Bourges,
Beauvais,
Noyon, Soissons, Laon ,
Sens, l'abbatiale de Saint-Denis, les
Saintes
de Paris et de Vincennes;
2° Saint-Ouen
de Rouen, Saint-Urbain de Troyes, le portail
de Saint-Antoine (Isère);
3° Notre-Dame-de-l'Epine ,
le grand portail de la cathédrale de Rouen, l'église
Saint-Maclou de la même ville, la flèche de Strasbourg,
la nef de la cathédrale de Nantes, etc.
L'architecture militaire
commença vers le XIe siècle à prendre
un essor rapide, et le pays se couvrit de forteresses. Nous pouvons juger
de leur importance par les magnifiques débris qui subsistent encore, tels
que les remparts d'Aigues-Mortes ,
d'Arles, d'Avignon,
de Carcassonne ,
de Die ,
de Montpellier, de Narbonne ,
de Saint-Guillhem, de Provins ;
les portes de Moret ,
de Cadillac ,
de Nogent-le-Roi ,
de Saint-Jean de Provins; les châteaux d'Alluye,
d'Argental , de Blanquefort, d'Angers, de Beaucaire, de Bruniquel, de Chalusset,
de Château-Gaillard ,
de Coucy ,
de Chinon, de Fougères ,
de Cesson, de Montlhéry, de Mehun, de Loudun, de Pierrefonds ,
de Saumur, de Vincennes, du Vivier; le
château des Papes Ă Avignon, le Palais de Justice Ă
Paris;
les abbayes fortifiées de Saint Jean-des
Vignes Ă Soissons et de Saint-Leu d'Esserant;
les ponts fortifiés de Cahors
et d'Aigues-Mortes, etc.
L'architecture civile
ne resta pas en arrière, et bon nombre de villes conservent encore des
maisons de ces Ă©poques.
L'histoire n'a pu
enregistrer qu'un petit nombre de noms des artistes constructeurs du Moyen
âge ;
parmi eux, nous citerons : Romuald, architecte de Louis
le Débonnaire, qui commença en 840 la cathédrale
de Reims, rebâtie plus tard; l'évêque de
Chartres,
Fulbert,
qui donna les plans de sa cathédrale et en dirigea les premières constructions;
l'abbé Suger, qui fit rebâtir, d'après ses propres
plans, l'Ă©glise abbatiale de Saint-Denis;
Robert de Luzarches et Thomas de Cormont, architectes
de la cathédrale d'Amiens; Pierre de Montereau,
architecte de la Sainte-Chapelle
Ă Paris; Robert de Coucy et Jean d'Orbais,
architectes de la cathédrale de Reims; Jean
de Chelles, un des architectes de la cathédrale de Paris ;
Eudes
de Montreuil, qui construisit à Paris les églises de Sainte-Catherine-des-Écoliers,
de l'HĂ´tel-Dieu, de Sainte-Croix de-la-Bretonnerie, des Cordeliers, des
Blancs-Manteaux, des Mathurins et des Chartreux, tous Ă©difices qui ont
été détruits; Jean Ravy, qui termina l'église Notre-Dame; Hugues Libergier,
architecte de Saint-Nicaise de Reims; Jean Langlois, architecte de Saint-Urbain
Ă Troyes; Enguerrand le Riche, architecte
de la cathédrale de Beauvais, etc. C'est
vers la fin du XIIIe siècle et pendant
le XIVe que se formèrent ces compagnies
d'ouvriers maçons, charpentiers et sculpteurs, auxquelles les francs-maçons
doivent leur origine. C'est alors aussi que, dans le midi de la France,
les Frères pontifices construisirent les ponts d'Avignon
et de Pont-Saint-Esprit, ouvrages merveilleux pour ce temps.
A la fin du XVe
siècle, les artistes de l'Italie
avaient répudié les traditions de l'architecture
gothique, et se livraient avec succès à l'étude de l'Antiquité .
Le travail de la Renaissance ,
c.-Ă -d. le retour vers l'antique, fut moins prompt en France .
La peinture et une partie de la sculpture
suivirent franchement les nouvelles voies; mais l'architecture
et la sculpture monumentale cherchèrent à maintenir les formes ogivales;
elles en augmentèrent outre mesure l'ornementation, et, en la surchargeant
de détails prétentieux et de mauvais goût, en hâtèrent la décadence.
