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Neptune
Histoire des découvertes
Neptune est la dernière découverte des quatre planètes géantes du Système solaire. Son histoire est donc courte et se résume à trois chapitres principaux : celui de sa découverte, celui de son exploration in situ, par la sonde spatiale Voyager 2, et, enfin, celui de la découverte de ses satellites et de ses anneaux, qui s'est faite en partie depuis la Terre et en partie sur place.

Déjà vue à plusieurs reprises, Neptune mais n'a été reconnue comme planète, avec la première observation qu'en a faite Galle, le 23 septembre 1846, et qui se basait sur les prédictions de Le Verrier et d'Adams. Une découverte remarquable, témoin du haut degré de précision que pouvaient atteindre à cette époque les calculs astronomiques.

Pendant longtemps ensuite, on apprendra peu de chose sur la planète. Des études spectroscopiques conduites par Moore et Menzel, à l'observatoire Lick ont montré en 1928 que celle-ci a une rotation directe dont la période est estimée à une quinzaine d'heures. Les grands instruments, tels que la lunette du Pic du midi, ont également révélé quelques détails sur le disque bleuté. Ainsi à partir de 1948, y signale-t-on des taches sombres ou claires peu contrastées. Depuis ce même observatoire, Henri Camichel mesure par ailleurs le disque et estime son diamètre à 44300 km, sans pouvoir constater d'aplatissement notable aux pôles, malgré les déductions que Tisserand, au XIXe siècle, avaient faites à partir de la précession de l'orbite du principal satellite de Neptune. Kuiper en 1954, qui utilise le télescope du mont Palomar, note la probable absence de bandes comparables à celle de Jupiter ou Saturne, mais observe une zone équatoriale brillante.
Sans doute les grands télescopes actuels, et l'accès qu'ils ouvrent aux divers domaines du spectre électromagnétique (U.V., radio et infrarouge...) permettent désormais d'aller beaucoup plus loin dans les observations de la planète depuis la Terre. Reste que l'on doit l'essentiel de ce que l'on sait aujourd'hui sur Neptune à l'exploration spatiale, qui à ce jour, n'a d'ailleurs été le fait que d'une seule sonde, Voyager 2, parvenue à proximité de la planète le 25 août 1989.

La mission Voyager a également permis la découverte de plusieurs satellites, ainsi que d'anneaux autour de Neptune. Auparavant, on n'en connaissait que deux : Triton et Néréide. L'observation du premier satellite de Neptune avait été dès 1847 par Lassell. Pour le second, il avait fallu attendre plus d'un siècle pour que Kuiper, l'observe en 1959.

Dates clés :
1821 - Indices de la planète révélés par les calculs de Bouvard.

1846 - Observation par Galle.

1985 - Découverte des arcs des anneaux de Neptune depuis le sol.

1989 - Survol par la sonde Voyager 2.

Prédictions et premières observations

Tout a commencé avec la découverte d'Uranus par Herschel (1781). Les astronomes s'occupèrent alors de calculer l'orbite de la nouvelle planète. Et dès 1788, il était patent que la planète ne suivait pas exactement l'orbite que prévoyaient les tables. Bouvard a commencé à soupçonner en 1821, que la cause en puisse être la perturbation par une autre planète. La même idée vient à un astronome amateur, le rév. Thomas J. Hussey, qui suggéra, dans une lettre adressée en 1834 à Airy, que la planète devait être perturbée par un autre corps du Système solaire encore à découvrir. Hussey, qui s'offrit pour rechercher l'objet avec son télescope, proposa à Airy d'effectuer les calculs nécessaires à la détermination de sa position. Une proposition qui ne fut pas suivie d'effet, car Airy n'était pas complètement persuadé que les déviations d'Uranus aient pour cause des perturbations. Peut-être même n'étaient-elles que le résultat d'erreurs de calcul. Une remarque qui s'avéra d'ailleurs en partie fondée, comme il le démontrera en 1838, dans un article publié dans les Astronomische Nachrichten.

