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Zwingli

Ulrich ou Huldreich Zwingliest un réformateur (Protestantisme) né à Wildhaus, dans le Toggenbourg, le 1er janvier 1484, mort à Cappel le 11 octobre 1531. Il a été l'un des trois grands réformateurs, et, avec Calvin, le fondateur de l'Église réformée (La Renaissance). En 1506, âgé de vingt-deux ans, il fut élu curé de Glaris, avant d'avoir reçu les ordres. Il y poursuivit l'étude de l'Écriture sainte, des pères de l'Église et des auteurs classiques et apprit, sans maître, le grec, qui devint sa langue favorite. C'est plus tard seulement, à Zurich, qu'il étudia l'hébreu. A Glaris (1506-16), il se trouva pour la première fois en présence d'une pratique qui exerçait une influence corruptrice sur le peuple; les Suisses louaient leurs bras et leur vaillance à des souverains étrangers; Zwingli accompagna plusieurs fois ses ouailles sur les champs de bataille d'Italie; il combattit à Ravenne (1512) et à Marignan (1515), maniant l'épée et la hallebarde aussi bien que la parole et la plume. Après Marignan, il s'opposa à l'alliance française, ce qui le mettait du parti du pape; celui-ci eut dès lors le plus grand intérêt à le ménager; aussi Zwingli put-il commencer son oeuvre réformatrice sans être inquiété. En 1516, l'administrateur de l'abbaye d'Einsiedeln (Notre-Dame des Ermites), Diebold de Geroldseck, lui offrit une place de prédicateur et une retraite paisible dans son couvent. 
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Zwingli.
Ulrich Zwingli (1484-1531).

Son séjour à Einsiedeln fut pour Zwingli ce qu'a été pour Luther son voyage à Rome. Il y avait là une image miraculeuse de la Vierge, qui attirait de nombreux pèlerins; sur la porte on lisait : « Ici l'on trouve une pleine rémission de tous les péchés ». Peut-être Zwingli connut-il là déjà le vendeur d'indulgences, Bernardin Samson, le Tetzel de la Suisse. Vers la fin de 1518, il fut appelé comme curé de la cathédrale, à Zurich.
Il y entra en fonctions le 1er janvier 1519. Il se mit aussitôt à expliquer l'Écriture sainte, en commençant par l'Évangile selon saint Matthieu. Sa prédication était simple, sans art, mais claire et à la portée de tous.

Zwingli s'attaqua aux abus de l'Église et gagna rapidement Zurich à la Réforme. Déjà en 1520 la majorité du conseil des Deux-Cents enjoignit aux prêtres de prêcher sur les évangiles et les épîtres des apôtres. Cependant ce n'est qu'en 1522 qu'il entra en conflit avec l'Église, à la suite d'un sermon sur le jeûne. Zwingli et ses adhérents prirent alors la résolution de ne pas prêcher autre chose que ce qu'enseignent des Écritures. Comme il y eut quelques troubles dans la ville, on convoqua, à la demande de Zwingli, un colloque (29 janvier 1523), où vinrent les chefs du parti catholique, et à leur tête Jean Faber, auparavant l'ami, et maintenant l'adversaire déclaré du réformateur. On discuta sur des thèses (Schlussreden) rédigées par Zwingli; un second colloque se réunit le 26 octobre de la même année, à la suite duquel il y eut un mouvement populaire pour enlever des églises les images, crucifix et oeuvres d'art. Un troisième colloque fut convoqué (13 janvier 1524), pour empêcher ces désordres et procéder avec ordre et modération; on abolit alors également la messe. Mais alors déjà Zwingli dut entrer en lutte avec l'anabaptisme, qui lui suscita beaucoup d'embarras. C'est aussi de 1524 à 1529 que commença et s'accentua la querelles sur la sainte Cène, qui amena la séparation entre luthériens et zwingliens. En 1525, Zwingli dédia au roi François Ier son principal écrit, Comrnentarius de vera et falsa religione, où il exposa tout son système doctrinal, mais qui est bien inférieur à l'institution de Calvin. En 1528, au colloque de Berne, Zwingli décida le triomphe de la Réforme dans ce puissant canton.