Telle Ă©tait la situation,
quand les Français furent conduits en Italie par Louis
XII. Georges d'Amboise, promoteur ardent et protecteur éclairé
des arts, voulut faire profiter la France des merveilles de l'art italien,
et y amena un célèbre architecte, Fra Giocondo, moine dominicain.
Les artistes ne manquaient pas; mais ils bâtissaient encore en style flamboyant,
malgré leurs tendances marquées vers le style italien; tels étaient,
Ă Rouen, Roger Ango, architecte du palais de justice, Pierre Desaulbeaux
et les frères Leroux, architectes et sculpteurs de Notre-Dame
et de Saint-Maclou; Ă Solesme, Pilon l'Ancien ; Ă Troyes,
François Gentil; à Nantes, Michel Columb;
à Orléans, François Marchand et Viart;
Ă Tours, Pierre Valence et Jean Juste. Giocondo
n'eut qu'Ă diriger vers le style italien les talents de nos artistes,
et l'on vit bientĂ´t s'Ă©lever le charmant palais de la Cour des comptes
à Paris, détruit par un incendie en 1737,
et la splendide résidence du cardinal d'Amboise à Gaillon ,
dont Pierre Valence fut l'architecte et Jean Juste le sculpteur.
La façade
orientale du château de Blois
date aussi de Louis XII. Toutefois, quelques
artistes, fidèles à l'ancien style, élevaient les châteaux de Vigny
et de Châteaudun ,
les hĂ´tels de ville de Nevers ,
d'Arras, de Saint-Quentin ,
la jolie petite chapelle de l'hĂ´tel de
Cluny, et l'hôtel de La Trémouille à Paris.
Sous le règne de François Ier,
Serlio et Vignole, appelés en France, firent triompher les principes de
Vitruve
et de Palladio, aux dépens de l'architecture
gothique, qui fut définitivement condamné. Serlio rebâtit le château
de Fontainebleau, que le Primatice
et le Rosso décorèrent à l'intérieur. Dominique Cortone (Boccador)
construisit en
1533 l'HĂ´tel de Ville
de Paris; puis on vit s'Ă©lever, comme Ă l'envi, dans le style italien,
la grande façade du château de Blois, les châteaux de Madrid, de la
Muette, de Saint Germain ,
de Villers-Cotterets, de Chantilly ,
de Follembray ,
de Nantouillet, d'Écouen, de Varengeville,
d'Azay-le-Rideau ,
de Chenonceaux ,
et celui de Chambord, espèce de compromis
essayé par Pierre Nepveu entre les deux styles rivaux.
-
Château
de Blois. façade de l'aile septentrionale. Il date des premières
années
du
règne de François Ier . Photo : © Serge
Jodra, 2010.
L'architecture civile s'Ă©tait rapidement
pliée, et, sans trop de difficultés, aux exigences de la mode, d'autant
plus que le style italien se prĂŞte mieux que le style
ogival à la disposition intérieure des habitations; mais il n'en
fut pas de mĂŞme, pour l'architecture religieuse. Jean Texier continuait
à élever la flèche septentrionale de la
cathédrale
de Chartres; d'autres architectes construisaient
l'Ă©glise de Brou ,
la flèche centrale de Notre-Dame et la tour de Beurre à Rouen,
la tour Saint-Jacques-la-Boucherie
à Paris, les flèches de Saint-André
Ă Bordeaux, de Saint-Jean Ă
Soissons,
etc. Les chapelles des châteaux
de Chenonceaux ,
de Blois, de Nantouillet, d'Écouen,
sont de style ogival, lorsque toutes les autres parties de ces châteaux
sont en style de la Renaissance .
Philibert
Delorme fut le premier à bâtir la chapelle du château d'Anet
en style purement italien, en 1532.
II y eut alors des
protestations contre l'emploi de l'architecture étrangère dans les monuments
religieux, par exemple, la flèche de la cathédrale
de Beauvais, élevée en 1555 par Jean Wast
et François Maréchal (elle s'écroula en 1573), et les églises'Saint-Etienne
et Saint-Eustache Ă Paris.