Mais et l'idée n'en faisait pas moins son chemin et, en 1836, le Bureau des Longitudes proposa à Bouvard de l'approfondir en se lançant dans les calculs requis. Possédant déjà nombre d'observations, celui-ci, aidé de son neveu Eugène, s'efforça d'utiliser toutes ces données, mais, après avoir éliminé successivement les perturbations de Saturne et de Jupiter, il resta entre les positions calculées et observées des divergences que les erreurs d'observations ne pouvaient expliquer. Notre astronome en conclut donc qu'effectivement qu'il devait bien exister au delà d'Uranus une planète encore inconnue dont l'effet produisait ces perturbations.

En 1843, la Société royale des sciences de Göttingen promis un prix de 50 ducats à qui produirait (avant septembre 1846) une explication satisfaisante de l'orbite d'Uranus. Une simple manière, en fait, de prendre acte des préoccupations du moment. Bessel, John Herschel, et d'autres astronomes soulignaient déjà vers cette époque la nécessité de pousser les calculs plus loin, pour tirer une fois pour toutes l'affaire au clair. Mais cela allait demander, comprenait-on, un travail considérable. On avait besoin de calculateurs hors pair.

Parmi ceux qui se lancèrent dans l'aventure, il y avait fut John Couch Adams, en Angleterre, qui, après deux ans de labeur, fut le premier à obtenir un résultat. Il communiqua à James Challis la valeur de l'excentricité de l'orbite de la nouvelle planète, puis début quelques semaines plus tard, il adressa à Airy la valeur des autres éléments orbitaux. Deux ou trois nuit d'observations furent consacrées à la recherche de l'objet. Cela ne donna rien. Et de toute façon, il était trop tard, car, il ne s'en était fallu que de quelques jours, mais, entre le moment où Challis et Airy avaient reçu la communication d'Adams, et cet instant, d'autres avaient déjà découvert la planète. Il s'agissait de Le Verrier, qui en avait calculé les éléments, et de Galle qui l'avait observée...

Le Verrier, sollicité par Arago, avait lui aussi entreprit de rechercher, à l'aide de l'analyse mathématique, ladite planète. Après avoir recalculé l'orbite d'Uranus et vérifié l'exactitude des conclusions de Bouvard, Le Verrier avait suivi exactement le même parcours qu'Adams, et quels devaient être les éléments de la nouvelle planète pour qu'il y ait concordance entre les calculs et les observations.

Nous mettons en regard les éléments qu'il en déduisit et ceux que les observations subséquentes lui fournirent :
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Paramètres
Le Verrier, 1847
Le Verrier, 1850
Distance moyenne au Soleil
36,154
30,055
Durée de la révolution
217 ans, 387j
164 ans 280j
Longitude moyenne
--- du périhélie
--- du noeud ascendant
318°47'
284°65'
156°
334°33'29"
45° 59'43"
130°6'25"
Inclinaison
1°47'2"
Excentricité
0,10761
0,008964
Masse rapportée au Soleil
1/9300
1/19700

Comme on le voit, les éléments trouvés différaient singulièrement de ceux réellement existants. Si nous ramenons la longitude moyenne à janvier 1847, nous trouvons 328° environ, cette donnée seule était à peu près bonne. La cause de ces divergences provenait principalement de ce que la loi de Titius-Bode placée par Le Verrier sur le même plan que la loi d'attraction universelle ne s'appliquait pas à Neptune. Toutefois, les longitudes moyennes différant peu, la position assignée répondait sensiblement à la réalité des faits.

L'Observatoire de Berlin ayant eu communication des calculs de Le Verrier, un de ses astronomes, Galle; rechercha la planète, à l'aide de la lunette construite par Fraunhofer, et la retrouva le premier soir, grâce, paraît-il, à de nouvelles cartes écliptiques (Coordonnées écliptiques) qui venaient d'être dressées. La planète se présentait sous l'apparence d'une étoile de huitième magnitude. On estimera peu de temps après son diamètre à quatre fois celui de la Terre, et sa densité au tiers de celle de notre planète.


Le réfracteur de Fraunhofer, utilisé par Galle.
Source : Deusches Museum.

Une fois la planète découverte, il y eut réclamation de la part d'Adams, et une discussion interminable s'ensuivit pour savoir à qui revenait en somme l'honneur de la chose, La priorité de Le Verrier et Galle était indiscutable, bien que due peut-être au hasard; il faut toutefois faire remonter à Bouvard et à Hussey l'idée de la question.