On est frappé de la grande place que la politique a prise dans l'oeuvre réformatrice de Zwingli. Beaucoup en ont été scandalisés et ont été induits à porter sur lui un jugement injuste. Zwingli n'a pas été un réformateur se mêlant à la politique, mais un patriote suisse s'apliquant à réformer l'église. Comme prédicateur et comme chanoine, il ne pouvait pas se désintéresser des affaires politiques, sous peine d'être considéré comme un mauvais citoyen. Ses principes politiques étaient du reste ceux de l'Église catholique, c.-à-d. absolument théocratiques. Pour lui, quiconque ne veut pas se soumettre à la « Loi de Dieu », n'a pas le droit de rester dans le pays, car il faut « que le Seigneur Jésus-Christ règne dans le pays ». Dans ses Schlussreden, il ne fait aucune distinction entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel :

« Le prétendu pouvoir spirituel n'a aucun fondement dans l'enseignement du Christ (34). Ce pouvoir temporel est fondé sur l'enseignement du Christ (35). Tous les chrétiens doivent être soumis au pouvoir temporel (37). Pourvu que celui-ci n'ordonne rien de contraire à la loi divine (38). Si les chefs sont infidèles et abandonnent la règle du Christ, qu'on les destitue, au nom de Dieu (42). Qu'ils sortent d'ici, tous ceux qui ne veulent pas l'Ecriture pour juge suprême (67). » 
Aussi toutes les réformes furent-elles décidées en conseil; à la majorité des voix; et les colloques entre zwingliens et catholiques ressemblaient plutôt à des assemblées législatives délibérant sur des projets de loi, qu'à des Conférences entre théologiens. Ce qui mêla encore plus Zwingli aux affaires politiques, c'est qu'à défaut d'autre secrétaire rédacteur capable, le Conseil chargea le réformateur de rédiger tous les actes politiques, diplomatiques et militaires, et il devint ainsi le chef politique et militaire de Zurich. Il élabora, par exemple, trois projets de réorganisation de l'armée, pour la défense nationale, où se mêlent d'une manière étrange la religion et la stratégie. Il appréciait d'un coup d'ail clairvoyant la situation politique de Zurich, qui était menacé par les quatre cantons primitifs (Schwytz, Uri, Unterwalden, Lucerne) et par celui de Zug. Il s'agissait de les prévenir pour les surprendre. Zwingli organisa donc la campagne de 1529, dont il dressa lui-même le plan, et marcha en tête, avec les chefs, la hallebarde au poing. Il eût réussi, sans l'intervention malencontreuse d'un homme bien intentionné, mais peu clairvoyant, le landamman Aebli de Glaris, qui empêcha la bataille. 

C'est au sortir de cette campagne que Zwingli se rendit au colloque de Marbourg. Il y réussit à arrêter avec le landgrave Philippe de Hesse les bases d'une alliance. A son retour à Zurich, il écrivit au doge de Venise, qui l'éconduisit; puis il entra en négociations avec l'ambassadeur de France, de Boisrigault, et avec le deuxième ambassadeur, le général Lambert Maigret, auxquels il envoya un projet de traité « pour briser la puissance de l'empereur »; si le roi de France l'acceptait, on le soumettrait encore à l'examen « des savants et des serviteurs de la parole de Dieu de la Confédération ». Il ne fut pas plus heureux. Son projet fait sourire aujourd'hui; cependant il ne manquait pas de grandeur; pour la première fois, peut-être, la Suisse y traite de puissance à puissance avec d'autres États, et n'est plus seulement une agglomération de petites provinces. L'influence de Zwingli dans les conseils de Zurich et de plusieurs autres cantons fut prépondérante. Mais il resta toujours d'un désintéressement absolu. Il n'avait qu'un seul but, grandir sa patrie, et ainsi son patriotisme domina toute son oeuvre réformatrice. Il fit la guerre à tout ce qui lui semblait corrompre et abaisser son peuple, les abus de l'Église aussi bien que les enrôlements mercenaires. Ses premiers écrits réformateurs étaient dirigés contre le ,jeûne et le célibat des prêtres. En 1522, il publia : en avril, un traité, De la Liberté des aliments; en juillet, une Prière et exhortation amicale en faveur du mariage des prêtres; entre les deux, en mai, il écrivit une Exhortation contre les enrôlements et les pensions.