Mais ces efforts furent vains : une révolution s'était opérée dans
les esprits depuis le XVe siècle, les
croyances religieuses avaient faibli : les
ordres
gréco-romains l'emportèrent, et Vitruve
devint le véritable chef des écoles françaises. Alors s'élevèrent
le pavillon de l'Horloge et l'aile gauche du Louvre,
la
fontaine des Innocents,
sur les dessins de Pierre Lescot; le pont
Neuf, les hĂ´tels Carnavalet
et Bretonvilliers, la grande
galerie du Louvre, sous la direction de Jacques
Androuet Ducerceau; le nouveau château de Saint-Germain en Laye ,
aujourd'hui détruit, dont J.-B. Ducerceau fut l'architecte; une
façade
du château de Fontainebleau, par Jamin;
le palais du Luxembourg
et le portail de l'Ă©glise
Saint-Gervais, par Debrosses; le beau phare connu sous le nom de Tour
de Cordouan, bâti par Louis de Foix.
L'architecture
des Temps modernes
Le XVIIe siècle.
Au XVIIe
siècle, pendant l'administration de Richelieu
et de Mazarin, l'architecture
de la Renaissance a perdu sa grâce et sa délicatesse; elle devient
lourde, et se traîne péniblement dans l'ornière antique. Quelques architectes
se placent cependant hors ligne : Charles Lemercier construit la Sorbonne,
le Palais-Royal et une aile nouvelle
au Louvre; Pierre Le Muet et François
Mansart érigent le Val-de-Grâce; Louis Le Vau
bâtit le Collège des Quatre Nations (auj. le palais de l'Institut
de France), achève les Tuileries
avec l'architecte d'Orbay, et élève le château de Vaux; Gérard
DĂ©sargues donne les dessins de l'HĂ´tel de Ville de Lyon,
qu'un autre architecte, Simon Maupin, eut la gloire de bâtir.
-
La
colonnade du Louvre ver 1770.
Tableau
de Pierre-Antoine Demachy.
L'architecture ,
sous le règne de Louis XIV, sort des hésitations
ont elle n'avait pas cessé de se trouver, soit qu'elle affectât une légèreté
souvent plus étonnante que réfléchie, soit qu'elle fléchit sous la
lourdeur des proportions; désormais sure d'elle-même, elle devient savante,
pleine de grandeur, de majesté et d'unité. C'est encore l'Antiquité ,
mais servant uniquement de base et de modèle pour les proportions et la
pureté des détails. Deux grands faits contribuèrent à cet important
progrès, la création de l'Académie d'architecture,
fondée par Colbert en
1671,
et la publication des principaux Ă©difices antiques de Rome,
mesurés et dessinés par Desgodets, sur l'ordre
du mĂŞme ministre, en 1682. Les huit
premiers membres de l'Académie furent Blondel,
Le Vin, Bruant, Gittard, Le Paultre, Mignard,
d'Orbay et d'André Félibien. On vit alors
le château de Versailles
et l'Ă©glise des Invalides s'Ă©lever
sous la direction de Jules Hardouin Mansart,
la colonnade
du Louvre et l'Observatoire
de Paris faire la gloire de Claude Perrault,
Blondel construire la Porte Saint-Denis,
Bruant bâtir l'Hôtel des Invalides et passer en Angleterre
pour ériger le château de Richmond; Saint-Cloud, Trianon,
Marly,
s'embellissent de constructions modernes; enfin Antoine Le Paultre s'occupe
de la décoration intérieure des palais, et dessine la cascade
de Saint-Cloud. Dans toutes ces oeuvres, la richesse s'allie avec la grandeur
et la majesté. Simon de La Vallée fait adopter en Suède
la manière française.
Le XVIIIe
siècle.
L'impulsion donnée à l'architecture
sous Louis XIV fut si forte, qu'elle se fit
sentir pendant presque toute la durée du règne suivant, et que les architectes
se maintinrent pendant un certain temps Ă la hauteur de leurs devanciers.
Les Robert de Cotte, père et fils, bâtiment le
colonnade de Trianon et l'Ă©glise Saint Roch ;
Gabriel
élève les colonnades de la place de la Concorde ,
l'École militaire
de Paris, la salle d'opéra de Versailles
et le château de Compiègne;
Soufflot construit l'église Sainte Geneviève (Panthéon),
l'École de Droit à Paris, et le grand hôpital
Ă Lyon; Servandoni fait le portail
de l'Ă©glise Saint-Sulpice .