Ces controverses, irritantes à l'époque, car des questions de nationalité y étaient mêlées, rappellent que les astronomes n'échappent pas aux plus mesquines vanités et au chauvinisme. Ceci dit, le problème une fois proposé et une solution étant certaine, dès que l'on eut réuni suffisamment de données, il fallait bien un jour que la planète fut découverte. Chose fort curieuse, l'on reconnut après coup qu'on possédait déjà des observations de Neptune, deux de Lalande qui l'avait pris pour une étoile en 1795, et de plus Lamont l'avait relevé en dressant ses zones (1845). L'honneur d'avoir servi de parrain à la planète reviendrait à Arago; il lui donna le nom qu'elle porte en annonçant sa découverte à l'Institut. Nous avons fourni, d'après Le Verrier, les éléments servant au calcul des Éphémérides de la planète (Annales de l'Observatoire de Paris, 1876, t. XIII); avant lui Kowalski et Newcomb s'étaient livrés à des recherches analogues. L'historique de la découverte a donné lieu à de nombreuses publications, les plus importantes ont paru à Berlin (1870).
 

Des satellites aux anneaux
Le système de Neptune
Immédiatement après la découverte de Neptune, Lassell dirigea l'un des meilleurs instruments de cette époque vers la nouvelle planète, et découvrit, le 10 octobre, 1846, un satellite offrant l'aspect d'une petite étoile de 14e magnitude.


Le télescope de 48" utilisé par Lassell à Malte.
Source : History of the telescope, (Rice).

Les astronomes ont pu rapidement montrer que la distance moyenne de ce satellite, que l'on nommera Triton, est de 13 demi diamètres de la planète, et sa révolution s'effectue en 5 jours 21 heures. Il apparut par ailleurs que ce satellite gravitait, comme ceux d'Uranus, dans un plan considérablement incliné sur l'écliptique et en sens rétrograde. Ce constat conduisit à des généralisations sans fondement. En particulier, il fit croire que l'on avait découvert au passage une nouvelle "loi", à savoir que la zone qui sépare Saturne d'Uranus divise le Système solaire en deux parties distinctes, et que dans la première, la plus voisine du Soleil, les rotations des planètes et les circulations des satellites sont directes, alors que dans la seconde, elles sont rétrogrades. On jugeait également probable que les éventuelles planètes extra-neptuniennes devaient, selon une opinion qui durera jusqu'au XXe siècle, comme Uranus et Neptune, en sens rétrograde.

Après la découverte de Triton, plusieurs fausses alertes ont eu lieu, à commencer par celle de la découverte d'anneaux autour de Neptune par Lassell lui-même. Mais au total, on ne découvrira rien de nouveau autour de la planète, jusqu'à ce que Gerard Kuiper, qui n'en était pas à son coup d'essai, découvre en 1949 un petit objet de magnitude 19 en orbite autour de Neptune. Ce nouveau satellite dont le diamètre est estimé assez correctement dès cette époque à 300 km, a été nommé Néréïde. Et, lui, circule dans le sens direct sur son orbite très allongée, qu'il met presque un an à parcourir. 

Un troisième satellite a été "à moitié découvert" le 10 mai 1981, depuis le sol. A cette époque, les astronomes, qui connaissaient déjà les anneaux autour des trois autres planètes géantes, cherchaient à en détecter d'éventuels autour d'Uranus à partir d'observations d'occultations. Or, ils ont effectivement constaté à l'occasion de ces travaux qu'un objet avait bel et bien occulté une étoile. Mais ils n'ont pu en retrouver la trace, et il faudra attendre qu'une sonde parviennent dans le secteur pour qu'il puisse être calculé que l'objet devait être probablement le satellite Larissa. Quant aux anneaux, après une nouvelle tentative infructueuse en 1983, ils ont dû attendre les campagnes de recherches entamées à partir d'observatoires des Andes, par deux équipes indépendantes (l'une conduite par André Brahic et Bruno Sicardy, l'autre par William Hubbard), entre 1984 et 1985, pour donner des indices de leur présence, mais ils ont semblé à l'époque discontinus, comme fragmentés. L'exploration spatiale permettra d'en savoir bien plus. 
L'exploration in situ
Neptune a été survolé par une seule sonde. Il s'agissait de Voyager 2, qui s'est approchée à 5000 seulement du haut des nuages de la planète, le 25 août 1989. Pas mois de 10 000 images ont été prises entre le 11 et le 26 août. Elles ont révélé la présence de diverses taches, telles la Grande tache sombre, qui rappelle la Grande tache rouge de Jupiter, et d'autres formations nuageuses, ainsi que l'extraordinaire vitesse des vents qui parcourent cette atmosphère, et, enfin, l'existence d'une magnétosphère

