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Le Sinaï
est un massif montagneux qui occupe le Sud d'une
presqu'île située au Nord-Est de l'Egypte .
La presqu'île du Sinaï (Djebel Tor), qui correspond à
l'essentiel de ce que les Anciens appelaient l'Arabie Pétrée,
est un territoire triangulaire, à pointe tournée vers le
Sud, compris entre les deux golfes de Suez (ou Héroopolis) et d'Aqaba
(ou d'Aelana) qui terminent au Nord la mer Rouge;
à l'Ouest, la dépression des lacs Amas, utilisée par
le canal de Suez ,
continue celle du golfe de Suez jusqu'à la Méditerranée;
à l'Est, la dépression du Ouadi-el-Arabah conduit du golfe
d'Aqaba à la mer Morte.
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Carte
de la péninsule du Sinaï. Cliquer
pour afficher une carte plus détaillée.
La région sinaïtique est donc
nettement délimitée, sauf au Nord-Est où elle confine
au désert de la Palestine
méridionale (Neguev). Elle forme entre l'Egypte à l'Ouest
de l'isthme de Suez, Israël et l'Arabie
Saoudite une région bien distincte de 25.000
à 30.000 km². Elle comprend deux
parties : au Nord, le désert de Tih, vaste plateau
calcaire qui s'abaisse insensiblement vers la Méditerranée
où ses eaux descendent temporairement par l'ouadi El-Arich (torrent
d'Egypte); à l'Ouest, il s'abaisse par gradins vers les lacs
Amers, à l'Est vers la dépression, qualifiée d'ouadi
El-Arabah. Ces monotones terrasses calcaires sont
profondément ravinées. Elles aboutissent, au Sud-Ouest et
au Sud-Est, aux escarpements montagneux du Djebel Tih dont l'altitude moyenne
est de 1000 à 1200 m. De l'autre côté de celui-ci,
la plaine sablonneuse et aride du Debbet-er-Ramleh (500 m), au delà
de laquelle surgit le massif du Sinaï formé de plusieurs réseaux
différents au Nord, près du Djebel Tih des collines de grès
stratifiés, aux colorations puissantes, découpées
en masses irrégulières par des ravins sinueux; l'oued Feiran
à l'Ouest sépare ces roches stratifiées des roches
métamorphiques qui forment la grande masse du Sinaï : granit
et gneiss; les parties granitiques sont encombrées
de blocs détachés et roulés; celles du gneiss forment
des murailles monotones, encaissant d'étroits couloirs; le porphyre
apparaît aussi.
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Deux
vues du Sinaï, depuis l'espace. Source :
Nasa.
Les cimes principales sont : à l'Ouest
le Serbal (2060 m), au centre le Djebel Katharin (2602 m), point culminant
flanqué au Nord du Djebel Safsafeh, comprenant le Djebel Mousa (2241
m) qui domine le couvent de Sainte-Catherine (1528 m) au Sud du Djebel
Zebir; plus au Sud, le Djebel Oumm Chomer (2575 m) et le Djebel Thebt,
dont les contreforts (Djebel Tharfa) vont former le Ras Mohammed, pointe
extrême de la péninsule; la chaîne côtière
de l'Est, de même formation que le grand massif et caractérisée
également par le lacis géométrique des vallées,
est beaucoup moins haute. Elle ne laisse qu'un mince ruban de plaine littorale;
cette plaine, d'ailleurs aride, est, par contre, fort large au Sud-Ouest,
au pied du grand massif on elle forme le désert
d'El Kaa.
Les pluies d'hiver sont abondantes le long
du Djebel Tih et transforment en torrents formidables les ouadis qui en
découlent, notamment le Gharandel (à 100 km au Sud de Suez).
Les parties supérieures des ravins sont aménagées
en petites oasis dont les arbres (palmier, grenadier, mimosa, tamarin,
henné), les arbrisseaux, les champs d'orge et de blé ont
un aspect très frais au printemps; à partir de mai, l'eau
s'évapore et le vent du Sud-Est déchaîne des tempêtes
de sables.
La seule ville ancienne qu'ait possédée
le Sinaï est celle de Pharan ,
dont l'oasis de Feiran montre les vestiges. Le
centre habité actuel est le couvent Sainte-Catherine, entouré
de beaux vergers. La population de la presqu'île est formé
de Bédouins semi-nomades : on les groupe sous le nom de Tourah;
les principales tribus sont les Saoualiheh; les Ouled Saïd et Garrachbeh
qui occupent le Feiran; les Aleigat, sur l'oued Ououtah qui aboutit au
Gharandel; les Mezeineh, tribu arabe illustre qui habite au bord du golfe
d'Aqaba ;
les Ouled Chahin, auprès de Tor; les Djebeliyeh, étrangers
aux autres tribus et qui paraissent descendre de 400 prisonniers valaques
et égyptiens cantonnés là par Justinien
pour protéger le monastère; ils en occupent les abords et
en monopolisent le service.