D'autres architectes français, Peyre, Jardin, de la Guépière, Thomas,
Thibaut, etc., construisent Ă l'Ă©tranger le palais de Coblence,
la cathédrale de Copenhague,
le palais de La Haye, l'hĂ´tel de ville d'Amsterdam,
le grand théâtre et la Bourse de Saint-Pétersbourg,
etc.
Cependant la pureté du goût s'était
altérée en Italie;
Borromini
et son école s'étaient jetés dans un système d'ornementation
exagérée, tourmentée, prétentieuse; ils ne tardèrent pas à trouver
des imitateurs en France : Oppenord fut le chef de cette nouvelle Ă©cole
capricieuse et fantasque, qui donna naissance au style dit de Louis
XV, et dont le type est la merveilleuse résidence de Mme
Dubarry Ă Luciennes. Boffrand, architecte
de la même école, décora l'hôtel de Soubise (auj. Archives nationales),
le palais de Nancy pour le roi Stanislas, la
résidence de Wurzbourg, et le château de
la Favorite, près de Mayence. Dans les monuments
de cette période de l'art, on doit reconnaître que la grâce, la délicatesse,
l'imprévu et l'originalité des ornements font pardonner ce qu'il y a
d'incorrect, d'irrégulier et de faux.
Après Louis XV,
il s'opéra un revirement dans les esprits : on se reprit d'une vive ardeur
pour les arts antiques; les découvertes de Pompéi
et d'Herculanum donnèrent une force irrésistible
à ces nouvelles tendances, préparées par les savants écrits de Winckelmann.
Alors on copia servilement l'Antiquité
: Boullée dans l'architecture, comme
David
dans la peinture, fut le chef de
la nouvelle école. Parmi les architectes de cette époque sévère, nous
citerons : Gondouin, qui fit l'École de Médecine
de Paris,
Ledoux,
qui construisit plusieurs beaux hĂ´tels Ă Paris, entre autres l'hĂ´tel
de Thélusson, en face de la rue d'Artois, et les barrières de Paris,
auj. détruites ( Propylées de Paris );
Louis, Ă qui on doit les galeries du Palais-Royal ,
le Théâtre français, l'ancien Opéra, et le théâtre de Bordeaux;
Wailly,
architecte de la salle de l'Odéon à Paris; Rousseau, qui donna les plans
de l'hĂ´tel de Salm (aujourd'hui hĂ´tel de la LĂ©gion d'honneur); Chalgrin,
qui bâtit le Collège de France et l'église Saint-Philippe-du-Roule;
Antoine, qui construisit l'Ă©glise des Monnaies et le Palais de Justice
Ă Paris, le palais du prince de Salm-Kibourg en Allemagne ,
l'HĂ´tel de la Monnaie Ă Berne, et le palais
du duc de Berwick Ă Madrid. On peut mentionner
en second ordre Detournelle, Hubert, Van Clemputte, Poyet, Beaumont, Renard.
Sous le Premier Empire, puis sous la Restauration,
l'architecture se borna à copier l'Antiquité ;
elle manqua de grandeur et d'originalité. Fontaine
et Percier furent les chefs des Ă©coles de ce temps. On vit s'Ă©lever l'arc
de triomphe de l'Étoile sous
la direction de Chalgrin, la Bourse
sous celle de Brongniart, la colonne
de la place VendĂ´me avec
Gondouin
et Peyre, l'arc du Carrousel avec
Fontaine et Percier, presque tous les intérieurs du Louvre
par les mêmes; le palais du Corps législatif (Palais
Bourbon) par Poyet, celui du Conseil d'État et de la Cour des Comptes,
sur le quai d'Orsay, par Lacornée; l'église
de la Madeleine par Vignon et Huvé, etc.
Le XIXe
siècle.
Au XIXe
siècle, les architectes français en reviennent à des idées plus justes
et plus sages; s'ils n'ont pas de style qui leur soit propre, du moins
ils n'en répudient aucun, et nous ne se livrent à aucune copie servile;
ils restaurent avec soin et pureté les monuments de tous les temps, ils
cherchent le meilleur parti Ă tirer des divers styles. C'est l'Ă©clectisme
qui s'impose. Le gouvernement de Louis-Philippe
a élevé la colonne de Juillet sur la place de la Bastille
et le palais des Beaux-Arts.