Les satellites et les anneaux ont été eux aussi scrutés en détail. Les anneaux, au nombre de quatre, se sont révélés dans leur continuité, et les astronomes ont pu constater que les "fragments" que leur avaient suggéré les occultations étaient des plusieurs condensations disposées le long des anneaux, appelées des arcs. 

On a donné à ces quatre anneaux les noms des premiers découvreurs du système neptunien : Galle, Le Verrier, Lassell / Arago, et Adams. es arcs, pour leur part, ont reçu en 1989, les appellations de L, E, et F, initiales de Liberté, Égalité, Fraternité, les trois valeurs de la Révolution française dont on célébrait le bicentenaire cette année-là. Une quatrième arc, décelé un peu plus tard a été appelé C, comme Courage. L'ensemble forme le mot CLEF...
 


Possible geyser sur Triton, observé par Voyager 2.

Six nouveaux satellites (en comptant Larissa) ont été découverts. Triton a montré son étrange surface, une atmosphère et des traînées sombres celle-ci, qui ont été interprétées comme des panaches de matière expulsés par d'inattendus geysers. On notera pour finir, que les observations de Néréïde au télescope, qui avaient parfois suggéré qu'il possédait un hémisphère plus sombre que l'autre, un peu comme Japet, n'ont pas été confirmées par Voyager.
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Les planètes transneptuniennes

Dès la découverte de Neptune, l'on s'est nécessairement demandé s'il n'existait pas au delà des planètes encore inconnues. La chose paraissait probable; en ne relatant que les principales, les astronomes citaient d'abord les anomalies relevées entre les positions observées et calculées de Neptune. Ils y ajoutaient une remarque faite sur l'orbite des comètes périodiques (supposées alors capturées par le Système solaire), et qui faisait penser que leur présence pourrait être due à des modifications subies par leur vitesse au moment du passage dans le voisinage des planètes. Leur orbite primitivement parabolique ou légèrement hyperbolique deviendrait de ce fait elliptique. Il apparaissait clair que les distances aphélies de celles dont l'orbite est la moins allongée, forment des groupes répondant aux demi-grands axes des planètes connues. Les autres, tout en s'éloignant beaucoup plus du Soleil, pouvaient être classées d'une manière analogue, et l'on en conclurait l'existence de plusieurs planètes.

Mais il fallait bien avouer que leur recherche n'était pas précisément facile. Pour pouvoir utiliser une méthode analogue à celle de Le Verrier, estimait-on, il aurait été nécessaire de posséder des observations embrassant à peu près une révolution complète de Neptune et attendre par conséquent une centaine d'années. D'un autre côté, soulignait-on, l'éclat des nouvelles planètes est nécessairement très faible et leur mouvement si lent qu'il devrait être difficile de les différencier des étoiles. Les astronomes n'ont cependant pas tardé à disposer d'un nouvel outil, la photographie, sur lequel ils ont fondé de grands espoirs. La comparaison des clichés pris à des époques différentes, expliquait-on, fera reconnaître les étoiles disparues ou nouvelles, et c'est parmi ces astres qu'il conviendra de rechercher les planètes inconnues. La méthode a, de fait, permis depuis la découverte à partir de 1930 (Pluton), de divers objets transneptuniens, mais la question de l'existence d'une planète ou d'un objet de masse suffisante pour justifier, au moins certaines caractéristiques des orbites cométaires restera en débat tout au long du XXe siècle.

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