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Pierre Jules
César Janssen est un astronome
et physicien né à Paris
le 22 février 1824, mort le 23 décembre 1907, à Meudon.
Il étudia d'abord la peinture, puis les mathématiques et
la physique, passa en 1852 et en 1855 les licences correspondant à
ces deux sciences, fit dans l'intervalle quelques suppléances au
lycée Charlemagne et, en 1857, fut envoyé par le ministre
de l'instruction publique au Pérou, en compagnie des frères
Grandidier,
pour y effectuer diverses observations relatives à la détermination
de L'équateur magnétique; mais une grave dysenterie l'obligea
de regagner presque aussitôt l'Europe (1858). En 1860, il se fit
recevoir docteur ès sciences physiques avec une thèse très
remarquée : Sur l'Absorption de la chaleur rayonnante obscure
dans les milieux de l'oeil; il y démontrait la propriété
qu'ont les milieux oculaires d'absorber la chaleur rayonnante obscure et
de ne laisser parvenir à la rétine que les rayons lumineux
qui doivent déterminer la vision. De 1865 à 1871, il fut
professeur de physique générale à l'École spéciale
d'architecture. En 1873, il se vit nommer, à quelques mois d'intervalle,
membre de l'Académie des sciences de Paris
(section d'astronomie) et membre du Bureau des longitudes. En 1875, la
Société royale de Londres se
l'associa à son tour. En 1876, il établit rue
Labat, à Montmartre, aux frais
du gouvernement, un observatoire d'astronomie physique. II a encore (1894)
la direction de cet établissement, qui a été transféré
dès 1877 sur les ruines du château de Meudon et qui a pris
un développement considérable.
Il s'y est plus spécialement occupé
de photographie astronomique, contribuant par ses beaux clichés
du soleil à la connaissance de la constitution physique de la photosphère.
Il a été chargé, entre temps, d'un nombre considérable
de missions scientifiques : en Italie et dans les Alpes, pour l'étude
des raies
telluriques du spectre
solaire (1861-62 et 1864); à Trani (Italie), pour l'observation
d'une éclipse
de Soleil
(1867); à l'île de Santorin ,
pour l'étude du volcan alors en éruption (1867); aux Açores ,
avec Ch. Sainte-Claire-Deville,
pour des observations magnétiques et la reconnaissance topographique
de ces îles (1867); à Guntoor (Inde anglaise), pour l'observation
d'une seconde éclipse de Soleil (1868); à Oran, durant le
siège de Paris, d'où il sortit en ballon, pour l'observation
d'une troisième éclipse (1870-71); à Shoolor, dans
les Nil Gherrys (Inde anglaise), pour une quatrième éclipse
(1871); à Nagasaki (Japon ),
pour l'observation du passage de Vénus
(1874); à Oran, pour le second passage
de Vénus (1882); aux îles Carolines,
pour l'observation d'une nouvelle éclipse de Soleil.
Chacun de ces voyages a été
marqué par quelque nouvelle découverte. C'est ainsi qu'à
Guntoor, en 1868, le physicien a reconnu la nature des protubérances
solaires et a en même temps indiqué une méthode pour
l'étude de ces phénomènes en dehors des éclipses
: double découverte qui lui a fait décerner par l'Académie
des sciences le prix Lalande, exceptionnellement quintuplé en sa
faveur. En 1870, lors de sa traversée en ballon des lignes prussiennes,
il a inventé un nouvel instrument, le compas aéronautique,
qui permet de fixer à chaque instant sur la carte la position de
l'aérostat. En 1871, à Shoolor, il a constaté la présence
autour du Soleil d'une nouvelle et dernière enveloppe gazeuse, qu'il
a dénommée l'atmosphère coronale .
Au cours de la même mission, il a déterminé la position
de l'équateur magnétique au Sud de l'Inde et il a réuni
pour le Muséum d'histoire naturelle une riche collection d'animaux.
Il avait été conduit à
supposer, dès ses premiers travaux, que les raies de l'oxygène
observées dans le spectre du Soleil, surtout lorsque cet astre est
à l'horizon ,
ont une origine exclusivement terrestre, qu'elles sont produites par l'interposition
de notre atmosphère
et que les enveloppes gazeuses de la photosphère
solaire sont complètement dépourvues d'oxygène; cette
hypothèse s'est trouvée confirmée par une série
d'observations qu'il a faites : aux Grands-Mulets, à mi-côte
du mont Blanc, en 1888 (il était alors président de Club
alpin); à la Tour Eiffel ,
en 1889 au sommet du mont Blanc, en août 1890. Cette dernière
ascension, effectuée entièrement en traîneau, lui a
fourni, en outre, l'occasion d'observations physiologiques des plus intéressantes
et a eu encore un autre résultat important l'édification,
d'après ses indications, d'un observatoire météorologique
sur la cime même du géant des Alpes. C'était alors
le plus élevé du globe (4 810 m). Commencé en 1891,
avec le concours pécuniaire de Bischoffsheim, il était terminé
dès l'automne de 1893. Un autre (celui-ci astronomique), dû
également à l'initiative de Janssen, a été
construit 800 m plus bas, au grand Rocher-Rouge. (Léon
Sagnet).