Sous le règne de Napoléon III, les travaux
publics ont pris un essor considérable : nous citerons l'achèvement du
Louvre,
la prolongation et la construction de la rue
de Rivoli, les boulevards de Sébastopol et de Malesherbes, l'aménagement
en parcs anglais des bois de Boulogne
et de Vincennes .
L'école française d'architecture dans cette période est représentée
par Lepère, Huvé, Achille Leclère, P. Debret,
Blouet,
Lebas, Duban, Hittorff, Visconti, Lassus,
V.
Baltard, Labrouste, de Gisors, Lefuel, Viollet-Le-Duc,
etc. (E. L.).
L'architecture en
France depuis 1900
Le XXe
siècle.
DĂ©but
du XXe siècle (1900-1939).
L'Art nouveau
(fin XIXe - début du XXe
siècle) est caractérisé par l'utilisation de formes organiques, lignes
courbes, ornements végétaux et animaux, ainsique par l'utilisation
innovante des matériaux comme le fer et le verre. Exemples : Hector Guimard
et les bouches de métro parisiennes; la Maison de l'Art Nouveau à Paris.
Le Modernisme
et mouvement Moderne (années 1920-1930) rejette pour sa part l'ornementation,
et adopte des formes géométriques simples et utilise de nouveaux matériaux
comme le béton, l'acier et le verre. L'accent est mis sur la fonctionnalité.
Exemples : la Villa Savoye et la Cité de Refuge (Armée du Salut) (Le
Corbusier).
L'Art déco
(années 1920-1930) opte pour des formes géométriques, des lignes épurées,
l'utilisation de matériaux luxueux comme le marbre et l'ébène, et des
ornements stylisés. Exemples : Théâtre des Champs-Élysée et Palais
de Chaillot Ă Paris.
Milieu
du XXe siècle (1940-1970).
Après la Seconde
Guerre mondiale, la nécessité de reconstruire a mené à l'usage
du béton brut, des formes massives, et un accent sur la fonctionnalité.
Cette Architecture brutaliste (années 1940-1960) est représentée
par la Cité Radieuse de Marseille et l'Unité d'Habitation de Rezé (Le
Corbusier), ainsi que par diverses réalistions d'Auguste Perret (les tours
Ă©ponymes de Grenoble et d'Amiens, le centre-ville du Havre).
L'Architecture
moderniste (années 1950-1970) s'installe dans la simplification des
formes. Elle utilise des matériaux modernes, des grandes surfaces vitrées
et toits plats. Exemples : la Tour Montparnasse Ă Paris et l'Ă©glise Sainte-Bernadette
du Banlay Ă Nevers.
Fin
du XXe siècle (1970-2000).
Le Postmodernisme
(années 1970-1990) marque un retour à l'ornementation. Il se signale
par sont utilisation de formes historiques de manière ludique, et par
sonéclectisme. Exemples : la Cité des Sciences et de l'Industrie à Paris
(Adrien Fainsilber); la Pyramide du Louvre (I.M. Pei).
La Haute technologie
(années 1970-2000) se caractérise par l'xpression des éléments structurels
et techniques, l'utilisation de matériaux industriels comme l'acier et
le verre, flexibilité des espaces. Exemples : le Centre Pompidou
(Renzo Piano et Richard Rogers); l'Institut du Monde Arabe Ă Paris (Jean
Nouvel).
DĂ©but du XXIe
siècle.
L'Architecture
durable et Ă©cologique fait son apparition. Elle repose sur une conception
respectueuse de l'environnement, l'efficacité énergétique, l'utilisation
de matériaux recyclables et locaux, et l'intégration du bâtiment dans
son environnement naturel. Exemples : le musée du Quai Branly à Paris
(Jean Nouvel); l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes
(Lacaton et Vassal).
L'Architecture
paramétrique est une tendance qui utilise de logiciels de conception
assistée par ordinateur pour créer des formes complexes et innovantes.
Exemples : la Philharmonie de Paris (Jean Nouvel); la Fondation Louis Vuitton
Ă Paris (Frank Gehry).
Aujourd'hui, l'architecture
se caractérise par une grande diversité des styles et des approches qui
mélangent les influences, l'innovation technologique et l' attention aux
enjeux sociaux et environnementaux. Exemples : la CanopĂ©e des Halles Ă
Paris (Patrick Berger et Jacques Anziutti); la Tour First Ă La DĂ©fense
restructurée par Kohn Pedersen Fox Associates.
|
|