Zwingli était, d'un autre côté, un humaniste, et son humanisme domina sa dogmatique aussi bien que son exégèse. Le point de départ de toute sa théologie est l'idée de l'absoluité et de la toute-puissance de Dieu. Il en résulta, à la base de son système, la doctrine de la prédestination, qui, chez lui, est plus raide et encore plus absolue que chez Calvin, car il va jusqu'à faire de Dieu l'auteur du mal. Tous les péchés et tous les crimes sont l'oeuvre de la Providence : Dei ordination fit ut hic Parricida sit, alius adulter. Seulement ces crimes, qui, pour l'humain placé sous la loi, entraînent la juste condamnation du coupable, ne sauraient être imputés à Dieu à titre de faute morale, 

« puisque la volonté divine est absolument souveraine, placée en dehors et au-dessus de la loi; là ou il n'y a point de loi, il n'y a point de transgression ».
Tout humain étant prédestiné, soit au salut, soit à la condamnation, ce n'est plus la foi qui sauve, mais l'élection. Aussi Zwingli place-t-il dans le ciel, à coté de Moïse, des prophètes et des apôtres, du premier et du deuxième Adam, non seulement des païens comme Socrate, Aristide, Caton, les Scipions, etc., mais encore des personnages mythologiques, tels que Hercule et Thésée. Avec cette théorie, les moyens de grâce, les sacrements devenaient forcément des hors-d'œuvre, de purs symboles. Aussi n'est-ce pas sans raison que Luther lui dit à Marbourg : « Vous avez un autre esprit que nous ».

De quelque manière que l'on apprécie l'oeuvre de Zwingli, on ne peut méconnaître qu'il a été un grand et noble caractère. Sans doute on lui a reproché les écarts de sa vie privée, comme prêtre; mais il ne faut pas oublier que sa conduite était celle de la généralité des prêtres de son temps; il vivait caute, non caste, ménageant au moins les apparences. En 1524, il se maria avec Anna Reinhard, la veuve de Meyer de Knonau. Zwingli eut une belle vie de famille, de belles et fortes amitiés. Il fut un homme profondément sympathique, désintéressé, affable, plein de verve et d'esprit; bon prédicateur, d'une grande érudition et un fidèle pasteur. La peste ayant éclaté à Zurich alors que Zwingli se trouvait, pour sa santé, aux bains de Pfeffers, il revint au milieu de son troupeau décimé, fut lui-même atteint du mal et pensa mourir. Mais une autre mort lui était réservée.

Sa fin fut le digne couronnement de sa carrière. Ce qu'il avait prévu arriva. Les cantons protestants ayant décrété le blocus des cinq cantons catholiques, ceux-ci surprirent les Zurichois, non préparés et isolés. Zwingli reconnut aussitôt qu'il n'y avait aucun espoir de victoire. Il ne se mêla pas cette fois de la conduite des troupes, qu'il accompagna cependant au combat. On se rencontra à Cappel. Aux 8000 hommes des cinq cantons catholiques, Zurich n'en put opposer que 700. Zwingli se tenait au troisième rang, appuyé sur sa hallebarde. Il fut trois fois renversé, puis abattu pour ne plus se relever et achevé par un officier ennemi. (Ch. Pfender).

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