Reprenons tout cela par thèmes
(en suivant un autre auteur) :
Analyse
spectrale.
Des découvertes faites dans les
astres par l'analyse spectrale, Janssen, dans un discours sur l'Âge
des Étoiles, lu en 1887 à la séance annuelle des
cinq Académies, conclut que tous les
astres ont la même constitution matérielle; que, la Terre
ayant été un globe de feu, le Soleil
et les astres subiront des phases semblables à celles de la Terre;
que, par suite, les étoiles
ont un âge lié à la température
de la matière.
L'examen du spectre
de la lumière réfléchie par la Lune
a conduit Sir W. Huggins et W.-A.
Miller de 1862 à 1864, ainsi que Janssen en 1863, à conclure
que la Lune n'a pas d'atmosphère .
En 1867, Janssen, après des observations
faites sur le mont Etna et en s'appuyant sur sa découverte du spectre
de la vapeur d'eau, annonça la présence de cette vapeur dans
l'atmosphère de Mars .
D'observations faites à l'Observatoire
de Meudon en 1897, Janssen conclut que l'atmosphère de Mars contient
des corps qui peuvent se condenser à la surface de la planète
et augmenter à ses pôles la transparence atmosphérique.
En
1827, Brewster remarquait que le spectre du
Soleil contient des bandes sombres au lever et au coucher de cet astre;
et il émettait en 1860, avec J.-H. Gladstone,
l'idée que ces bandes ont leur origine dans l'atmosphère
de la Terre. De 1862 a 1864, Janssen montra que ces bandes peuvent se résoudre
en raies fines, permanentes pendant le jour; que ces raies, qu'il nomma
raies telluriques, sont dues à l'action absorbante de la vapeur
d'eau de l'atmosphère, que leur intensité est en rapport
direct avec les épaisseurs atmosphériques traversées.
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Études
solaires.
En 1877, H. Draper annonçait que
l'oxygène manifestait sa présence dans le Soleil par des
raies directes dans son spectre. Sa découverte ayant été
contestée, il envoya les résultats de ses observations à
M. Christie, qui démontra en 1881 que
les raies constatées provenaient de l'atmosphère
terrestre .
De nouvelles recherches, qui amenèrent un résultat négatif,
furent faites par Janssen, d'abord en 1888 aux Grands-Mulets et en 1890
à la Grande-Bosse, sur le mont Blanc; mais il fit ses expériences
les plus concluantes en 1893, à l'Observatoire situé sur
le mont Blanc [1],
à une attitude de 4810 m; Ià, M. Hansky
a trouvé en 1897 que le spectre solaire n'a pas de raies très
prononcées d'origine aqueuse.
M. H. Faye avait
émis l'hypothèse de l'absence autour du Soleil d'une atmosphère
analogue à celle de la Terre. Janssen, après avoir observé,
à Trani, l'éclipse
annulaire du 6 mars 1867, se montra favorable à cette hypothèse;
et, à Guntoor, il l'admit complètement, après avoir
remarqué que les raies du bord du Soleil ne diffèrent pas
sensiblement de celles de son centre.
Le jour de l'éclipse totale de Soleil
du 18 août 1868, MM. Janssen et Tennant
à Guntoor, M. G. Rayet sur la côte
de la péninsule malaise reconnurent que les protubérances
rosacées sont d'immenses appendices appartenant au Soleil et formés
d'hydrogène incandescent. Le lendemain,
M. Janssen trouva une méthode pour étudier en tout temps
le phénomène des protubérances, à l'aide du
spectroscope, qu'il venait, en y apportant une modification, de rendre
applicable à l'observation du Soleil, même lorsqu'il n'y a
pas d'éclipse. Pareille découverte a aussi été
faite à Londres le 20 octobre 1868 par Sir N.
Lockyer, qui ne connaissait pas les résultats obtenus par M.
Janssen. Tous deux ont conclu que les protubérances forment autour
de la photosphère une mince enveloppe, appelée chromosphère
par Sir N. Lockyer.
Jusqu'en 1871, quelques savants pensaient
que la couronne
est solide ou liquide, à cause de son spectre continu; d'autres,
en plus grand nombre, disaient qu'elle est gazeuse, à cause de la
polarisation et de la raie verte 1474. M. Janssen, observant à Schoolor
la couronne due à l'éclipse solaire totale du 12 décembre
1871, a été conduit, par ses observations avec le spectroscope
et le polariscope, à admettre qu'il existe autour de la chromosphère
un milieu bien limité, l'atmosphère coronale, qui a une densité
inférieure à celle de la chromosphère, qui contient
de l'hydrogène incandescent et dont le spectre présente la
raie verte 1474; il pense que l'aspect et les formes bizarres de l'atmosphère
coronale proviennent d'essaims d'étoiles filantes
circulant dans le voisinage du Soleil.