Histoire.
L'histoire du Sinaï est caractérisée
par deux faits essentiels : l'exploitation des mines par les Egyptiens ;
le séjour légendaire de Moïse
et des Hébreux .
Des bas-reliefs rupestres rappellent les victoires des pharaons égyptiens
des IVe, Ve
et VIe dynasties sur les Bédouins;
les Egyptiens exploitaient les mines de cuivre et de turquoise du district
de Maghara, près de la côte occidentale, et avaient consacré
ce pays à la déesse Hathor .
Les XIe et XIIe
dynasties, puis la XVIlIe et la XIXe
reprirent ces exploitations, étendues à Sarabit, dans l'intérieur;
le dernier pharaon mentionné par les inscriptions est Ramsès
XI.
Il est difficile de dire si l'exode des
Hébreux à travers la presqu'île du Sinaï se réfère
à un quelconque événement historique. Une chose est
sûre, le récit a été rédigé beaucoup
plus tard et il a conféré au Sinaï pour les Juifs
et pour les fidèles des religions sémitiques, chrétiens
et musulmans ,
une importance capitale, si bien que le Sinaï est devenu un lieu sacré
et que son histoire est essentiellement religieuse.
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Le
couvent Sainte Catherine, dans le Sinaï.
Source : The World factbook.
Les nombreuses inscriptions qui tapissent
les rochers n'ont cependant rien d'hébraïque; elles sont écrites
dans l'alphabet dés Nabatéens de Pétra
et probablement par des païens pratiquant un culte sabéen du
IIe siècle av. J.-C. au IIe
siècle ap. J.-C.; ce sont des formules votives très simples.
Les pics du Sinaï, souvent enveloppés de nuages, hantés
d'orages terribles avec leurs échos sonores, frappèrent l'imagination
des tribus sémitiques qui les peuplèrent de divinités,
d'Elohim redoutables. Cette réputation survit dans la Bible ,
qui a attaché le souvenir de Moïse à cette montagne
de terreur ou Yahveh lui dicte les tables de la Loi. On a beaucoup discuté
pour savoir quel pic identifier avec le Sinaï des Hébreux,
avec le mont de la Loi, l'Horeb. Les auteurs qui ont prété
foi au mythe mosaïque se sont divisés entre le Serbal et le
Djebel Mousa.
Le Serbal, visible de plus loin et d'aspect
plus redoutable, était le centre religieux au IVe
siècle de l'ère chrétienne; au pied se trouve Pharan
qui fut érigé en archevêché. Mais au VIe
siècle, les moines qui peuplaient les vallées du Serbal s'étant
ralliés à l'hérésie monophysite ,
Justinien les expulsa et fonda au pied du Safsafeh une communauté
religieuse nouvelle à laquelle fut attribué l'archevêché;
à la place de la tour érigée par l'impératrice
Hélène en l'honneur de sainte, Catherine d'Alexandrie ,
s'éleva le couvent de ce nom. Il transféra sur les montagnes
qui l'avoisinaient toutes les légendes sacrées. On y montre
aujourd'hui la caverne
où l'on raconte s'être réfugié le prophète
Elie
(sur les flancs du Djebel Mousa ); une chapelle du couvent occupe la place
prétendue du buisson ardent
où Dieu se manifesta à Moïse; tout près est le
puits dit de Moïse; une cime au Nord du Djebel Mousa porte le nom
d'Horeb. Quant au Djebel Katharin, c'est là que les anges
auraient déposé le corps de la sainte, dont le couvent conserve
les reliques
supposées. L'archevêque du Sinaï, élu par les
moines, est l'un des quatre archevêques indépendants de l'Eglise
grecque .
Le couvent est situé sur la pente
de la vallée comprise entre le Safsafeh à l'Ouest et le Djebel
ed-Deir à l'Est; c'est un rectangle de 72 m sur 63, enclos de hautes
murailles de granite munies de petites tours; cette enceinte, refaite par
Kléber ,
comprend les bâtiments du couvent, la grande basilique bâtie
par Justinien et remaniée depuis, 24 autres chapelles, une mosquée,
une bibliothèque (700 manuscrits arabes et 1500 livres), la chambre
des morts où l'on dessèche les cadavres, lesquels ne sont
pas enterrés. Les moines, au nombre d'une vingtaine, sont Grecs
et vivent des revenus des fermes qu'ils possèdent ailleurs. (A.-M.
B.).
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Chapelle
du couvent Saint-Catherine. Lithographie de Louis Hague (XIXe s.).
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