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Manet

Edouard Manet est un peintre et graveur, né à Paris en 1832, et mort à Paris le 30 avril 1883. Il appartenait à une famille de magistrats qui, rêvant pour lui une profession libérale, le mit au collège Rollin; mais Manet s'était pris pour la peinture d'une passion irrésistible. Vainement on l'embarqua, comme novice, sur un vaisseau qui se rendait à Rio Janeiro; à son retour, malgré les protestations des siens, il s'inscrivit (1850) parmi les élèves de Couture, dont il fut l'élève durant six années; élève assez indiscipliné d'ailleurs, quittant l'atelier pour parcourir l'Allemagne, la Hollande et l'Italie, rentrant à Paris, visitant les musées de l'étranger, toujours en quête et en éveil. 

Les premières oeuvres d'Edouard Manet trahissent certaines réminiscences de son maître, surtout le Buveur d'absinthe (1860). Mais l'exemple des Espagnols devait s'imposer à lui plus fortement que les enseignements de Couture. Velazquez et Goya lui ouvrirent des perspectives nouvelles et lui communiquèrent ce goût, cette préoccupation de la pleine clarté qui, dès lors, remplirent et dominèrent toute sa vie d'artiste. Pour la première fois, le nom de Manet figura aux catalogues du Salon en 1861, avec l'Espagnol jouant de la guitare. Cette toile « peinte en pleine pâte, d'une brosse vaillante, et d'une couleur très vraie », écrivit Théophile Gautier, lui valut d'ardentes sympathies, mais aussi elle déchaîna contre lui de violentes critiques : le « réalisme » en fut déclaré intolérable par les partisans des traditions et, les deux années qui suivirent, les tableaux qu'il tenta d'envoyer à l'exposition : le Fifre de la garde et le Déjeuner sur l'herbe, ne furent pas admis par la commission d'examen. 
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Olympia, par Manet.
Olympia, par Edouard Manet (1863).

Manet prit sa revanche à l'exposition des refusés : le Déjeuner sur l'herbe y fit scandale, provoquant les sarcasmes des uns et les cris d'admiration des autres suscitant partout des polémiques passionnées. Manet était entré dans la pleine lutte. Bientôt la fameuse Olympia (1865) vint accentuer encore le ton de ces controverses-: autour de Manet s'étaient groupés une douzaine de fervents, parmi lesquels les peintres A. Legros, WhistLer, Fantin-Latour, Desboutins; les écrivains Emile Zola, Babou, Duranty; un graveur, Belot, immortalisé depuis par le Bon Bock; l'orientaliste Guillemet, le sculpteur Zacharie Astruc. On se réunissait dans un café des Batignolles; on discutait des expositions récentes; on acclamait les jeunes talents et les théories audacieuses de l'école nouvelle. Cependant les adversaires ne désarmaient pas. 

Edouard Manet.
Edouard manet.

Ayant eu tous ses tableaux repoussés par le jury de 1866, le peintre, à l'imitation de Courbet, résolut d'ouvrir une exposition particulière de ses toiles : en 1867, on vit s'élever sur l'avenue de l'Alma, vers l'emplacement du futur Hippodrome, deux bâtiments de bois. Courbet s'installa dans l'un, Manet dans l'autre, avec cinquante toiles dont la plupart sont aujourd'hui dispersées chez les amateurs l'Enfant à l'épée, qui est célèbre, est parti aux Etats-Unis. C'est à partir de ce moment que la critique, jusquelà très dure pour Manet, commença de rendre hommage à sa persévérance, à la sincérité de son talent, et consentit à discuter ce qu'elle appela son système. La Jeune Femme, au Salon de 1868, fut bien accueillie; le portrait d'Emile Zola, mieux encore; le Balcon et le Déjeuner (1869), la Leçon de musique (1870), passèrent sans exciter de tempêtes. 

Alors Edouard Manet osa davantage. Il se plaça un jour résolument devant la lumière, posa ses modèles sur une pelouse, entre les bosquets, et se mit à peindre. De là sortit son premier tableau en plein air intitulé le Jardin, qui fut comme une révélation : l'école du plein air naquit avec cette toile. En 1872, il peignit le Combat du Kearsage et de l'Alabama. En 1873, le Bon Bock, morceau remarquable, plein d'expression et de vie, est fêté par la critique et obtient auprès du public un retentissant succès. Il est vrai que les hostilités reprennent presque aussitôt: le Chemin de fer, le Polichinelle (1874), Argenteuil (1875) sont discutés avec emportement, et le jury de 1876 croit devoir refuser encore l'accès du Salon à l'artiste, qui, pour la seconde fois, organise dans son atelier une concurrence au Palais de l'industrie. L'année d'après, Nana est exclue du Salon, mais son portrait de Faure dans le rôle d'Hamlet (1877) est admis. Dans la Serre, En bateau (1879), Chez le père Lathuile, les portraits d'Antonin Proust, de Mme V. (1880),  d'Henri Rochefort, de Pertuiset, puis le chasseur de lions (1881), le Bar des Folies-Bergère et Jeanne (1882) ont été les derniers envois de Manet.
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Le Bar des Folies-Bergère, par Manet.
Le Bar des Folies-Bergère, par Edouard Manet.

Edouard Manet a été le peintre systématique de la vie moderne et du plein air, de la figure humaine se mouvant dans l'atmosphère avec les effets, les valeurs intenses, les modelés francs, que donnent aux êtres et aux choses, en les simplifiant, la vraie lumière et le soleil. Il a laissé un nombre considérable de pastels et tout un oeuvre gravé. En 1874, il publia chez Cadart un album, tiré à cinquante exemplaires, qui contenait huit pièces, plus un frontispice. Il illustra encore le Fleuve, poème de Ch. Cros, puis les Chats de Champfleury, le Corbeau, d'Edgar Poe, etc. Il a fait aussi des miniatures, des aquarelles. L'Exposition de 1900 a montré, outre diverses toiles plus haut nommées, un Combat de taureaux (1863); les Baigneuses, le Déjeuner dans l'atelier, Portraits en plein air, et diverses marines et natures mortes, magistralement traitées. Edouard Manet a aussi gravé les portraits de Baudelaire, de Poe, celui de l'infante Marguerite, d'après Velasquez, etc. (Gaston Cougny).

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