La
figure
de la couronne, conclut-il, doit varier avec l'état d'activité
extérieur du Soleil. Aux époques du maximum des taches, alors
que les éruptions protubérantielles sont dans toute leur
activité, cette atmosphère doit être sillonnée
par des jets nombreux et riches qui augmentent son étendue, sa densité
et changent son aspect.
Pendant l'éclipse totale de Soleil
du 6 mai 1883, Janssen, dans l'île Caroline, a constaté qu'il
existe dans la couronne beaucoup de lumière réfléchie;
il attribue cette lumière à des corpuscules en suspension
dans cette enveloppe; en outre, il fit alors la première mesure
précise sur un cliché de l'intensité de la lumière
de la couronne et la trouva supérieure à celle de la pleine
Lune.
Études
photographiques.
Janssen, directeur de l'Observatoire physique
de Meudon depuis sa fondation, en 1875, y obtint en 1889 des clichés
du Soleil ayant 70 cm de diamètre. Jusque-là les meilleurs
tirages de cet astre ne donnaient bien que les taches et les facules; en
abaissant la durée de l'action lumineuse à un tiers de millième
de seconde et en employant de nouvelles dispositions optiques, il est parvenu
à obtenir l'image de la granulation.
De l'étude de ses photographies
du Soleil, Janssen tire les conclusions suivantes. La photosphère
est constituée par une matière fluide obéissant facilement
aux forces extérieures. Dans les parties calmes, cette matière
est presque sphérique; dans les parties agitées, elle a la
forme de grains de riz, de feuilles de saule, de filaments; entre ces deux
parties, elle affecte la forme granulaire. La surface du Soleil offre donc
l'aspect d'un réseau dont les mailles sont des chapelets de grains
ronds et qui contient dans les intervalles des corps allongés. La
couche de matière lumineuse à laquelle le Soleil doit son
pouvoir rayonnant est très mince et fluide; elle tend à se
former en une enveloppe continue autour du noyau solaire, mais elle est
brisée par les courants ascendants. Par suite, dans les parties
calmes, les éléments photosphériques prennent une
forme globulaire; dans les parties où arrivent les courants ascendants,
ces éléments prennent des formes allongées; les photographies
du Soleil montrent que la matière photosphérique est animée
de mouvements d'une énorme violence.
Par cette méthode de photométrie
photographique, il découvrit en 1881 que la lumière de la
pleine Lune est, comme Bouguer l'avait trouvé au moyen d'une bougie,
300 000 fois plus faible que celle du Soleil; puis il compara les pouvoirs
rayonnants de Sirius et du Soleil.
M. Janssen obtint une belle épreuve
photographique de la comète
1881b, avec une portion très grande de la queue de cet astre. Les
mesures photométriques faites sur cette épreuve montrent
que la queue est, à peu de distance du noyau, 300 000 fois moins
lumineuse que la Lune. (Lebon, 1899).
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En
bibliothèque - Les écrits
de Janssen comprennent, outre la thèse déjà signalée,
une centaine de mémoires, notes ou rapports insérés
pour la plupart dans les Comptes rendus de l'Académie des
sciences de Paris, dans les Archives des missions scientifiques,
dans les Annales de chimie et de physique : Mémoire sur
le spectre de la vapeur d'eau (1856); études sur une éruption
volcanique à Santorin (1867); Sur l'Observation de l'éclipse
annulaire à Trani (1867), Rapport sur l'éclipse totale
observée à Guntoor (1868); mémoire sur les
raies telluriques du spectre solaire (1871); Sur la Photométrie
photographique (1881); Note sur l'observation du passage de la planète
Vénus sur le soleil (1883); Rapport sur la mission en Océanie
pour l'observation de l'éclipse totale du 6 mai 1883 (1883);
Sur
la Constitution des taches solaires (1886); Sur le Phonographe d'Edison
(1889); Compte rendu d'une ascension scientifique au mont Blanc,
relation détaillés et très intéressante de
son ascension du 18 août 1890 (1890); Note sur l'édicule
placé au sommet du mont Blanc (1892), etc. Il a donné
à part : Rapport sur l'éclipse du 12 décembre 1872
observée à Shoolor (Paris, 1873, in-8); les Méthodes
en astronomie physique (Paris, 1882, in-8); l'Âge des étoiles
(Paris, 1887, in-8); la Photographie céleste (Paris, 1888,
in-8); le Spectre de l'oxygène et l'atmosphère terrestre
(Paris, 1889, in-8), etc.
Notice
sur les travaux de M. J. Janssen; Paris, 1812, in-4. Revue encyclopédique,
1891, p. 276, et 1893, pp. 978-988. Liste de ses mémoires dans le
Catalogue
of scientifc papers de la Société royale de Londres,
t. VIII et X.
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[1]
Cet observatoire a été construit de 1891 à 1893 grâce
à des donations, notamment à celle de Bischoffsheim. Janssen
avait demandé la création de cet établissement, afin
qu'il fût possible de mieux étudier les cyclones, les planètes Mercure
et Vénus ,
les régions circumsolaires, la radiation des astres. |